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24. (1825) Notices des œuvres de Molière (IX) : La Comtesse d’Escarbagnas ; Les Femmes savantes ; Le Malade imaginaire pp. 53-492

Chamfort a dit quelque part : « C’est une chose remarquable que Molière, qui n’épargnait rien, n’a pas lancé un seul trait contre les gens de finance. […] Il semblait ne diriger ses traits que contre leurs grossières et maladroites imitatrices, en faisant de celles-ci une espèce particulière qu’il avait appelée les précieuses ridicules, comme si cette qualification n’eût pas dû appartenir au genre entier. […] Lysidas, auteur vain et jaloux, dont la peinture a également fourni quelques traits pour celle de Trissotin. […] On parle de contraste : en est-il un plus vrai, mieux ménagé, plus suivi, et toutefois moins tranchant et moins symétrique, que celui de Chrysale et de Clitandre, dont je viens de marquer les principaux traits ? […] Procurer d’un même coup, et par le plus simple moyen, la manifestation du vice et celle de la vertu, la punition de l’un et le triomphe de l’autre, c’est un trait, de génie où Molière apparaît tout entier.

25. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [73, p. 108] »

[73, p. 108] Molière ne traitait point de caractères, il ne plaçait aucuns traits ; qu’il n’eût des vues fixes. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage, mais Molière avait son original, il voulut le mettre sur le théâtre.

26. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. Pieces intriguées par un événement ignoré de la plupart des Acteurs. » pp. 192-198

Je ne puis rappeller ce trait qu’avec transport. […] Emilie est aimable, & je lui rends justice : Mais j’admire ses traits, sans en être touché ». […] Le trait est sans égal.

27. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XL. Du dénouement des Pieces à caractere. » pp. 469-474

de l’Empyrée fasse le dénouement, il s’en faut bien qu’en lisant la lettre qui prouve sa générosité & qui dénoue la piece, on s’écrie : Voilà bien le trait d’un poëte ! […] « Aux traits dont vous peignez la charmante Lucile, « Je ne suis pas surpris de l’amour de mon fils. […] Nous avons dit, dans le Chapitre de l’exposition des caracteres, que le héros de la piece devoit toujours débuter par un trait bien marqué ; nous ajouterons ici qu’il doit en faire autant en quittant le théâtre, afin de laisser son caractere gravé dans la mémoire du spectateur.

28. (1734) Mémoires sur la vie et les ouvrages de Molière (Œuvres de Molière, éd. Joly) [graphies originales] pp. -

Il n’appella point du jugement du public ; il ne fit pas même imprimer sa piéce, quoiqu’il y eût des traits qu’il jugeât dignes d’être insérés depuis dans d’autres comédies, & sur tout dans le misantrope. […] Les traits naïfs d’Agnès ingénuë & spirituelle, qui ne pêche contre les bienséances, que parce qu’Arnolphe les lui a laissé ignorer, ne sont pas les mêmes que ceux d’Isabelle fine & déliée, qui n’ont d’autre principe que la contrainte où la tient son tuteur. […] Ce sont là de ces traits où l’art seul ne peut rien, si l’on n’est inspiré par le génie, & guidé par le bon goût. […] La proposition faite à l’avare d’épouser sa fille sans dot, l’enlévement de la cassette, le désespoir du vieillard volé, sa méprise à l’égard de l’amant de sa fille qu’il croit être le voleur de son trésor, l’équivoque de la cassette, sont les traits principaux que Moliere a puisés dans Plaute. […] La fécondité de Moliere est encore plus sensible dans les sujets qu’il a tirés des auteurs anciens & modernes, ou dans les traits qu’il a empruntés d’eux.

29. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IX. M. PALISSOT. » pp. 297-316

Il dévoile à ce gredin le mépris qu’il a pour Cidalise, l’adresse qu’ont les Philosophes d’insérer des traits hardis dans les ouvrages qu’ils dictent à la vieille folle, & qu’elle croit composer. […] La piece finit par ces deux vers : Des sages de nos jours nous distinguons les traits : Nous démasquons les faux, & respectons les vrais. […] Le héros des Femmes Savantes & celui des Philosophes seroient, je pense, tout-à-fait ressemblants, si Valere n’avoit en même temps & les traits de Trissotin & ceux du Méchant. […] Il me donne en passant une atteinte légere Parmi plusieurs Auteurs qu’au Palais on révere : Mais jamais dans ses vers il ne te laisse en paix, Et l’on t’y voit par-tout être en bute à ses traits. […] Le Lecteur impatienté lui dit : Voilà qui est bien, vous avez senti le trait lâché contre les meres dénaturées, mais vous avez assez ri.

30. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

L’orgueil étant désintéressé, elle se laissa aller à ce que pensait et pratiquait le couvent, soit par cette disposition à sympathiser avec des opinions générales, disposition qui formait un des traits de son caractère, soit par cette ambition d’estime, d’affection, de considération qui lui était propre aussi, et qui commençait à se développer en elle. […] Ce fut alors que le désir de la conserver et de retendre devint en elle une passion qui a formé le trait saillant de son caractère. […] Elle avait tous les traits du visage agréables et surtout la bouche, des veux et un regard enchanteurs, une taille élégante, qu’elle conserva belle et noble jusqu’à cinquante ans. […] À sa beauté elle joignait la grâce qui faisait passer dans ses traits, dans ses mouvements, dans sa parole quelque chose de l’âme la plus douce, la plus sensible, et de l’esprit le plus sage et le plus délié. […] Si, par la méthode que j’ai suivie, j’ai découvert une autre madame de Maintenon que celle dont nous avons été entretenus jusqu’à présent, si seulement je puis faire remarquer quelques traits échappés aux recherches et à la sagacité d’un biographe tel que M.

31. (1848) De l’influence des mœurs sur la comédie pp. 1-221

Au milieu des graves événements et des péripéties sanglantes de ces temps funestes, jurait-elle pu conserver aucuns traits de sa physionomie ? […] Il est pur, élégant, élevé, plein d’énergie et de passion; il abonde, en outre, en traits heureux, fins, piquants et comiques. […] C’est à vous ; et vos ris complaisants Tirent de son esprit tous ces traits médisants. […] Si cela est, l’acteur, pour mieux entrer dans sa pensée, ne doit-il pas en adoucir les traits plutôt que de les outrer? […] C’est que, en effet, malgré ses profondes et constantes études, toujours quelque trait, quelque nuance, quelque intention échappe à son intelligence.

32. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

Oublierons-nous, dans les Femmes savantes, un de ces traits qui confondent? […] Il y a pourtant clans ce dernier un trait d’humeur et de caractère que Molière a jugé assez bon pour se l’approprier. […] Est-ce autre chose, dans cette occasion, qu’un trait d’humeur d’un vieillard jaloux et contrarié? […] A peine Orgon a-t-il parlé, qu’il se peint tout entier par un de ces traits qui ne sont qu’à Molière. […] Il était d’un caractère doux et de mœurs pures : on raconte de lui des traits de bonté.

33. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [50, p. 83-85] »

Avant qu’un peu de terre, obtenu par prière, Pour jamais sous la tombe eut enfermé Molière, Mille de ces beaux traits, aujourd’hui si vantés, Furent des sots esprits, à nos yeux, rebutés. […] L’un, défenseur zélé des bigots mis en jeu, Pour prix de ses bons mots, le condamnait au feu ; L’autre, fougueux marquis, lui déclarant la guerre, Voulait venger la cour immolée au parterre ; Mais sitôt que, d’un trait de ses fatales mains, La parque l’eut rayé du nombre des humains, On reconnut le prix de sa muse éclipsée.

34. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VI. Des Pieces à scenes détachées, dans lesquelles une Divinité préside. » pp. 61-74

Feuilletez avec soin tous nos Auteurs fameux ; Mes traits les plus frappants sont tirés d’après eux. […] Ce bel ouvrage d’esprit  Bien écrit, Où les plus beaux traits pétillent, Est semblable au casaquin  D’Arlequin, Où toutes les couleurs brillent. […]  Le Sultan avoit de l’esprit ; Il sentit bien le trait, & le mit à profit. […]  Te voilà jeune, fraîche, belle ;  Ton amant est tendre & fidele :  Et loin d’avoir cette douceur Qu’annonce de tes traits la grace naturelle,  Tu n’as qu’amertume & qu’aigreur.

35. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVI. Des Caracteres nationaux. » pp. 268-283

Nous ne serions pas aussi frappés que nous le sommes de tous les traits qui peignent l’Avare, si Harpagon exerçoit sa lésine sur la dépense d’une maison réglée suivant l’économie des maisons d’Italie. […] Un fiel bien ménagé coule de veine en veine, Part du cœur, y retourne, ou fait filer la haine A longs traits, avec art, comme l’amour enfin, Chez les femmes sur-tout, où le plaisir malin Prend racine, s’étend : la terre en est si bonne ! […] Ce trait de mon frere est indigne. […] Ils ont une ame magnanime, De l’honneur, des vertus, & je sais de leurs traits...

36. (1886) Molière, l’homme et le comédien (Revue des deux mondes) pp. 796-834

Non pas, bien entendu, d’une laideur déplaisante : des traits que le génie éclaire peuvent être irréguliers, la flamme intérieure leur donne une beauté d’ordre supérieur. […] On comprend qu’un homme ainsi bâti n’ait jamais pu s’imposer au public dans les amoureux tragiques ; mais, mieux fait et avec des traits plus fins, aurait-il réussi complètement dans la comédie et dans la farce ? […] Cette toile ne peut avoir été peinte qu’entre 1668 et 1672, lorsque la maladie dont souffrait alors Molière et un labeur toujours plus écrasant avaient ruiné ses forces et altéré profondément ses traits. […] Ceux de Molière, par la synthèse de leurs traits divers, représenteraient assez bien son propre caractère. […] On a reconnu les traits essentiels de cette morale des honnêtes gens que Sainte-Beuve a définie dans Port-Royal avec une si pénétrante justesse.

37. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Il consiste, comme nous l’avons vu tout à l’heure, dans les ridicules ignorés ou caches, et j’ai dit que ces ridicules ne doivent se trahir que par des traits presque imperceptibles. […] Il n’a emprunté à Plaute que quelques scènes et quelques traits. […] Mais le comique avoué égaye à la fois les spectateurs et le personnage, et Alceste a le front si morose, cinq actes durant, que tous les spectateurs contractent leurs traits par sympathie. […] Ne vous fâchez donc point : plus vous serez mutins, Plus vous me fournirez matière aux traits malins. […] Taschereau, « Ce petit trait d’histoire littéraire est original, mais controuvé.

38. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLIII. Du But Moral. Philosophie de Regnard comparée à celle de Moliere. » pp. 504-548

Hé bien, votre satyre S’exerce-t-elle assez d’un trait envenimé ? […] Alors elles ne méritent que quelques traits décochés en passant. […] Ce sont des peintures en pastel dans lesquelles on peut aisément substituer un trait à un autre, témoin le même Auteur. […] A ces traits on reconnoît Regnard : nous allons jetter un coup d’œil rapide sur chacun de ses ouvrages. […] Il faudroit transcrire toute la piece, si nous voulions rapporter les traits éloquents de cet ouvrage.

39. (1882) Molière (Études littéraires, extrait) pp. 384-490

Ce souci des mœurs s’accuse également dans les traits dirigés contre les marquis. […] Voilà le trait qui l’éclaire enfin ! […] Il lui arrive de forcer la couleur et de pousser le trait à outrance. […] Ajoutez à ce trait l’expérience personnelle des passions. […] Tous les mots qui expriment cette intention sont attendus comme des traits de nature.

40. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXIII. Examen de quelques Caracteres. » pp. 350-377

Les petites simagrées & les affectations d’un pareil original figureroient, je crois, très mal à côté des traits mâles & vigoureux que Moliere leur a abandonnés. […] Aussi l’Auteur, content d’avoir ramassé ces différents traits, qui sont en même temps comiques & moraux, qui peuvent lui fournir cinq grands actes, s’empresse de les mettre à leur place. […] Tous les traits avec lesquels nous l’avons caractérisé avant que d’extraire l’Important, servent encore dans la piece de Brueys. […] Il est d’une humeur libre & gaie,   Mais je dis d’une gaieté vraie ; Malin, railleur, aimant les traits plaisants. […] Voilà certainement plusieurs traits qui caractérisent bien la défiance, & qu’un Auteur ne pourroit que copier pour en faire un second portrait bien ressemblant.

41. (1852) Molière, élève de Gassendi (Revue du Lyonnais) pp. 370-382

On voit, dit Sorbière, autre disciple de Gassendi, les traits d’une belle philosophie dans les comédies de Molière. […] « C’est qu’il s’attache aveuglément aux opinions de nos anciens, et que jamais il n’a voulu comprendre ni écouter les raisons et les expériences des prétendues découvertes de notre siècle, touchant la circulation du sang et autres opinions de même farine. » Voilà les traits comiques lancés contre le péripatétisme scolastique, voyons maintenant ceux qu’il lance contre Descartes et son école. […] Cependant s’il ne tourne pas la vertu en ridicule, il lui oppose souvent, en lui donnant l’avantage, une certaine sagesse où nous reconnaissons, à plus d’un trait, l’esprit de la morale de Gassendi, c’est-à-dire de la morale de la prudence et de l’intérêt bien entendu. […] De là un caractère de Molière en opposition avec le spiritualisme cartésien de la plupart des grands écrivains du siècle de Louis XI v, de là l’origine et l’explication d’un certain nombre de traits comiques répandus dans quelques-unes de ses pièces, de là quelques maximes de sagesse plus en harmonie avec la morale de l’intérêt bien entendu qu’avec celle ’ du devoir.

42. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « [Introduction] » pp. 1-4

Convenons qu’il ne sera question ici que de la belle nature, telle que l’a imité Moliere dans les parties & l’ensemble de ses meilleures pieces ; telle enfin que doit la voir un Philosophe qui se propose de corriger & de faire rire les hommes en leur peignant au naturel leurs gestes, leurs traits, leurs travers, leurs ridicules, leurs vices, enfin toutes les vérités que leur amour-propre leur déguise, ou qu’il tient cachées sous les replis du cœur humain. M. le Chancelier d’Aguesseau compare l’imitation qui ramasse plusieurs traits épars dans la nature à une lunette d’approche.

43. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [56, p. 89-93] »

Enfin s’il s’agissait de se faire l’idée d’une comédie parfaite, il me semble qu’aucun des comiques anciens ne fournirait autant de traits que Molière ; il a ses défauts, j’en conviens ; par exemple, il n’est pas souvent heureux dans ses dénouements ; mais la perfection de cette partie est-elle aussi essentielle à l’action comique, surtout quand c’est une pièce de caractère, qu’elle l’est à l’action tragique ? […] Mais qu’Harpagon, avare, cède sa maîtresse pour avoir sa cassette, ce n’est qu’un trait d’avarice de plus, sans lequel toute la comédie ne laisserait pas de subsister.

44. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE PREMIER. Regnard imitateur comparé avec la Bruyere, Plaute, & la nature. » pp. 5-50

Outre les traits que j’ai rapportés, Regnard en a pris encore plusieurs chez la Bruyere, qu’il a mis tant en action qu’en récit ; mais nous eussions été trop minutieux, si nous nous fussions arrêtés sur tous. […] Comment Regnard a-t-il donc pu imaginer d’établir l’intrigue d’une piece sur un caractere qui, tout différent des autres & de ce qu’il faut pour la comédie, devient invraisemblable à mesure qu’il accumule ses traits ? Comment Regnard a-t-il pu surtout imaginer de faire naître & ressortir ces mêmes traits par des moyens tout-à-fait contre nature ? […] Regnard ne s’est tiré d’affaire qu’au moyen de certains traits plaisants, & par les jeux comiques de cette piece ». […] Quoi qu’il en soit, Crispin, commençant à se léguer une somme, est très plaisant5, & c’est peut-être le seul trait naturel qui soit dans la piece.

45. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIX. De la Gradation. » pp. 342-351

D’un autre côté Lisette assure à la jeune veuve que Valere est épris de ses charmes, & le lui prouve par un des traits le plus ingénieux qu’il y ait dans tous les théâtres. […] J’aime A voir adroitement peindre une flamme extrême, A la faveur du tour & des traits délicats Donner à deviner ce qu’on n’avoueroit pas. […] Ma foi, ce dernier trait lui seul est impayable.

46. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXIV. » pp. 489-499

De quel traits, ma beauté, le Ciel t’a-t-il pourvue ! […] La nuit je n’en dors point ; je n’entends que clameur, Qui d’un trait de pitié s’efforce de m’atteindre : Voyez, ma chere sœur, suis-je pas bien à plaindre ? […] Ceci n’est point du tout un trait d’esprit, Madame, Et c’est un pur aveu de ce que j’ai dans l’ame.

47. (1802) Études sur Molière pp. -355

elle pétille de tant de traits ! […] Avant de déterminer la manière de les rendre, ne serait-il pas à propos de jeter un coup d’œil sur leurs traits les plus frappants ? […] Il n’est pas de nation qui n’ait sur son théâtre un Misanthrope peint à plus grands traits que le nôtre. […] Quel trait profond de caractère ! […] N’a-t-il pas fondu, dans ses rôles de raisonneurs, les traits les plus philosophiques de Montaigne ?

48. (1819) Introduction aux œuvres de Molière pp. -

Molière ne pouvait manquer de mettre en action ces traits d’observation générale. […] Us n’aiguisent pas des traits d’esprit ; ils laissent échapper des mots de caractère. […] Les traits malins, les bons mots éblouissent d’abord ; mais leur charme, qui naît de la surprise, meurt avec elle. […] Oui, sans doute, il a souvent renforcé et multiplié les traits dont ses caractères sont formés. […] Le trait, en effet, leur convient à tous deux ; mais leur taciturnité n’avait ni le même caractère, ni le même principe.

49. (1877) Molière et Bourdaloue pp. 2-269

Les traits qui peignent au vif les misères, les déconvenues, les inassouvissements de l’ambition y abondent. […] » Plusieurs traits dans cette page nous rappellent Molière et nous ramènent à lui. […] Un seul trait en fera juger. […] Mais d’un autre côté je ne trouve pas que ce coup de génie soit un trait de caractère. […] C’est le dernier trait où l’on reconnaît la nature relativement honnête de la coquetterie.

50. (1686) MDXX. M. de Molière (Jugements des savants) « M. DXX. M. DE MOLIÈRE » pp. 110-125

Ce même père prétend que Molière est le seul parmi nous qui ait découvert ces traits de la Nature qui la distinguent et qui la font connaître. […] Mille de ces beaux traits aujourd’hui si vantés Furent des sots esprits à nos yeux rebutés. […] L’autre fougueux Marquis lui déclarant la guerre Voulait venger la Cour immolée au Parterre, Mais sitôt que d’un trait de ses fatales mains La Parque l’eût rayé du nombre des Humains, On reconnut le prix de sa Muse éclipsée.

51. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE X. De la Diction. » pp. 178-203

Hautement d’un chacun elles blâment la vie, Non point par charité, mais par un trait d’envie Qui ne sauroit souffrir qu’un autre ait les plaisirs Dont le penchant de l’âge a sevré leurs desirs. […] Le même Prince voyoit jouer le ** par ses comédiens ; les beaux esprits qui l’entouroient sourioient à tous les traits fins, délicats, à toutes les épigrammes dont cette piece fourmille. […] Ce qu’on appelle trait d’esprit, défigure les caracteres, en affoiblit le ridicule, & substitue à des traits naturels, si essentiels pourtant, des bons mots, des pensées brillantes, qui fixent l’attention du spectateur à tout autre objet que l’action de la comédie ; aussi les Auteurs se dispensent-ils d’en mettre. […] A trois longueurs de trait, tayaut ; voilà d’abord Le cerf donné aux chiens.

52. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXV. » pp. 500-533

Il prend soin de les arrêter, ces larmes qu’il trouve si belles ; & l’aimable bergere prend soin en même temps de le remercier de son léger service, mais d’une maniere si charmante, si tendre & si passionnée, que le berger n’y peut résister ; & chaque mot, chaque regard, est un trait plein de flamme dont son cœur se sent pénétré. […] lisons la scene IX, acte III du Bourgeois Gentilhomme : l’Auteur a non seulement imité les caprices que sa femme lui faisoit essuyer, les brouilleries, les tendres dépits, les raccommodements qui s’ensuivoient ; il y copie la taille, la façon de parler, la conversation, les manieres, les traits d’une épouse qu’il adora toujours, & qui, par des infidélités redoublées, sembla s’étudier à prouver que le génie n’est pas le mérite le plus estimé des femmes, ou du moins le plus propre à les fixer. […] Disons mieux, il a saisi les traits de la nature épars dans les écrits des hommes, dans leur conduite, dans leurs propos, dans leurs regards, dans les moindres de leurs gestes, & n’a réellement imité qu’elle. […] Il faut qu’elle-même choisisse son peintre, qu’elle le doue de tous les talents nécessaires, qu’elle le mene sans cesse par la main, qu’elle l’éclaire sur tout ce qui se présente à lui ; qu’elle lui indique, par le moyen du goût, l’attitude, les traits, les couleurs qui rendront son portrait aussi frappant qu’agréable : sans cela il ouvrira de grands yeux sans voir, & les beautés les plus séduisantes passeront devant lui sans qu’il les saisisse. […] Nous n’avons qu’à nous rappeller les morceaux de ses romans d’après lesquels Moliere a fait la reconnoissance de Pourceaugnac & d’Eraste, la brouillerie & le raccommodement de Mariane & de Valere dans l’Imposteur ; le trait d’hypocrisie employé par Tartufe pour se blanchir de l’accusation de Damis : ces différentes scenes ne sont-elles pas en entier dans les Hypocrites, & Ne pas croire ce qu’on voit ?

53. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Nous allons donc, en premier lieu, chercher à déterminer les traits caractéristiques du fondateur de la comédie française, et nous donnerons ensuite un court exposé des travaux de ses successeurs. […] Molière n’en a emprunté que quelques scènes et quelques traits, et le plan général de sa pièce est entièrement différent. […] Ce trait, du genre d’Aristophane, bien rendu par l’acteur, produit un grand effet, et nous pouvons juger par là de la force comique du poète grec. […] Plusieurs vers de cette pièce sont à la fois des saillies spirituelles et des traits de caractères ; d’autres plaisanteries tiennent à cette gaîté sans but, véritable inspiration du génie comique. […] Il peut souvent y avoir un trait d’esprit jusque dans le choix d’un air, ou dans une allusion à ses anciennes paroles.

54. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Beau trait de Boursault envers Boileau. […] quel est le cœur assez glacé pour y trouver un trait à reprendre, un mot à blâmer ? […] D’aucun trait plus galant se peut-on souvenir ? […] » Le trait peint son cœur, l’exclamation son génie. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage.

55. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. Regnard imitateur de Moliere. » pp. 51-80

Ramassons quelques traits épars. […] Ce trait seul vaut toute la scene, parcequ’il peint le peu de valeur de l’art par la misere de celui qui le montre. […] Le plaisant de ces deux traits naît du contraste qui se trouve entre la situation malheureuse des deux originaux, & les faveurs de la fortune dont ils prétendent disposer. […] Griffon est usurier, il trafique avec des courtiers ; mais il dépense de l’argent pour faire donner une sérénade à sa maîtresse : ce trait seul, qui jure avec son caractere, le place bien loin de son modele. […] Mais Regnard pillant Moliere le maître de son art, quand il est à peine dans le tombeau ; Regnard voulant s’approprier les traits frappants des chefs-d’œuvre qu’on représente journellement, & qu’on représentera toujours, à moins que le goût ne retombe tout-à-fait dans la barbarie ; Regnard, dis-je, s’exposant à être comparé tous les jours à Moliere, me paroît ou bien inconséquent ou bien présomptueux.

56. (1885) La femme de Molière : Armande Béjart (Revue des deux mondes) pp. 873-908

Pris un à un, les traits d’Armande Béjart étaient défectueux, mais l’ensemble respirait un charme souverain. […] Jamais son visage ne s’est paré de plus vives couleurs ni ses yeux ne se sont armés de traits plus vifs et plus perçans. […] S’il a plusieurs fois emprunté certains traits à sa femme pour les appliquer aux personnages qu’il lui donnait à représenter, il est impossible qu’il ne laisse pas voir çà et là à travers ces personnages les sentimens qu’elle lui inspirait. […] En outre, peut-on admettre que, de gaieté de cœur et pour le seul plaisir, un homme se représente lui-même sous les traits du grotesque tuteur d’Agnès et se bafoue aussi cruellement ? […] Quant à Molière, si on le voit sous les traits d’Alceste, il y apparaît malheureux, mais nullement ridicule.

57. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VIII. Du Genre gracieux. » pp. 91-102

Mon Lecteur verra avant la fin de cet article la raison pour laquelle je lui rappelle ce trait. […] Fortunian est un des premiers sur qui tombent les traits de ce Dieu ; mais malheureusement ce Berger s’est attaché à la Nymphe Dorine, qui est dévouée au culte de Diane, & qui ne veut pas répondre à sa tendresse. […] L’héroïne n’y est point nue, un Satyre n’est pas prêt à la violer ; mais il y a dans le dialogue des détails très lestes, sur-tout lorsque l’Amour, en faisant l’exercice, bande son arc, & qu’il attend, dit-il, d’être dans le bois pour lâcher son trait.

58. (1801) Moliérana « Vie de Molière »

124 Trop de complicité dans le nœud, et peu de vraisemblance dans le dénouement ; mais une source de vrai comique, et des traits également ingénieux et plaisants. […] L’Avare est un peu outré ; mais le vulgaire ne peut être ému que par des traits marqués fortement. […] Malgré l’irrégularité de la conduite de cette pièce, elle plaît par un grand nombre de traits, et sur-tout par le tour neuf et délicat de la déclaration de l’amour à Psyché Les Femmes savantes , comédie en cinq actes et en vers, représentée sur le même théâtre, le 11 mars 1672.

59. (1898) Molière jugé par Stendhal pp. -134

C’est peut-être un de ces traits pour lesquels Bourdaloue blâme l’auteur. […] Traits excellents dans le genre peignant. […] Ses traits sont une espèce de plaisanterie. […] Les pédans ont si peu de tact que [je] ne doute nullement que le trait ne soit dans La Nature. […] Je suis convaincu que la vie privée de Mme Dacier donnait des traits plus forts que ceux de la pièce.

60. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Mais il les varie par l’expression et, le plus souvent, il tâche d’enchérir sur le premier trait par un trait plus énergique. […] Aussi ne sommes-nous point familiers avec tous les traits de ce visage. […] Mais comme elle marque d’un trait lumineux et profond l’entêtement d’Orgon pour Tartuffe ! […] Le dialogue pétille de traits passionnés ou piquants. […] On y trouve pourtant encore de ces traits qui enlèvent, et l’on sent la main du maître.

61. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXII. Des Pieces à caractere. » pp. 253-258

Dans la Comédie moyenne, les Auteurs n’ayant plus la permission de nommer leurs victimes, prirent des masques qui représentoient les traits de leurs visages. […] Les traits d’un homme ne pouvant pas fournir au plaisant nécessaire pour toute une piece, il est probable que les Auteurs, en offrant au public la figure d’un personnage connu, ne manquoient pas d’étaler ses travers & ses défauts, ce qu’ils ne pouvoient faire encore sans tracer le portrait de son caractere.

62. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE PREMIER. Part de la Morale dans la Comédie de Molière. » pp. 1-20

Dans une mesure fixée par son goût, il outre les vertus ou les vices humains, afin d’attacher les regards par des traits saillants, et de remuer les âmes par des émotions supérieures. […] La vigueur avec laquelle sont accusés les traits des personnages, la mesure savante avec laquelle le ridicule est porté graduellement jusqu’à sa dernière limite, excitent des sentiments d’une vivacité insolite et forcent absolument le rire. […] Ajoutez enfin que l’auteur est Molière, le peintre le plus habile et le plus sûr, le plus capable de rassembler en une seule image palpitante de vie et de passion26 tous les traits divers ramassés dans mille personnages, le plus puissant à imposer l’approbation, l’admiration, l’enthousiasme : il est inutile d’insister pour faire comprendre la puissance morale de Molière. […] Mais quoiqu’on doive marquer chaque passion dans son plus fort degré et par ses traits les plus vifs pour en mieux montrer l’excès et la difformité, on n’a pas besoin de forcer la nature et d’abandonner le vraisemblable. » Fénelon, Lettre à l’Académie-françoise, VII. — C’est son amour absolu du vrai qui a fait dire à Boileau :   C’est par là que Molière illustrant ses écrits Peut-être de son art eût remporté le prix,   Si, moins ami du peuple, en ses doctes peintures,   Il n’eut point fait souvent grimacer ses figures.

63. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XII. Des Pieces intriguées par une Soubrette. » pp. 135-150

Une Soubrette qui se mêle d’intriguer ne doit employer que ces petits traits fins, adroits, déliés, auxquels les femmes sont si bien stylées ; ces faussetés, ces perfidies qu’elles savent si bien couvrir du masque de l’ingénuité : aussi est-il plus difficile de faire filer une intrigue à une Soubrette qu’à un valet. […] Je présenterai, pour modele & pour exemple, un trait de fourberie pris dans une de mes pieces. […] N’importe, je leur soutiendrai encore que le trait dont je parle est sublime, & qu’il n’y en a pas un aussi vigoureux, aussi réfléchi dans tous les Théâtres connus.

64. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE II. La Débauche, l’Avarice et l’Imposture ; le Suicide et le Duel. » pp. 21-41

Mais quand il peint les grands vices, se contente-t-il de les condamner dans ce qu’ils ont d’évidemment condamnable, et d’exprimer la morale du code ; ou bien son esprit profond sait-il joindre à cette peinture des traits qui prouvent qu’il les hait plus vigoureusement que le vulgaire, et qu’il veut qu’on en soit choqué, non-seulement dans leur développement monstrueux, mais encore dans leur naissance imperceptible et dans leurs conséquences éloignées, presque indifférentes à tout autre qu’au véritable homme de bien ? […] Que Molière ait su allier à ce caractère odieux une élégance chevaleresque, une audace juvénile42 qui empêchent que l’horreur ne nous prenne trop vile, et qui intéressent encore au héros, si méprisable qu’il soit ; qu’il ait agréablement mêlé à l’intrigue les traits et les situations les plus comiques, pour rester dans le domaine de la comédie, et ramener le rire chez le spectateur prêt à subir des émotions moins gaies, c’est une habileté d’auteur qu’on doit admirer, et qui ajoute grandement au mérite d’une pièce si difficile à rendre attrayante sans rendre le vice lui-même attrayant. […] Mais quel trait de génie, de nous le présenter amoureux de la maîtresse de son fils, volé par son fils, qu’il a forcé, par l’excès, de son vice, à ne plus voir, dans cette tête sacrée du père, qu’un indigne rival avec qui toute guerre est permise, un ennemi domestique contre qui toute la maison se ligue, depuis l’héritier du nom paternel jusqu’au dernier valet de cuisine ! […] « Comme la fausse dévotion tient en beaucoup de choses de la vraie..., comme les dehors de l’une et de l’autre sont presque tous semblables, il est… d’une suite presque nécessaire que la même raillerie qui attaque l’une intéresse l’autre, et que les traits dont on peint celle-ci défigurent celle-là… Et voilà ce qu[est arrivé lorsque des esprits profanes… ont entrepris de censurer l’hypocrisie, non point pour en réformer l’abus..., mais pour faire une espèce de diversion dont le libertinage pût profiter, en… faisant concevoir d’injustes soupçons de la vraie piété par de malignes représentations de la fausse.

