Devant ces mots très durs, il m'apparait donc indispensable que des discussions soient organisés afin de réaffirmer l'engagement du corps médical pour assurer la meilleure prise en charge à tout individu ayant besoin de soins et ce sans discrimination, socio-économique ou autre.
Puis la maraude, le meilleur moment de cette garde; en effet, affecté à 3 arrondissement de Paris, on part en maraude, "guetter" les personnes nécessitant de l'aide, ou bien, on se rend sur les lieu où les bureaux nous indiquent qu'on a besoin de nous; la nuit fut assez chargée.
Une certaine distance doit tout de même être préservée ; ainsi l'exercice professionnel de cette fonction (plutôt que bénévole) est nécessaire dans la conservation d'une objectivité indispensable à la meilleure prise en charge du plus grand nombre, m'a-t-on expliqué.
Chacun avait son histoire: du dealer qui a été renversé volontairement par un concurrent et se trouve en fauteuil roulant dans la rue depuis, un autre qui parle peu et finit par me dire que ça fait l'équivalent de mon âge qu'il vit dehors et se débrouille; et puis les migrants qui viennent en nombre, certains plus jeunes que moi, qui ont traversé une bonne partie du monde pour trouver une vie meilleure, avec pour seuls effets personnels une tenue de rechange leurs papiers et un peu de nourriture et d'argent sous leur manteau, certains ne pouvant même pas faire de demande d'asile pour la seule raison que leur empreinte digitale a été prise dans un autre pays de l'UE.
Dans ces conditions tenir un dossier pour traiter leur demande dans les meilleures conditions peut être un réel défi et demander patience et abnégation.
Cette rencontre m'a permis de comprendre à quel point les troubles mentaux peuvent isolés les personnes, et à quel point il est important d'écouter les gens qui vivent dans la rue, car c'est la meilleure façon de leur venir en aide.
En nous portant volontaire et en choisissant nous-même une date, nous irions avec une bien meilleure volonté et avec une approche beaucoup plus positive et ouverte.
A 2 jours des partiels, j'étais contente d'être rentrée tôt chez moi (avant le retour au centre pour dîner), j'ai beaucoup plus apprécié ma garde et j'en garde un bien meilleur souvenir que si j'avais dû marauder toute la nuit (surtout au vu de ce que je dis juste au-dessus, ce sentiment d'impuissance, de non-construction réelle), et l'idée d'en refaire une à distance des examens ne me rebute pas.
Cet homme était particulièrement touchant car il était très honnête, et malheureusement il nous expliquait qu'il avait des idées suicidaires et ne s'en cachait pas, tout en sachant que ce n'était pas la meilleure des solutions.
Je ressors de cette garde avec une autre vision des sdf,une meilleure compréhension et moins de préjugés mais sans la casquette du samu je ne pense pas que je ferai un pas vers eux,mais dans ma vie de futur médecin j'essaierai de respecter au mieux le travail du samu social et je tacherai de voir le sdf comme un patient comme les autres et non pas juste comme un homme alcoolisé "qui l'a bien cherché".
Il nous explique qu'il est venue dans le 14eme pour l'enterrement d'un de ses meilleurs amis, un ancien militaire comme lui avec qui il vivait dans la rue qui à 54 ans a été retrouvé mort de froid la semaine dernière.
Pour ce qui est de la maraude, je trouve qu'il était important d'établir un contact proche auprès de ces usagers de la rue afin de tenter de leur trouver un refuge pour au moins un nuit, leur permettre de prendre une douche, de boire, de manger, et même si certains refusaient malgré toutes nos tentatives pour les convaincre de monter dans le camion avec nous pour être emmené dans un meilleur endroit pour eux, il restait tout de même possible de leur proposer des chaussettes, un café, une soupe, ce qui reste une aide très appréciable.
C’était sans aucun doute la meilleure des gardes que j’ai faites!
La double écoute : Elle est indispensable au début de la soirée pour comprendre le fonctionnement du samu social, et la façon dont sont coordonnées toutes les action; et même pour avoir un aperçu de l'importance des appels pour un hébergement qui est ennorme (bien plus parlant que des chiffres); et des réponses qui, bien que données au mieux et avec la meilleure volonté du monde de la part du samu social, restent largement insuffisante (avec la réalisation d'un "tri" inévitable).
L’enfant choqué s’ouvre immédiatement, en reprend, s’intéresse, cherche à communiquer, je lui montre un avion en papier, il me montre le modèle qu’il sait réaliser (bien meilleur que le mien).
Cela nous permet aussi d'avoir une autre approche de la misère que l'on peut voir dans les services hospitaliers , peut être mieux l'appréhender, avoir un meilleur contact avec les sdf que l'on sera amené à prendre en charge en tant que futur médecins.
A son désespoir, nous n'avons aucune réponse à apporter, si ce n'est l'encourager à persévérer dans l'espoir d'un hypothétique et bien improbable futur meilleur.
Ils sont venus en France pour trouver de meilleures conditions pour leur bébé.