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4. (1884) La Science du cœur humain, ou la Psychologie des sentiments et des passions, d’après les oeuvres de Molière pp. 5-136

Est-ce dans les livres de morale ? […] C’est exclusivement dans les sentences pleines de sagesse émises par les personnages qui dans ses œuvres, vis-à-vis de la folie, représentent la raison, que se trouve sa morale ; et cette morale ne lui appartient point en propre, elle est également celle de tout homme doué de bon sens, c’est-à-dire des bons sentiments humains ; elle est la morale dans son essence, la morale elle-même. […] Ces passions d’origine morale s’appellent fanatisme. […] Molière n’avait pas de système particulier de morale, et par conséquent il n’avait pas à en exposer. […] La Morale de Molière, page 120, 1867.

5. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE IV. Jugement sur les Hommes de Molière. » pp. 65-82

Seulement, la morale n’y est plus ; et on ne le lui reproche pas, puisqu’il atteint son but, qui est de divertir irrésistiblement. On se contente de juger que Molière a un grand sens moral, une grande influence morale, mais encore une fois n’est point moraliste. […] Mais, pendant tout ce rire, où donc était la morale ? […] Ces réflexions n’ôtent rien à la valeur artistique de toutes les œuvres de Molière, ni à la portée morale de plusieurs, ni à l’éclat du bon sens qui brille par traits saillants jusque dans les plus folles scènes ; mais elles sont nécessaires si l’on veut se rendre compte de la morale de Molière. […] Qu’on ne dise point que cela importe peu à la morale.

6. (1870) La philosophie dans le théâtre de Molière (Revue chrétienne) pp. 326-347

D’où viennent donc, et son idée de Dieu, et le principe de sa morale ? […] Quel fut donc le principe de la morale de Molière, et à qui l’emprunta-t-il ? […] »La morale du juste milieu prônée par le maître n’est-elle pas celle qui remplit les œuvres et la vie de son illustre élève ? […] Pour Gassendi, en effet, le principe de la morale s’appelle le bonheur, — pour Molière il s’appelle ? […] Morale de Molière, p. 219.

7. (1901) Molière moraliste pp. 3-32

Brunetière, « séparer la morale de la religion ». […] Comment Molière s’appuie sur l’opinion pour établir la partie positive de sa morale. […] Pour remplacer Dieu et les chaudières bouillantes, il lui fallait une force morale à opposer aux faiblesses des hommes. […] Tel me semble être le dernier mot de la morale de Molière. […] C’est cette relativité dans la conception d’une vertu humaine qui me semble donner à la morale de Molière une valeur incomparable et définitive au point de vue positif.

8. (1852) Molière, élève de Gassendi (Revue du Lyonnais) pp. 370-382

Cependant s’il ne tourne pas la vertu en ridicule, il lui oppose souvent, en lui donnant l’avantage, une certaine sagesse où nous reconnaissons, à plus d’un trait, l’esprit de la morale de Gassendi, c’est-à-dire de la morale de la prudence et de l’intérêt bien entendu. […] Qui vaut le mieux de cette noble et vertueuse indignation de ces haines vigoureuses d’Alceste contre les méchants, ou de cette indifférence morale de Philinte que Molière nous représente comme le plus haut degré de la sagesse ? Cette indifférence morale parait d’autant plus grave qu’elle se fonde sur ce que l’homme serait naturellement méchant, comme s’il n’avait pas la raison pour voir le bien et la liberté pour le faire. Recommander d’être sage avec sobriété et de s’accoutumer aux vices des hommes, n’est-ce pas mettre en pratique la morale de Gassendi, qui n’a pas d’autre but que de rendre la vie heureuse, et qui fait de la prudence la mère de toutes les vertus ? […] Ce qu’il y a de certain, c’est que si Molière est devenu cartésien en physique, il est demeuré fidèle aux leçons de Gassendi en métaphysique et en morale.

9. (1922) La popularité de Molière (La Grande Revue)

Sa morale, parce qu’elle est celle de la droite raison et du bon sens, est celle qui convient à tout le monde. […] C’est un fait que ni la philosophie scientifique d’Épicure, ni la morale austère d’Épictète n’ont conquis le monde : c’étaient doctrines d’intellectuels et d’aristocrates. […] La morale de Molière est adéquate à l’âme universelle. […] Là est un des plus grands secrets de la popularité de Molière : il exprime une morale qu’il ne crée pas, une morale qui ne lui appartient pas en propre, mais qui, par-dessus tous les dogmes, par-dessus les systèmes les plus ingénieux, n’est autre chose que la Morale même. […] Comme sa morale, sa psychologie est large, simple, faite pour tous les lecteurs et tous les publics.

10. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

L’Art n’est pas plus un hochet amusant qu’un instrument utile202 au service de la morale ou de la religion. […] La Vérité morale reste inébranlable et intacte à côté des débris de tout ce qui s’enfle pour singer ou parodier sa puissance éternelle. […] C’est à Rome, la ville sans sérénité, la ville de la loi roide et des codes de morale stoïque. […] C’est ainsi qu’Aristophane avait détruit ce qui est faux en Morale, en Religion, en Politique, en Philosophie, en Littérature, au plus grand honneur de l’indestructible Vérité. […] Comme les figures modernes de la scène tragique, ils combattent contre le Divin, contre une idée morale, solide et puissante, où ils finissent par se briser.

11. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE III. L’Honnête Homme. » pp. 42-64

Il y a des points plus délicats, où la morale paraît moins intéressée, et où elle l’est pourtant. […] A-t-on droit à ce titre quand on hait en gros le vice, quand on aime en gros la vertu, et quand on désire en général se défendre soi-même et protéger les siens contre la dégradation morale ? […] Or, cette délicatesse morale, Molière l’a eue au plus haut degré, et l’a exprimée avec un suprême génie dans le Misanthrope 126. […] Lire les Œuvres de Quinault (Paris, 1739, 1778, 1842) : Boileau a raison au nom du goût et au nom de la morale. […] — Mais sur ce point, quelle que soit la portée morale de Molière, ceux qui lui attribuent une intention formelle de réforme scolaire se trompent (J.

12. (1769) Éloge de Molière pp. 1-35

On ne voit point qu’une grande idée philosophique, une vérité morale utile à la société, ait présidé à l’ordonnance de leurs plans. […] Molière à son exemple renversa l’ancien système, et tirant le Comique du fond des caractères, il mit sur la Scène la morale en action, et devint le plus aimable Précepteur de l’humanité qu’on eût vu depuis Socrate. […] Cette morale est-elle nuisible ? […] Il a dans ses mains l’arme du ridicule, arme terrible, avec laquelle Pascal a combattu une morale dangereuse, Boileau le mauvais goût, et dont Molière a fait voir sur la Scène des effets plus prompts et plus infaillibles. […] C’est le personnage honnête de presque toutes ses Pièces, et la réunion de ses rôles de frère formerait peut-être un cours de morale à l’usage de la société.

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