(1771) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire
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(1771) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire

Je ne vous Ecris plus si Exactement, voicy pourquoy.
Tant que J’étois avec mes parents mon comerce devoit vous être agréable. A présent que puis-je vous dire qui vous intéresse? Je ne suis au fait de Rien, Je ne m’intéresse à rien, Je n’apprend les nouvelles que par les gazettes. Je reçois des lettres de Chanteloup, voilà ma seule corespondance, et comme on sçait que Je conserve vos Lettres on m’envoye toutes celles qu’on reçoit de vous.

L’on me charge de vous dire qu’on est très content de votre reconnoissancehttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1210433_1key001cor/nts/001, qu’on n’a nule raison d’en doûter et que si on ne vous le dit pas soy même c’est qu’on s’est interdit d’écrire à personne. Ce n’est point une fausse défaite, c’est la pure vérité. On s’y porte fort bien, on n’a de chagrin que ceux qui viennent de l’attachement et de l’amitié; mais c’est beaucoup trop J’en conviens, Je l’Eprouve par moi même.

Je n’ay point envoyé la 7ème page dont vous me parlezhttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1210433_1key001cor/nts/002, toutes ces sortes d’écrits sont entre leurs mains, mais J’ay recommandé d’y faire attention.

Vous me donnez une lueur d’espérance de vous revoir, Je voudrois bien qu’elle se réalisât. Indépendament du plaisir que J’aurois de vous Embrasser et de vous entretenir, Je serois bien aise de sçavoir comment vous trouvez le bel Esprit d’aujourd’huy. Ce n’est pas le vôtre ni d’aucun de vos contemporains, c’est un genre tout neuf et qui me renvoye à ne lire que le siècle de Louis XIV, et à ce qu’on a Ecrit il y a 40 ou 50 ans. J’en Excepte le dernier ouvragehttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1210433_1key001cor/nts/003 de mr Gaillard, qui m’a fait beaucoup de plaisir. Mon pauvre Formont appelloit ce siècle cy pédant et frivole, J’y ajouterois, froid, sec et ennuyeux. Vous me trouveriez digne d’y tenir ma place si Je vous Ecrivois plus long tems. Ainsy donc adieu mon cher Voltaire, Je vous aime et Je vous aimeray toujours.