Lorsque Molière mourut, personne en France, à l’exception d’un petit nombre d’hommes d’élite, Boileau, La Fontaine, Louis XIV, Bussy, Bouhours, personne ne parut s’apercevoir de la perte que la patrie et les lettres venaient de faire. […] Après l’étude qu’on vient de faire, on peut être étonné d’entendre Molière déclarer qu’il n’y a rien de plus « innocent » que ses comédies ; on éprouve le même sentiment qu’en entendant La Fontaine déclarer qu’il n’y a rien de mauvais dans ses Contes 829.
On conçoit difficilement aujourd’hui que l’interrogatoire qu’on vient de lire ait passé à la représentation.
Pour faire la critique des sujets que je viens de citer, & de tous ceux qui lui ressemblent, il me suffit de rapporter ce que M. […] Dans un autre temps j’eusse peut-être accepté le parti ; mais après le trait que sa sœur vient de me jouer....
Les véritables précieuses ne furent pas dupes du détour ; elles se tinrent pour averties, et elles renoncèrent du mieux qu’il leur fut possible, au platonisme hypocrite et au jargon quintessencié qui venait de faire rire tout Paris à leurs dépens. […] Cotin, qui avait assez bravement supporté les coups redoublés de Boileau, et les lui avait rendus de son mieux, resta écrasé sous celui que Molière venait de lui porter. […] Le public n’apprit qu’il n’existait plus, qu’en apprenant qu’on venait de le remplacer à l’Académie Française. […] On parle de contraste : en est-il un plus vrai, mieux ménagé, plus suivi, et toutefois moins tranchant et moins symétrique, que celui de Chrysale et de Clitandre, dont je viens de marquer les principaux traits ?
L’on peut encore distinguer les caracteres simples & dominans, tels que ceux que nous venons de nommer, d’avec les caracteres accessoires, qui leur sont comme subordonnés. […] On pourroit encore diviser la comédie relativement aux états, & on verroit naître de cette division, la comédie dont nous venons de parler dans cet article, la pastorale & la féerie : mais la pastorale & la féerie ne méritent guere le nom de comédie que par une sorte d’abus. […] Dès qu’Henri III. fut monté sur le throne, il infecta le royaume de farceurs ; il fit venir de Venise les comédiens Italiens surnommés li Gelosi, lesquels au rapport de M. de l’Etoile (que je vais copier ici), « commencerent le dimanche 29 Mai 1577 leurs comédies en l’hostel de Bourbon à Paris ; ils prenoient quatre souls de salaire par teste de tous les François, & il y avoit tel concours, que les quatre meilleurs prédicateurs de Paris n’en avoient pas tous ensemble autant quand ils preschoient... […] Ces mots pourroient donc bien venir de truillon, qui en langage celtique ou bas breton, signifie guenille.
Il a reçu le contrecoup du premier coup de canon qui se soit tiré dans ce bas monde, il a lu le premier livre sorti des presses naissantes du premier imprimeur, il a mangé le premier fruit venu de l’Amérique, il s’est élevé aux écoles de René Descartes et de Despréaux ; il a vu Bossuet face à face, il a souri le premier, aux doctes murmures de Pierre Basyle, il a pleuré, le premier, aux vers du grand Corneille. […] Comme le mariage, il a ses fêtes ; il a ses anniversaires ; il a ses deuils ; il a ses billets d’enterrement. — On a vu, de nos jours, un homme d’un grand esprit à qui la mort charitable enlevait sa maîtresse, mariée à un autre homme, et qui faisait imprimer le billet que voici : « Monsieur Myrtil a l’honneur de vous faire part de la perte douloureuse qu’il vient de faire en la personne de madame Agnès, et vous prie d’assister… » etc. […] La langue qu’il parle est si retenue en ses plus vifs emportements, elle a quelque chose de si réservé, même quand elle ose le plus, elle est si bien le langage de la meilleure compagnie, même quand elle passe par la bouche de Frontin ou de Lisette, qu’il est impossible, aux femmes les plus sévères, de ne pas écouter, malgré elles, et même assez volontiers, ces beaux discours fleuris, à rencontre des choses du cœur, ces folles dissertations d’amour, cette éloquence enivrante qui appartient beaucoup plus aux sens et à l’esprit qu’elle ne vient de l’âme. […] disait-elle, nous sommes venus de bien loin, mon mari et moi, pour vous voir jouer une fois encore, mais nous sommes arrivés trop tard !
Et, vous venez de le voir, cet élément comique, cher à Molière, au début et à la fin de son théâtre, se traduit par des images également sinistres. […] Il dit cela avec fierté, avec orgueil, et ces auteurs de Paris dont il est fier d’être le confrère, je viens de vous les nommer ! […] Telle est l’impression que pour ma part j’ai éprouvée ; je viens de relire Molière, plume en main, pour la troisième fois ; et je ne sais pas s’il a écrit les plus bouffonnes des comédies ou les plus lugubres des drames ! […] Mais Dona Elvire est traduite de l’espagnol, elle ne vient pas de Molière. […] Arnolphe, comme je viens de le dire, n’est pas l’homme le plus intéressant du monde.
Mais un esprit sublime, en vain veut s’élever À ce degré parfait qu’il tâche de trouver : Et toujours mécontent de ce qu’il vient de faire : Il plaît à tout le monde, et ne saurait se plaire ; Toi donc qui vois les maux où ma Muse s’abîme, De grâce, enseigne-moi l’art de trouver la Rime : Ou, puisqu’enfin tes soins y seraient superflus, Molière, enseigne-moi l’Art de ne rimer plus.