Mais la tragédie moderne est encombrée de personnages, et les incidents s’y multiplient au gré de l’imagination du poète, parce qu’ici toute chose est bonne, propos hors du sujet, situations extraordinaires, interruptions de l’action dramatique, embarras compliqués de l’intrigue, toute chose est bonne qui peut servir à ce premier dessein du poète moderne : faire vivre des êtres individuels et réels, peindre des caractères 201. […] Cet être tombé de la lune, comme Goethe le désignait, cet étrange et mystique esprit ne voit rien avec l’organe dont tous les habitants de notre globe se servent pour voir. […] La Science se venge contre Arnolphe du système absurde d’éducation morale, par lequel il a voulu proscrire de sa famille jusqu’à l’alphabet ; Agnès, contre le dessein de son tuteur, a appris à écrire, et elle se sert de l’écriture pour le tromper. […] Les héros domptaient eux-mêmes le cheval qu’ils voulaient monter, fabriquaient leurs armes, leur bouclier et leurs instruments de labour, coupaient l’arbre qui devait servir de sceptre royal dans leur famille de génération en génération, façonnaient de leurs mains leur couche nuptiale, tuaient le bœuf du festin et le faisaient rôtir. […] De même un général d’armée, dans nos temps modernes, est bien revêtu d’une grande puissance ; mais les moyens d’exécution ne sont pas créés par lui ; ils ne sont pas même soumis à lui comme individu ; ils n’obéissent pas à sa personnalité propre ; ils sont là pour un tout autre objet que celui de servir d’instruments à cette individualité militaire.
Dans une espèce de Préface qui sert de commencement à ce Livre, l’Auteur s’étonne qu’on n’ait point encore donné la Vie de Molière. […] Ses actions nuement rapportées, avaient assez de quoi satisfaire ceux qui s’intéressent à le connaître, sans les faire servir de divertissement au Public.
Je citerai, à la fin de ce Chapitre, l’exemple que j’ai en vue : il me servira à prouver plus d’une vérité. […] Il établit Brindavoine & la Merluche dans la charge de donner à boire, les avertit de n’en porter que lorsqu’on en aura demandé plusieurs fois, & de servir beaucoup d’eau.
Madame Béverley entend la voix de son mari : elle sort avec une lanterne, le voit, le console : les ouvrages qu’elle faisoit jadis pour s’amuser, serviront, dit-elle, à faire vivre ce qu’elle aime. […] Il sait que Jarvis a surpris son maître l’épée à la main : il projette de faire servir sa déposition à perdre Béverley.
Si cette résurrection solennelle du vrai Don Juan a profité à la gloire de Molière, elle a beaucoup moins heureusement servi la renommée de Thomas Corneille. […] A l’appel du frère de done Elvire, il répond : « Vous savez que je ne manque point de cœur et que je sais me servir de mon épée quand il le faut.
Le rôtisseur part de là pour lui demander sa pratique et surtout le payement du repas qu’il a fait servir chez lui à douze francs par tête. […] « Rien, madame, répond-il, vous trépaner seulement, pour vous désennuyer en attendant que le Docteur vienne. » Et comme, en s’en allant, elle le traite de fou : « Vous en avez besoin, lui crie-t-il, servez-vous de l’occasion, vous ne la trouverez pas toujours si commode. » Ces traits sont pris parmi les meilleurs que l’on puisse glaner dans le recueil.
Concision, dont je me suis servi au commencement de cet article, ne sera pas sans doute du goût de mon Censeur ; mais lui-même qui se tient si fort à l’antique n’a-t-il rien hasardé dans sa Critique ? […] Si l’on prenait toutes les petites circonstances que j’ai rapportées de la mort de Molière, comme il les a prises, j’avoue que ce ne serait pas le plus bel endroit de mon Livre ; mais tout le monde n’a pas jugé comme lui, et elles ont du moins servi à détromper le Public de ce qu’il pensait sur cette mort : c’était la principale fin que je m’étais proposée. […] Ils ne sont pas assez rudes pour avoir recours à l’insulte ; et je ne suis pas de caractère à m’en servir, quand je me croirais bien battu.
Rien ne sert devant lui d’être juste, si l’on n’est sublime ; d’être vrai, si l’on n’est frappant. […] Son propre cœur lui expliquait celui de Phèdre. » Mais ce n’est pas de Phèdre seulement, c’est de l’ensemble de son cœur que la vie intime de Racine sert à nous rendre compte. […] Pour sauver le poëte, la grâce s’était servie de l’instrument de la perdition : le théâtre avait été le chemin par lequel il était revenu.
Aujourd’hui un tout autre sentiment dirige les recherches dans le même sens, c’est l’intérêt de plus en plus vif qui s’attache à tout ce qui a pu servir son génie, c’est le désir de montrer comment l’imagination ne crée point de rien, comme quelques-uns se le figurent, mais transforme et vivifie ce qu’elle touche, et d’une chose morte fait une chose impérissable.