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4. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

L’homme a beau varier ses compositions, l’écrivain a beau s’exercer dans les genres les plus différents, tout ce qui sort de sa plume porte le cachet de son talent naturel. […] De grands généraux, de grands écrivains en ont immortalisé la gloire : Molière en a immortalisé les ridicules et les vices. […] Des esquisses agréables, des miniatures charmantes, des écrivains spirituels ; mais plus de vastes conceptions, plus de grands tableaux, plus de grands hommes ; j’en atteste Marivaux, Lanoue, Dorat, et leurs tristes imitateurs. […] Tu distinguas l’imposteur de l’homme religieux ; tu saurais séparer le faux philosophe du véritable ami de la sagesse ; le novateur factieux, du citoyen qui travaille à d’utiles découvertes ; le charlatan littéraire, de l’écrivain qui dédaigne les succès d’un jour, et qui n’aspire qu’aux suffrages de la postérité. […] Le souverain qui associe tous les talents à la gloire de son règne est l’appui de l’écrivain qui en accroît la splendeur ; le législateur qui réforme son siècle est le soutien du moraliste qui l’éclaire.

5. (1838) Du monument de Molière (Revue de Paris) pp. 120-

Parmi les écrivains, race assez abandonnée des dieux et des gouvernemens, il s’en est rencontré un qui du premier coup et presque à son premier ouvrage a eu des admirateurs, et, ce qui est plus précieux encore, des ennemis. […] Comparé par les plus grands écrivains de son temps aux modèles du genre qu’il traitait, il a joui de son vivant de la protection d’un roi, de l’amitié d’une noblesse avare même d’estime, et de la constante adoration du public. […] C’est à cet écrivain si peu connu, comme on voit, si peu rémunéré pendant sa vie et après sa mort, que MM. les comédiens ordinaires du roi ont voulu rendre l’honneur tardif d’un monument. […] C’est que si nous n’avons pas eu plus de bonnes comédies en France depuis Molière, la faute en est à Molière ou à ses prôneurs exclusifs, à ses admirateurs forcenés, qui, à genoux devant son image, donnent des coups de pied à tous ceux qui veulent prendre une petite place sur le socle, où on l’a scellé pour l’effroi bien plus que pour l’exemple des écrivains.

6. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Il est certainement très blâmable d’avoir fait bafouer Trissotin comme un homme vil et intéressé, car sous ce personnage, Molière désignait un écrivain encore vivant dont le nom même n’était que légèrement déguisé. La vanité d’auteur serait plutôt une garantie contre l’amour de l’argent ; pour parvenir à la fortune en sacrifiant le sentiment de l’honneur, il y a des carrières plus profitables que celle d’écrivain. […] Autrefois des écrivains qui pouvaient élever plus haut leurs prétentions, un le Sage, un Piron, n’ont pas dédaigné de travailler pour le vaudeville, même pour le vaudeville des marionnettes. […] Il chercha moins à relever ses productions par la peinture des caractères, que par des saillies piquantes, et surtout par de continuelles allusions à sa propre carrière d’écrivain. […] Dans la sphère de la véritable littérature dramatique, les travaux d’un écrivain tel que Lemercier, méritent sans doute l’attention des connaisseurs.

7. (1886) Molière et L’École des femmes pp. 1-47

Vous aurez probablement remarqué, mesdames et messieurs, que nos écrivains aujourd’hui sont très préoccupés de la postérité. […] On oublie que la société française, au xviie  siècle, était profondément monarchique, que la nation ne connaît encore que ses rois, ne connaît que le Roi, et les écrivains ne pensent pas autrement que la nation. Voyons donc un peu la situation de ces écrivains. […] En voyant toutes les flatteries, toutes les adulations, ce cortège d’honneur que font les écrivains du grand siècle autour du grand roi, est-ce qu’il ne vaut pas mieux penser pour eux qu’ils ont été des sujets très fidèles et très sincères ? […] Quant aux écrivains qui nous occupent plus particulièrement ; souvenez-vous que Pascal ouvre le siècle, ce Pascal qui a écrit les Provinciales et qui n’en est pas moins un chrétien, le plus épouvanté des chrétiens.

