Cependant la malheureuse enfant de Dercetis, abandonnée dans un désert, y fut miraculeusement nourrie par des colombes, qui, soir et matin, lui apportoient dans leur bec du miel et des fruits, ce qui la fit appeler Sémiramis, nom syriaque de cet oiseau. […] Ulysse enfin se fit connoître et raconta ses aventures, ses combats chez les Ciconiens, son séjour chez les Lothophages où l’on trouvoit ces fruits délicieux qui faisoient oublier la patrie, séjour corrupteur dont il ne put arracher ses compagnons qu’en usant de violence, ses exploits chez les Cyclopes. ses ruses avec leur chef Poliphême, qui dévora plusieurs de ses compagnons, et auquel il creva l’œil unique qu’il avoit ainsi que tous les Cyclopes, au milieu du front, les détails de son entrevue avec Eole, qui lui donna des outres dans lesquels étoient renfermés les vents nuisibles, et que ses matelots déchaînèrent, en croyant trouver un vin précieux dans ces outres merveilleuses, ses malheurs sur la côte barbare des Lestrigons, dont le loi Antiphate dévora deux de ses compagnons ; ses aventures chez la magicienne Circé, fille du soleil, qui, par un breuvage enchanté, changea en pourceaux ses compagnons, et dont il se garantit par le moyen d’une plante bienfaisante nommée Moly ; la passion de Circé pour lui, qui la décida à rendre à ses compagnons leur première forme, et à lui conseiller de descendre aux enfers, pour y consulter sur ses destins, l’ombre du devin Tirésias ; comment après ce terrible voyage, il évita les pièges séducteurs des Syrènes34 et les gouffres affreux de Carybde et de Scylla ; ses dangers dans l’île du Soleil ou ses compagnons osèrent porter une main sacrilége sur les troupeaux consacrés à ce Dieu, qui les épouvanta par un affreux prodige ; car les chairs sanglantes de ces animaux sacrés, préparées pour un festin, tressaillirent et poussèrent de longs mugissemens ; enfin, son séjour dans l’île d’Ogygie où il passa sept ans avec la belle Calypso. […] Les anciens comparoient la jeunesse à l’été qui produit des fruits, et non au printemps, Nous ne faisons de la jeunesse que la saison de l’espérance, c’est peut-être lui ôter une émulation utile en bornant trop son ambition ; les jeunes gens n’en sont pas plus modestes, et avec cette idée ils sont moins actifs, moins passionnés pour la gloire.