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24. (1874) Leçon d’ouverture du cours de littérature française. Introduction au théâtre de Molière pp. 3-35

C’est à ce moment que le théâtre en France prend un caractère légal, qu’il jouit de la protection des magistrats, qu’il devient une institution permanente et reconnue. […] Reconnaissons aussi que, soit dans les couvents, soit dans les maisons seigneuriales ou princières, il y eut quelques germes de représentations dramatiques, quelques ébauches de mise en scène. […] Assurément il n’est pas malaisé de reconnaître dans mainte et mainte scène de nos vieux Mystères les mœurs bourgeoises ou les usages seigneuriaux du temps. […] Le Sauveur ressuscité se présente à Marie-Madeleine «en forme d’un jardinier; »elle ne le reconnaît point et lui demande si c’est lui qui a enlevé le corps du tombeau. […] »Aussitôt elle le reconnaît et tombe à ses pieds.

25. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Les Aristarques français, et l’opinion qu’ils ont rendue dominante, ne reconnaissent dans la comédie qu’un seul poète classique, Molière. […] Avant de parler en détail de celles des productions de Molière qui sont entièrement à lui, et que l’on reconnaît généralement pour des chefs-d’œuvre, nous ferons encore quelques remarques sur ses pièces imitées du latin. […] Que Marivaux soit maniéré, c’est une chose si généralement reconnue en France, que l’on a même inventé, pour désigner son style, un mot à part, le marivaudage. […] Comment ne pas reconnaître de véritables inspirations romantiques dans de petits opéras tels que Nina et Richard Cœur de Lion ? […] On reconnaît çà et là les membres dispersés du poète, mais tout est si renversé, si tourmenté, une confusion si pénible a remplacé la riche simplicité de l’original, que les passages mêmes qui sont traduits mot à mot, perdent en quelque sorte leur véritable sens.

26. (1852) Molière — La Fontaine (Histoire de la littérature française, livre V, chap. I) pp. 333-352

Cette image fidèle qui ne copie point ce qu’elle représente, cette satire générale sans fiel et sans aigreur, comme Boileau l’a si bien remarqué, nous instruit sans nous blesser, parce que si nous venons, par bonne foi accidentelle, à nous y reconnaître, nous pouvons profiter tacitement de la leçon sans avoir été pris à partie et humiliés. […] Mais lorsque vous peignez les hommes, il faut peindre d’après nature : on veut que ces portraits ressemblent ; et vous n’avez rien fait, si vous n’y faites reconnaître les gens de votre siècle. […] Tous les moralistes reconnaissent qu’il n’y a pas de vice au-dessus de l’hypocrisie sur l’échelle de l’immoralité : pourquoi donc, étant digne de tous les châtiments, ne serait-elle pas justiciable du ridicule ? […] Boileau, qui ne put jamais avouer ni sans doute reconnaître la supériorité de Molière sur Térence, tant était fervente et timorée sa piété envers l’Antiquité ! […] Leur physionomie, si expressive et si distincte, est en même temps si franche et si ouverte que l’humanité n’hésite nulle part à s’y reconnaître.

27. (1886) Molière, l’homme et le comédien (Revue des deux mondes) pp. 796-834

On a reconnu les traits essentiels de cette morale des honnêtes gens que Sainte-Beuve a définie dans Port-Royal avec une si pénétrante justesse. […] Dans tout cela, il faut le reconnaître, la pensée maîtresse du siècle, l’idée chrétienne tient fort peu de place. […] Ce n’est pas le moment de discuter en détail l’inspiration de ces deux pièces, mais il faudrait quelque naïveté ou beaucoup de parti-pris pour s’étonner des protestations d’un Bourdaloue, même d’un Rochemont, et ne pas reconnaître qu’à leur point de vue de croyant et de prêtre, ils n’avaient pas tort de prendre l’alarme. […] Tous les traits essentiels qui y sont tournés en ridicule, le nez en l’air, les yeux égarés, l’épaule en avant, « la tête sur le dos, la perruque plus pleine de lauriers qu’un jambon de Mayence, » tout cela se reconnaît dans le portrait de la Comédie-Française, d’autant plus aisément que le peintre et le satirique ont tous deux représenté leur modèle dans César, de la Mort de Pompée. […] Beaucoup, cependant, partent d’ennemis acharnés, qui n’ont aucunement l’intention de lui faire des complimens ou d’enregistrer ses succès, qui le dénigrent, au contraire, l’injurient, ne lui accordent que des éloges perfides, par exemple lorsqu’ils consentent à le reconnaître bon farceur en ajoutant que c’est là son véritable emploi et qu’il aurait tort de vouloir s’élever plus haut.

28. (1850) Histoire de la littérature française. Tome IV, livre III, chapitre IX pp. 76-132

Je ne reconnais plus là un menteur, mais un reste du faux brave, du fier-à-bras de la farce, de ce matamore de L’Illusion, qui met le Grand Turc en fuite, et force le soleil de s’arrêter. […] On rit du rôle, et on reconnaît la vigoureuse et naïve ébauche de caractère qui est dessous. […] Dans les comédies d’intrigue, on voyait, sortant de la coulisse, la main du poète faisant mouvoir par un fil tous ses personnages ; sous leurs intonations diverses, on reconnaissait sa voix. […] Si l’observation est la marque du génie dans le poète comique, en quoi y a-t-il moins de génie à reconnaître la nature dans l’auteur qu’on lit, qu’à la surprendre sur l’original qui passe ? […] Les gens de goût y reconnaissent la langue la plus près de la pensée, et l’expression la plus parfaite de l’esprit de société dans notre pays.

29. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. M. DE BEAUMARCHAIS. » pp. 442-462

Le Baron arrive, veut aller chez sa fille ; le jeune homme l’arrête : ils mettent l’épée à la main : on apporte des flambeaux ; le Baron reconnoît son fils dans son adversaire : Sir Charles voit avec le dernier étonnement qu’il a mis l’épée à la main contre son pere. […] Cette idée l’afflige au point qu’elle se trouve mal : dans ce temps l’amant qu’elle regrette paroît, elle le prend long-temps pour son esprit : mais elle reconnoît Don Alvar lui-même en qui Jacinthe retrouve son frere. […] Don Pedre reconnoît sa maison, voit que le Comte est l’amant de sa sœur. […] Un honnête homme lui reproche ses indignes procédés pour Fanni : ils la cherchent ensemble, ils voient sur un chemin écarté un enfant de sept ans, beau comme le jour, qui, la larme à l’œil, leur peint ses besoins, ceux de sa mere & de son grand papa : ils le suivent ; le Lord reconnoît Fanni, se jette à ses pieds, lui demande pardon : elle lui présente son fils & le conduit vers le lit de son pere.

30. (1865) Les femmes dans la comédie de Molière : deux conférences pp. 5-58

Enfin, lorsqu’elle a reconnu la bassesse du savant et la noble conduite de Clitandre, elle reconnaît franchement son erreur et revient à lui sans arrière-pensée. […] Tels sont les traits principaux que nous allons reconnaître dans le caractère de Célimène. […] C’est une vérité reconnue même des savants, j’entends les savants qui se piquent de quelque galanterie, que les années ont plus de douze mois pour les dames. […] Si je me trompe en croyant la reconnaître, n’aurai-je pas le droit et même le devoir de tenter une nouvelle épreuve ? […] Ce n’est plus Henriette qu’elle s’appelle, c’est Elmire ; mais sous un autre nom vous reconnaîtrez la même personne.

31. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Quant aux diverses parties de l’œuvre poétique, il vous sera facile de les reconnaître, à savoir : la proposition, le nœud, le dénouement, l’imprévu, la difficulté, le retard, la péripétie au moment où tout est perdu… où tout est sauvé. […] Bouchardy, qui est dans son genre un géant aux pieds d’argile, et l’on se demande comment il a fait pour reconnaître, lui-même, au fond des cinq actes où ils s’agitent et se débattent en poussant leurs gloussements, les divers personnages de Christophe le Suédois ? […] Et moi, cependant, témoin des pressentiments égrillards de la petite Agnès, vous ne voulez pas que je m’attriste quand je viens à reconnaître, dans cette enfant qui débite en rougissant tout l’esprit de Molière, la même petite fille que j’ai rencontrée si souvent, suspendue au bras de sa mère et se promenant sous les orangers des Tuileries ? […] Ces grands hommes, l’honneur de l’esprit humain, reconnaissaient très volontiers les devoirs de la critique ; ils étaient, avant tout, de véritables hommes de lettres, et ils prouvaient, par leur exemple, que cette qualité d’homme de lettres est la plus grande et la plus honorable dont se puisse décorer un galant homme. […] Mademoiselle Duparc, envieuse et jalouse, c’était la prude Arsinoé ; mademoiselle de Brie, indulgente et dévouée, sera plus tard la sage Éliante ; mademoiselle Molière, vive, agaçante, coquette, est déjà Célimène, et le Misanthrope, ne le reconnaissez-vous pas dans Molière ?

32. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

On reconnaît la meilleure et la plus honnête nature du monde dans le peintre hardi des ridicules de son époque. […] Dans cette noble fierté, ou reconnaît l’auteur du Misanthrope. […] Il a érigé l’égoïsme en système; il ne reconnaît que la volupté ! […] Je ne reconnais pas l’auteur du Misanthrope. […] On va reconnaître la franchise qui caractérise tous les personnages de Dancourt.

33. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Il faut le reconnaître : c’étaient là des imitations, et l’on pourrait presque dire des traductions libres du théâtre italien. […] On reconnaît la scène iv du premier acte du Dépit amoureux et les contradictions du malheureux Mascarille. […] Il n’en faut d’autre preuve que la profonde sensation que fit la petite pièce, et l’originalité saisissante et hardie que le public lui reconnut. […] C’est bien possible, mais ce canevas, tel que Cailhava l’a traduit, est certainement d’une date plus récente que la comédie de Molière : cela se reconnaît aux seuls noms des personnages. […] Mais il convenait de reconnaître la part considérable que l’art antérieur de l’Italie occupe dans les commencements de sa carrière, pour montrer combien cet art avait contribué à son éducation dramatique.

34. (1819) Notices des œuvres de Molière (III) : L’École des femmes ; La Critique de l’École des femmes ; L’Impromptu de Versailles ; Le Mariage forcé pp. 164-421

Ces divers ridicules étaient peints avec trop de vérité et de vivacité dans La Critique, pour que ceux qui avaient servi de modèles, reconnus par tout le inonde, ne se reconnussent pas eux-mêmes, et n’en devinssent pas plus furieux contre l’auteur. […] Boursault, qui eut, dit-on, la malheureuse fantaisie de se reconnaître dans le Lysidas de La Critique, eut l’idée plus malheureuse encore d’en vouloir tirer vengeance, en faisant Le Portrait du peintre, ou la Contre-critique de l’École des femmes. […] Les comédiens de l’hôtel de Bourgogne, moins piqués de quelques traits qu’il avait lancés contre eux, que jaloux des succès toujours croissants du théâtre dont il était le fondateur et le soutien, cherchèrent un champion capable de bien servir leur ressentiment ; et ils crurent l’avoir trouvé dans Boursault, auteur encore obscur de quelques mauvaises comédies, à qui Molière n’avait peut-être jamais songé, mais qu’une des plus perfides suggestions de l’amour-propre avait porté à se reconnaître dans le personnage de Lysidas. […] L’auteur de ce commentaire possède un de ces portraits : la perruque farcie de laurier, l’épaule en avant, la main sur la hanche ; tout s’y trouve, et la peinture héroïque de Mignard force à reconnaître une certaine fidélité dans la description grotesque de Montfleury. […] La bouffonnerie entrait dans le plan de Molière, qui voulait amuser une jeune cour dans cette saison de l’année où le plaisir ressemble à la folie ; et ce n’est sûrement pas de la bouffonnerie sans agrément, que la scène où Sganarelle fait sortir, à coups de bâton, Marphurius de son scepticisme obstiné, le force à reconnaître une certitude, celle de la douleur, et, changeant avec lui de rôle, lui conseille à son tour de substituer le langage du doute à celui de l’affirmation : cette revanche si comique n’appartient pas à Rabelais, et Molière ici, comme à son ordinaire, s’approprie ce qu’il emprunte, en le perfectionnant.

35. (1919) Molière (Histoire de la littérature française classique (1515-1830), t. II, chap. IV) pp. 382-454

Il résulte de là une intrigue fort embrouillée et extravagante  : Thomas Corneille reconnut lui-même plus tard — dans l’édition de 1660 — la faiblesse de son sujet ; de ses sujets en général, aurait-il pu dire. […] Chacun des spectateurs de ses pièces peut se reconnaître, ou reconnaître son voisin, dans ces personnages français. […] On reconnaît là l’idée fondamentale de la « philosophie » de Rabelais. […] Ils reconnurent dans l’Ecole des Femmes une intention qui la passait elle-même. […] S’ils avaient pu s’y méprendre un instant, c’est ce qu’ils reconnurent tous,quand,après bien des difficultés, Tartufe, en 1669, parut enfin publiquement sur la scène.

36. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXIX. Des Caracteres propres aux personnes d’un certain rang seulement. » pp. 312-327

Dès qu’un homme devient membre de quelque College, il lui tombe une taie sur les yeux, de sorte qu’il ne reconnoît plus même ses meilleurs amis. . . . . […] La femme d’un Serrurier qui étoit bonne amie de Madelaine, & qui lui avoit souvent prêté de l’argent, arrive pour la féliciter ; Madelaine ne la reconnoît plus & la fait mettre à la porte. […] Le Boug-mestre maudit sa charge, les livres où il a puisé sa manie ; & ne sachant plus où donner de la tête, il va se pendre, quand Antoine vient lui annoncer qu’on n’a feint de l’élire Bourg-mestre que pour se moquer de lui : il en est enchanté, & reconnoît sa folie.

37. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

Laujon avait donné l’édition complète de ses œuvres ; on y reconnaît un esprit fin, un travail facile, une aimable négligence. […] Églé et l’Amoureux de quinze ans sont deux tableaux d’un dessin pur et gracieux ; et cependant, lorsque l’auteur se livre à des compositions dramatiques, on voit que c’est encore la muse de la chanson qui l’inspire ; elle veut essayer un ton plus grave, des manières plus imposantes, mais elle se trahit à la naïveté de son langage, à la délicatesse de ses formes, et l’œil le moins clairvoyant reconnaît Érato sous le masque de Thalie. […] si tu revivais parmi nous, divin Molière, tu les reconnaîtrais encore !

38. (1885) La femme de Molière : Armande Béjart (Revue des deux mondes) pp. 873-908

Un exemplaire de cette tragédie, qui faisait partie de la bibliothèque Soleinne, donne, en face des personnages, une liste manuscrite d’acteurs ; ces noms sont ceux des camarades de Molière, on prétend même y reconnaître l’écriture de celui-ci. […] Or, quiconque est un peu familier avec l’envers du théâtre, reconnaît dans la Fameuse Comédienne un parfum de coulisses prononcé. […] Faut-il aller plus loin, et y reconnaître, comme on le veut, l’esprit ou la main de Molière lui-même, que ce soit un compte-rendu écrit de souvenir par Chapelle, ou une lettre adressée par Molière à son ami, compte-rendu ou lettre tombés dans les mains du libelliste ? […] Elle s’indigne, il s’emporte ; dans un collier qu’elle portait, il croit en reconnaître un dont il avait fait présent à La Tourelle et il le lui arrache ; la garde arrive au bruit et il est arrêté. […] Peut-on, sa situation une fois connue, ne pas reconnaître que la nécessité d’un second mariage s’imposait à elle ?

