(1772) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire
/ 86
(1772) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire

J’attendois ce que vous m’aviés promis Monsieur pour répondre à votre dernière lettre, ne voulant pas vous donner l’ennuie de multiplier les miennes; mais ne Voilà t’il pas que vous me forcé à vous Ecrire, pour vous accabler de plainte et de reproche! Plusieurs personne ont reçue la dernière Edition de vos quatre derniers ouvrageshttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1230012_1key001cor/nts/001, nommément Mr. de Beauvau; c’est Mr Marin qui les distribue, et il n’y a rien pour moy.
D’où vient faut il que je sois la moins bien traitée de vos amies? C’est de tout injustice.

J’ay fait Connoissance depuis peu avec un nommé Mr. Hubert, de Geneve. Je luy ay déjà beaucoup parlé de vous, vous seray le sujet éternel de nos Conversations. Sur les rapports qu’il m’a fait, je juge que vous n’êtes changé en rien de ce que vous Etiés, il y a quarante ou cinquante ans; pour l’esprit j’en étois sûre, mais suivant ce qu’il dit pour la figure aussy. Pourquoy n’en est il pas de même de votre Coeur? Je n’en peut rien apprendre que par vous; prouvés moy donc qu’il n’est pas changé en me traitant mieux que vous ne faite; mon amitié sincère et Constante me met en droit d’exiger de vous, toutes sorte, d’attentions et de préférences.