65. (1820) Notices des œuvres de Molière (V) : L’Amour médecin ; Le Misanthrope ; Le Médecin malgré lui ; Mélicerte ; La Pastorale comique pp. 75-436

Les nombreux personnages qui concourent à l’action de la pièce, ou dont les portraits seulement sont encadrés dans le dialogue, offrirent aux yeux des attitudes si naturelles, des formes si bien senties, des traits si bien modelés, qu’on voulut voir des individus peints avec ressemblance, où il n’y avait que des espèces représentées avec vérité, et qu’on chercha partout, à la cour comme à la ville, les originaux dont Molière avait pris les figures à leur insu pour les transporter et les distribuer dans sa composition. […] Il est aujourd’hui démontré à tous les bons esprits que Rousseau, confondant très mal à propos, dans le personnage d’Alceste, la vertu qui le fait estimer, avec la morosité qui le rend insociable, a fort inutilement voulu venger l’une des traits qui n’étaient dirigés que contre l’autre et ne tombaient que sur elle. […] En rapprochant les traits dont se compose le caractère comique d’Alceste, je cesse d’être étonné que Rousseau ait fait le procès à Molière. […] De toutes les pièces de Molière, c’est peut-être la seule où ne se trouve aucune idée de scène ni aucun trait de dialogue emprunté aux comiques anciens ou modernes ; c’est la seule aussi que n’aient pu mettre à contribution les successeurs de Molière, qui sont tous plus ou moins ses imitateurs ; c’est en même temps celle que les étrangers se sont le plus empressés d’adopter, soit en la traduisant simplement, soit en l’accommodant aux mœurs nationales. […] Ce qui n’est pas une conjecture, mais une certitude, c’est qu’une autre farce, attribuée à Molière, Le Médecin volant, lui a fourni, pour la même pièce, des scènes, des situations, des jeux de théâtre et des traits de dialogue.

66. (1865) Les femmes dans la comédie de Molière : deux conférences pp. 5-58

C’est un trait du génie de Molière et la leçon même de la comédie. […] Elle se complaît surtout dans la galanterie quintessenciée, nouveau trait qui lui est commun avec les premières précieuses. […] Tels sont les traits principaux que nous allons reconnaître dans le caractère de Célimène. […] C’est la chimère d’Alceste, et l’espérance qu’il exprime ici nous révèle un des traits originaux de son caractère. […] Toutefois je ne me dissimule pas que c’est aussi un trait du temps, et je profiterai de l’occasion pour marquer un changement curieux qui s’est opéré dans les mœurs publiques.

67. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

Ce sont là de ces traits où l’art seul ne peut rien, si l’on n’est inspiré par le génie et guidé par le bon goût. […] Voilà ce qui s’appelle manier des scènes : voilà ce qui s’appelle travailler avec art, et représenter avec des traits délicats ce qui se passe tous les jours dans le monde. […] Un maître de l’art me répondra peut-être que cinq domestiques chez Harpagon sont autant de ressorts pour faire jouer son caractère, que Molière en a fait un usage admirable, qu’il en a tiré des traits sublimes, et qu’en faveur de ces traits, on peut bien lui pardonner une faute aussi légère. […] Pantalon, par un sentiment d’amour et de reconnaissance, ouvre sa bourse et donne à Scapin des poignées d’argent, pour chaque trait de louange qu’il lui rapporte. […] Combien d’ornements et de traits d’une nouvelle invention n’a-t-il pas fallu que Molière ait inséré dans son ouvrage pour le mettre en état d’être applaudi comme il l’a été ?

68. (1856) Les reprises au Théâtre-Français : l’Amphitryon, de Molière (Revue des deux mondes) pp. 456-

Le mari, bien que trompé, mais trompé par une femme de bonne foi, qui ne peut rire de sa mésaventure, puisqu’elle l’ignore elle-même, éveille plus de sympathie que l’amant heureux obligé de prendre les traits d’Amphitryon pour obtenir les faveurs d’Alcmène. […] Plus d’un trait sans doute s’adresse aux courtisans.

69. (1818) Épître à Molière pp. 6-18

Si malgré tes efforts, tes succès, tes lauriers, Des vices dont gémit notre humaine faiblesse Tu ne corrigeas pas l’incorrigible espèce, Laissant sur nos défauts tomber tes traits railleurs, Dans l’emploi périlleux de nous rendre meilleurs Prêtant ton éloquence à la plus noble cause, J’aime que ton courage à le tenter s’expose : Mais de la vérité les dangereux accents Ont armé contre toi la horde des méchants. […] Tu conserves toujours à chaque personnage Son état et ses mœurs, ses traits et son langage ; Et, par l’illusion complétant notre erreur, Derrière lui jamais l’on n’aperçoit l’auteur. […] Il est inutile de faire observer que ce vers et les suivants n’ont trait qu’à la censure exercée sur les ouvrages dramatiques.

70. (1914) En lisant Molière : l’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Ce personnage était de tradition dans la comédie italienne ; mais celui du Dépit amoureux est original ; il a son trait particulier. […] Molière avait rencontré une nouvelle matière et il l’exploitait avec cette obstination légère et allègre qui est un des traits de son caractère. […] C’est une étude de mœurs provinciales, À peine y avait-il quelques traits rapides de mœurs de la province dans Monsieur de Pourceaugnac. […] Le Menteur, voilà la comédie d’imagination brillante et fantasque, avec quelques traits de caractère. […] La méchanceté qui est une volonté de puissance et une volonté de se prouver à soi-même sa puissance, et Nietzsche ne tarit, pas là-dessus, est le premier trait, le trait essentiel et presque le tout de Don Juan.

71. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. » pp. 357-396

L’Avare, comédie en cinq actes en prose, comparée pour le fond & les détails avec l’Aulularia de Plaute ; Arlequin & Célio, valets dans la même maison ; le Docteur bigot ; Arlequin dévaliseur de maisons ; la Fille-de-chambre de qualité ; Pantalon avare, canevas italiens ; avec la belle Plaideuse, comédie de l’Abbé de Bois-Robert ; l’Esprit, comédie de Pierre de Larivey ; l’Embarras des richesses, de Dalainval ; une scene de Mithridate de Racine, & deux traits imités par les Anglois. […]   Nous ne rapporterons pas ici les différents traits cités par la Fleche & Strobile, parcequ’ils nous serviront dans la suite à comparer les deux Avares. […] Autre trait fort plaisant ! […]   Ce trait d’un homme qui, obligé de se pendre, regrette la corde qu’il faudroit acheter, ce trait, dis-je, me paroît de la plus grande vigueur. […] Je suis encore fâché que notre Poëte n’ait pas enrichi notre théâtre de ce trait ; mais nous devons le lui pardonner, en faveur de ceux qu’il n’a pas empruntés de Plaute.

72. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Il se moquait d’Arnolphe et riait de Sganarelle, et que de traits, pour les peindre, il empruntait à son propre caractère ! […] On a cherché dans les traits de M. de Montausier le portrait d’Alceste. […] cette pièce de Dom Juan est ainsi remplie de traits qui sont comme des cris jetés à l’avenir. […] Le chagrin a creusé et miné ces traits mâles et bons. […] — Il avait peut-être emprunté le trait aux premiers essais de Molière.

73. (1819) Notices des œuvres de Molière (III) : L’École des femmes ; La Critique de l’École des femmes ; L’Impromptu de Versailles ; Le Mariage forcé pp. 164-421

Arnolphe n’est point un vieillard, comme l’ont dit Voltaire, La Harpe, et beaucoup d’autres, trompés apparemment par la représentation, où la tyrannique division des emplois nous fait voir ordinairement ce personnage sous les traits de l’acteur à qui appartiennent les rôles d’amoureux sexagénaires. […] Quelques traits détachés du rôle de Climène et du portrait d’Araminte ont servi à composer les personnages de la prude Arsinoé et de la pédante Philaminte. […] Jeanne Le Doux, personne qui aimait à obliger son prochain, et Marie Simonet, femme de Hervé de la Tourelle, qui, de concert avec la Le Doux, abusant de la ressemblance qu’elle avait dans ses traits et dans sa taille avec madame Molière, avait osé se livrer, sous ce nom, à M.  […] Assurément ni la personne, ni la qualité même des marquis dont les actions et les discours étaient sages, ne recevait la moindre atteinte de quelques traits lancés contre quelques étourdis qui s’embrassaient convulsivement, faisaient de grands gestes, poussaient de grands éclats de voix, débitaient de méchantes pointes, outraient les modes les plus outrées, et se donnaient en spectacle jusque sur les théâtres publics. […] Molière, qui semblait déjà avoir épuisé les traits du ridicule contre ses ennemis de la cour et de la ville, dans La Critique de l’École des femmes, ne fut peut-être pas moins embarrassé que flatté de l’ordre que lui donna Louis XIV, de se moquer d’eux une seconde fois : c’était lui prescrire de recommencer son propre ouvrage, au risque de demeurer inférieur à lui-même, et de procurer un véritable triomphe à ses adversaires, loin de leur faire essuyer un nouvel échec.

74. (1800) Des comiques d’un ordre inférieur dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VII) pp. 294-331

Il est plein de traits naïfs et plaisants, qu’on a retenus et qui sont, passés en proverbes. […] Si l’on n’était convaincu par des exemples très-récents que des gens qui impriment journellement savent pas même de quels auteurs a parlé Boileau dans l’Art poétique, on ne concevrait pas que dans une feuille périodique on ait attribué tout à l’heure à un avocat de nos jours, comme une chose toute nouvelle, un trait si frappant d’une pièce aussi connue que l’Ésope à la cour, de Boursault. […] Il avait même fait une autre pièce, qui a pour titre le Tombeau de Boileau, et dans laquelle il y a des traits dignes de Boileau lui-même. […] Ce n’est ni la raison supérieure, ni l’excellente morale, ni l’esprit d’observation, ni l’éloquence de style qu’on admire dans le Misanthrope, dans le Tartufe, les Femmes savantes : ses situations sont moins fortes, mais elles sont comiques; et ce qui le caractérise surtout, c’est une gaieté soutenue qui lui est particulière, un fonds inépuisable de saillies, de traits plaisants : il ne fait pas souvent penser, mais il fait toujours rire. […] Un trait d’habileté dans l’auteur, c’est d’avoir donné au Ménechme officier, non seulement une jeune maîtresse qu’il aime, mais une liaison d’intérêt avec une vieille folle dont il est aimé.

75. (1862) Corneille, Racine et Molière (Revue chrétienne) pp. 249-266

Un peuple poétique a peu besoin de spectacles; pour lui, du moins, les plus simples sont les meilleurs ; il lui suffit de ceux qui, en quelques traits, consacrent et symbolisent sa vie sérieuse, active et tranquille. » Vinet a eu pour successeur, à Lausanne, M. […] Rambert relève d’autres traits, plus noirs encore, de l’ingratitude de Racine envers ceux qui avaient été ses premiers et devaient être ses derniers amis. […] La plupart des écrivains du temps, poètes ou prosateurs, ont entrevu un idéal semblable et ont contribué à en dessiner les traits; mais il y a pourtant des différences entre eux Chez Racine, l’honnête homme est plus chevaleresque et se montre surtout par les côtés galants c’est dans ses relations avec le beau sexe qu’il aime à déployer toute sa distinction. […] C’est une chose frappante que de voir la poésie française tourner, pendant des siècles, autour de ce sujet, chaque siècle ajouter quelques traits à cette figure repoussante et apporter son tribut à la formation de ce type hideux. […] Son style, abondant en poésie, a de la clarté, du trait et de la vigueur.

76. (1740) Lettres au Mercure sur Molière, sa vie, ses œuvres et les comédiens de son temps [1735-1740] pp. -89

Ce même Père prétend que Moliere est le seul parmi nous qui ait découvert ces traits de la, nature qui la distinguent et qui la font connoître. […] VII : Avant qu’un peu de terre, obtenu par prière, Pour Jamais sous la tombe eût enfermé Moliere, Mille de ses beaux traits, aujourd’hui si vantés, Furent des sots esprits à nos yeux rebutés. […] A l’exemple des peintres et des sculpteurs, qui donnent de grands traits aux visages que l’on veut voir de loin, « Moliere outroit souvent les caractères qu’il mettoit sur le theatre, parce qu’on les y regarde comme dans un éloignement. […] Le poète françois a non seulement exposé sur la scène les vices et les ridicules communs à tous les âges et à tous les pays, il les a peints encore avec des traits tellement propres à sa nation, que ses comédies peuvent être regardées comme l’histoire des mœurs, des modes et du goût de son siècle ; avantage qui distinguera toujours Moliere de tous les auteurs comiques. […] On n’avoit point encore vu de si parfait comédien dans la troupe royale de l’Hôtel de Bourgogne, dont il étoit l’orateur ; il annonçoit de bonne grâce, parloit facilement, et ses petits discours faisoient toujours plaisir à entendre par les traits nouveaux dont il prenoit soin chaque jour de les orner.

77. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. Du Dialogue. » pp. 204-222

Ils se trouvent ensemble ; Tartufe croit avoir trouvé l’occasion favorable : il cherche, par de légeres galanteries, à faire naître l’instant de placer sa déclaration : il se présente, il le saisit bien vîte, & débite d’un seul trait cette tirade. […] Comme ce dernier trait est vigoureux ! […] Elles effacent non seulement les traits les mieux caractérisés du principal personnage, elles ôtent encore tout le sel du reste de la scene.

78. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

Molière, qui ressemblait tant à sa mère, ne lui dut rien, à lui, que quelques traits peut-être de son Harpagon. […] Soulié ne nous semble pas avoir compris la signification, est, à nos yeux, un trait de lumière pour le caractère de l’homme et sa moralité. […] Molière lui-même prit plaisir à peindre Lucile, qui affolait et désolait Cléonte, sous les traits mêmes d’Armande Béjard. […] Je ne sais au juste qui lui servit pour l’athée ; mais, du moins, il est un trait des plus saillants, et même, en ce point, le mot du rôle, pour ainsi dire, dont on sait l’origine. […] Or, comme nous le ferons voir, c’est un trait de ressemblance de plus qu’il eut avec Tartuffe, jésuite pour ceux-ci, janséniste pour ceux-là.

