Vous m'avez proposé madame d'▶acheter une charge ◀d'▶écuyer chez madame la duchesse du Maine, et ne me sentant pas assez dispos pour cet employ j'ay été obligé ◀d'▶attendre d'autres ocasions ◀de▶ vous faire ma cour.
On dit qu'avec cette charge ◀d'▶écuyer il en vaque une ◀de▶ lecteur. Je suis bien sûr que ce n'est pas un bénéfice simple chez me du Maine comme chez le roy. Je voudrois ◀de▶ tout mon cœur prendre pour moy cet employ, mais j'ay en main une personne qui avec plus ◀d'▶esprit, ◀de▶ jeunesse et ◀de▶ poitrine s'en acquitera mieux que moy. Voicy une ocasion madame ◀de▶ montrer la bonté ◀de▶ votre cœur et votre crédit. La personne dont je vous parle est un jeune homme nommé mr l'abbé ◀de▶ Linant à qui il ne manque rien du tout que ◀de▶ la fortune. Il a auprès de vous une recomandation bien puissante, il est amy ◀de▶ mr Formont qui vous répondra ◀de▶ son esprit et ◀de▶ ses mœurs. Je ne suis icy que le précurseur ◀de▶ mr Formont qui va bientôt obtenir cette grâce ◀de▶ vous, et je vous en remercieray comme si c'étoit à moy seul que vous l'eussiez faitte. En vérité si vous placez ce jeune homme vous ferez une action charmante, vous encouragerez un talent bien décidé qu'il a pour les vers, vous vous attacherez pour le reste ◀de▶ votre vie quelqu'un ◀d'▶aimable qui vous devra tout, vous aurez le plaisir ◀d'▶avoir tiré le mérite ◀de▶ la misère et ◀de▶ l'avoir mis dans la meilleure école du monde. Au nom de dieu réussissez dans cette affaire pour votre plaisir, pour votre honneur, pour celui ◀de▶ me du Maine et pour l'amour ◀de Formont qui vous en prie par moy. Adieu madame, je vous suis attaché comme l'abbé Linant vous le sera, avec le plus respectueux et le plus tendre dévouement.
(1732)
Voltaire to Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand
V.