8. (1886) Molière : nouvelles controverses sur sa vie et sa famille pp. -131

Il est bon, à mon avis, de discuter et de peser tous les écrivains, même les plus illustres, tous les chefs-d’œuvre, même les plus généralement admirés, que les écrivains s’appellent Molière ou Victor Hugo, les chefs-d’œuvre Tartuffe ou la Légende des Siècles. […] Larroumet l’a traité en écrivain et en homme d’esprit. […] Plusieurs écrivains, qui ont traité certaines parties de l’histoire de notre grand comique et de sa famille, ont puissamment aidé à ce mouvement de réaction ou s’y sont associés. […] Léopold Delisle, Henri Bordier et A. de Montaiglon, des écrivains ayant une autorité incontestée pour tout ce qui touche à Molière, comme MM. […] Le spirituel et subtil écrivain que j’analyse ne va pas jusque-là.

9. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre X » pp. 83-88

Quelques écrivains ont fait honneur à l’influence d’Anne d’Autriche et à l’esprit espagnol apporté par elle en France, du premier essor de Corneille. […] C’est du reste un tic commun à beaucoup d’écrivains, d’indiquer dans nos vieilles cours l’origine du génie en tout genre, comme s’ils étaient aussi sûrs de la trouver cette source qu’ils le sont d’y trouver l’origine des plus grands vices.

10. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VI » pp. 50-55

Ne voulant pas souscrire au jugement porté sur Voiture par une multitude d’écrivains qui ne l’ont pas lu, j’ai courageusement entrepris de le lire, et voici ce que j’ai recueilli de ma lecture : Voiture, dans sa première jeunesse, écrivit à la manière du temps, avec recherche et affectation. […] Il attaque une phrase qu’il croit être de Pline le jeune, dont il se moque comme d’un écrivain affecté. « Ne m’avouerez-vous pas, dit-il, que cela est d’un petit esprit de refuser un mot qui se présente et qui est le meilleur, pour en aller chercher avec soin un moins bon et plus éloigné : Pline est de ces éloquents dont Quintilien dit : illis sordent omnia quæ natura dictavit ? 

11. (1819) Notices des œuvres de Molière (II) : Les Précieuses ridicules ; Sganarelle ; Dom Garcie de Navarre ; L’École des maris ; Les Fâcheux pp. 72-464

Somaise, écrivain obscur et bien fait pour l’être, fit une comédie des Véritables Précieuses, en tête de laquelle il mit une préface fort insultante pour Molière, et ensuite, comme pour le maltraiter plus sûrement encore, il traduisit en méchants vers ses Précieuses ridicules. […] Il faut tout dire : Neufvillenaine ne s’était pas borné à faire imprimer l’ouvrage de Molière ; il avait mis du sien dans le volume, et s’était associé, comme écrivain, à l’auteur de la pièce qu’il mettait au jour. […] Cet écrivain, sincère admirateur du génie de Molière, mais plaisamment dominé par l’idée que ce grand homme a emprunté au théâtre italien la plupart des créations dont il a enrichi le nôtre, veut absolument voir le sujet, des Fâcheux dans une méchante farce intitulée, Le Case svaliggiate, ou Gli Interrompimenti di Pantalone. […] Ces deux génies étaient de même trempe : c’est pour avoir été tous deux également vrais et originaux, c’est surtout pour avoir excellé l’un et l’autre dans l’imitation de la nature, qu’ils ont tous deux mérité le surnom d’inimitable qui les distingue au milieu de tous les grands écrivains de leur siècle. […] Cet écrivain, par sa manière, Charme à présent toute la cour.

12. (1739) Vie de Moliere (Réflexions sur les ouvrages de litérature) [graphies originales] « Chapitre » pp. 252-262

Ce misérable Ecrivain fit une Préface, dont je vais rapporter quelques morceaux, pour faire voir que les plus grands hommes sont exposés depuis long-tems à la fureur des plus ridicules barbouilleurs de papier. […] Faut il être surpris que les modernes se déchaînent contre les excellens Ecrivains de notre siécle ?

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