« Mandez-moi tout ce qu’on dit, tout ce que vous pensez… Quel plaisir d’être enfermée89, pour les raisons que vous dites ! […] Je ne veux pourtant pas en sortir encore ; trop de charmes m’y attachent, et à ma faiblesse, je sens que je ferais des efforts inutiles, on vous a dit vrai, si l’on vous a peint mon directeur comme un homme rigide ; mais vous ne devriez pas vous le figurer ridicule, Il ne défend point les plaisirs innocents ; mais il ne permet pas de traiter d’innocents ceux qui sont criminels. […] Sur quoi le roi dit, en parlant de madame Scarron : Elle sait bien aimer ; il y aurait du plaisir à être aimé d’elle 92. » L’aversion des érudits pour les conjectures, et celle des esprits sages pour le romanesque, ne peuvent aller jusqu’à méconnaître que cette parole du roi fait époque dans l’histoire de ses relations avec madame de Maintenon. […] Il doit y avoir du plaisir à servir un héros et un bienfaiteur.
Les caracteres de tous les temps sont préferables aux autres pour deux raisons : la premiere, parceque si l’Auteur réussit à les peindre comme il faut, sa gloire est plus durable ; il n’est pas douteux que le spectateur ne prenne plus de plaisir à voir jouer sur le théâtre des travers, des ridicules ou des vices qui le frappent tous les jours dans la société, que s’il ne les connoissoit que par tradition : de telles pieces bien faites réunissent le double avantage de frapper toujours les connoisseurs & le commun des hommes : elles ont sans cesse les graces de la nouveauté60. […] Si je suis découvert dans mes plaisirs secrets, Tout le corps en chaleur prendra mes intérêts ; Et, sans me remuer, je verrai la cabale Me mettre hautement à couvert du scandale. […] On m’objectera que nous voyons jouer les Précieuses avec plaisir, quoique les modeles n’existent plus.
Que d’éloges ne faudroit-il pas donner à la façon dont cette aventure est mise en action & encadrée dans la Métromanie, si nous n’avions résolu de laisser entiérement au Lecteur le plaisir de prononcer sur les Auteurs vivants. […] Le vieillard vécut cinq ou six ans : il eut le plaisir de voir toujours ses enfants dans cette même crise de sentiments : il n’avoit qu’à souhaiter, on se rendoit à ses desirs, on le prévenoit même, on ne lui épargna rien. […] Un extrait concis des Fils ingrats mettra le Lecteur à portée de comparer tout de suite le Conte avec la Piece, & lui procurera le plaisir de rendre justice au Poëte. […] L’oncle donne tout son bien à la belle orpheline, qui se fait un plaisir d’offrir son cœur & sa main au bon & généreux Géronte, & sollicite, en faveur de cet hymen, la grace des trois fils.
On les trouvera rétablis dans celle-ci, et ce n’est pas un petit service rendu au public par ceux qui ont pris ce soin, puisque les nombreuses Assemblées qu’on voit encore tous les jours aux représentations des Comédies de ce fameux Auteurs, font assez connaître le plaisir qu’on se fera de les avoir dans leur pureté. […] Son Altesse Royale s’applaudit du choix qu’il avait fait d’eux, puisque le Roi les trouvait capables de contribuer à ses plaisirs, et particulièrement à toutes les belles Fêtes qui se faisaient à Versailles, à S. […] Après qu’elle fut à sa Majesté, Monsieur de Molière continua de donner plusieurs Pièces de Théâtre, tant pour les plaisirs du Roi que pour les divertissements du public, et s’acquit par là cette haute réputation qui doit éterniser sa mémoire. […] Il n’y a plus présentement dans Paris que cette seule Compagnie de Comédiens du Roi entretenu par sa Majesté : Elle est établie en son Hôtel rue Mazarini, et représente tous les jours sans interruption, ce qui a été une nouveauté utile aux plaisirs de cette superbe Ville, dans laquelle avant la jonction il n’y avait comédie que trois fois chaque semaine, savoir le Mardi, le Vendredi et le Dimanche, ainsi qu’il s’était toujours pratiqué.
Cette description des Plaisirs de l’Île enchantée n’est rien moins qu’un morceau bien écrit ; mais elle est un témoignage de la noble magnificence que Louis XIV déployait dans ses plaisirs ; et, ce qui suffirait seul pour la préserver de l’oubli, elle contient une mention curieuse de la représentation des trois premiers actes du Tartuffe. […] Ces plaisirs magnifiques, qui durèrent sept jours, et à la description desquels Voltaire n’a pas dédaigné de consacrer plusieurs pages, étaient dans ce goût moitié guerrier et moitié galant qui rappelle les jeux de l’ancienne chevalerie. […] La Princesse d’Élide, accompagnée d’un prologue et de cinq intermèdes, fut représentée le 8 mai 1664, c’est-à-dire le second jour des fêtes connues sous le nom de Plaisirs de l’Île enchantée. […] Ce nombre peut étonner, si, même en mettant à part le peu d’intérêt de la pièce, on considère qu’à Paris elle se montra dépouillée de tous ces brillants accessoires qui, à Versailles, en avaient fait du moins un plaisir pour les yeux et pour les oreilles. […] Ce gouverneur d’Euryale, qui, au lieu de blâmer ou de réprimer les tendres sentiments de son élève, les justifie et les encourage, lui confesse qu’il s’inquiétait jusque-là de voir qu’un jeune prince, en qui brillaient tant de belles qualités, ne possédât pas la plus précieuse de toutes, ce penchant à l’amour, qui peut tout faire présumer d’un monarque, et auquel les héros doivent leurs plus grandes actions, mais lui déclare que, rassuré par la passion dont il vient de lui faire l’aveu, il le regarde à présent comme un prince accompli ; cet Arbate, dont le langage convient si peu à son grave emploi, parle en courtisan de Louis XIV, charmé des faiblesses de son maître, et empressé de les flatter, dans l’espoir d’en tirer parti pour sa fortune, ou du moins pour ses plaisirs.
Il critiquoit les hommes, & sa femme les aimoit ; l’un tiroit sa gloire de leurs défauts, l’autre tiroit son plaisir de leurs foiblesses. […] Cet homme unique mourut presque subitement : on eût dit qu’il vouloit enlever aux Médecins l’honneur & le plaisir de le tuer.
quel plaisir alors de s’aimer but à but ! […] Ma mere A pris aussi, dit-on, grand plaisir à me faire, Et je m’en suis senti, car certain air gaillard, Que j’ai d’elle hérité, me rend tout égrillard ; Je vous divertirai. . . . . . […] Les coups qu’ils se porteroient mutuellement tour à tour donneroient un plaisir plus varié au spectateur.
ils n’ont pas vu que dans ce grand drame qu’ils défaisaient à plaisir, il s’agissait de la conscience, cet inévitable châtiment du coupable ! […] Le plaisir, c’est la grande affaire. […] Ces choses-là s’appelaient tantôt la Vallée de Misère, tantôt les Plaisirs de la Jeunesse, et parmi ces plaisirs, le gros Rieux et la belle Pâtissière, la Dame de pique et la Dame de carreau : dames, écoliers, pages, chevaliers. […] La décoration, qui est fort belle et d’un très pittoresque effet (quelle somme d’argent représenteraient ces magnifiques décorations qui remplacent, si misérablement et si chèrement, par le stérile plaisir des yeux, les impérissables plaisir de l’esprit) ! […] c’est là encore mentir à l’histoire et avilir à plaisir et sans aucune nécessité dramatique, le noble caractère de M. le marquis de Montespan.
La satire directe met en jeu l’amour-propre qui regimbe, qui s’irrite et qui récrimine : la comédie le ménage, elle dit le mot de tout le monde sans le dire à personne expressément, et c’est ainsi qu’elle devient tout ensemble un plaisir innocent et un enseignement profitable. […] Lorsque vous peignez des héros, vous faites ce que vous voulez ; ce sont des portraits à plaisir, où l’on ne cherche point de ressemblance, et vous n’avez qu’à suivre les traits d’une imagination qui se donne l’essor et qui souvent laisse le vrai pour attraper le merveilleux. […] Alors, pleinement éveillé et riche des fruits de ce travail qui avait été pour lui un plaisir, il écrivait, non pas négligemment et à l’aventure, mais avec un soin curieux, une attention soutenue, un goût délicat et plein de scrupules, ces fables immortelles qu’on ne se lasse pas de relire, aliment et parure de la pensée. […] C’est le goût des plaisirs qui l’attira auprès de Fouquet et qui l’y retint jusqu’à la disgrâce, qui fit passer ce corrupteur élégant, ce splendide dilapidateur de la fortune publique, des fêtes plus que royales du château de Vaux à la dure prison de Pignerol. […] Si l’on ajoute à cet attrait de la réalité vivante le plaisir que cause le spectacle de l’humanité visible sous ces symboles animés, on aura les deux principes de l’intérêt universel qu’excitent Les Fables de La Fontaine.
Nous prenons plaisir à déconstruire pièce par pièce l’édifice des célébrités anciennes. […] Sans doute, le sujet de, la pièce est heureux, les caractères sont d’un comique irrésistible, le dialogue est d’une vivacité naturelle, le style d’une pureté hardie : tout cela fait un plaisir extrême. […] On peut même dire en général que l’ensemble en doit être moral, ainsi que vraisemblable, à cause de la mystérieuse intimité qui unit le vrai, le beau et le bien, et fait de leur réunion la condition normale et habituelle du plaisir. […] Ceux qui ont voulu voir en Molière un mélancolique habillant sa tristesse sous une gaieté forcée, ou un voluptueux sans autre pensée que le plaisir, ont fait preuve, les premiers d’une clairvoyance voisine de l’imagination pure27, et les autres d’une ignorance réelle sur la philosophie de son maître Gassendi28. […] X : « Molière est un sage… Grand homme, qui a reçu du ciel le don puissant de corriger les vices et les ridicules, et qui, habile à emmieller les bords du vase, nous mène à la vertu par le plaisir même. » 9.