79. (1845) Œuvres de Molière, avec les notes de tous les commentateurs pp. -129

J’ai déjà cité un trait de leur bienfaisante courtoisie dans un passage de la Vie de Molière tiré des Mémoires de d’Assoucy. […] Brécourt avait beaucoup de valeur, et on rapporte un trait qui mérite d’être placé ici. […] Ceci est un trait lancé contre Beaubourg, qui avait remplacé Baron, et dont le jeu était outré. […] Un autre trait mérite d’être rapporté. […] Ce trait prouve la préférence qu’il donnait à ce dernier ouvrage.

80. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXIX. De l’action dans les Pieces à caractere. » pp. 448-468

Quelle égide opposer aux traits de la satyre ? […] Il vaut mieux sans contredit n’en pas mettre, que de l’animer par le secours de personnages subalternes, comme dans le Dissipateur, dans le Philosophe marié, le Glorieux, &c. ou par des traits qui n’appartiennent pas du tout au caractere annoncé : mais lorsqu’on aura l’art de faire naître toutes les scenes, tous les incidents, toutes les situations du caractere promis par le titre, qu’on ne craigne point de trop compliquer une action ; ce seroit craindre de mettre trop de beautés dans un ouvrage. Souvenons-nous sur-tout que tout en faisant filer une action par le personnage principal, il faut lui ménager les moyens de dénouer cette même action avec éclat, & par un trait qui le caractérise bien.

81. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

Des traits épars qui circulent dans le monde, ou qui sont enfermés dans les livres, sont peu de chose pour l’écrivain, pour le poète : c’est l’art de la composition qui de ces traits fait un ouvrage, et c’est le génie qui de cet ouvrage fait un chef-d’œuvre. […] Ce n’est certainement point ici l’acte solennel d’un père justement courroucé, foudroyant la tête d’un enfant coupable ; c’est simplement le trait d’humeur, la saillie de colère d’un vieillard jaloux qui, trouvant un rival dans son fils, s’irrite assez injustement d’une résistance assez légitime ; ainsi, la plaisanterie de ce fils, criminelle, si la malédiction eût été sérieuse et méritée, reste seulement indécente, dès qu’elle ne fait que répondre à une boutade ridicule et mal fondée. […] C’est par un même trait de génie, et pour produire un même effet, que Molière a rendu Harpagon amoureux. […] Elle suppose une gaîté originale ; les caractères en sont comme les grotesques de Calot, où les principaux traits de la figure humaine sont conservés. […] En l’absence de l’amour naïf et des sentiments naturels, il développa la théorie subtile et quintessenciée de l’amour métaphysique ; à la place des discours énergiquement passionnés, il mit les entretiens fadement polis et spirituels ; aux mots de caractère et de situation, il substitua les phrases fines et recherchées ; aux saillies d’une gaîté vive et franche, les traits d’une plaisanterie froide et forcée.

82. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Ses traits y sont déjà bien arrêtés, quoique accusés avec moins d’énergie ; le cadre où il se meut est à peu près le même. […] Sous des apparences d’humilité, elle change la religion en astuce et se rend maîtresse des biens, de l’honneur et de l’esprit des gens… C’est un beau trait que celui du démon se faisant adorer comme un saint… Ceux qui me nourrissent, je les loue de leurs œuvres pies, de leurs vertus, de leur charité ; je les rassure sur leurs débauches, sur leurs usures ; rentrant la tête dans les épaules avec un petit ricanement, j’allègue la fragilité de la chair.

83. (1725) Vie de l’auteur (Les Œuvres de Monsieur de Molière) [graphies originales] pp. 8-116

Ce petit ouvrage qui certainement n’a pas été composé pour faire plaisir au Comedien Guerin second mari de la Moliere, ne laisse pas de contenir des traits singuliers touchant la personne de Moliere, & Mr.  […] Grimarest a eu raison de le justifier en disant qu’il connoissoit déjà le point de vûë du Theatre qui demande de gros traits pour affecter le public. […] La diversité de caracteres dont cette Piece est remplie, & la nature que l’on y voyoit peinte avec des traits si vifs, enlevoient tous les applaudissemens du public. […] En voici un exemple, qui fait un des plus beaux traits de sa vie. […] Elle regardoit cet endroit comme un trait indigne d’un si bon Ouvrage : Mais Moliere avoit son original, il vouloit le mettre sur le Theâtre.

84. (1900) Molière pp. -283

» Voulez-vous encore un trait, un trait admirablement choisi pour peindre l’esprit d’une condition : vous le trouverez dans la bouche du même Sganarelle. […] Les traits choisis, recueillis à cet effet, s’assemblent, se composent sous sa main en un tout d’un relief extraordinaire, et alors la figure va bien au-delà de ce qu’il veut peindre. […] Il est probable qu’à ce premier trait, certaines gens commencèrent à dresser l’oreille. […] C’est une épopée mise en dialogue, où tous les caractères, même les plus épisodiques, sont accusés à grands traits, d’une manière qui rappelle la largeur et la simplicité de la touche homérique. […] Ce mot sur Molière, mot risqué et bien sévère, avait trait à son rôle de poète amuseur du roi Louis XIV et de la cour.

85. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. Des Comédies Héroïques. » pp. 9-29

Azael reproche à Samson l’indigne repos dans lequel il languit, au lieu de tourner contre les ennemis de Dieu ces traits qu’il n’emploie que contre des animaux. […] que de traits sublimes dans ce que je viens de transcrire ! […] Mais ces grands traits de lumiere qui percent l’ombre de temps en temps, ne suffisent pas ; il faut un grand intérêt ; nulle langueur ne doit l’interrompre : les raisonnements politiques, les froids discours d’amour ne doivent pas le glacer ; & les pensées recherchées, les tours de force ne doivent point l’affoiblir.

86. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [95, p. 139-140] »

[95, p. 139-140] Voici comme Piron* s’exprime sur le Misanthrope : « Un chasseur qui se trouve en automne, au lever d’une belle aurore, dans une plaine ou dans une forêt, fertiles en gibier, ne se sent pas le cœur plus réjoui que dût l’être l’esprit de Molière, quand, après avoir fait le plan du Misanthrope, il entra dans ce champ vaste où tous les ridicules du monde venaient se présenter en foule et comme d’eux-mêmes, aux traits qu’il savait si bien lancer.

87. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [63, p. 100-101] »

On a rapporté de lui ce trait comique : Un jour qu’il était pressé par l’heure du spectacle, il prit une brouette pour se rendre promptement à la comédie ; mais cette voiture n’allait pas assez vite à son gré.

88. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLII. De l’art d’épuiser un Sujet, un Caractere. » pp. 493-503

Il est reçu qu’un seul homme, quelque ridicule, quelque vicieux qu’il soit, ne peut réunir sur lui seul tous les traits du ridicule ou du vice qui le caractérise. […] Il est donc nécessaire, loin de se borner à un seul original, d’étudier tous ceux qui se présentent, de saisir leurs traits les mieux marqués, de les réunir ensuite, & d’en faire un ensemble bien caractérisé.

89. (1846) Quelques pages à ajouter aux œuvres de Molière (Revue des deux mondes) pp. 172-181

Un trait pourtant est à relever : Tombavit in meas manus Homo qualitatif, dives comme un Cræsus. […] OCTAVUS DOCTOR Impetrato favorabili congé A domino praeside, Ab electa troupa doctorum, Tam praticantium quam practicæ avidorum, Et a curiosa turba badaudorum, lngeniose bacheliere, Qui non potuit esse jusqu’ici déferré, Faciam tibi unam quæstionem de importantia : Messiores, deturnobis audiencîa. […] Ce trait caractérise une certaine partiede la société du xvIIesiècle.

90. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

On a souvent, cité à ce propos le trait curieux de l’administration de saint Charles Borromée, le grand archevêque de Milan, que M. […] Chacun pouvait se faire un fonds plus ou moins riche de traits conformes à son caractère.

91. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

Il résulta de ces échanges que les traits de ressemblance entre la comédie régulière et la comédie de l’art se multiplièrent. […] Les valets balourds et poltrons en arrivent de bonne heure à se ressembler sur les deux scènes comiques : ainsi le Zucca de L’Interesse (l’Intérêt ou la Cupidité), comédie régulière de Nicolo Secchi, Zucca qui est devenu le Mascarille du Dépit amoureux, était un véritable Arlequin poltron et balourd dont Molière n’a pas complètement effacé les traits, tandis que le Mascarille de L’Étourdi n’était autre, comme on le verra plus loin, que le rusé Scappino, le Scapin-modèle emprunté à Beltrame, l’un des plus fameux artistes et écrivains de la commedia dell’arte.

92. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Il suffit de lire l’analyse que donnent de ce scénario les auteurs de l’Histoire de l’ancien théâtre italien, pour se convaincre que les traits de ressemblance qu’il présente avec la fameuse comédie sont d’abord tout à fait insignifiants, qu’en outre ils ne tiennent nullement, dans la farce italienne, au fond du sujet et y semblent au contraire introduits après coup ; d’où l’on peut conclure à peu près certainement que Il Basilico di Bernagasso s’est enrichi de ces traits aux dépens du Tartuffe.

93. (1919) Molière (Histoire de la littérature française classique (1515-1830), t. II, chap. IV) pp. 382-454

La chambre à coucher, tendue tout entière de tapisserie façon de Rouen, était garnie de beaux et bons meubles, comme il convient à la chambre d’un tapissier, ornée de tableaux et d’un miroir de glace de Venise ; nous avons là, comme sauvée de la destruction et réduite en quelques traits, une image de la vie réglée, saine et facile d’il y a deux siècles passés. […] Si maintenant nous voulons résumer les traits que nous avons rapidement notés, la comédie de cette période est un vaudeville et un opéra-comique, elle n’est ni une comédie d’intrigue, ni une comédie de mœurs, ni une comédie de caractères. […] Ainsi la comédie de Molière se dégage du romanesque pour se caractériser par des traits qui lui soient personnels. […] Ce sont des portraits à plaisir, où l’on ne recherche point de ressemblance ; et vous n’avez qu’à suivre les traits d’une imagination qui se donne l’essor et qui souvent laisse le vrai pour attraper le merveilleux. […] Qu’est-ce à dire, — car Orgon est sincère, car pas un instant on ne nous l’a présenté sous les traits d’un malhonnête homme, et encore moins d’un hypocrite — qu’est-ce à dire, sinon qu’autant il fait de progrès dans la dévotion, autant il en fait vers l’inhumanité ?

94. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IX. » pp. 180-200

Les chasseurs arrivent, & ne voulant plus écouter son amant, elle part pour la chasse, mais avec le trait dans le fond du cœur. […] Le chagrin des vieux jours ne peut aigrir mon ame Contre les doux transports de l’amoureuse flamme : Et bien que mon sort touche à ses derniers soleils, Je dirai que l’amour sied bien à vos pareils ; Que ce tribut qu’on rend aux traits d’un beau visage, De la beauté d’une ame est un vrai témoignage ; Et qu’il est mal-aisé que, sans être amoureux, Un jeune Prince soit & grand & généreux. […] Et puisque les langueurs d’une plaie invincible Nous montrent que votre ame à ses traits est sensible, Je triomphe ; & mon cœur, d’alégresse rempli, Vous regarde à présent comme un Prince accompli.

95. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [9, p. 41] »

Ce secret de faire passer sur le théâtre des traits un peu hardis, a été trouvé si bon que plusieurs acteurs l’ont mis en usage depuis avec succès.

96. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [46, p. 78-80] »

Mais le prodige de l’art, pour se tirer d’une situation difficile, c’est ce trait du caractère du Tartuffe : Oui, mon frère, je suis un méchant un coupable, Un malheureux pécheur, tout plein d’iniquité, Le plus grand scélérat qui jamais ait été.

97. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [78, p. 118-119] »

Attentif à ce tableau, qui peut-être lui fournit encore d’autres traits, il conçut alors le nom de son imposteur d’après le mot de tartuffoli, qui avait fait une si vive impression sur tous les acteurs de la scène.

98. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [87, p. 131-132] »

Pour le tirer de sa distraction, Despréaux* et Racine qui étaient naturellement portés à la raillerie, se mirent à l’agacer par différents traits plus vifs et plus piquants les uns que les autres ; mais La Fontaine ne s’en déconcerta point.

99. (1775) Anecdotes dramatiques [extraits sur Molière]

Voici comment Chapuzeau38 a mis en œuvre ce trait comique : Crispin (C’est le Riche Vilain). […] Molière, comptant sans doute qu’il ne le serait jamais, en tira quelques traits qu’il jugea dignes d’être insérés dans d’autres Pièces. […] Ce secret de faire passer sur le Théâtre des traits un peu hardis a été trouvé si bon, que plusieurs Auteurs l’ont mis en usage depuis avec succès. […] Ce trait fait voir la préférence qu’il donnait à ce dernier ouvrage sur l’autre. […] Le même Prince voyait jouer le Cercle 142 par ses Comédiens : les beaux esprits Français qui l’entouraient, souriaient à tous les traits fins, à toutes les Épigrammes, dont cette Pièce est remplie.

100. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Préface » pp. -

L’histoire de la société polie veut, pour être traitée convenablement, une plume légère qui sème à chaque pas de sa course des traits brillants et gracieux, comme Le Petit Chien de La Fontaine qui, en secouant sa patte, en faisait tomber des diamants, des perles et des rubis.

101. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXV. Du contraste des Caracteres. » pp. 386-397

On prétend dans le monde qu’on ne peut rendre les traits d’un caractere bien saillants, sans les faire contraster avec ceux d’un autre. […] Rapprochons quelques-uns de leurs traits.

102. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. M. GOLDONI. » pp. 468-479

J’ignore si M. de Voltaire a puisé le trait généreux de Freeport chez M.  […] Jamais piece ne m’a fait sentir aussi bien que le Bourru bienfaisant combien il est utile pour un Auteur comique d’être à l’affût des traits qui échappent aux divers caracteres répandus dans la société, de les recueillir avec un soin extrême, de les mettre chacun dans leur case pour les en retirer au besoin ; sur-tout combien il est heureux d’être amené par les circonstances dans les lieux & dans les instants les plus favorables pour prendre la nature sur le fait, & faire une ample moisson.

103. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

Aux noms de La Rochefoucauld, du cardinal de Retz, de Francas et des femmes de leur société, je me hâte de dire que Molière et Despréaux, si follement accusés de diriger leurs traits satiriques contre elle, s’empressaient de lire leurs ouvrages. […] Les murs auraient amplement contenu Toute sa vie…………………………… Au fond du temple on eût vu son image, Avec ses traits, son souris, ses appas, Son art de plaire et de n’y penser pas… J’aurais fait voir à ses pieds, des mortels, Et des héros, des demi-dieux encore, Même des dieux : ce que le monde adore Vient quelquefois parfumer ses autels.

104. (1836) Une étude sur Molière. Alceste et Célimène (La Revue de Bordeaux et Gironde unies) pp. 65-76

Celui qui avait conçu ce rôle, Molière seul, pouvait lui prêter quelques traits de son propre caractère. […] Ce penchant eut plus d’une fois prise sur l’âme de Molière, les biographes nous l’attestent ; mais nous ne parlerons que de la passion qui domina toute sa vie, qui lui causa tant de souffrances, qui nous valut les plus beaux traits d’Alceste et la création de Célimène.

105. (1717) Molière (Grand Dictionnaire historique, éd. 1717) [graphies originales] « article » p. 530

Il est le seul parmi nous, qui ait decouvert ces traits de la nature qui la distinguent et qui la font connaître.

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