39. (1705) La vie de M. de Molière pp. 1-314

Il ne cachait point ces sentiments, et il disait publiquement qu’il ne cherchait point à se remettre avec lui, parce qu’il s’en reconnaissait indigne. […] Mais il ne le reconnut point. […] Mais s’il revenait aujourd’hui il ne reconnaîtrait pas ses ouvrages dans la bouche de ceux qui les représentent. […] Vous eût-on reconnu dans un caractère si opposé au vôtre ? […] Dans ce sac ridicule où Scapin s’enveloppe, Je ne reconnais plus l’auteur du Misanthrope, etc.

40. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre III » pp. 30-37

Aussi Boileau lui-même y reconnaît-il « une narration également vive et fleurie, des fictions très ingénieuses, des caractères aussi finement imaginés qu’agréablement variés et bien suivis Il fut fort en estime même des gens du goût le plus exquis17 ». […] À peine le Ier volume de L’Astrée parut, qu’on y reconnut, dit Patru, une pastorale allégorique , un assemblage d’histoires des amours de d’Urfé avec Marguerite de Valois, avec Diane de Châteaumorand, et d’autres amours du temps.

41. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

Le succès de cet ouvrage, que l’auteur reconnaît être fort défectueux, « fut, dit-il, surprenant ; il donna lieu à l’établissement d’une nouvelle troupe de comédiens malgré le mérite de celle qui était en possession de s’y voir l’unique ». […] On peut reconnaître encore des différences entre la naïveté pastorale, la naïveté comique, la naïveté érotique.

42. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE PREMIER. Des différents Genres en général. » pp. 1-8

Je veux que le Clinquant rentre dans la bassesse D’où l’avoit su tirer le manque de justesse, Et qu’il soit reconnu du public assemblé, Pour un fils du Faux-goût, méprisable & sifflé. […] Tout le monde a reconnu dans les bons Auteurs comiques trois especes de pieces, pieces à intrigue, pieces à caractere, pieces mixtes, c’est-à-dire, qui tiennent des deux premieres : mais tout le monde n’a peut-être pas senti que les pieces à intrigue, que les pieces à caractere, que les pieces mixtes sont variées à l’infini dans leur construction, dans leur marche ; que chacun de ces trois genres en a plusieurs autres, qui doivent être traités différemment, & qui l’ont été par les meilleurs maîtres de l’art chez toutes les nations.

43. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XX. Des Pieces intriguées par le hasard. » pp. 223-240

Dom Félix veut courir après la dame voilée pour tâcher de la reconnoître : Laura l’arrête en lui disant qu’il la connoît assez. […] Cependant Démiphon devient veuf, revient à Sicyone, voit par hasard Phanostrate, & l’épouse sans la reconnoître pour la personne qu’il a jadis violée. […] On apporte les joujous d’enfant, pour les faire reconnoître par la mere de la fille exposée.

44. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII. La Chaussée, imitateur de Regnard, d’un Auteur Espagnol, d’un Auteur Italien, d’un Romancier François, &c. » pp. 262-276

Nous avons encore vu dans le second volume de cet ouvrage, Chapitre XIX, des Pieces intriguées par un déguisement, que cette comédie, imitée de l’espagnol, étoit passée sur notre théâtre avec tous les défauts de son modele, puisque, comme dans l’original, l’héroïne déguisée en femme y suit son amant, vit familiérement avec lui, le charme par les agréments de sa voix, & lui donne son portrait sans en être reconnue, quoiqu’elle ait déja été très bien avec lui sous l’habit de femme. […] Un jour elle l’apperçoit, révele son secret à Théodon : celui-ci parle au Marquis, qui, trop épris de Rosalie, avoue que Mélanide prend mal son temps pour se faire reconnoître. […] Mélanide paroît, tombe avec son fils aux pieds du Marquis, qui reconnoît ses torts, embrasse sa femme, & marie Darviane avec Rosalie.

45. (1663) Nouvelles nouvelles pp. 210-243

Et comme, loin de combattre les mauvais goûts du siècle et de s’opposer à ses appétits déréglés pour lui faire reconnaître son erreur, ils s’accommodent à sa faiblesse, il ne faut pas s’étonner si ce même siècle leur donne des louanges que la postérité ne leur donnera sans doute pas. […] Pendant cela, notre Auteur fit réflexion sur ce qui se passait dans le monde, et surtout parmi les gens de qualité, pour en reconnaître les défauts. […] Et de fait, après que l’on eut joué Les Précieuses, où ils étaient et bien représentés et bien raillés, ils donnèrent eux-mêmes, avec beaucoup d’empressement, à l’Auteur dont je vous entretiens, des mémoires de tout ce qui se passait dans le monde et des portraits de leurs propres défauts et de ceux de leurs meilleurs amis, croyant qu’il y avait de la gloire pour eux que l’on reconnût leurs impertinences dans ses Ouvrages et que l’on dît même qu’il avait voulu parler d’eux.

46. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

À je ne sais quels signes imperceptibles, l’écrivain le plus oublieux et le plus négligent de ses œuvres, une fois qu’elles sont lancées dans le torrent, les reconnaît cependant comme on reconnaît un vieil ami qui a fait un long voyage. […] Mais son ami le reconnaît à ce petit coin du sourire, à ce son argenté de la voix, au feu du regard ; surtout il les reconnaît, parce qu’il a conservé le souvenir, le respect et la fidélité des jeunes années. […] peut-être aurais-je quelque honte à te reconnaître en public ; en revanche, quand nul ne me verra, je te veux dévorer ligne à ligne ! […] À reconnaître ainsi ses premiers essais au milieu des étincelles éteintes, on éprouve une tristesse qui n’est pas sans charme. […] ne reconnaît plus au pouvoir le droit de lier ou de délier à son gré ; le pouvoir est soumis à la justice.

47. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. De la Décence & de l’Indécence. » pp. 314-341

Dans Plaute, Amphitrion, après avoir reconnu son rival, est dévoré d’un grand chagrin ; le voici. […] Le Chevalier s’est introduit auprès de sa maîtresse en qualité de maître Italien ; son oncle le fait reconnoître sans le vouloir : voici comment cet honnête neveu lui parle : ACTE IV. […] Moliere, non content de prendre un sonnet & un madrigal dans les ouvrages imprimés de Cotin, pour les analyser & les déchirer sur la scene, avec toute la cruauté possible, parodia encore, avec la plus grande indécence, le nom du pauvre Abbé ; & l’acteur qui joua le rôle de Trisotin ou de Tricotin 47, eut le soin de prendre un habit, un son de voix & des gestes propres à faire reconnoître l’original. […] La comédie de la Femme Juge & Partie eut un succès prodigieux, non pas tant à cause de son mérite, que parcequ’on crut y reconnoître l’histoire du Comte de ***, qui avoit vendu sa femme à un Corsaire.

48. (1858) Molière et l’idéal moderne (Revue française) pp. 230-

Et cependant, si je reconnaissais là un côté de moi-même, je ne me reconnaissais pas tout entier, je n’étais pas enveloppé dans l’œuvre de Molière. […] Singulier contrat qui porte sur un fait reconnu faux par les deux contractants !

