Mais le sexe avec tant d’ardeur Aspire à la foy conjugale Que je n’ay pas la force ny le cœur De luy prescher cette morale. […] Elle auroit attendri un rocher, belle et affligée comme elle estoit ; mais la Barbe-Bleuë avoit le cœur plus dur qu’un rocher. […] Belles, ce don vaut mieux que d’eſtre bien coëffées, Pour engager un cœur, pour en venir à bout, La bonne grace eſt le vrai don des Fées ; Sans elle on ne peut rien, avec elle on peut tout. […] — Si la chose est ainsi, dit la princesse, je souhaite de tout mon cœur que vous deveniez le prince du monde le plus beau et le plus aimable, et je vous en fais le don, autant qu’il est en moy. » La princesse n’eut pas plustost prononcé ces paroles que Riquet à la Houppe parut, à ses yeux, l’homme du monde le plus beau, le mieux fait et le plus aimable qu’elle eust jamais vû. […] Un soir que ces enfans estoient couchés, et que le Bucheron estoit auprés du feu avec sa femme, il luy dit, le cœur serré de douleur : Tu vois bien que nous ne pouvons plus nourir nos enfans ; je ne sçaurois les voir mourir de faim devant mes yeux, et je suis resolu de les mener perdre demain au bois, ce qui sera bien aisé, car, tandis qu’ils s’amuseront à fagoter, nous n’avons qu’à nous enfuir sans qu’ils nous voyent.