Ils étoient tous deux jeunes, d’un même âge, & avec les mêmes inclinations ; si ce n’est qu’Anselme étoit un peu plus galant, & Lothaire aimoit plus la chasse : mais ils s’aimoient tous deux encore plus que toutes choses, & renonçoient toujours l’un pour l’autre à leurs propres plaisirs. […] Pendant qu’il s’empêchoit de lui parler, il ne laissoit pas de faire des réflexions sur sa beauté ; & croyant ne tourner les yeux vers elle que par bienséance, il commença peu à peu à la regarder avec admiration, & après cela avec tant de plaisir qu’il ne pouvoit plus s’en détacher. […] L’Olive paroît en faisant claquer son fouet, & lui dit que le pere de Léandre, échappé depuis peu d’une grande maladie, le prie de différer le mariage, parcequ’il espere que les plaisirs de la noce lui rendront entiérement la santé : Géronte y consent & va joindre Léandre. […] Léandre embrasse Damon, le remercie du bonheur pur qu’il goûte, lui demande ce qu’a dit Géronte, apprend avec plaisir que le bon-homme laisse sa fille maîtresse de son sort : il espere qu’elle refusera toute autre main que la sienne. […] Mélisse vante ses charmes : le blanc dont elle se sert, est le plaisir de conquérir tous les cœurs.
Ce fut même au sortir de l’un de ces spectacles où rien n’était négligé pour le plaisir de l’oreille et des yeux, que le jeune roi Louis XIV, qui était encore en sa minorité, s’écria, battant des mains : « Voici mon collège ! […] Il se hâtait de vivre, et le roi se bâtait d’utiliser son génie au profit de ses plaisirs. […] Don Juan, c’est le démon des temps féodaux ; c’est le châtiment des seigneurs implacables qui se servaient de toutes les femmes pour leurs plaisirs, de tous les hommes pour leur ambition. […] Un beau logis à la ville, un grand jardin dans le doux village d’Auteuil, où Racine, Despréaux, La Fontaine, égal à Molière, venaient partager sa vie et ses plaisirs. […] Jamais rien de plus gai : cette comtesse d’Escarbagnas ouvrait la porte à toutes ces femmes de licence et de plaisir, bêles et viles, qui remplissent le théâtre du dix-neuvième siècle.
Et pourtant, si l’exposition prolongée d’une idole excite l’impatience, c’est un bien vif plaisir que de ressaisir l’habitude extérieure et l’être moral d’un homme de génie. Rien n’empêche de se donner ce plaisir avec Molière. […] Il fut donc un épicurien, prenant de la vie tout ce qu’elle mettait à sa portée de désirable : amour et plaisir, richesse et gloire. […] Ce rat le cas de Molière ; il essaya d’arranger la sienne de façon à en tirer la plus grande somme possible de bien-être et de plaisir. […] Les voluptueux sont tristes, et l’on sait avec quelle sincérité douloureuse leur poète favori, Lucrèce, exprime l’amertume qui se dégage des plaisirs.
Je ne cherche point de raisonnements pour m’empêcher d’avoir du plaisir. […] Je suis convaincu qu’il regardait avec plaisir faire les foins. […] Je sais qu’il y a des écrivains qui détruisent à plaisir la vérité, par défaut de finesse et manie d’exagérer. […] Il ne cherchait point de raisonnements pour s’empêcher d’avoir du plaisir. […] Après une journée de plaisir, on s’assembla sur le théâtre.
De plus, vous vous croyez un mérite suprême, Et vous n’estimez rien à l’égal de vous-même : Vous vous raillez sous main de vos meilleurs amis, Quoique toujours près d’eux complaisant & soumis : Votre intérêt vous guide & seul vous détermine : Chez vous en grand secret l’amour-propre domine : Quand vous n’êtes point vu vous courez au miroir, Et vous vous régalez du plaisir de vous voir. […] Le plaisir d’amasser vaut seul tous les plaisirs. […] Enfin ce que le monde a de plus spécieux, Mon coffre le renferme, & je l’ai sous mes yeux, Sous ma main ; & par-là l’avarice qu’on blâme, Est le plaisir des sens, & le charme de l’ame.
Se peut-il que Dieu dirige une telle barbarie, & qu’il y prenne plaisir ? […] Si vous n’avez ni égard, ni considération, ni justice pour l’innocence ; si vous exercez contre les bons tant de rigueur & de dureté ; enfin si vous prenez plaisir, si vous trouvez des délices dans les peines, dans les malheurs des ames pures & qui détestent l’iniquité, comment punirez-vous les impies, les infames, & les scélérats ? […] C’est un lieu de plaisir, séjour de mes aïeux, A mon gré le plus beau qui soit dessous les cieux. […] Vous me ferez plaisir, c’est ce que je desire. […] Hautement d’un chacun elles blâment la vie, Non point par charité, mais par un trait d’envie Qui ne sauroit souffrir qu’un autre ait les plaisirs Dont le penchant de l’âge a sevré leurs desirs.
Donc Bossuet, dans sa suprême sévérité, a eu l’esprit plein des dangers et des hontes de la vie de comédien, le cœur soulevé par les grossièretés étalées sur la scène de l’époque, l’indignation surexcitée par l’encouragement donné aux plaisirs de Louis XIV. […] Il est vrai que Molière semble quelquefois s’égayer à des plaisirs et à des plaisanteries qu’il doit condamner lui-même824. […] Même pour les spectacles modernes, la défense générale de ce genre de plaisir paraîtra raisonnable à ceux qui voudront réfléchir que l’Église, institutrice et gardienne de la morale pour ses fidèles’, doit nécessairement leur interdire, comme dangereux, un divertissement où il est incontestable que la morale est souvent blessée, et où le talent des auteurs et des acteurs s’efforce d’enlever aux spectateurs émus le calme nécessaire pour discerner équitablement le bien et le mal. Quand même ce plaisir ne serait pas universellement blâmable, et quand même telles et telles personnes pourraient y assister sans danger, l’Église, par son caractère de catholicité, c’est-à-dire d’universalité, a des règles disciplinaires très-générales, et défend l’usage de ce qui est généralement mauvais, sans entrer dans le détail des circonstances où l’inconvénient peut disparaître832. […] si le peuple était instruit moralement d’une manière suffisante ; si chaque homme dans son cœur portait, avec la volonté. de bien faire, une connaissance assez nette de ce qui est bien ou mal pour rester maître de son jugement au milieu du plaisir, et discerner avec calme ce qu’il doit fuir ou imiter ; s’il avait depuis l’enfance une habitude constante et forte de l’honnête, alors ou dirait avec confiance au peuple : Allez au théâtre de Molière.
Mercure, du haut de la maison, l’en empêche, lui dit des injures, lui jette des tuiles, lui défend de troubler la tranquillité d’Amphitrion qui goûte dans les bras d’Alcmene tous les plaisirs d’un raccommodement. […] Il est vrai qu’il s’y divertit à prévenir l’assemblée sur qui doit arriver dans le courant de la piece, à lui enlever par-là tout le plaisir des surprises, & sur-tout de l’intérêt. […] Jupiter annonce tout uniment qu’il vient pour goûter le plaisir d’un racommodement & se réconcilier avec Alcmene sous la figure du mari. […] Dans cette scene, ainsi que dans celle de Plaute, Mercure insulte le malheureux Amphitrion, le menace de lui envoyer des messagers fâcheux s’il ne s’éloigne, & s’il trouble Amphitrion & Alcmene qui goûtent le plaisir de s’être raccommodés. […] Livrez-vous uniquement au plaisir de rire ».
On a vu, dans la relation de ces fêtes connues sous le nom de Plaisirs de l’Île enchantée, que le roi, personnellement satisfait des trois actes qu’il venait d’entendre, et persuadé des bonnes intentions de l’auteur, n’en avait pas moins cru devoir défendre la représentation publique d’une comédie qui, quoique dirigée contre la seule hypocrisie, pouvait être d’une fâcheuse conséquence pour la véritable dévotion. […] Une religion toute sensuelle comme le polythéisme, n’exigeait pas cette pureté de mœurs, cette abnégation de soi, ce renoncement au plaisir que la nôtre commande, et dont on peut outrer les apparences pour imposer au peuple et pour le tromper. […] Mais que le monologue insipide où Mercure raconte tout ce qu’on va voir et entendre, comme s’il craignait qu’on n’y prît trop d’intérêt et de plaisir, lui ait semblé supérieur au charmant dialogue de Mercure et de la Nuit, qui prépare au merveilleux de l’action, sans la faire connaître ; surtout que le jeu du double moi lui ait paru plus ingénieux dans Plaute qui l’indique à peine, que dans Molière qui en a tiré un si grand parti d’après Rotrou, voilà de ces erreurs que Boileau ne pouvait commettre, et qu’il y aurait une témérité presque sacrilège à lui imputer sur la périlleuse parole d’un auteur d’ana. […] Voici textuellement le passage de la description des Plaisirs de l’Île enchantée : « Le soir, Sa Majesté fit jouer les trois premiers actes d’une comédie, nommée Tartuffe, que le sieur de Molière avait faite contre les hypocrites ; mais, quoiqu’elle eût été trouvée fort divertissante, le Roi connut tant de conformité entre ceux qu’une véritable dévotion met dans le chemin du ciel, et ceux qu’une vaine ostentation des bonnes œuvres n’empêche pas d’en commettre de mauvaises, que son extrême délicatesse pour les choses de la religion ne put souffrir cette ressemblance du vice avec la vertu qui pouvaient être pris l’un pour l’autre ; et, quoiqu’on ne doutât point des bonnes intentions de l’auteur, il la défendit pourtant en public, et se priva soi-même de ce plaisir, pour n’en pas laisser abuser à d’autres, moins capables d’en faire un juste discernement. » Cette citation est tirée de l’édition originale publiée, en 1665, par Ballard, et plusieurs fois réimprimée du vivant de Molière. […] Débaucher une femme, et coucher avec elle, Chez ce galant bigot, c’est une bagatelle ; À l’entendre, le ciel permet tous les plaisirs ; Il en sait disposer au gré de ses désirs, Et, quoi qu’il puisse faire, il se le rend traitable.
