Cela a été une expérience à part que de sillonner la ville, des quartiers fréquentés au quotidien, avec la préoccupation d'aller à la rencontre des sans-abris et personnes en souffrance. Une expérience dont découle curieusement probablement un sentiment de réconfort -- réconfort d'avoir pu venir en aide, quelque modeste soit-elle, aux plus démunis, avec les moyens qui sont ceux du Samu social. Une expérience dont découle également un sentiment d'impuissance voire d'accablement, face à une misère que le samu social ne semble pouvoir prendre en charge que de façon "palliative" et quelque part, que de façon "superficielle". Au delà du réconfort matériel en effet, le réconfort moral que le samu social se donne également pour mission de procurer m'est apparu limité ; peut-être en partie du fait de la distance que tiennent à respecter les maraudeurs vis à vis des personnes rencontrées, dans le souci de respecter leur intégrité et leur dignité. Difficile en effet de trouver la juste distance, celle qui laisse la place à la rencontre, à l'écoute. De cette nuit au Samu Social découle également un sentiment d'injustice. Les personnes qui acceptent d'être aidées sont bien souvent les moins avancées dans le processus d'exclusion -- des travailleurs précaires, personnes touchant encore quelques aides sociales, par contraste avec des personnes trop isolées ou trop souffrantes pour faire face aux difficultés rencontrées dans les centres d'hébergement ; ou encore, par contraste avec des personnes ressortissant d'autres pays de l'union européenne, ne pouvant qu'être "dépannées" exceptionnellement.
(2012)
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