Cela m'est parvenu, quoiqu'à mon adresse, je pourrois par conséquent en recevoir d'autres de même; J'avois lû ce petit ouvrage, et j'en avois été si contente que je désirois de l'avoir à moy; je vous en fait mil remerciemens.
Je suis charmée, enchantée du Marseillois, je le relis sans cesse. En vérité monsieur je crois que vous n'avez rien fait de plus joli; mon Dieu que vous êtes en vie! Vous me donné un conseil que vous ne prenés pas pour vous: vous ne méprisez ni le monde ni la vie, et vous avez raison; vous tirez bon party de l'une et de l'autre; vous mettez de la valeur à tout; tout vous affecte, tout vous anime; vous annéantissez les Pompignans, les Ribaniers, les Fréron, &c. &c. Vous voulés rajeunir le Président; vous exiter sa colère; vous lui offrez de prendre sa deffense, c'est un bon procédé. Mais, monsieur, vous auriés fait encore mieux de lui laisser ignorer L'offense; il y avoit plus de quatre mois que nous n'étions occupée qu'à lui dérober la connoissance de cette brochure, craignant l'effet qu'elle pourroit lui faire; vous avez détruit toute nos mesures; heureusement il n'en n'a pas été fort troublé; le Grand succès de son livre (qui lui est fort prouvé) lui a fait mépriser cette critique; il vous a répondu ainsy je n'ay point à vous apprendre ce qu'il pense; mais je vous dirai ce que pense le public. Personne ne croit que Mr. de Bellestat en soit l'auteur, on le connois pour un homme très borné, qui n'a ni esprit ni littérature, et ne sçait même pas Ecrire une lettre; on juge que cette ouvrage est de plus d'une plume; on y trouve du commun et du piquant; cette brochure n'a pas fait Grande fortune icy, et chacun pense qu'elle ne mérite pas qu'on la réfute et qu'on y réponde. Cependant si vous voulé en prendre la peine, j'en seray fort aise, parce que j'auray toujours du plaisir à lire ce que vous Ecrirez; laissez, laissez au Président sa façon de penser. Si elle l'occupe, si elle le console, n'est il pas trop heureux? est il quelque chose dans la vie qui ne soit pas illusion? celles qui donne la paix et la tranquilité ne sont elles pas préférables aux autres? Vous l'avez dit vous même Monsieur.
Remercié le Ciel, ou la nature des immenses Talents que vous en avez reçu; ils vous mettent pour jamais à l'abry de L'ennuy; plaignez tous les autres mortels, il n'y en a aucuns d'aussy bien partagez; et trouvez bon qu'il s'accrochent où ils peuvent.