Le jour ensuivant venu, Nérin retourna vers Jeanneton : cependant qu’ils étoient en plaisirs amoureux & propos gracieux, le mari arriva. […] mais la mauvaise & envieuse fortune m’a rompu tous mes plaisirs, parceque le mari est survenu & a gâté tout le mystere. […] Comme ils passoient leurs temps en plaisirs & propos amoureux, le mari retourna au logis, tellement que Jeanneton, se voyant ainsi surprise, ouvrit incontinent une garde-robe qui étoit assez grande, & qui étoit dans sa chambre, & cacha dedans Nérin. […] L’étudiant reprit : Je suis nouveau dans Rome ; Et puis, hors les beautés qui font plaisir aux gens Pour la somme, Je ne vois pas que les galants Trouvent ici beaucoup à faire. […] Chacun a ses plaisirs, qu’il se fait à sa guise : Mais pour ceux que du nom de galants on baptise, Ils ont en ce pays de quoi se contenter ; Car les femmes y sont faites à coqueter : On trouve d’humeur douce & la brune & la blonde, Et des maris aussi les plus bénins du monde : C’est un plaisir de Prince ; &, des tours que je vois, Je me donne souvent la comédie à moi.
C’est un homme amoureux du plaisir, Ennemi du travail, toujours plein de loisir ; Méprisant ses égaux, &, depuis son enfance, Nourri dans le repos, dans la magnificence, Cherchant les courtisans & les gens du bel air, Imitant leur exemple, & les traitant de pair. […] Il céderoit à l’attrait des plaisirs faciles que les unes lui offriroient. […] Corneille, à l’imitation des Espagnols, qu’on accuse de n’avoir jamais mis des caracteres sur le théâtre ; Corneille, dis-je, après nous avoir présenté le portrait d’un jeune homme qui se fait un plaisir d’accumuler mensonge sur mensonge, ne nous l’a-t-il pas fait voir, dans une seconde piece, luttant contre son malheureux caractere, & ne pouvant le vaincre, n’employer désormais ses mensonges que pour faire de bonnes actions.
Qu’on y voit succéder De plaisir, de tendresse ! […] Quand je plaisois à ma bergere, Je vivois dans les plaisirs.
Béverley frémit en approchant de sa maison, & se peint les plaisirs qu’il y goûtoit jadis. […] Madame Béverley accourt avec son fils pour embrasser son mari & lui peindre le plaisir que lui cause son retour. […] Sa femme se fait un plaisir de ce nouveau sacrifice. […] Béverley finit l’acte par ces vers : Plaisirs faux & trompeurs, pleins d’horreur & d’alarmes, Le repentir vous chasse à jamais de mon cœur.
Ce qui domine dans l’une, c’est la passion et le plaisir, et dans l’autre la vanité et la légèreté. […] il tâche de la contenter et il estime que cette toilette et ces distractions sont des plaisirs qu’on peut, Lorsque l’on a du bien, permettre aux jeunes filles. […] Il est permis au riche d’étaler sa richesse, d’ouvrir ses salons et sa bourse, de répandre autour de soi l’or et les plaisirs ; c’est une bonne manière de faire la charité. […] C’est un état où le sérieux des devoirs à remplir est tempéré par de douces jouissances ; mais le plaisir ni même le bonheur ne sont ici le principal, ce n’est que l’assaisonnement. […] « La vie, a dit M. de Tocqueville, la vie n’est ni un plaisir ni un supplice, c’est une affaire grave dont nous sommes chargés, et qu’il faut terminer à notre honneur. » Dieu, en nous imposant des devoirs, y attache certains plaisirs qui en rendent l’accomplissement plus facile ; et le bonheur qu’il nous accorde en échange n’est destiné qu’à nous en faire souhaiter un plus complet.
» Plus loin, l’évêque de Meaux prend la peine d’expliquer à ce malheureux théatin, qui n’y a jamais mis les pieds, l’espèce de plaisir que l’on trouve au théâtre, et jamais commentaire n’a été mieux fait à l’éloge de ce grand plaisir, le premier de tous, peut-être, quand il est complet. […] Évidemment, le public était préoccupé de la comédie, et il écoutait sans trop de plaisir les colères éloquentes d’Hermione ! […] Son activité ne se dément pas un seul instant ; il est patient et rusé comme le renard ; il joue avec ses victimes, et quand il voit une dupe, il dit tout basque c’est plaisir. […] J’aime le jeu, les assemblées, les visites, les cadeaux et les promenades ; en un mot, toutes les choses de plaisir. […] Le poète, il est vrai, les maltraite à outrance, mais toujours comme un homme de bonne compagnie qui se venge à plaisir des fats qui lui ont déplu.
Ils m’offrent des plaisirs en m’offrant votre vue ; Mais ils pourroient ici découvrir ma venue, Qu’il est à propos de cacher. […] Nos premiers Poëtes, bien différents des Anglois, cherchoient des difficultés pour se ménager le plaisir de les vaincre, en faisant des vers à rime couronnée : je n’en citerai qu’un exemple pris dans la tragédie du Mauvais Riche. […] Il ne faut pas remonter si haut pour trouver des Poëtes qui se sont fait un plaisir de vaincre sur la scene précisément les difficultés qui, loin d’ajouter au mérite de la piece, la gâtent.
On ne peut pas dire, pour expliquer cette conformité de sentiments, que madame de Staël fut de deux cents ans en arrière de son siècle, ni madame de Rambouillet de deux cents ans en avant du sien ; elles étaient toutes deux de leur temps, de leur sexe, et toutes deux plus sensibles aux plaisirs de l’âme et de l’esprit qu’à tout autre. […] Jamais les plaisirs de l’esprit ne furent mieux goûtés que par ces gens-là. […] n’était-elle pas de celles qui donnent à l’esprit le plus d’étendue et de lumières, qui s’allie ni le plus naturellement et le plus étroitement aux qualités morales, au perfectionnement de la raison, au sentiment du beau et du grand, à la délicatesse du goût, et se prêtent le mieux aux plaisirs d’une imagination sage et réglée ?
Madame de Montespan elle-même, malgré le plaisir qu’elle avait trouvé autrefois dans ces conversations, les tourna après en ridicule pour divertir le roi63. » Il était fort naturel sans doute qu’à la cour, où tant d’intrigues étaient toujours en action, soit pour la galanterie ou pour la fortune, on regardât comme oisifs les gens qui faisaient les plaisir de la conversation, et que le roi et madame de Montespan, dans les ébats d’un double adultère, eussent besoin de donner un nom ridicule aux personnes spirituelles de mœurs régulières et décentes. […] Mais enfin, sans querelle, sans reproche, sans éclat, sans le chasser, sans éclaircissement, sans vouloir le confondre, elle s’est éclipsée elle-même ; et, sans quitter sa maison, où elle retourne encore quelquefois, sans avoir dit qu’elle renonçait à tout, elle se trouve si bien aux Incurables, qu’elle y passe quasi toute sa vie, sentant avec plaisir que son mal n’était pas comme celui des malades qu’elle sert.
Les héros du poète français ne personnifient rien du tout, et son but est rempli quand il nous a fait éprouver le plaisir de l’admiration en présence de la grandeur d’âme d’Auguste ou de la fermeté héroïque de Polyeucte.» […] Le plaisir de l’admiration est un plaisir si grand qu’il ne faut le subordonner à rien. […] Il avouait lui-même que la moindre critique, si mauvaise qu’elle fût, lui avait toujours causé plus de chagrin que toutes les louanges ne lui avaient fait de plaisir. » Jusqu’ici le jeune professeur de Lausanne marche d’accord avec Vinet ; mais il se sépare de lui au moment de tirer les conséquences de son récit. […] Alors que tous les prenaient au sérieux, il les réduit à quelques observations de bon sens : « Laissez-vous aller de bonne foi aux choses qui vous prennent par les entrailles, dit-il par la bouche de Dorante, dans La Critique de l’Ecole des femmes, et ne cherchez pas de raisonnements pour vous empêcher d’avoir du plaisir. » « On a voulu, dit M. […] Mais ici se pose une question : celle de savoir si, en entrant dans la lice, Molière faisait œuvre de religion ou de frivolité ; s’il venait au secours de Pascal, ou s’il ne prenait en main que la cause des plaisirs de la cour, menacés par une feinte sévérité.