49. (1734) Mémoires sur la vie et les ouvrages de Molière (Œuvres de Molière, éd. Joly) [graphies originales] pp. -

11 Il produisit une réforme générale ; on rit, on se reconnut, on applaudit en se corrigeant. […] Il supprima la derniére piéce, quand il crut que le mérite de la premiére avoit été reconnu ; sans cette adresse, le misantrope devenoit la victime de l’injustice ou de l’ignorance. […] La raillerie fine de Dorine, dans la scéne avec son maître, nous découvre Orgon tout entier, & nous prépare à reconnoître Tartuffe dans le portrait de l’hypocrite, que Cléante oppose à celui du vray dévôt. […] On reconnut dans monsieur Jourdain un ridicule commun à tous les hommes dans tous les états ; c’est la vanité de vouloir paroître plus qu’ils ne sont. […] Plaute n’auroit pas rejetté le jeu même du sac, ni la scéne de la galére, rectifiée d’après Cyrano, & se seroit reconnu dans la vivacité qui anime l’intrigue.

50. (1692) Œuvres diverses [extraits] pp. 14-260

Mais sitôt que, d’un trait de ses fatales mains La Parque l’eût rayé du nombre des Humains ; On reconnut le prix de sa Muse éclipsée. […] Dans ce sac ridicule où 1 Scapin s’enveloppe, Je ne reconnais plus l’Auteur du Misanthrope.

51. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

Fulvio survient encore une fois mal à propos, partage la colère de Lavinia, dément Scapin et ne reconnaît son tort que lorsque Scapin lui explique dans quel but il avait conçu ce projet. […] Le capitaine reconnaît sa fiancée Laudomia.

52. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IV. Brueys & Palaprat, imitateurs, comparés avec Térence, Blanchet, un Auteur Italien, & la nature. » pp. 100-132

Bartholin Juge donne audience, Agnelet y paroît avec la tête enveloppée : Guillaume vient lui-même plaider sa cause ; Patelin est surpris de le voir, se cache le visage : le marchand le reconnoît, fait un galimatias de six aunes de mouton, de six vingts draps, de trente écus couleur de marron. […] On vient dire au Baron qu’un homme le demande dans la cour ; c’est Simon qui déclare au bon-homme toutes les fourberies de Frontin, & qui est reconnu lui-même pour le frere de la nourrice de Zaïde. […] Pour peu qu’on soit familiarisé avec le théâtre italien, on reconnoît aisément Arlequin dans l’impatience que Simon a pour l’heure du dîner, & dans son zele ardent pour la clef de la cave. […] On peut encore reconnoître dans le rôle du Baron la bêtise de Pantalon, & dans son affectation à traduire ce que dit Frontin la maniere des Acteurs Italiens pour se rendre intelligibles à ceux des spectateurs qui n’entendent pas leur langue.

53. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

Je me hâte de reconnaître que Mlle Emilie Dubois, chargée maintenant du rôle d’Agnès, ne commet pas cette bévue, et accepte franchement l’ingénuité du personnage. […] En cette occasion, je me hâte de le reconnaître pour justifier Mme Plessy, personne ne songe à invoquer la tradition. […] J’imagine que si l’auteur pouvait assister maintenant à la représentation du Misanthrope, il aurait grand’peine à reconnaître son ouvrage et demanderait ce qu’on joue. […] Cependant il faut reconnaître que depuis Firmin et Menjaud personne n’a compris ce rôle aussi bien que lui.

54. (1910) Rousseau contre Molière

Il faut reconnaître cela, pour ne pas accuser Molière d’une absolue inconscience et d’une absolue immoralité. […] Reconnaissez-le ; le berneur aime toujours sa berne. […] Je reconnais qu’il n’est pas d’une vérité moyenne et facilement vérifiable qu’un valet bâtonne son maître. […] Et donc il reconnaît lui-même qu’Arnolphe est « honnête homme ». […] Il y a ceci de remarquable, que Brunetière reconnaît lui-même qu’elle est inexacte.

55. (1870) La philosophie dans le théâtre de Molière (Revue chrétienne) pp. 326-347

Tout d’abord, on prétend qu’il a attaqué le principe lui-même, et dans le scepticisme universel de Marphurius, on croit reconnaître une parodie du doute, si fort recommandé dans les premières pages du Discours de la Méthode. […] Le lecteur a reconnu les deux définitions du corps et de l’âme, de la matière et de l’esprit, selon Descartes. […] De plus, nous avons reconnu qu’il se moquait, et à juste titre, peut-être, d’un spiritualisme poussé à l’extrême ; il serait plus vrai de dire à l’excès. […] Car si l’on peut lui reprocher de n’avoir pas même toujours su se maintenir à cette modeste hauteur, et d’être tombé plus bas encore dans telle ou telle scène justement blâmée, — hâtons-nous de le reconnaître, il a voulu, disons mieux, il a dû parfois s’élever plus haut et faire entendre quelques-uns de ces aveux qui suffiront toujours pour lui gagner les sympathies des esprits les plus sévères. — On dirait en effet à certains moments que, fatigué de se traîner toujours dans cette atmosphère plus ou moins énervante de nos instincts et de nos passions, il a senti lui aussi le besoin de prendre son vol vers ces cimes sublimes de la conscience et du devoir, où l’air est toujours pur, et la lumière d’en haut toujours rayonnante. […] « Aristote a toujours été reconnu dans l’Université pour juge sans appel, et non comptable de ses opinions » Arrêt burlesque de Boileau.

56. (1746) Notices des pièces de Molière (1658-1660) [Histoire du théâtre français, tome VIII] pp. -397

Mais sitôt que d’un trait de ses fatales mains, La Parque l’eut rayé du nombre des humains, On reconnut le prix de sa Muse éclipsée, L’aimable Comédie avec lui terrassée, En vain d’un coup si rude espéra revenir, Et sur ses brodequins ne put plus se tenir. […] Trop de complication dans le nœud, et trop peu de vraisemblance dans le dénouement : cependant on y reconnaît dans le jeu des personnages une source du vrai comique ; pères, amants, maîtresses, valets, tous ignorent mutuellement les vues particulières qui les font agir : ils se jettent tour à tour dans un labyrinthe d’erreurs, qu’ils ne peuvent démêler. […] « Après le succès de ces deux pièces, son théâtre commença à se trouver continuellement rempli de gens de qualité, non pas tant pour le divertissement qu’ils y prenaient (car l’on n’y jouait que de vieilles pièces), que parce que le monde ayant pris habitude d’y aller, ceux qui aimaient la compagnie, et qui aimaient à se faire voir, y trouvaient amplement de quoi se contenter : ainsi l’on y venait par coutume, et sans dessein d’écouter la comédie, et sans savoir ce qu’on y jouait. » « [*]Pendant cela notre auteur fit réflexion sur ce qui se passait dans le monde, et surtout parmi les gens de qualité, pour en reconnaître les défauts : mais comme il n’était encore ni assez hardi pour entreprendre une satire, ni assez capable pour en venir à bout, il eut recours aux Italiens ses bons amis, et accommoda les Précieuses au théâtre français, qui avaient été jouées sur le leur, et qui leur avaient été données par un abbé des plus galants*. […] « Il apprit que les gens de qualité ne voulaient rire qu’à leurs dépens ; qu’ils voulaient que l’on fît voir leurs défauts en public ; qu’ils étaient les plus dociles du monde, et qu’ils auraient été bons du temps où l’on faisait pénitence à la porte des temples, puisque loin de se fâcher de ce que l’on publiait leurs sottises, ils s’en glorifiaient : et de fait, après que l’on eut joué les Précieuses, où ils étaient bien représentés et bien raillés, ils donnèrent eux-mêmes, avec beaucoup d’empressement, à l’auteur dont je vous entretiens, des mémoires de tout ce qui se passait dans le monde et des portraits de leurs propres défauts, et de ceux de leurs meilleurs amis, croyant qu’il y avait de la gloire pour eux que l’on reconnût leurs impertinences dans ses ouvrages, et que l’on dît même qu’il avait voulu parler d’eux : car vous saurez qu’il y a de certains défauts de qualité dont ils font gloire, et qu’ils seraient bien fâchés que l’on crût qu’ils ne les eussent pas. […] Cette scène est interrompue par l’arrivée de M. de Gréval, ami des précieuses, qui reconnaît Picorin pour un laquais de feu M. 

57. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

Me reconnaît-on pas un sentiment : de faiblesse dans ces hommages inquiets et timides qu’il rend à ses maîtresses, et qui semblent moins solliciter leur affection que leur appui ? […] Voiture s’était fait remarquer, dès l’âge de quinze ans, par une longue épitre au roi, ouvrage de jeune homme, mais où, parmi les antithèses et les jeux de mots, on ne peut s’empêcher de reconnaître de l’esprit, du talent et surtout de l’élévation.

58. (1848) De l’influence des mœurs sur la comédie pp. 1-221

Chérubin et le comte Almaviva ne reconnaissent pas la comtesse qui prend la voix de Suzanne ; Figaro ne reconnaît pas Suzanne qui prend la voix de la comtesse ; et pas un non plus des personnages enfermés dans le pavillon ne se reconnaissent à la voix. […] On peut encore reprocher à Picard le laisser-aller de son style, bien qu’il trouve à sa prose « un cachet d’originalité qui tout d’abord, dit-il, doit la faire reconnaître[…] Il ne reconnaît plus son Paris, qu’il prétend qu’on lui a gâté. […] Si, en effet, le ridicule est ce que les hommes redoutent surtout, plus encore que d’être reconnus pour méchants, la loi suprême du poëte doit être, sans contredit, de faire rire aux dépens des vicieux. […] N’est-ce pas, au contraire, une vérité reconnue que dans les organisations, même les plus fortes, soit eu bien, soit en mal, on rencontre souvent des penchants contradictoires, des anomalies, des inconséquences singulières ?

59. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Molière, pour fermer la bouche à ses ennemis qui l’accusaient d’être un esprit fort, un impie, un athée, reconnut qu’il devait faire une profession de foi solennelle de ses principes religieux ; il voulut fermer la bouche à ses calomniateurs, et se préparer à la lutte terrible qu’il était sur le point de soutenir. […] Ainsi les Tartuffes, en accusant Molière, prouvaient la vérité de ses portraits ; ils mettaient leurs noms au bas comme si on ne les eût pas suffisamment reconnus. […] Les amis de Molière crurent devoir réfuter cette diatribe ; elle n’était pas digne d’une réponse : l’envie porte avec elle son contrepoison ; elle rehausse le mérite en s’efforçant de l’abaisser ; plus elle le nie, plus elle le reconnaît. […] La débauche de ses filles, la persécution de ses gendres, ne le touchent plus ; toutes les intrigues se débrouillent, les ennemis se réconcilient, les deux jumeaux se reconnaissent, la paix et la joie rentrent dans le sein de la famille, le tout par les soins de l’hypocrite, qui emploie toujours un langage mystique, et quelquefois des moyens peu délicats, mais qui au fond rend service à tout le monde, et ne travaille que secondairement pour lui-même. […] » L’admirable scène où Tartuffe, accusé par Damis, se reconnaît coupable de tous les crimes, est imitée d’une nouvelle de Scarron intitulée Les Hypocrites.

60. (1816) Molière et les deux Thalies, dialogue en vers pp. 3-13

Oui, je ne sais comment je vous ai reconnue, À cet air triste et froid. […] À cet air précieux, à cette mine austère, Qui vous reconnaîtrait ?

61. (1911) L’Étourdi de Molière et Le Parasite de Tristan L’Hermite (De Jodelle à Molière) pp. 292-302

Il est reconnu de Manille, veut faire pendre Lisandre, et enfin consent à unir les deux amoureux. […] S’il est ainsi, vous perdrez la raison ; A l’heure qu’il faudra jaser comme un oison, Vous deviendrez muet, et peut-être Manille Prendra quelque soupçon que vous aimez sa fille ; Que de son fils absent vous empruntez le nom, Et venez comme en masque apporter un momon ; Rengainez votre amour, cachez sa violence, Et vous souvenez bien des choses d’importance ; Il faut de la mémoire à qui sait bien mentir, N’oubliez pas les noms de Jaffe ni de Tyr, Vous citerez encore d’autres lieux de Syrie Pour vous conduire enfin jusqu’en Alexandrie, Où vous avez trouvé ce marchand Marseillais Qui vous a reconnu pour chrétien, pour Français, Pour natif de sa ville, et d’honnête famille, Et vous a racheté.

62. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. Des Comédies Héroïques. » pp. 9-29

Elle reconnoît l’objet de son amour dans le héros qui lui sauve la vie. […] Il reconnoît alors que le bras de Dieu s’appesantit sur lui, & punit son amour pour Dalila. […] Il pousse aussi-tôt de ce côté-là, & joint les Députés comme ils étoient près d’arriver : c’est par son arrivée que l’aventurier Carlos est reconnu pour le Prince Don Sanche, après quoi la Reine D.

63.

Mais le cynique a lu Boileau et ne reconnaît pas l’auteur du Misanthrope « dans le sac ridicule où Scapin l’enveloppe ». […] Sous la table, Orgon a une physionomie très accentuée ; dans le dessin un peu confus, on reconnaît un vêtement court, une soutanelle boutonnée, avec rabat uni. […] Mais il faut bien reconnaître que, dans ses chefs-d’œuvre, Molière évite la note contemporaine ; et l’on ne saurait l’en blâmer. […] J’avais cru reconnaître notre Vinot dans le Robert Vinot « composeur de sauces », dont B.  […] Au bas des affiches du Marais, on reconnaît les grotesques de Callot.

64. (1725) Vie de l’auteur (Les Œuvres de Monsieur de Molière) [graphies originales] pp. 8-116

Boursaut avoit cru se reconnoître dans Lisidas Personnage de la Critique de l’Ecole des Femmes. […] Mais il ne le reconnut point. […] C’est une farce à ne la regarder que du côté de l’intrigue ; mais c’est une farce de Moliere, & on l’y reconnoît par tout, quoi qu’il y soit fort au-dessous de lui-même. […] Vous eût-on reconnu dans un caractere si opposé au vôtre ? […] Si nous en croions les Menagiana, il fut assez debonnaire pour ne se pas vouloir reconnoître dans un portrait si bien marqué.

65. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

L’Italie le reconnut et le proclama elle-même avec un enthousiasme qui fut porté jusqu’à l’excès et lui fit répudier l’antique génie de la nation. […] Santeul se refusa absolument à le reconnaître et prétendit que ce visiteur solennel n’avait rien de commun avec Arlequin.

66. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

C’est sans doute une preuve de sagacité d’avoir reconnu le fond des intentions du poète ; mais n’avoir point remarque que la direction franche et naturelle est détournée dans l’exécution, que le trait primitif du dessin tracé dans la pensée de l’auteur s’est à peu près effacé et pour ainsi dire oblitéré dans l’ouvrage, et n’avoir point pénétré le motif de cette altération, c’est n’avoir pas porté la sagacité assez loin. Si on l’avait exercée à découvrir pourquoi ce poète, si heureux pour l’ordinaire dans le choix de ses sujets, qui marque toujours si clairement son but, qui y marche si franchement, a manqué ici de ces mérites, on aurait reconnu ce qu’il y avait d’embarrassant dans sa position en face de la société qu’il voulait attaquer pour plaire au roi, et qui, puissante dans l’opinion, gagnait tous les jouis dans l’esprit du roi lui-même.

