La maraude permet d'être confronté à des problèmes dont tout le monde connait l'existence mais pour lesquels la majorité n'agit pas.
Cela permet de voir d'un autre oeil les gens qui sont dans la rue, si un jour, sûrement, on est confronté à ce genre de personne à l'hôpital ; Car il faut adopter une tout autre approche par rapport à notre pratique courante, car ce sont des gens qui, à la différence de la majorité des personnes, n'attachent pas une attention particulière à leur santé.
La situation du travailleur social du 115 est complexe : bien qu'il entende à longueur de journée des histoires toutes plus tristes les unes que les autres, il est bien souvent obligé de laisser la grande majorité de ces personnes encore une nuit dehors, faute de places disponibles...
Concernant la double écoute, de ce que j'ai vu les personnes qui appellent le Samu doivent se confronter à de très longues durées d'attente au téléphone ( certaines personnes que nous avions eu au téléphone avaient essayé d'appeler toute la journée sans succès et avaient attendu parfois jusqu’à 1h30 au téléphone )avant d'avoir une personne au bout du fil, pour se voir refuser une place en centre dans la grande majorité des cas devant le faible nombre de disponibilités dans les centres, ce que j'ai personnellement trouvé assez choquant. […] Le manque de personnel est peut être en cause mais devant le très faible nombre de places en centre je trouve ça regrettable de faire attendre au téléphone durant des heures des personnes en situation déjà précaire pour leur refuser dans la grande majorité des cas une place en centre, d'autant plus qu'on les invite à reproduire cette situation plusieurs fois par jour à des heures stratégiques, ce qui m'a donné l'impression de "ballotter " un peu les gens (désolée du terme) toute la journée en les incitant à passer leurs journées au téléphone pour un résultat négatif la plupart du temps.
Le hasard de la randomisation a fait que la majorité des appels concernait des usagers de moins de 20 ans, ce qui résonne toujours en nous quand on est étudiant d'une vingtaine d'années également.
La plupart était des gens qui avaient vecu des concours de circonstances aux conséquences ravageuse, qu'ils n'ont pas toujours étaient des marginaux et que la majorité avaient une vie bien ranger avant et que c'était finalement des "monsieurtoutlemonde" très malchanceux certes.
J'ai été aussi agréablement surprise de voir que ce sont eux qui appellent le 115 en majorité et pas des particuliers, ce qui témoigne à nouveau d'un véritable climat de confiance qui a nécessité j'imagine des années pour être établi.
D'autre part, j'ai été assez choquée d'apprendre que la majorité des lits proposés étaient des lits superposés alignés dans un ancien gymnase, où il n'y a aucun respect des règles d'hygiène, aucun accueil pour ceux qui viennent y dormir et presque aucune sécurité.
Ils admettent pour une grande majorité leur alcoolisme, sans pour autant que ce soit une fierté, et s'il y a quelque chose qui ne leur plait pas, ils n'hésiterons pas à vous le faire savoir.
mais, de là, à passer une nuit à leur rencontre, à leur parler, à partager leur expérience, c'est une chose totalement différente et pour la plupart d'ente nous, cette nuit était la 1ère expérience sociale et elle nous fait prendre conscience que, dans la majorité des cas, nous sommes totalement démunis face à leur détresse.
Ainsi les équipes, composées pour la majorité d'un conducteur, d'un travailleur social et d'un infirmier, se répartissent avec précision les rues parisiennes, tout en gardant un contact permanent entre elles et avec le centre dans le but de venir en aide au plus de personnes.
Déjà lors de la double écoute j'ai été surprise de découvrir que la majorité des personnes qui appelaient étaient jeunes (20-30 ans).
La majorité de ceux désireux d'un abri composent le 115.
En grande majorité nous ne pouvons rien faire, le réseau est saturé, plus aucune place, il faut rappeler plus tard mais "sans aucune garanti" evidemment.
A part ces quelques regrets, cette garde fut une bonne expérience, avec une équipe sympathique, à mon écoute et prête à m'expliquer plein de choses, et dans la grande majorité des cas avec de bons rapports avec les personnes, qui appréciaient de bavarder un peu dans les camions ou lors des soins infirmiers dans les centres.
En discutant avec mon écoutante, j’ai appris que nous étions passés de 1 femme pour 9 hommes à 1 femme pour 4 hommes dans la rue, et que les centres ne s’étaient pas adaptés, certains sont mixtes mais une grande majorité sont réservés aux hommes comme la Boulangerie ou la Mie de Pain.
Je m'attendais donc à des appels difficiles, durant lesquels il faudrait annoncer à la majorité des appelants qu'ils devraient passer une nouvelle nuit dehors.
On pourrait facilement croire que certains sans-abris le sont par choix, par besoin de liberté, de non-volonté de travailler, et que lorsque l’on veut s’en sortir, on s’en sort ; la réalité s’avère tout autre, la grande majorité des usagers que nous avons vu cette nuit ont perdu leur travail, ont par la même été délaissés par leurs familles, ont perdu leur logement, et ont essayé sans succès de retrouver du travail.
J’ai aussi réalisé que si dans la majorité des cas le 115 était bien accueilli par les sans abris, dans certains cas aucun dialogue n’était possible (on nous a ainsi jeté de l’eau alors que nous cherchions à parler avec quelqu’un, mais d’après ce que m’a dit le reste de l’équipe de l’EMA il y avait bien pire qui pouvait arriver).
Enfin, c'était intéressant de voir l'organisation qui existe pour les sans abris, beaucoup ont régulièrement un lit ce à quoi je ne m'attendais pas, on connait leur prénom, leur histoire, pour la grande majorité des personnes croisées dans la maraude.