Molière prolonge avec un visible plaisir ce distinguo victorieux. […] Il faut distinguer dans l’opération de nos sens la nécessité, l’utilité, la vivacité du sentiment, et enfin l’attachement au plaisir sensible. […] Vous bannissiez de mon cœur les vains plaisirs ; mais, pour empêcher que mon cœur ne les regrettât, vous y entriez à leur place ; et dès là, Seigneur, la privation de ces plaisirs était pour moi plus délicieuse que n’en aurait jamais été, ni n’en aurait pu être la possession. […] Le plaisir alla croissant jusqu’à la fin. […] Qui évaluera jamais le déficit que ces restitutions forcées du plaisir laissent dans le budget que soldait autrefois volontairement la charité !
Rœderer, — la position de Molière, et le plaisir que le roi prenait à diriger son talent, on se persuaderait sans peine qu’en approchant l’oreille des rideaux du roi, on surprendrait quelques paroles dites à demi voix, pour désigner à Molière ce caractère, qui, bien que respecté au fond du cœur, avait quelque chose d’importun pour les maîtresses et pour les femmes de la cour qui aspiraient à le devenir8. » Préparer le triomphe du vice, tel serait donc le sens mystérieux du caractère d’Alceste. […] Que ce partisan effréné du pouvoir absolu, qui veut qu’on bâtisse “deux citadelles à Paris pour contenir le peuple, et qui, avec ses grands airs d’austérité, rivalise avec sa femme, pour servir les plaisirs du roi ! […] Sans aucun doute, les contemporains ont placé des noms connus au bas de chacun de ces portraits, et plus d’un de ces beaux de cour, se donnant en spectacle sur les bancs de l’avant-scène, a dû offrir au public le malin plaisir de comparer la copie à l’original. […] « Lorsque vous verrez Le Misanthrope, songez à Molière, à son infortune profonde ; persuadez-vous bien que sous le nom d’Alceste c’est lui-même que vous avez devant les yeux, et vous sentirez quelle douleur amère se cache au fond de ce diamant plaisir 47. » On voudrait se transporter dans ce temps où Molière lui-même, interprétant ses chefs-d’œuvre, racontait à cette grande société française l’histoire intime de son cœur et de ses souffrances. […] Nous avons acquis par nous-même la certitude que, si une représentation du Misanthrope n’est pas une de celles où « tout Paris court en foule» elle est toujours pour l’esprit un plaisir délicat.
Elle se dévoua à consoler de respectables douleurs, au lieu de rechercher des plaisirs ou des avantages personnels : en entrant dans le monde, elle sembla vouloir s’y placer sous un vénérable patronage qui la préservât des écarts et des calomnies. […] On n’y trouva une des lettres d’amour, parmi lesquelles étaient celles de madame de Sévigné. « Le roi prit un grand plaisir à les lire, parce qu’elles contrastaient avec les douceurs fades des autres lettres. » Le Tellier, qui les avait lues avec le roi, dit que le surintendant avait mal à propos mêlé l’amour et l’amitié42. […] On y lit aussi que l’hôtel d’Albret et l’hôtel de Richelieu « étaient une suite et une imitation de l’hôtel de Rambouillet, quoiqu’avec des correctifs, et qu’il leur manquât un Voiture pour en faire passer à la postérité les plaisirs et les amusements. » Avant les hôtels d’Albret et de Richelieu, j’aurais dû citer en première ligne les cercles de mademoiselle de Montpensier.
Selon lui, les moqueries même que, sur son théâtre, il se plaisait à jeter sur les maris n’étaient qu’une sorte de cruel plaisir qu’il éprouvait à déchirer ses plaies en face de tous, qu’une amère dérision de ses propres souffrances. […] Comme il prend plaisir à pénétrer et à révéler les doux secrets de ces jeunes cœurs s’entrouvrant aux plus tendres sentiments ! […] Indépendamment de ces jeunes figures de femme qui semblent avoir été pour Molière la réalisation de ses rêves les plus chers, il nous en a tracé d’autres ayant un caractère plus marqué, qu’il semble avoir eu encore grand plaisir à peindre. […] En quels excellents termes, aussi vrais qu’animés, elle fait justice de l’hypocrisie de tous ces critiques zélés et de ces prudes à leur corps défendant, Qui ne sauraient souffrir qu’une autre ait les plaisirs, Dont le penchant de l’âge a sevré leurs désirs.
Coquelin semble avoir été formé à plaisir par la nature pour les rendre à merveille. […] Le public lui témoigne assez, par les applaudissements qui éclatent à chacune de ses tirades, tout le plaisir qu’il fait. […] — Je ne veux point, aujourd’hui, d’autres affaires que le plaisir. […] C’est un ravissement de l’entendre, et j’ajouterai même, si l’on veut, que c’est un plaisir de le voir. […] Si nous touchons terre un instant, cet instant suffit pour nous gâter le plaisir de ces inventions comiques.
Ami du plaisir, il respecta la décence ; chantre de l’Amour, il n’effaroucha point les Grâces. […] Disciple des Collé, des Piron, des Favart, il fut admis par eux à cet ancien caveau, véritable académie du plaisir, qui fut aussi, plus souvent qu’on ne pense, l’académie du bon, goût. […] Nous sommes sérieux, rêveurs jusque dans nos plaisirs ; la froide étiquette préside à nos festins, et la triste raison s’assied avec nous.
Il prenoit plaisir à décharger sa mauvaise humeur contre les personnes de ce caractère, qui de leur côté ne l’épargnoient pas dans l’occasion. […] Au contraire, il semble qu’on ait affecté de répandre l’infamie sur ceux qui nous font tant de plaisir. […] L’applaudissement du Prince, récompense aussi juste que flateuse pour Moliere, les allusions vrayes ou fausses qui pouvoient avoir quelque chose de mystérieux, les agrémens de la musique et de la danse, et plus encore l’espece d’yvresse que produisent le mouvement et l’enchaînement des plaisirs, contribuèrent au succès de la Princesse d’Elide. […] On n’avoit point encore vu de si parfait comédien dans la troupe royale de l’Hôtel de Bourgogne, dont il étoit l’orateur ; il annonçoit de bonne grâce, parloit facilement, et ses petits discours faisoient toujours plaisir à entendre par les traits nouveaux dont il prenoit soin chaque jour de les orner. […] Leurs complimens étoient ordinairement courts, bien tournés, et faisoient souvent autant et plus de plaisir que la pièce qu’on venoit de jouer.
Nous avons une comédie que l’on joue très souvent sur la scene françoise, & qu’on y voit avec plaisir : mais tout le monde s’écrie aux représentations : C’est dommage que le fond de cette piece n’ait pas le sens commun ! […] Prêts à l’exécuter, nous sentons tous les deux Qu’aux mains d’un étranger la mere d’Emilie Ne livrera jamais une fille chérie, L’objet de tous ses soins, & son unique espoir, Elle qui met sa joie au plaisir de la voir.
Quant à nous, qui aimons Molière, laissons-nous aller de bonne foi aux choses qui nous prennent par les entrailles, et ne cherchons point de raisonnements pour nous empêcher d’avoir du plaisir . […] Aucun préjugé ne la roidit contre le plaisir d’être touchée, amusée ou ravie. […] Elle apprécie trop ce plaisir-là pour remettre jamais sous le joug la liberté de son goût. […] Ne cherchez pas de raisonnements pour vous empêcher d’avoir du plaisir, et quand vous lisez une comédie, regardez seulement si les choses vous touchent. […] « Je conjure mes critiques d’avoir assez bonne opinion d’eux-mêmes pour ne pas croire qu’une pièce qui les touche, et qui leur donne du plaisir, puisse être absolument contre les règles. » (Préface de Bérénice.)
Quoi qu’il en soit, la scène du chasseur fut faite et apprise en moins de vingt-quatre heures, et le Roi eut le plaisir de la voir dans son cadre à la seconde représentation, qui fut donné à Fontainebleau huit jours après la première. […] Cette espèce d’invention, née du hasard et de la nécessité, eut beaucoup de succès, et Molière, par la suite, en fit usage toutes les fois qu’il reçut du Roi l’ordre d’embellir, par quelque production nouvelle, les fêtes que donnait ce prince, ami des plaisirs magnifiques6. […] La rencontre, si même c’en est une, est à peine digne de remarque : le sujet des Fâcheux n’est rien, et il se trouve partout, puisque chaque pas que nous faisons dans le monde nous fait rencontrer des importuns qui nous détournent de nos affaires ou de nos plaisirs. […] On peut croire que, dans le récit de toutes les merveilles et de tous les plaisirs qui composèrent cette fameuse fête, la comédie des Fâcheux n’est point oubliée. […] On y verra, sans étonnement, mais non pas sans plaisir peut-être, que La Fontaine avait été des premiers à sentir et à reconnaître le talent de Molière.
Le maître aimeroit mieux donner sa leçon en particulier ; mais le pere est curieux d’entendre sa fille, & de procurer ce plaisir à M. […] Voyez ce qu’aujourd’hui votre faute me coûte : J’aurois eu le plaisir de jamais ne vous voir, Si Monsieur dessus moi n’avoit pas tout pouvoir. […] Le commun des hommes jouit des sentiments que la musique fait naître dans son cœur sans en rechercher les causes ; & le plaisir que les amateurs prennent à comparer le rapport des modes avec les situations qu’ils peignent par le son, ne vient qu’après coup ; c’est un plaisir réfléchi qui ne se fait sentir qu’en second. […] Par ce moyen le Lecteur verra une suite d’imitation, & il aura le plaisir de juger par lui-même de la différence prodigieuse qui peut se trouver entre deux imitateurs.