67. (1819) Notices des œuvres de Molière (IV) : La Princesse d’Élide ; Le Festin de Pierre pp. 7-322

Le poète qui a fourni à Molière le sujet de La Princesse d’Élide, est Augustin Moreto, reconnu supérieur, dans le genre de la comédie, à Caldéron, son compatriote et son contemporain. […] A la vérité, le comédien Dorimond a donné pour second titre à sa pièce celui de L’Athée foudroyé ; mais ce n’est qu’une qualification sans exactitude ; car ce prétendu athée reconnaît formellement la divinité en plus d’une occasion, sans qu’on puisse supposer en lui l’intérêt ni la volonté de tromper. […] Lorsque ensuite il ne lui est plus possible de douter de la réalité de ce phénomène, il s’en irrite plutôt qu’il n’en est troublé ; il appelle au secours de son incrédulité aux abois, son orgueil qui rougirait de reconnaître un pouvoir qu’il a toujours méconnu ; et, sans avouer, sans éprouver peut-être ni terreur ni repentir, il se précipite en déterminé dans l’abîme d’éternels supplices que le ciel ouvre enfin sous ses pas.

68. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Madame de La Sablière eut le malheur de remarquer que l’astrolabe sert à mesurer la hauteur des astres et non à reconnaître si la terre tourne ou est fixe ; et que parallaxe est du féminin. […] La Fontaine, entraîné par son goût pour le plaisir, suivait le torrent ; et cependant il avait déjà quelques pressentiments du nouveau système de vie qu’il devait professer plutôt qu’embrasser deux ans plus tard, système dont il reconnut la convenance quand il fut élu à l’Académie, et que madame de La Sablière se livra sans partage à la vie pieuse. […] Mais sans considérer que toutes ces personnes n’avaient pas besoin d’un bien grand discernement pour reconnaître si elles ou leurs amis étaient l’objet de satires courantes, il aurait suffi de leur supposer un peu de cette curiosité maligne qui ne manque jamais aux bénévoles auditeurs d’une satire.

69. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [9, p. 41] »

1775, Anecdotes dramatiques, tome I, p. 408 Lorsque Molière se préparait à donner son George Dandin, un des ses amis lui fit entendre qu’il y avait dans le monde un Dandin qui pourrait se reconnaître dans la pièce, et qui était en état, par sa famille, non seulement de le décrier, mais encore de le desservir dans le monde.

70. (1801) Moliérana « Préface »

Ceux-ci ont fait un roman ; ceux-là, plus scrupuleux, ont fait un abrégé si court qu’il est impossible de reconnaître l’auteur du Misanthrope.

71. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLIII. Du But Moral. Philosophie de Regnard comparée à celle de Moliere. » pp. 504-548

Les tristes soupirants de Thalie ont beau s’écrier que le rire est devenu bourgeois, la Muse reconnoît leur impuissance à travers le faux-fuyant ; leur sérieux de qualité ne lui en impose point ; elle rejette leur hommage ennuyeux. […] Vous en faites aujourd’hui un portrait frappant : tout le monde se récrie sur la ressemblance, & applaudit : demain, graces à la légéreté de l’original, on ne le reconnoît plus ; le tableau ne représente qu’un fatras ridicule de choses dont on se souvient à peine, & dépare la galerie dont il faisoit l’ornement. […] A ces traits on reconnoît Regnard : nous allons jetter un coup d’œil rapide sur chacun de ses ouvrages. […] Moliere, fâché de voir la plus belle moitié de l’espece humaine déguiser ses graces naïves sous de pareils ridicules, les expose sur la scene dans les Précieuses ridicules ; ils frappent même ceux qui les érigeoient en agréments : on rit, on se reconnoît, on applaudit, on se corrige, & la piece produit une réforme aussi subite que générale. […] combien ton ame sublime dut s’estimer heureuse, quand tu triomphas de l’hypocrisie, & que tu fis reconnoître ce monstre à sa voix, à ses affectations, à son adresse, à ses amours exécrables, à son ingratitude, à son audace, à sa lâcheté, à sa barbarie ; quand enfin tu l’abattis à tes pieds, & que tu lui arrachas son masque !

72. (1824) Notices des œuvres de Molière (VIII) : Le Bourgeois gentilhomme ; Psyché ; Les Fourberies de Scapin pp. 186-466

Jourdain est le type de cette manie universelle : il n’y a qu’à descendre ou à monter, en idée, l’échelle des rangs ; et, dans ce bourgeois qui fait le gentilhomme, on reconnaîtra toutes les espèces de gens qui veulent sortir de leur condition. […] La plupart, et Fulgence le premier, y ont vu une image de l’union de l’âme et du corps, ou plutôt de l’empire des passions sur l’âme ; d’autres y ont aperçu la peinture de l’homme profane régénéré par son admission aux mystères ; des théosophes, sans s’inquiéter si une fiction du paganisme pouvait se prêter raisonnablement à une interprétation toute chrétienne, y ont reconnu le péché originel effacé par la rédemption ; enfin, un savant danois de nos jours y a découvert un mythe moral, faisant partie de ces mystères (sacra) auxquels les femmes seules étaient initiées, et destiné à être représenté devant elles, sous la forme d’un drame symbolique (symbolica et dramatica representatio), afin de leur rappeler les dangers qui assiègent la beauté, les devoirs que la femme mariée doit accomplir au milieu des difficultés et des épreuves de tout genre, et les récompenses qui sont réservées à celle dont la chasteté et la foi conjugale ne se seront point démenties. […] Dans ces comédies latines, dont presque toujours un esclave dirige l’intrigue, il est presque toujours aussi question des amours d’un jeune homme libre pour une jeune fille de même condition, enlevée à ses parents dès l’enfance, vendue comme esclave, devenue courtisane, et reconnue à la fin par quelque honnête citoyen. […] Boileau a dit, dans son Art poétique : Étudiez la cour et connaissez la ville ; L’une et l’autre est toujours en modèles fertile : C’est par là que Molière, illustrant ses écrits, Peut-être de son art eût remporté le prix, Si, moins ami du peuple, en ses doctes peintures, Il n’eût pas fait souvent grimacer ses figures, Quitté, pour le bouffon, l’agréable et le fin, Et sans bonté à Térence allié Tabarin : Dans ce sac ridicule où Scapin s’enveloppe, Je ne reconnais plus l’auteur du Misanthrope.

73. (1706) Addition à la Vie de Monsieur de Molière pp. 1-67

Le nom du Libraire qui débite ce petit Ouvrage, m’a fait soupçonner qu’une plume accoutumée depuis longtemps au travail, aurait voulu à mes dépens, procurer quelque petit profit à son Libraire, sous le nom de Molière, qui rappelle assez son Lecteur : Mais le style de la Critique est aisé ; il n’est point raboteux ; je n’y reconnais point l’Auteur qui m’avait d’abord causé des soupçons. […] On doit reconnaître son penchant à faire du bien dans tout ce qui se passe entre la Raisin, Baron, Mondorge, et Lui. […] Mais j’ai dit, que Molière ne reconnaîtrait pas ses Pièces dans le jeu d’aujourd’hui. […] En mon particulier je reconnais ces Mr-là pour de fort honnêtes gens ; ils ont de l’esprit, de la conduite, jusqu’à de la vertu, puisque mon Censeur le veut.

74. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

» Il reconnaît que ces exemples de vraie piété sont rares ; mais « il y en a jusque dans la cour ». […] D’ailleurs, il faut le reconnaître, si l’on devait renoncer aux pratiques extérieures aussitôt que la foi diminue et est ébranlée, ou quand on a des faiblesses morales, combien de pratiquants seraient réduits à devenir des libres penseurs ? […] Malgré tout cela, il faut bien reconnaître le succès, et le critique avoue que Molière a eu du bonheur « de débiter avec tant de succès sa fausse monnaie et de duper tout Paris avec de mauvaises pièces ». […] Ils reconnaissent qu’Alceste est l’homme vertueux de la pièce et aussi qu’il est quelquefois ridicule ; mais ce n’est pas sa vertu qui est ridicule, ce sont les travers qui s’y joignent, c’est l’âpreté de ses critiques, l’emportement de son humeur, enfin ses propres faiblesses, puisque, fier comme il est, il se laisse jouer par une coquette. […] C’est cette vertu elle-même, la seule que le monde reconnaisse, c’est celle-là qui lui devient à charge et qui appelle à son tour ses traits et ses railleries, lorsqu’elle se prend au sérieux et qu’elle veut être pure, sévère, sans mélange.

75. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [50, p. 83-85] »

L’un, défenseur zélé des bigots mis en jeu, Pour prix de ses bons mots, le condamnait au feu ; L’autre, fougueux marquis, lui déclarant la guerre, Voulait venger la cour immolée au parterre ; Mais sitôt que, d’un trait de ses fatales mains, La parque l’eut rayé du nombre des humains, On reconnut le prix de sa muse éclipsée.

76. (1877) Molière et Bourdaloue pp. 2-269

C’est, disent-ils, à quoi l’on reconnaît le philosophe, l’homme qui a sondé les profondeurs du cœur humain. […] Prompt à reconnaître le mérite de l’orateur, il se rendait indulgent pour ses défauts. […] Bientôt, quelque mouvement naturel de la vraie piété ferait reconnaître l’hypocrite en dépit de sa ruse, on le chasserait et il ne serait plus question de lui. […] On ne le peut lire, et encore moins sans doute pouvait-on l’entendre, sans reconnaître la beauté, la force et la justesse de cette expression. […] C’est le dernier trait où l’on reconnaît la nature relativement honnête de la coquetterie.

77. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXII. De l’Intérêt. » pp. 385-398

L’Exempt reconnoît la feinte dame pour ce M. de Pourceaugnac qu’il cherche, & il veut le conduire en prison. […] Sbrigani paroît, s’afflige de ce qu’on a reconnu son ami, & propose un accomodement à l’Exempt, qui ordonne aux archers de se retirer.

78. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXI. De la Catastrophe ou du Dénouement. » pp. 503-516

Quand Orgon a reconnu les coquineries de son imposteur, & qu’il le chasse, celui-ci va dénoncer son bienfaiteur, remet au Roi les papiers qu’Orgon a reçus d’un criminel d’Etat, & se charge d’accompagner l’Exempt qui est censé devoir l’arrêter. […] On reconnoît le mérite d’un dénouement, dans quelque genre qu’il soit, à la surprise qu’il cause.

79. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [36, p. 64-67] »

Ménage lui-même reconnaît dans une de ses lettres qu’il est le Vadius de cette pièce, et quant à Cotin, il était difficile de le désigner mieux que par un de ses ouvrages.

80. (1845) Œuvres de Molière, avec les notes de tous les commentateurs pp. -129

En effet, tout le mal se réduit à quelques fautes d’impression et à l’oubli d’une douzaine de lignes dans cette pièce où Boileau ne reconnaissait pas l’auteur du Misanthrope. […] Combien de scènes blâmées, d’intentions calomniées, dans lesquelles il faut toujours finir par reconnaître un trait de morale et de génie ! […] Il ne cachait point ces sentiments, et il disait publiquement qu’il ne cherchait point à se remettre avec lui, parce qu’il s’en reconnaissait indigne. […] vous eût-on reconnu dans un caractère si opposé au vôtre ? […] On n’y reconnaît ni Molière ni Bernier, et ce n’est point ainsi qu’après de longues années se passe la première entrevue de deux amis de collège.

81. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

Il ne faut pas pour cela, comme font quelques-uns, nier les plaisirs de l’avare, et refuser de les reconnaître : c’est assez de ne pas les comprendre. […] La plus belle scène de l’ouvrage peut-être, celle du moins où le comique a le plus de force et de profondeur, la scène où le fils d’Harpagon reconnaît dans son père même l’infâme usurier qui travaille à sa ruine, n’appartient pas à Molière : il l’a prise et ne l’a pas prise seule dans La Belle Plaideuse, de Boisrobert, homme à bons mots, mais auteur plus médiocre encore que fécond, qui n’avait sans doute vu qu’une situation propre à exciter le rire, là même où son heureux plagiaire trouva la matière d’une des plus hautes leçons que puisse donner le théâtre. […] Molière se disposait, dit-on, à faire jouer sa comédie, lorsqu’un de ses amis l’avertit qu’il y avait à Paris un homme qui pourrait bien se reconnaître dans le personnage de George Dandin, et qui était en état, par ses nombreux entours, de nuire beaucoup à un ouvrage où il se croirait insulté. […] Don Sanche et Sostrate voient tous deux couronner leur flamme par un auguste hymen ; mais, avant d’obtenir ce prix, don Sanche, cru fils d’un pêcheur, venait d’être reconnu pour fils d’un roi ; tandis que Sostrate, d’amant devient époux sans changer d’état, et demeure ce qu’il était, le premier de sa race et le fils de ses propres œuvres. […] Après le mérite de faire un bon ouvrage, il y en a un autre, moins brillant sans doute, mais peut-être encore plus rare, c’est de reconnaître qu’on en a fait un mauvais.

82. (1914) En lisant Molière : l’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Il était bien certain que M. de Soyecourt ne se reconnaîtrait point. […] Pour être juste, ii faut reconnaître que si le Médecin malgré lui n’est qu’une farce, c’est la meilleure des farces de Molière. […] Que faudrait-il que Molière eût écrit pour être reconnu comme ayant attaqué l’ambition, le libertinage et la débauche ? […] Toutes les filles qu’on ne peut pas saluer sans qu’elles croient qu’on les demande en mariage ; toutes les femmes à qui l’on ne peut dire que le temps est à l’orage sans qu’elles pensent, avec scandale, qu’on les veut détourner de leurs devoirs, devront se reconnaître et ne se reconnaîtront pas en Bélise. […] Elle a plus l’orgueil que de vanité, ce qui la fait très supérieure, sachons le reconnaître, aux Cathos, aux Magdelon et aux Bélise.

83. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Les causes déterminantes, comme nous le verrons dans les événements de cette année, 1680 et des précédentes, qui été l’inconstance du roi, la lassitude des continuelles avanies qu’elle lui attirait, et surtout la douceur, la raison pleine de charmes, le vif intérêt qu’il trouvait dans la conversation de madame de Maintenon, son inclination pour elle, le désir de se fixer à la possession du noble cœur qu’il lui avait reconnu. […] M. de Beausset aurait peut-être dû se défier de l’intérêt qui rattachait à la gloire de Bossuet, et surtout de l’aversion qu’il a dû reconnaître dans le duc de Saint-Simon pour madame de Maintenon ; il n’aurait pas refusé à cette femme illustre un témoignage mérité de son heureuse influence sur le retour du roi à des habitudes régulières, pour l’attribuer exclusivement au prélat qui avait tant d’autres titres à ses hommages.

84. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE VII. De l’Amour. » pp. 121-144

  Quand on repense à la fausseté et à l’indécence des amours applaudis sur tant de théâtres, à la corruption insinuée chaque jour au peuple par tant de romans pleins de passions hors nature, à la gloire acquise par tant d’auteurs au moyen des théories d’amour les plus brutales et des peintures d’amour les plus lubriques, on reconnaît que Molière a rendu service à la morale en présentant sans cesse le spectacle, conforme à la nature et à la raison, d’amours jeunes, joyeux et honnêtes. […] Elle est capricieuse ; mais tout sied bien aux belles ; on souffre tout des belles. » On peut reconnaître Molière dans Ariste de l’École des Maris. […] À côté d’une fleur fanée naît une fleur toute semblable, et des milliers de familles se reconnaissent sous la rosée aux premiers rayons du soleil.

