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175. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « [Introduction] » pp. 1-4

Convenons qu’il ne sera question ici que de la belle nature, telle que l’a imité Moliere dans les parties & l’ensemble de ses meilleures pieces ; telle enfin que doit la voir un Philosophe qui se propose de corriger & de faire rire les hommes en leur peignant au naturel leurs gestes, leurs traits, leurs travers, leurs ridicules, leurs vices, enfin toutes les vérités que leur amour-propre leur déguise, ou qu’il tient cachées sous les replis du cœur humain.

176. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [74, p. 108-114] »

Aujourd’hui le préjugé qui flétrissait la profession de comédie, est anéanti, et Molière, dans ce temps-ci, eût tenu un tout autre langage.

177. (1734) Mémoires sur la vie et les ouvrages de Molière (Œuvres de Molière, éd. Joly) [graphies originales] pp. -

Elle est partie à l’antique, puisque c’est un valet qui met la scéne en mouvement, & partie dans le goût espagnol, par la multiplicité des incidens qui naissent l’un après l’autre, sans que l’un naisse de l’autre nécessairement ; on y trouve des personnages froids, des scénes peu liées entre elles, des expressions peu correctes ; le caractére de Lélie n’est pas même trop vraysemblable, & le dénouement n’est pas heureux ; le nombre des actes n’est déterminé à cinq, que pour suivre l’usage, qui fixe à ce nombre les piéces qui ont le plus d’étenduë ; mais ces défauts sont couverts par une variété & par une vivacité qui tiennent le spectateur en haleine, & l’empêchent de trop réfléchir sur ce qui pourroit le blesser. […] ne soit pas une des meilleures du côté de l’intrigue, quoiqu’elle ne soit pas une des plus nobles, elle doit tenir un rang considérable parmi les chef-d’œuvres de Moliere. […] Les traits naïfs d’Agnès ingénuë & spirituelle, qui ne pêche contre les bienséances, que parce qu’Arnolphe les lui a laissé ignorer, ne sont pas les mêmes que ceux d’Isabelle fine & déliée, qui n’ont d’autre principe que la contrainte où la tient son tuteur. […] Thessala dans Plaute, Céphalie dans Rotrou, ne sont que de simples confidentes d’Alcméne ; Moliere a fait de Cléanthis, qui tient leur place, un personnage plus intéressant par lui-même. […] L’aimable comédie, avec lui terrassée, En vain, d’un coup si rude, espéra revenir, Et, sur ses brodequins, ne put plus se tenir.

178. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

« Si cet auteur n’eût joué que les précieuses, s’il n’en eût voulu qu’aux pourpoints et aux grands canons, il ne mériterait pas une censure publique et ne se serait pas assuré l’indignation de toutes les personnes de piété ; mais qui peut supporter la hardiesse d’un farceur qui fait plaisanterie de la religion, qui tient école de libertinage, et qui rend la majesté de Dieu le jouet d’un maître et d’un valet de théâtre ? […] Après avoir répandu dans les âmes ces poisons funestes qui étouffent la pudeur et la honte, après avoir pris soin de former des coquettes et de donner aux filles des instructions dangereuses ; après des écoles fameuses d’impureté, il en a tenu d’autres pour le libertinage ; et voyant qu’il choquait toute la religion et que tous les gens de bien lui seraient contraires, il a composé son Tartuffe, et a voulu rendre les dévots des ridicules ou des hypocrites. […] Tartuffe se croit dévot ; s’il déposait tout à coup le masque devant Elmire, et qu’il lui tînt le langage d’un petit maître ou d’un libertin, cet aveu seul de son hypocrisie l’humilierait aux yeux de celle qu’il veut séduire ; mais c’est comme dévot qu’il veut plaire, c’est par sa profession même qu’il essaie de faire taire les scrupules d’une femme bien née qui hésite entre ses devoirs et ses passions ; il lui promet De l’amour sans scandale et du plaisir sans peur. […] Aussi, quand Elmire lui adresse cette question : On tient que mon mari veut dégager sa foi Et vous donner sa fille. […] Le premier, dans son sermon sur l’hypocrisie, dit que, « comme la fausse dévotion tient en beaucoup de choses de la vraie, comme la fausse et la vraie ont beaucoup d’actions qui leur sont communes, comme les dehors de l’une et de l’autre sont presque tous semblables, il est non seulement aisé, mais d’une suite presque nécessaire, que la même raillerie qui attaque l’une, et que les traits dont on peint celle-ci défigurent celle-là, à moins qu’on n’y apporte toutes les précautions d’une charité prudente ».

179. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [76, p. 115-117] »

Pour éviter sans doute la consonance de la rime de satire avec le mot lire qui termine cet hémistiche ; mais Molière soutint qu’il fallait s’en tenir à la première expression, et que la raison et l’art même demandaient et autorisaient souvent le sacrifice d’une plus grande perfection du vers à une plus grande justesse.

180. (1898) Molière jugé par Stendhal pp. -134

Du tems de Romulus c’était peut-être le seul terrain libre, ou, par superstition, il tint au terrain, ou il avait été exposé, où comme les Vénitiens, il choisit un terrain difficile, pour éloigner l’ennemi. […] Je ne pense pas que vous puissiez tenir à l’ennui d’une petite ville plus de 2 ou 3 mois. […] Elmire Sied-il bien de tenir une rigueur si grande ? […] Scapin « Tiens, boilà cé qué jé té vaille pour lui. » Ah ! […] Que ces femmes croient tenir un rang distingué dans le monde, et qu’il y ait de l’ambition dans leur cœur (l’amour des avantages extérieurs dans la société, le désir d’être distingué des autres hommes), c’est ce qui est prouvé par plusieurs vers de la pièce.

181. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. Du Dialogue. » pp. 204-222

Un Auteur qui veut se piquer de précision, doit encore savoir sacrifier son esprit au bon goût, & se priver du plaisir de faire dire à ses interlocuteurs de jolies choses, à moins qu’elles ne tiennent tout-à-fait au sujet, à l’action, à la scene. […] Enfin il en est du dialogue comme de la diction, à laquelle il tient si bien, qu’on les a souvent confondus : il doit prendre, comme elle, le caractere des interlocuteurs, de leur état, de leur situation, de leurs passions, de leurs intérêts.

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