A présent que je n’ai pour moi que mon âge & ma figure, vous me traitez comme un enfant ; mais quand vous aurez entendu dire : Il s’est trouvé à telle affaire, son Régiment a donné dans telle occasion, il s’est distingué, il a pris un poste, il a couru mille dangers : c’est alors que votre petit cœur palpitera de crainte, de plaisir, peut-être d’amour ; que sait-on ? […] Madame, il faut être juste : j’abandonne volontiers tous les cœurs pour le vôtre ; perte ou gain, c’est le sort du jeu, & j’en veux bien courir les risques : mais il y a encore un échange à faire, & en conscience vous ne pouvez pas exiger que je renonce au plaisir. […] Je serois fâché, Monsieur, que leur impertinence m’eût privé du plaisir ... […] Jé mé flatte qu’il vous féra plaisir. […] Seigneur, j’ai appris que vous cherchiez un nombre de gens pour contribuer par leurs talents aux plaisirs de l’Hiver pendant son séjour en France.
On devait se plaire à la peinture d’amours dégagés d’un érotisme grossier, accueillir même l’exagération des plaisirs attachés à des communications purement intellectuelles et morales. […] Rien n’est bon, rien n’est innocent, rien n’est sans danger dans l’ennemi vaincu ; ni ses doctrines, ni ses habitudes morales, ni ses plaisirs intellectuels.
Mais la raison triomphe et, n’en déplaise à Rome, Un acteur aujourd’hui peut rester honnête homme, À ses devoirs chrétiens consacrer ses loisirs Et faire son salut en faisant nos plaisirs. […] … C’est plus, c’est une nation Jalouse de payer dans sa reconnaissance Deux siècles de plaisirs dont tu dotas la France.
Elle leur donne le peu de temps qu’elle a, avec un plaisir qui fait regretter qu’elle n’en ait pas davantage. […] « N’espérez pas de plaisir, dit-elle à son frère, sur le récit de ce voyage, ni sur la citadelle de Tournay.
Pendant le siècle de Louis XIV, elle ne fut en général cultivée et pratiquée que par quelques hommes d’esprit et de plaisir, et elle n’a régné que dans quelques salons suspects de libertinage d’esprit et de mœurs, dans la société du Temple et chez Ninon de Lenclos. […] Ils se sont fait plus de renommée par leur amour des plaisirs, par leurs débauches, leurs goûts aventureux, leur turbulence, leurs vers anacréontiques, que par leur sagesse ou leurs travaux philosophiques ; ils ont eu plus de souci de mettre en pratique la philosophie d’Épicure, ressuscitée par Gassendi, que d’en approfondir la théorie. […] Ainsi Armande dit à Henriette : Songez à prendre goût des plus nobles plaisirs, Et, traitant de mépris les sens et la matière, A l’esprit, comme nous, donnez-vous tout entière… Mariez-vous, ma sœur, à la philosophie.
Aimant à s’égayer par d’utiles loisirs, Louis, qui te devait ses plus nobles plaisirs, Dont l’appui protecteur faisant taire l’envie, Contre elle, tant de fois, a défendu ta vie ; Cet esprit éclairé, ce brillant potentat Qui de l’éclat des arts a reçu tant d’éclat 1; Qui soutint si longtemps le Tartuffe et Molière ; De son siècle, avec peine, obtint qu’un peu de terre Couvrirait par pitié l’honneur du nom français. […] Tu servais à la fois nos plaisirs et ta gloire Quand des mœurs de ton temps tu nous traçais l’histoire ; Quand tes vers, devenus proverbes en naissant, Marquaient le front des sots d’un stigmate cuisant. […] Ami de la raison, soutien de la gaîté, Jamais avec les sots il n’a fait de traité ; Et si de nos plaisirs il était moins avare Leur espèce chez nous redeviendrait plus rare.
Un tel génie devait être content de soi, quand il touchait si admirablement les points où le monde s’imagine que la morale n’a rien à voir, parce que le sens moral du monde est émoussé par la double habitude du plaisir, qu’on croit honnête tant qu’il n’est point scandaleux, et de l’intérêt, qu’on croit permis tant qu’il n’est point criminel. […] Mais, dans tous les plaisirs permis, utiles même, tant qu’ils ne deviennent pas des passions, c’est l’excès seulement que Molière condamne avec une verve sans pareille, en montrant combien deviennent maniaques et ridicules ceux qui, même dans leurs divertissements, se laissent aller au delà de la juste mesure. L’égoïsme, forme plus accentuée et plus basse de l’amour propre, est aussi une des matières universelles de Molière : les pères de l’Etourdi et du Dépit amoureux, égoïstes qui ne songent qu’à leur argent et leur tranquillité168 ; ceux du Mariage forcé et du Mari confondu, égoïstes qui ne songent qu’à se débarrasser de leurs filles169 ; Harpagon, égoïste qui ne songe qu’à ses écus170 ; Arnolphe, égoïste qui ne songe qu’à se fabriquer une femme au gré de son souhait et un nom au gré de son orgueil171 ; don Juan et Tartuffe, égoïstes hardis qui courent au plaisir à travers le crime, l’un suivant ses effrénés caprices, et l’autre avec une prudence raffinée172 ; Chrysale, égoïste timide qui ne songe qu’à sa soupe173 ; Argant, égoïste douillet qui ne songe qu’à sa santé, et déshérite ses enfants pour s’assurer une garde-malade174 ; Philinte même, égoïste discret qui n& ménage les autres que pour n’avoir pas à les combattre175 : la liste en est longue, et comprend plus des trois quarts des personnages de Molière. […] Il ne conçoit ni ne peint l’abstraction romanesque de l’homme qui n’a rien à faire qu’à suivre l’appât du plaisir ou la pente de la sensibilité : ses conceptions, si artistiques qu’elles soient, conservent toujours quelque chose de pratique.
Ce sont des portraits à plaisir, où l’on ne recherche point de ressemblance ; et vous n’avez qu’à suivre les traits d’une imagination qui se donne l’essor et qui souvent laisse le vrai pour attraper le merveilleux. […] Car cette cour pour laquelle il écrit, et pour laquelle il a plaisir à écrire, est celle de Louis XIV, où préside un roi qui connaît la plaisanterie, mais qui ne la veut pas sans quelque apprêt, ni surtout sans quelque choix. […] Quoi de plus naturel à l’homme que de vouloir s’élever au-dessus de ses semblables, si ce n’est de vouloir jouir des plaisirs de la vie ? […] S’il avait pu, dans, sa vingtième année, céder, sans y songer, au simple attrait du plaisir, il avait eu le temps, pendant ces douze ans, de voir, de comparer, de réfléchir. […] et, comme les religions, toutes les disciplines qui ne mettent pas dans la vie même et dans le plaisir de vivre l’objet et le but de la vie ?
— Il poursuit ; il raconte son entreprise ; il veut une moitié qui dépende toute de lui ; celle qu’il a choisie lui inspira de l’amour dès quatre ans ; il l’a achetée de sa mère, une bonne paysanne, qui, dit-il, A s’ôter cette charge eut beaucoup de plaisir. […] AGNÈS Vous me ferez plaisir… Et là-dessus, elle remonte, laissant le parterre en joie et Arnolphe dans le ravissement de son ouvrage. […] Elle raconte tout : le plaisir qu’elle avait de ses compliments et de ses caresses ; elle en est ravie comme d’une découverte ; persuadée d’ailleurs qu’une chose si douce ne saurait être condamnable. […] Autrement dit, l’éducation qu’on leur donne doit-elle avoir en vue leur bonheur à elles-mêmes, ou simplement notre plaisir ? […] La femme d’Arnolphe, en effet, ne saurait lui procurer que le plaisir ; Henriette apportera le bonheur à Clitandre.
Molière n’avait point encore auprès du roi un accès assez libre : de plus, ce n’était pas ce prince qui donnait la fête, c’était Fouquet ; et il fallait ménager au roi le plaisir de la surprise. Cette pièce fit au roi un plaisir extrême, quoique les ballets des intermèdes fussent mal inventés et mal exécutés. […] Les fêtes que Louis XIV donna dans sa jeunesse, méritent d’entrer dans l’histoire de ce monarque, non-seulement par les magnificences singulières, mais encore par le bonheur qu’il eut d’avoir des hommes célèbres en tous genres, qui contribuaient en même temps à ses plaisirs, à la politesse, et à la gloire de la nation. […] Cette pièce réussit beaucoup dans une cour qui ne respirait que la joie, et qui au milieu de tant de plaisirs, ne pouvait critiquer avec sévérité un ouvrage fait à la hâte pour embellir la fête. […] Les fous y étaient aussi à la mode ; chaque prince et chaque grand seigneur même avait son fou ; et les hommes n’ont quitté ce reste de barbarie, qu’à mesure qu’ils ont plus connu les plaisirs de la société et ceux que donnent les beaux-arts.
