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5. (1769) Éloge de Molière pp. 1-35

Il y avait dans les esprits une force nationale, effet ordinaire des guerres civiles, et qui peut-être n’avait pas peu contribué à former Corneille lui-même. […] Il a dans ses mains l’arme du ridicule, arme terrible, avec laquelle Pascal a combattu une morale dangereuse, Boileau le mauvais goût, et dont Molière a fait voir sur la Scène des effets plus prompts et plus infaillibles. […] Avoir à la fois un cœur honnête, un esprit juste ; se placer à la hauteur nécessaire pour juger la société ; savoir la valeur réelle des choses, leur valeur arbitraire dans le monde, celle qu’il importerait de leur donner ; ne point accréditer les vices que l’on attaque en les associant à des qualités aimables, méprise devenue trop commune chez les successeurs de Molière, qui renforcent ainsi les mœurs au lieu de les corriger ; connaître les maladies de son siècle ; prévoir les effets de la destruction d’un ridicule : tels sont dans tous les temps les devoirs d’un Poète comique. […] Naïveté d’un effet toujours sûr au Théâtre, mais que le Poète ne rencontre que dans les états subalternes, et jamais dans la bonne compagnie, où chacun laisse deviner tous ses ridicules avant que de convenir d’un seul. […] Arrêter ses funestes effets serait-il un dessein moins digne d’un sage ?

6. (1922) La popularité de Molière (La Grande Revue)

Dans son œuvre, comme dans la réalité, le comique est le plus souvent l’effet de deux contrastes aussitôt perçus. […] L’art d’exprimer la disproportion et l’antinomie entre la valeur des causes et leurs effets, entre les raisons de nos actions et nos actions elles-mêmes et non pas seulement, comme chez les bouffons italiens qui furent ses premiers maîtres, des jeux artificiels et faciles de mots et d’attitudes, voilà certes par quoi sa force comique est particulièrement irrésistible. […] Il faut ajouter que si de cette loi des contrastes, il a tiré tous les effets comiques qu’elle comporte, il en a exprimé aussi un élément tragique. […] C’est que, par l’effet d’un grossissement habile, par un art qui n’a jamais été égalé de trouver et d’exprimer les traits significatifs d’un caractère, Molière en impose au spectateur la représentation définitive, en quelque sorte symbolique.

7. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [56, p. 89-93] »

Car il est bien plus difficile de faire des tableaux d’après nature, c’est-à-dire, où on ne s’écarte jamais des idées du commun des hommes, que de s’abandonner à des caprices où le pinceau joue en liberté, et donne comme fait à dessein, ce qui n’est souvent que l’effet du hasard, ou quelquefois même de l’inhabileté, ou de quelque fougue d’imagination, enfin d’une sorte de libertinage de génie qui a secoué le joug... » « Il semble que Molière ait choisi dans les maîtres leurs qualités éminentes pour s’en former un talent particulier. […] Dans la tragédie, le dénouement a un effet qui reflue sur toute236 la pièce : s’il n’est point parfait, la tragédie est manquée.

8. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Ce trait, du genre d’Aristophane, bien rendu par l’acteur, produit un grand effet, et nous pouvons juger par là de la force comique du poète grec. […] On a visé à l’héroïque et au tragique dans un genre qui n’est nullement propre à de tels effets. […] La pièce de la Harpe, intitulée Mélanie, produit constamment cette impression d’angoisse, effet presque inévitable du genre et son éternel écueil. […] La déclamation tragique oscille en France entre deux extrêmes opposés, vers lesquels le ton qui règne dans les pièces mêmes, et le désir de faire effet, entraînent tour à tour les acteurs. […] Voilà une idée et des effets qui prouvent un vrai sentiment de l’art, mais l’exécution laisse encore beaucoup à désirer.

9. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

J’avoue que Molière, avec son génie habituel, a tiré de cette opposition des effets surprenants. […] Si j’ai parlé de cette couronne, c’est qu’elle m’a paru pesante et d’un vilain effet. […] George Dandin nous fait aujourd’hui un effet à peu près semblable. […] Molière a obtenu son effet définitif. […] Ces effets-là ne mènent pas loin.

10. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. De l’Entr’acte. » pp. 289-308

D’un autre côté, on ne peut trop les critiquer, ou du moins les plaindre, quand ils écartent de la scene des choses qui feroient beaucoup plus d’effet que tout ce qu’ils mettent en action. […] Quel effet n’auroit pas produit son Béverlai, s’il nous l’eût fait voir dans l’instant fatal où sa fortune s’engloutit, & entouré de tous les frippons qui se la partagent ! […] Des exemples de l’une & de l’autre espece rapprochés, vont nous faire apprécier leur juste mérite, à raison de l’effet différent qu’ils produisent. […] Le second tableau a banni de mon cœur tout l’effet que le premier y avoit produit.

11. (1847) Le Don Juan de Molière au Théâtre-Français (Revue des deux mondes) pp. 557-567

C’est là, je l’avoue, une opinion assez peu prévue, mais qui ressort pour moi avec évidence de l’effet produit par les représentations qui viennent d’avoir lieu. […] Quelques-unes de ces personnes prétendaient même qu’en un petit nombre de cas la touche un peu rude du copiste produisait plus d’effet au théâtre que les traits plus déliés du modèle. […] Molière, comme on sait, et après lui Mozart, n’ont pas admis dans leurs drames ce second repas, sans doute parce qu’ils ont pensé que l’emploi redoublé d’un ressort surnaturel ne peut avoir qu’un effet languissant sur l’imagination. […] Elles seraient possibles et d’un grand effet.

12. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

La leçon est importante : elle pourrait fournir un beau chapitre de monde; mais aurait-il l’effet de la scène de Molière ? […] et y avait-il quelque proportion entre l’effet et la cause? […] Cela ne vaut-il pas mieux (même dans les rapports moraux, et en mettant de côté l’effet dramatique) que de nous offrir un modèle presque entièrement idéal! […] L’Avare est une de ses pièces où il y a le plus d’intentions et d’effets comiques. […] Est-il possible, par exemple, de peindre mieux l’effet que produit le phébus et le galimatias dans la conversation comme dans les livres, que par ce vers si heureux ?

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