Grand papa, grand maman, petite fille, secrétaire, amis, connoissances, tous sont charmés de vos vershttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1200411_1key001cor/nts/001, mais on ne vous quitte point de la prose.
J'entend parler d'une réfutation d'un certain livre, Je voudrois l'avoir; Je m'en tiens à connoitre ce livre par vous. Toutes réfutation de sistème doivent être bonnes, sur tout quand c'est vous qui les faites. Mais, mon cher Voltaire, ne vous ennuyez vous pas de tout les raisonnement métaphisiques, sur les matières▶ inintelligibles? Ils sont à mon avis ce que le claveçinhttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1200411_1key001cor/nts/002 du père Castel étoit pour les sourds. Peut on donner des idées et peut on en admettre d'autres que celles que nous recevons par nos sens? Un sourd, un aveugle de naissance, peuvent regreter de ne pas voir, de ne pas entendre; mais cependant ils ne sçavent ce que c'est que voir et qu'entendre, ce que c'est que ces facultés qui leur manquent. Ils ne nient pas ce qu'on leur en dit, mais ils s'ennuyent de tout ce qu'on leur dit pour leur en donner la connoissance. De tout ce qu'on a Ecrit sur ces ◀matières, c'est le philosophe ignorant et la religion naturelle que Je lis avec [le] plus de plaisir. Je ne me tourmente point à chercher à connoitre ce qu'il est impossible de concevoir; l'éternité, le commencement, le plein, le wide: quel choix peut t'on faire?
Je n'iray point d'un vol présomptueux &c. &c.
Voilà où Je m'en tiens; faire autant de bien que Je peux, le moins de mal qui m'est possible, laisser à chacun sa façon de penser, ne troubler le bonheur ni la paix de personne. Eviter l'ennuy et les indigestions, les supporter patiemment quand on ne peut faire autrement, aimer, estimer mon très bon ami Voltaire, souhaiter qu'il me survive, parler sans cesse de lui avec la grand maman, recevoir souvent de ses lettres et de ses ouvrages; voilà ce que Je désire pour le peu de Jours qui me restent.