Il avait alors près de quarante ans, et la vie qu’il avait menée jusque-là, son goût pour le plaisir, le jeu et les voyages, semblaient promettre si peu ce qu’il est devenu, que quelques détails sur sa personne et ses aventures, d’ailleurs curieux par eux-mêmes, ne feront que répandre plus d’intérêt sur la notice de ses ouvrages dramatiques. […] C’est là qu’en mille endroits laissant errer ma vue , Je vois croître à plaisir l’oseille et la laitue ; C’est là que, dans leur temps, des moissons d’artichauts Du jardinier actif secondent les travaux , Et que de champignons une couche voisine Ne fait, quand il me plaît, qu’un saut dans ma cuisine. […] Mais ce contraste divertit, et l’on se prête à l’illusion pour l’intérêt de son plaisir. […] Les scènes épisodiques du Gascon et du tailleur sont dignes du reste pour l’effet comique, et ces sortes de méprises, nées de la ressemblance, sont un fonds si inépuisable, que nous avons au théâtre italien trois pièces sur le même sujet, qui toutes trois sont vues avec plaisir. […] Mais il n’en est pas moins vrai que le Galant Jardinier, le Mari retrouvé, les Trois Cousines, et les Bourgeoises de qualité, seront toujours au nombre de nos petites pièces qu’on revoit avec plaisir.
Pour moi je ne puis assez m’étonner, quand je vois une coquette ramener avant que de s’être justifiée, non pas un amant soumis et languissant, mais un misanthrope, et l’obliger non seulement à la prier de se justifier, mais encore à des protestations d’amour qui n’ont pour but que le bien de l’objet aimé, et cependant demeurer ferme, après l’avoir ramené, et ne le point éclaircir, pour avoir le plaisir de s’applaudir d’un plein triomphe. […] « Son Altesse Royale s’applaudit du choix qu’elle avait fait d’eux, puisque le roi les trouvait capables de contribuer à ses plaisirs, et particulièrement à toutes les belles fêtes qui se faisaient à Versailles, à Saint-Germain, à Fontainebleau et à Chambord, et en même temps ce prince leur donna des marques obligeantes de la continuation de son estime. […] Molière continua de donner plusieurs pièces de théâtres, tant pour les plaisirs du roi que pour les divertissements du public, et s’acquit par là cette haute réputation qui doit éterniser sa mémoire. […] Force masques, non pas célestes, Mais, à ce qu’on écrit, fort lestes, Venants illec montrer leurs nez, Avec plaisir furent lorgnés. […] ……………………………………………………… Quoi qu’il en soit, voyez la pièce, Vous tous citoyens de Lutèce, Vous avouerez, en bonne foi, Que c’est un vrai plaisir de roi.
Ce n’est pas tout ; nous voyons plus clairement encore, que Jupiter, le tout-puissant, reprend la figure d’Amphitrion pour goûter avec Alcmene les plaisirs qui suivent un raccommodement, & qu’ils quittent la scene pour aller signer la paix dans les bras de l’Amour. […] & quel chagrin pour une mere vertueuse qui ayant conduit sa fille au spectacle en croyant lui procurer un plaisir innocent, se voit forcée de rougir doublement à ses côtés ! […] Dès ce moment-là on n’estime plus ni Eraste ni sa sœur, on voit Moncade avec moins de plaisir ; & voilà comme, dans la comédie, la moindre faute en amene nécessairement plusieurs. […] C’est ainsi que la terre avec plaisir rassemble Ces chênes, ces sapins qui s’élevent ensemble.
Ce n’était pas seulement lui qui était dévoré par la passion du théâtre ; la France entière était alors avide de cet amusement, à la fois le plus innocent et le plus instructif des plaisirs. […] On estime un grand nombre d’états qui n’ont d’autre objet que le plaisir ; pourquoi refuser de la considération à une profession laborieuse, dont le but est d’instruire les hommes en les délassant de leurs travaux ? […] Quelques personnes regardent Le Sicilien comme le premier essai d’opéra-comique : les scènes de cet ouvrage sont très bien coupées pour le chant et pour la danse ; les plaisirs et les peines de l’amour s’y trouvent présentés sous le point de vue le plus favorable à la musique. […] Il se présenta une occasion favorable de remplir ses intentions, et le plaisir qu’il avait de faire du bien à ceux qui le méritaient. […] Comme il a beaucoup de feu, et de cette honnête hardiesse nécessaire à l’orateur, il y a du plaisir à l’écouter quand il vient faire le compliment ; et celui dont il sut régaler l’assemblée, à l’ouverture de la troupe du roi (le dimanche 9 juillet 1673), était dans la dernière justesse.
Veut-on que tout un public s’abuse sur ces sortes de choses, et que chacun ne soit pas juge du plaisir qu’il y prend? […] Si les hommes étaient meilleurs, il y aurait moins de plaisir à les observer, et ce plaisir est la grande distraction de sa vieillesse chagrine et morose. […] Pas un seul personnage sur lequel le regard se repose avec plaisir. […] La foule l’entoure et l’anime; elle rit à ses bons mots; elle applaudit à sa gaieté; elle se fait un plaisir délicat de se railler elle-même. […] Puis elle court à d’autres plaisirs, et, quand elle s’est bien réjouie, elle s’endort sur ses lauriers.
Fasse le Ciel qu’Amphitrion vainqueur Avec plaisir soit revu de sa femme, Et que ce jour, favorable à ma flamme, Vous redonne à mes yeux avec le même cœur, Que j’y retrouve autant d’ardeur Que vous en rapporte mon ame ! […] On trouveroit ridicule à Paris qu’un pere ordonnât d’apporter des chaises devant sa porte pour consulter au frais un Docteur sur la maladie de sa fille, & pour faire prendre l’air à la malade ; cela se fait journellement à la campagne : & on le voit, avec plaisir, dans le Médecin malgré lui de Moliere. […] Je veux croire qu’il y a grand plaisir à pousser des soupirs amoureux auprès d’une tombe fraîchement faite, & galamment couverte d’un tendre feuillage ; mais jusqu’ici nos belles dames n’ont pas mis cette galanterie à la mode, & un Auteur ne doit pas brusquer ainsi les mœurs & les coutumes de sa nation, pour présenter un spectacle très désagréable.
& de Mad. de Sotenville, refuse constamment de la laisser rentrer : alors elle feint d’être réduite au désespoir, & de se donner la mort, voulant se ménager le plaisir de faire pendre son époux. […] Ses freres lui ayant conté ce que son mari leur avoit dit, sans oublier le filet, & les coups qu’il lui avoit donnés : Trouvez-vous du plaisir, Monsieur, dit la belle, en se tournant vers son mari, à forger des chimeres pour me déshonorer, en vous déshonorant vous-même ? […] La belle voyant son désordre avec plaisir : Je vois bien, Messieurs, dit-elle à ses freres, qu’il veut m’obliger à vous faire le détail de sa vie.
Hé bien, puisque vous prenez les choses du bon côté, d’honneur, vous aurez de l’argent, quand je devrois vous payer moi-même sur mes menus plaisirs. […] parbleu, ce compliment me donne un extrême plaisir. […] Livrons-nous uniquement au plaisir d’admirer Dufresny dans ses deux dernieres imitations, les seules où nous reconnoissons cet art qu’il avoit, dit-on, pour composer un dessein parfait avec des découpures, des pieces de rapport prises çà & là & réunies, mariées ensuite avec goût : jusqu’à son Dédit, nous ne l’avions que trop vu mutiler des chefs-d’œuvre pour en former des monstres.
Il se joue une partie terrible pour l’un, indifférente pour l’autre ; Alceste y met pour enjeu son cœur, son sang, sa vie, sou âme ; Célimène, une demi-heure de plaisir ou d’ennui. […] Vous mentirez, je ne m’y tromperai pas, et pourtant je vous écouterai avec plaisir. […] Il ne fait pas non plus le mal pour le plaisir de le faire.
Il accompagne tristement Lucrezia dans ses parties de plaisir, refusant de céder la place aux Sigisbés qui entourent la brillante Vénitienne ; payant toutes ses fantaisies, mais incivil et incommode. […] Le génie français dépassait de beaucoup le génie italien ; et celui-ci, réduit à un rôle inférieur, ne fournissait plus, pour ainsi dire, qu’aux menus plaisirs de la cour et de la nation.
Le roi, en 1672, essayait ses premières séductions, et son but était le plaisir. […] Elle promet à Gobelin le plaisir de voir le roi très aimable et très chrétien à la messe, quand il viendra à Versailles ; elle parle de la simplicité de la chambre qu’elle occupe ; mais elle ajoute : « Plût au ciel qu’il y en eut autant dans mon cœur, et que sans compter ce que je n’y connais pas, le n’y découvrisse pas encore des replis qui peuvent gâter ce que je suis ! […] Encore une fois, ce n’est point le mariage qui est la gloire de madame de Maintenon, c’est le désintéressement, c’est le sacrifice de son amour, c’est le vertueux usage de l’empire qu’il lui donnait sur le cœur du roi pour le remettre dans ses devoirs : et c’est à l’honnêteté morale de madame de Maintenon, à celle de sa société tout entière, à la considération et aux aimables qualités qu’elle tenait de ses nobles amies, qu’est due la gloire que j’ai pris plaisir à célébrer. […] Dans cette période de splendeur pour le royaume, les arts y furent rois en honneur et les plaisirs enivraient la cour.
