A la place de ces traits mâles, vrais, vigoureux, qui démasquent le cœur humain, qui agrandissent l’ame, qui nous initient dans la connoissance si nécessaire de nous-mêmes, qui nous développent enfin la nature, nous substituons hardiment des colifichets, des enluminures, des situations traînées dans les plus misérables romans, des pieces qui ne décelent pas la moindre connoissance du cœur humain, & qui annonceroient aussi peu d’imagination si elles n’étoient remplies de caracteres imaginaires.
. — Boileau, qui n’acheva cette satire qu’en 1693, emprunta plus d’un trait à Molière, particulièrement en ce qui concerne la précieuse : Mais qui vient sur ses pas ?
La comédie des Chinois, de Dufresny et Regnard, jouée par les Italiens le 13 décembre 1692, contient plus d’un trait qui témoigne de la rivalité des deux théâtres, depuis que leur domaine était devenu à peu près le même.
Les traits divers, les scenes, les situations, que nous serons forcés de rappeller, pour les comparer avec ce qui leur sert de fondement, & qui leur ressemble, nous la feront connoître à fond. […] Dans toute la scene de Cyrano, Granger est aussi pédant qu’avare, & ses platitudes de college rebutent & gâtent les traits plaisants qui échappent à son avarice : notre Poëte les lui abandonne.
Un autre trait mérite plus d’être rapporté. […] Mais on ose dire que Plaute n’a point assez profité de cette situation, il ne l’a inventée que pour la manquer ; que l’on en juge par ce trait seul : l’amant de la fille ne paraît que dans cette scène ; il vient sans être annoncé ni préparé, et la fille elle-même n’y paraît point du tout.
— On épelait le dialogue, on retenait avidement le couplet ; on le chantait tout haut, et pas un trait n’était perdu. […] Même quand il s’enivre de son propre bruit, son ivresse est belle, et ne ressemble pas à la fausse ivresse des cabarets et des tavernes où se boit à grands traits, le vin frelaté. […] Ainsi, vous le voyez, toutes ces tentatives hardies, ces audaces littéraires, ces grandes promesses « je vais changer d’un trait de plume la face du théâtre et du monde ! […] Comment souffrir que l’insulte, en présence de la multitude avide, vienne salir vos traits, votre honneur, votre famille et vos amis livrés en pâture, aux calomniateurs ? […] Toujours est-il qu’à ces traits vulgaires, à cette profusion insensée de billets mal séants, à ce persiflage de mauvais ton, je ne reconnais là qu’un méchant bâtard de Lovelace ou de M. de Richelieu.
Il a peint par des traits forts, tout ce que nous voyons de déréglé et de ridicule. […] Mais quoiqu’on doive marquer chaque passion par un plus fort degré et par les traits les plus vifs, pour en mieux montrer l’excès et la difformité, on n’a pas besoin de forcer la nature et d’abandonner le vraisemblable. […] « Si les nudités causent naturellement ce qu’elles expriment, combien plus sera-t-on touché des expressions du théâtre, où tout paraît effectif, où ce ne sont point des traits morts et des couleurs sèches qui existent, mais des personnages vivants, de vrais yeux, ou ardents, ou tendres, ou plongés dans la passion ; de grandes larmes dans les acteurs, qui en attirent d’autres dans ceux qui regardent, et puis de vrais mouvements qui a mettent en feu le parterre et toutes les loges ! […] Si vous savez un trait plus vif que celui de Célimène, coupable, prise sur le fait, pressée de s’excuser, et relevant fièrement la tête en répondant : — Il ne me plaît pas, moi ! […] Elle était tour à tour, au gré de son génie, au gré de notre cœur, Célimène, Henriette, Elmire, et comme elle les jouait ces grands rôles dont elle avait les traits, la conscience et l’accent !