Mais qu’elle ait écrit les Lettres au Mercure, où il n’est question ni de son père Du Croisy, le créateur du rôle de Tartuffe, ni de son beau-père Raymond Poisson, le. premier des Crispins, dont Molière enviait le naturel, ni de son mari Paul, excellent comédien, cela me semble inadmissible. […] On ne connaît pas de pièce de ce nom : ce doit être « l’Amant de sa femme », comédie représentée et imprimée cette année même, et dont il est question plus loin.
Molière avait trop bien remarqué, la veille, les préoccupations du comte, pour s’étonner de ses questions curieuses ; il répondit donc, sans se troubler : « Votre visite, Monseigneur, et l’intérêt qui la cause, me font trop d’honneur, pour que je puisse y voir une indiscrétion. […] Ces jours-ci, lors de la reprise de Don Juan au Théâtre-Français, plusieurs bons esprits, et entre autres un des plus excellents et des mieux accrédités, se sont posé cette triple question ; mais ni les uns ni les autres ne sont allés au delà du doute ; personne n’affirma formellement, personne, non plus, ne se mit positivement sur la négative, bien que l’opinion la plus caressée semblât pourtant pencher de ce dernier côté. […] Dans la scène qui précède, ce même Rochemont avait encore trouvé à mordre sur un autre endroit, celui où il est question du Moine bourru. […] » Quand Boileau disait au grand homme, dont l’amitié compte tant dans sa gloire : Enseigne-moi, Molière, où tu trouves la rime, il lui faisait là une question singulière, et Molière, pour y répondre, dut sourire comme souriait Alceste. […] Vu cinquième acte du Misanthrope, dans cette première scène, trop peu remarquée, mais qui nous est, à nous, si précieuse, il est question des efforts tentés par l’adversaire d’Alceste, pour le faire arrêter.
Nous pourrions croire notre tâche terminée, si l’intéressante question mise au concours par la Société ne nous semblait demander, comme son complément nécessaire, de rechercher aussi pourquoi les mœurs, à différentes époques, n’ont exercé qu’une si faible influence, et souvent même n’en ont point exercé du tout sur la comédie. […] Sous Louis XV, au moment où se discutaient ces grandes questions qui changeaient toutes «es idées sociales, on la voit avec Dorat, Marivaux et de La Moue, spirituelle, romanesque et vide. […] Peut-être nous reprochera-t-on, après la lecture de ce travail, de ne nous être pas assez renfermé dans la question proposée; mais il ne faut pas oublier qu’en prescrivant de rechercher l’influence que les mœurs ont exercée sur la comédie, la Société a entendu provoquer, ce sont les termes exprès de son programme, un examen littéraire et philosophique des œuvres comiques qui ont paru sur notre théâtre, avec le plus de succès, depuis Molière. […] Pour le moment nous poserons cette simple question : Celui qui hait ses semblables, alors même que sa haine prendrait sa source dans un sentiment élevé, peut-il être considéré comme un homme vertueux ?
Une infinité de gens ont dit qu’il expira dans cette partie de la Piece ; & que lorsqu’il fut question d’achever son rôle, en faisant voir que ce n’étoit qu’une feinte, il ne put ni parler, ni se relever, & qu’on le trouva mort effectivement.
D’ailleurs Molière est si grand, que cette question lui devient étrangère.
Avant d’essayer un jugement sur la question qui nous occupe, il importe, pour avoir un fil conducteur dans ce dédale de conjectures, de .se faire une idée nette et précise de la poésie dramatique en général, et de la manière dont Molière a compris son art.
Quand il s’agit d’un tel ouvrage, c’est une question à peu près oiseuse que celle du titre ; cependant tout ce qui se rapporte à la plus belle comédie de caractère et de mœurs qui existe au théâtre a une certaine importance, et mérite d’exciter la curiosité publique. […] Aussi, quand Elmire lui adresse cette question : On tient que mon mari veut dégager sa foi Et vous donner sa fille.
Vivonne, étonné qu’un grand-veneur lui fit cette question, répondit brusquement : Quand est-ce que les galères partiront ?