Chacun trouve son plaisir où le lui imposent les éléments instinctifs prédominants de son esprit, c’est-à-dire dans les circonstances qui les flattent et qui les satisfont ; aussi chacun cherche-t-il à faire naître ces circonstances. […] Oui, je ne pus souffrir de les voir si bien ensemble, le dépit alluma mes désirs, et je me figurai un plaisir extrême à pouvoir troubler leur intelligence et rompre cet attachement dont la délicatesse de mon cœur se tenait offensée. […] Non seulement Don Juan éprouve du plaisir à faire le mal, mais encore il éprouve une jouissance à faire commettre le mal par autrui, pour le méchant plaisir de le lui voir commettre. […] Mais lorsqu’il témoigne à Don Juan tout le plaisir qu’il en éprouve, cet incorrigible se hâte de le désabuser: « Non, non ! […] En disant à Arsinoé que si l’on était sage il serait bon de se donner de mutuels avis pour s’éclairer, ce n’est point pour recevoir elle-même de ces avis dont elle ne croit pas avoir besoin, mais pour renouveler à son aise le malin plaisir de sermonner son adversaire et de la désobliger.
J’ai assisté avec la plus scrupuleuse assiduité au spectacle de la nation ; j’ai étudié l’effet que chaque trait, chaque scene, chaque situation & l’ensemble produisoient sur l’esprit des gens de lettres auprès de qui j’avois soin de me placer, sur le parterre & sur les loges ; je me suis bien gardé sur-tout de négliger les représentations qu’on a données gratis pour la populace ; j’ai joui du plaisir de lui voir saisir les véritables beautés, de lui voir distinguer celles qui sont dans la nature, au travers de celles que l’esprit seul enfante, & que l’esprit seul peut appercevoir ; enfin je me suis fait pour moi seul, d’abord, aux dépens des morts & des vivants, une Poétique qui m’a déja valu des encouragements bien flatteurs de la part du public, mais qui seroit encore dans mon porte-feuille, si l’Académie en Corps n’eût daigné m’encourager, & ne m’eût exhorté, devant l’Assemblée la plus brillante, à la soumettre au jugement du Public. […] Indépendamment du mauvais personnage qu’un homme, peu instruit des regles de la comédie, doit faire nécessairement dans un temps où tout le monde parle spectacle, où les cercles, les toilettes, les boudoirs même retentissent des mots pompeux de comédie larmoyante, comédie bourgeoise, comédie sérieuse, haut & bas comique, &c. indépendamment, dis-je, du rôle insipide qu’il joue en se voyant forcé de se taire ou de montrer son ignorance, je crois très agréable pour la propre satisfaction d’un homme, quel qu’il soit, de connoître toutes les finesses d’un art que nous faisons contribuer à notre amusement, puisque notre plaisir suit nécessairement le progrès de nos connoissances. […] Mon ouvrage enfin peut être d’une grande utilité aux Auteurs naissants ; & mon ame s’enivre de plaisir en songeant que je pourrai soulager, aider dans leur travail, des rivaux d’autant plus intéressants pour moi, que je sais combien il faut de courage & de noblesse d’ame pour entrer dans une carriere que l’envie & la jalousie la plus basse assiegent, que l’ignorance tâche de dégrader, qui est semée de dégoûts, de tracasseries, & qui ne conduit jamais à la fortune.
Le scandale du monde est ce qui fait l’offense, Et ce n’est pas pécher que pécher en silence508 ; en vain les raffinées comme Armande trouvent que c’est « jouer un petit personnage » De se claquemurer aux choses du ménage, Et de n’entrevoir point de plaisirs plus touchants Qu’une idole d’époux et des marmots d’enfants509 : — l’homme et la femme ont par nature un penchant qui les porte à s’aimer ; et cet amour peut, doit être satisfait par le mariage, seulement. […] VI, Ce que c’est que les mariages du théâtre : « On commence par se livrer aux impressions de l’amour sensuel ; le remède des réflexions ou du mariage vient trop tard ; déjà le faible du cœur est attaqué, s’il n’est vaincu ; et l’union conjugale, trop grave et trop sérieuse pour passionner un spectateur qui ne cherche que le plaisir, n’est que par façon et pour la forme dans la comédie… Toute comédie, selon l’idée de nos jours, veut inspirer le plaisir d’aimer ; on en regarde les personnages, non pas comme gens qui épousent, mais comme amants ; et c’est amant qu’on veut être, sans songer à ce qu’on pourra devenir après (chap.
Je m’imagine que mon fils & mes domestiques ont bien langui loin de moi, & que mon retour va leur causer un extrême plaisir. […] Le voisin y consent avec grand plaisir. […] Je vois avec plaisir la bonté de ton naturel, & je t’en estime davantage. […] vous ne sauriez me faire un plus grand plaisir. […] Boileau vivoit dans un temps où l’on regardoit encore une dédicace comme un hommage flatteur : le plaisir de voir son nom à la tête d’une Epître, l’auroit-il aveuglé sur les défauts de l’ouvrage ?
Mais si dans la piece de Montfleury, Don Maurice, jeune & brave Espagnol, se charge avec plaisir d’accompagner un homme, est-il dans la nature que Damis, un vieillard tout cassé, accepte un semblable emploi ? […] Don André vante les plaisirs qu’on goûte à séduire plusieurs femmes, à troubler la paix de plusieurs familles. […] Vous me croyez, Monsieur, une femme inutile, Ou très peu disposée à vous faire plaisir : C’est un bien dont il faut malgré vous me saisir. […] Il vous proposa quelques parties de plaisir ? […] La Dame qui le croit, s’empresse de lui donner de l’argent pour avoir le plaisir de le voir repartir bien vîte, & il arrive toujours à Auxerre avec une bourse assez dodue.
Mais on prend plaisir à se chantera soi-même, avec un délicieux plaisir de l’oreille et même de l’esprit, des vers comme ceux-ci : Est-ce que l’on consulte au moment qu’on s’enflamme ? […] A croire que les sots sont ici-bas pour nos menus plaisirs, on devient malicieux, et la malice est l’antichambre de la méchanceté. — Méchant, moi ! […] Veut-on que tout un public s’abuse sur ces sortes de choses et que chacun n’y soit pas juge du plaisir qu’il y prend ? […] Les inclinations naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. […] […] Le moyen de chasser ce qui fait du plaisir ?
C’est une suite de traits dont aucun n’est perdu; celui-ci est pour moi, celui-là est pour mon voisin ; et ce qui prouve le plaisir que procure une imitation parfaite, c’est que mon voisin et moi nous rions du meilleur cœur du monde de nous voir ou sots, ou faibles, ou impertinents, et que nous serions furieux, si on nous disait d’une autre façon la moitié de ce que nous dit Molière. […] Mais quand le plaisir du spectateur n’est pas fondé sur l’intérêt, qu’importe le dénouement ?
Son plaisir en société était la conversation ; le plaisir extraordinaire qu’elle s’accordait, mais dont elle n’abusait pas, c’était le spectacle20 ; alors il n’y avait pas spectacle tous les jours, et l’on n’allait pas à la comédie tous les jours qu’on la jouait.
Il était jeune ; il aimait le plaisir, et il ne voyait pas de si loin. […] Il ne faut pas oublier non plus que, pour le dévot libertin, il n’y a pas de vertu véritable ; il ne voit pas grand mal dans la séduction qu’il médite ; il prête aux autres ses propres désirs ; il suppose que toute femme est prête à accepter le plaisir quand il est facile. […] L’intempérance de l’esprit n’est pas moins flatteuse : comme l’autre, elle se fait des plaisirs cachés et s’irrite par la défense… La liberté de penser tout ce qu’on veut fait qu’on croit respirer un air nouveau. […] Un instant de pitié pour un misérable et le plaisir de braver encore Dieu dans la charité même n’ont rien de contraire au caractère général du personnage. Le libertin n’est pas avare ; il est indifférent à l’argent ; il donne facilement, et sa bonté indifférente n’a rien qui puisse racheter le bas plaisir qu’il se promettait en forçant un misérable à violer sa conscience et à avouer son hypocrisie.
Je suppose, qu’avant de lire la pièce française, on sera bien aise de voir un précis de l’italienne, ne fût-ce que pour avoir le plaisir de prendre notre auteur sur le fait, à mesure qu’il tentera quelques conquêtes sur les étrangers. […] Le Mariage forcé a été ordonné et fait pour un ballet où le roi dansa dans une fête intitulée Les Plaisirs de l’île enchantée, et qui dura sept jours. […] S’il paraît l’avoir moins consacrée à sa gloire qu’à sa tendre amitié pour ses camarades, et à sa reconnaissance pour son roi, rendons justice aux motifs qui ont dicté les deux pièces, mais sans renoncer au plaisir d’y trouver le grand homme. […] , et à la suite duquel les convives, pris de vin, résolurent d’aller se jeter dans la rivière, autant pour se débarrasser, disaient-ils, d’une vie toujours orageuse, que pour avoir le plaisir de mourir ensemble. […] Préville remplissait merveilleusement le rôle de Bourgeois gentilhomme, il y était gauche de corps et d’esprit, d’un bout à l’autre, mais gauche à faire plaisir, et voilà le difficile.
il le fait, lui, si rempli de plaisirs Que de se marier il donne des désirs. […] Le moyen de chasser ce qui nous fait plaisir! […] J’aurai le plaisir de perdre mon procès. […] Ne conviendrez-vous pas qu’il vaut encore mieux empêcher une injustice, si l’on peut, que d’avoir le plaisir de perdre son procès? […] Celui qui le premier a mis dans le dialogue en vers autant de naturel qu’il pourrait y en avoir en prose a résolu la question, puisque, sans rien ôter à la vérité, il a donné un plaisir de plus, et cet homme-là, c’est Molière.
