Ce dernier ne pouvoit se consoler d’avoir un si pauvre lot : « Mes freres, disoit-il, pourront gagner leur vie honnestement en se mettant ensemble ; pour moi, lors que j’aurai mangé mon chat, et que je me seray fait un manchon de sa peau, il faudra que je meure de faim. » Le Chat, qui entendoit ce discours, mais qui n’en fit pas semblant, luy dit d’un air posé et serieux : « Ne vous affligés point, mon maistre ; vous n’avez qu’à me donner un sac et me faire faire une paire de bottes pour aller dans les broussailles, et vous verez que vous n’êtes pas si mal partagé que vous croyez. » Quoique le maistre du Chat ne fist pas grand fond là-dessus, il lui avoit veu faire tant de tours de souplesse pour prendre des rats et des souris, comme quand il se pendoit par les pieds ou qu’il se cachoit dans la farine pour faire le mort, qu’il ne desespéra pas d’en estre secouru dans sa misere. […] « On m’a assuré encore, dit le Chat, mais je ne sçaurois le croire, que vous aviez aussi le pouvoir de prendre la forme des plus petits animaux, par exemple de vous changer en un rat, en une souris : je vous avouë que je tiens cela tout à fait impossible. […] Enſuite, elle alla regarder dans ſa ſouriſſiere, où elle trouva ſix ſouris toutes en vie ; elle dit à Cendrillon de lever un peu la trappe de la ſouriſſiere, & à chaque ſouris qui ſortoit, elle luy donnoit un coup de ſa baguette, & la ſouris eſtoit auſſi-toſt changée en un beau cheval ; ce qui fit un bel attelage de ſix chevaux d’un beau gris de ſouris pommelé : Comme elle eſtoit en peine de quoy elle ferait un Cocher, je vais voir, dit Cendrillon, s’il n’y a point quelque rat dans la ratiere ; nous en ferons un Cocher : Tu as raiſon, dit ſa Maraine, va voir : Cendrillon lui apporta la ratiere, où il y avoit trois gros rats.