85. (1740) Lettres au Mercure sur Molière, sa vie, ses œuvres et les comédiens de son temps [1735-1740] pp. -89

La précieuse à tes bons mots A reconnu son faux mérite. […] Il prétend, au contraire, que l’on n’a bien reconnu son mérite qu’après qu’il eut joué le dernier rôle de sa vie, et que l’on a beaucoup mieux jugé du prix de ses pièces en son absence que lorsqu’il étoit présent. […] C’est ce qu’auroient dû apercevoir quelques critiques suffisans, dit le même auteur, lesquels, en méprisant certaines saillies de Moliere comme indignes des autres productions de ce poëte, n’ont pas reconnu que dans les pièces mêmes qu’ils blâmoient sans restriction, il y avoit des scènes d’une extrême finesse, et même prises de Terence. […] Des gens qu’il n’avoit jamais eu en vûë, croyoient se reconnoître dans ses pièces, et il avoit toujours des plaintes et des éclaircissemens à essuyer35. […] On assure que le poète Boursaut crût se reconnoître dans le portrait de Lisidas, et que, pour s’en venger, il donna sur le théâtre de l’Hôtel de Bourgogne une petite comedie dans le goût de celle-ci, intitulée le Portrait du peintre, ou la Contre-critique.

86. (1892) Vie de J.-B. P. Molière : Histoire de son théâtre et de sa troupe pp. 2-405

» Il s’approche entre les rideaux : « Il serait difficile, madame, que je vous reconnusse », répondit-il. […] Il est le chef reconnu ; c’est lui qu’on appelle aux États, lui qui touche les gratifications.  […] On veut que ces portraits ressemblent ; et vous n’avez rien fait, si vous n’y faites reconnaître les gens de votre siècle. […] On reconnaît là, mieux même que dans les chefs-d’œuvre, le génie spécial de la comédie et du théâtre. […] De Vizé reconnaît lui-même sa défaite.

87. (1819) Deux pièces inédites de J.-B. P. Molière [La Jalousie du Barbouillé, Le Médecin volant] pp. 1-4

Nous ne voulons pas dissimuler que Rousseau, tout en consentant à reconnaître que le fond des deux farces appartient à Molière, en trouve le style trop ignoble pour le lui attribuer.

88. (1899) Salut à Molière, dit par Coquelin cadet, le soir du 15 janvier, pour le 277e anniversaire de la naissance de Molière, sur la scène de la Comédie-française pp. 3-8

Il veut, au contraire, honorer ce qui fut au nom de ce qui est, affirmer sa tradition et reconnaître son ancêtre.

89. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

Le comte de Modène ne la reconnut pas ; bien plus, Madeleine elle-même n’avoua pas qu’elle en était la mère, et ce furent ses propres parents, son père Joseph Béjard et sa mère Marie Hervé, qui reconnurent cet enfant, non comme leur petite-fille, mais comme leur fille. […] M. de Soleinne reconnut bientôt quelle en était l’inappréciable valeur. […] La scène du marquis de la tarte à la crème, dans la Critique de l’École des femmes, où tout le monde l’avait reconnu, et où il s’était reconnu lui-même, l’avait notamment fâché tout rouge. […] Louis XIV, en effet, ne s’était ému de toutes ces criailleries, que pour en reconnaître la sottise et l’injustice. […] Toute la livrée était en surtout gris, pour n’être pas reconnue.

90. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Nul ne reconnaît en ce monde l’aristocratie de l’éclat de rire. […] Même à Dorine je ne reconnais pas le droit de porter des socques. […] Il ne les reconnaissait plus, tant qu’ils se promenaient dans les jardins de l’univers habité. […] Il ne reconnaît pas la voix de Lucinde ! […] Or, ces dames, qui ne veulent pas être reconnues, étaient masquées !

91. (1882) Molière (Études littéraires, extrait) pp. 384-490

Il nous faut reconnaître en effet, avec Rousseau, qu’Alceste est « un véritable homme de bien ». […] Mais un jour l’une d’elles le reconnaît, l’injurie et le malmène, en place publique. […] Chacun d’eux le reconnaîtra ; car ils ont dû le coudoyer chemin faisant. […] On le verra bien quand le seigneur Anselme reconnaît son fils dans Valère, et sa fille dans Marianne. […] En effet, il eut le bon goût de louer la pièce et de ne pas s’y reconnaître ; un jour que Mme de Montausier lui disait : « Quoi !

92. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XI. De la Religion. Principe et Sanction de la Morale de Molière. » pp. 217-240

Le désintéressement de l’amour de Dieu, qu’il faut aimer par-dessus toute chose751, est exprimé eu action par le Pauvre qui « prie le ciel tout le jour, et qui est bien mal reconnu de ses soins, dit don Juan, puisqu’il est dans la plus grande nécessité du monde, et que, le plus souvent, il n’a pas un morceau depain à mettre sous les dents. » Pourtant, entre un louis d’or et un péché, il n’hésite pas ; et malgré le diable qui le tente et Sganarelle qui l’encourage, « il aime mieux mourir de faim752. » L’amour du prochain, qu’il faut aimer comme soi-même pour l’amour de Dieu753, quand a-t-il été pratiqué d’une manière plus touchante que par done Elvire, qui, trahie de la façon la plus injurieuse par un amant aimé, revient trouver ce scélérat, ce perfide, qu’elle a menacé de « la colère d’une femme offensée754, » pour adresser à ce cœur de tigre les paroles qui tirent des larmes à Sganarelle : «  Je ne viens point ici pleine de ce courroux que j’ai tantôt fait éclater ; et vous me voyez bien changée de ce que j’étois ce matin. […] Quelque étonnement que cela cause, il faut reconnaître là une intention réfléchie et l’expression d’un sentiment personnel. […] Il faut bien reconnaître qu’en fait de morale effective, qui ne soit point une théorie éphémère acceptée par quelques esprits distingué, mais une règle des mœurs fixe et universelle il n’y a que deux morales : l’une est celle de la religion, qui impose, au nom d’une révélation divine, des préceptes formels, dont l’observation ou la violation entraîne des peines ou des récompenses positivement promises ; l’autre, qui au fond donne les mêmes préceptes, est la morale naturelle, que nous trouvons dans notre nature même, c’est-à-dire dans la constitution de notre être, dans nos instincts, nos désirs et nos passions, dans notre conscience.

93. (1819) Introduction aux œuvres de Molière pp. -

Les peuples nouveaux n’ont rien qu’ils lui puissent opposer : eux-mêmes le reconnaissent sans peine. […] Madeleine Béjart pouvait se flatter qu’à l’aide de cet acte, elle ferait quelque jour reconnaître sa fille. […] L’église reconnaît principalement deux saints du nom deJean, savoir, Jean Baptiste, et Jean l’Évangéliste. […] 2º que ceux-ci, en se mariant, eussent négligé de le reconnaître et de le faire baptiser ? […] Voilà tout ce qu’il y a de vrai, et ce que tout le monde a reconnu, du vivant de Molière, comme depuis sa mort.

94. (1852) Molière, élève de Gassendi (Revue du Lyonnais) pp. 370-382

Il raconte même que Molière, afin que tout le monde pût reconnaître Rohault, lui aurait fait demander son chapeau, qui était d’une forme particulière, pour l’acteur qui devait jouer ce rôle, et que Rohault n’aurait pas été assez philosophe pour le prêter, instruit de l’usage qu’on voulait en faire. […] Cependant s’il ne tourne pas la vertu en ridicule, il lui oppose souvent, en lui donnant l’avantage, une certaine sagesse où nous reconnaissons, à plus d’un trait, l’esprit de la morale de Gassendi, c’est-à-dire de la morale de la prudence et de l’intérêt bien entendu.

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