C’est différent : au moins, vous avez une excuse ; Pleurez ; mais, croyez-moi, le rire vous va mieux : Laissez à Melpomène injurier les dieux, Apostropher le ciel d’une plainte importune, Quereller les destins et braver la fortune ; Vous, peignez la nature et l’homme tel qu’il est ; Qu’il s’amuse en voyant son bizarre portrait ; Tachez de corriger, mais surtout faites rire ; Rien ne vaut la gaîté ; l’espèce humaine en tire Des plaisirs toujours sûrs ; bien souvent la santé, Et presque autant de biens que de la Faculté L’on peut tirer de maux ; c’est dire assez, sans doute. […] En ce cas, je n’ai plus rien à dire, Et vous avez raison, vous, de faire pleurer ; Puis, c’est votre plaisir, il faut vous y livrer.
Tant mieux, c’est ce que je demande, et je serais fâché d’être sage aux yeux des hommes. » Il lui fait dire : « J’aurai le plaisir de perdre mon procès ; je voudrais, m’en coûtât-il grand’chose, pour la beauté du fait, avoir perdu ma cause. » C’est-à-dire je voudrais avoir le plaisir de mépriser mes juges. […] On ne les suit plus qu’avec le seul plaisir esthétique que peuvent donner les produits d’une imagination débridée. […] Les tours les plus punissables y sont rassemblés comme à plaisir avec un enjouement qui fait passer tout cela pour des gentillesses. […] La femme doit être un objet de plaisir pour son mari ; elle doit être un « harem » pour son mari ; mais il ne s’agit pas et il ne faut point qu’elle soit un objet de plaisir et un harem pour d’autres que pour son mari, comme l’est une grande musicienne, une brillante chanteuse, une danseuse raffinée. […] Mieux elles verront ces bruyants plaisirs, plus tôt elles en seront dégoûtées.
Le mariage de Marie avec le prince était le premier fruit de l’école de séduction et de plaisir ouverte à la cour durant la minorité de Louis XIV, et où le jeune roi avait été presque entraîné à épouser Hortense Mancini, la même qui depuis fut la connétable Colonna, et courut le monde en chercheuse d’aventures, avec sa sœur la duchesse Mazarin, comme elle galante sans retenue. […] Il arrive une autre fois qu’une précieuse pleure un ami, et se met tout-à-coup à disserter sur la douleur ; elle prétend que la douleur doit avoir pour objet de faire revivre le plaisir qu’on a goûté avec le défunt. […] Au mot Morale, qu’elles ont pour maximes de s’interdire tous les dehors de l’amour vulgaire, et de rechercher J’estime par la beauté des ouvrages ou des discours ; de se donner aux plaisirs d’imagination, la réalité seule pouvant blesser la morale. […] Ils corrigent les vers médiocres, et font à ces dames des réputations d’esprit. » « Une précieuse », dit-il ailleurs, « doit avoir l’adresse de donner du prix à ses sentiments, de la réputation à ses ouvrages, d’assurer approbation à ses railleries, force à ses sévérités. » Les auteurs soudoyés étaient les ilotes de la république ; aussi se rencontrait-il des précieuses de mauvais caractère qui, oubliant la politique du corps, se donnaient habituellement le plaisir de mettre les auteurs et les beaux-esprits de ce genre à la gêne, et de mortifier leur vanité ; et elles se vantaient de cette habitude : mais leur sévérité, dit de Pure, était combattue par d’autres précieuses. […] J’aimerais à savoir que madame de Sévigné brodait ou faisait de la tapisserie, Il y avait sûrement de l’élégance et de l’esprit dans ses dessins, et le fac simile d’un fauteuil de son aiguille me ferait autant de plaisir que le fac simile d’une de ses lettres.
On ne trouvera pas moins de plaisir dans la lecture de l’article suivant, où nous parlons des acteurs et des actrices du Marais et du Palais-Royal. […] « Les fous y étaient aussi à la mode, chaque prince, et chaque grand seigneur même, avait son fou, et les hommes n’ont quitté ce reste de barbarie qu’à mesure qu’ils ont plus connu les plaisirs de la société, et ceux que donnent les beaux-arts. […] On retrouva, dans le rôle de Béline, un caractère malheureusement trop ordinaire dans la vie civile ; et l’on vit avec plaisir la sensible Angélique oublier les intérêts de sa passion pour ne voir, dans son père mort, que l’objet de sa douleur et de ses regrets. […] Que Molière en prenne à la Cour, s’il veut me faire plaisir.” […] Le roi n’avait point parlé à la première représentation de cette pièce, mais à la seconde qui se donna à Saint-Cloud, Sa Majesté dit à Molière que la première fois elle avait dans l’esprit autre chose, qui l’avait empêché d’observer la pièce, mais qu’elle était très bonne, et qu’elle lui avait fait beaucoup de plaisir.
Un flatteur crut faire plaisir au dernier, après la première représentation, en lui disant : la pièce est tombée ; rien n’est si froid : vous pouvez m’en croire.
Le Malade imaginaire Ne saurait l’avoir fait mourir ; C’est un tour qu’il joue à plaisir, Car il aimait à contrefaire.
Us n’entendent pas malice à ce qu’ils disent ; c’est de bonne foi qu’ils se fâchent et qu’ils grondent : s’ils sont réjouissants, c’est contre leur gré, ce n’est ni pour leur plaisir, ni pour le nôtre. […] J’aurais peint avec plaisir le tableau dont je viens de donner une esquisse légère ; mais je ne dois pas reculer volontairement et sans nécessité les limites d’un sujet déjà bien étendu pour mes forces. […] Mais, pour la gloire et les plaisirs de la France, une vocation plus réelle l’entraîna vers le théâtre. […] Ô célestes plaisirs ! […] Pierre Boileau Puimorin, frère puîné de Despréaux, était homme d’esprit et fort ami du plaisir.
Entendre un philosophe parler littérature est l’un des plus grands plaisirs de l’esprit que je connaisse, et c’est une fête que vous m’avez donnée à Sainte-Barbe, pendant un an, toutes les semaines, à votre conférence du mercredi, lorsque je préparais mes examens de licence.
C’est un plaisir que de l’entendre raisonner sur les horribles agitations d’un certain pays qu’elle connaît bien… (la cour)… c’est une plaisante chose que de l’entendre causer sur tout cela… Nous parlons très souvent de vous. […] Mais le ridicule d’étaler de la science ne pouvait être assez général pour être connu du public, pour le blesser et lui causer du plaisir sur la scène.
Le contemplateur Molière, qui avait été témoin de la scène, en conçut l’idée de cette ingénieuse farce, qui eut le plus grand succès, et qu’on voit encore tous les jours avec le plaisir le plus vif.
Tous les spectateurs furent révoltés de cette grossièreté ; au lieu qu’à la seconde représentation, on entendit, avec plaisir, allez, monsieur, on voit bien que vous n’avez pas accoutumé de parler à des visages.
La fable seule est espagnole, le nombre des conquêtes de don Juan et le châtiment épouvantable de sa vie indigne ; mais l’homme est un fils de famille du dix-septième siècle, riche, égoïste, sans ombre de principes que son plaisir ; un de ces esprits forts du grand monde auxquels La Bruyère n’a pas craint de consacrer un chapitre entier, le plus solide de son œuvre. […] Il faut remarquer que l’archevêque de Paris et Bourdaloue ont pris l’un et l’autre ces idées et même ces expressions dans la relation intitulée les Plaisirs de l’Ile enchantée, Paris, 1665 : « Le roi connut tant de conformité entre ceux qu’une véritable dévotion met dans le chemin du ciel et ceux qu’une vaine ostentation de bonnes œuvres n’empêche pas d’en commettre de mauvaises, que son extrême délicatesse pour les choses de la religion ne put souffrir celte ressemblance du vice avec la vertu qui pouvoient être pris l’un pour l’autre, et quoique l’on ne doutât pas des bonnes intentions de l’auteur, il défendit pourtant celte comédie en public, et se priva soi-même de ce plaisir pour n’en pas laisser abuser à d’autres moins capables d’en faire un juste discernement. » Voir J.
La Fontaine, entraîné par son goût pour le plaisir, suivait le torrent ; et cependant il avait déjà quelques pressentiments du nouveau système de vie qu’il devait professer plutôt qu’embrasser deux ans plus tard, système dont il reconnut la convenance quand il fut élu à l’Académie, et que madame de La Sablière se livra sans partage à la vie pieuse. […] Il avait été frappé du plaisir qu’elle avoue avoir éprouvé à la lecture d’une critique de Bérénice, et n’avait pas remarqué que ce qu’elle appelle la folle passion de cette pièce lui déplaisait non seulement par sa folie, mais aussi parce que Bérénice rappelait cette Marie Mancini, nièce de Mazarin, que Louis XIV avait voulu épouser, et qui était odieuse à la société fréquentée par madame de Sévigné, Il n’avait pas lu ce qu’elle dit de Bajazet : La pièce m’a paru belle ; Bajazet est beau, mais Racine n’ira pas plus loin qu’Andromaque. […] On voit dans une lettre de madame de Sévigné du 9 mars 1672, à sa fille, au sujet de cette pièce des Femmes savantes, qu’on nous assure avoir été faite jour lui donner une petite correction, ainsi qu’à madame de La Fayette, qu’elle avait ménagé au cardinal de Retz, retenu chez lui par la goutte, le plaisir d’en entendre la lecture de la bouche de Molière.
On le suivra avec plaisir au milieu de la société, où il épie les ridicules pour les mettre en scène, et on le verra avec peine, dans l’intérieur de sa maison, tourmenté par une femme acariâtre et galante en même temps, qui jeta le dégoût et l’amertume sur ses jours, et les abrégea.