Nous avons ici Lope Tocho, fils de Jean Tocho, qui est un bon garçon, & que nous connoissons ; je sais qu’il regarde la petite de bon œil ; c’est son vrai fait : elle sera fort bien avec lui, qui est son égal, & nous les aurons toujours l’un & l’autre devant nous ; au lieu que nous ne verrons ni notre gendre ni elle si vous l’allez marier à la Cour & dans vos grands Palais, où personne ne l’entendra, ni elle n’entendra rien elle-même.
Il se regarda comme s’il eût été à la Comédie, & siffla intérieurement les acteurs.
Quoi qu’il fût très agréable en conversation lorsque les gens lui plaisaient, il ne parlait guère en compagnie, à moins qu’il ne se trouvât avec des personnes pour qui il eût une estime particulière : cela faisait dire à ceux qui ne le connaissaient pas qu’il était rêveur et mélancolique ; mais s’il parlait peu, il parlait juste, et d’ailleurs il observait les manières et les mœurs de tout le monde ; il trouvait moyen ensuite d’en faire des applications admirables dans ses Comédies, où l’on peut dire qu’il a joué tout le monde, puisqu’il s’y est joué le premier en plusieurs endroits sur des affaires de sa famille, et qui regardaient ce qui se passait dans son domestique.
Santeul, étonné d’abord et ensuite réjoui de ce qu’il voyait, entra dans la plaisanterie et courut lui-même dans tous les coins de sa chambre, puis ils se regardaient tous deux, faisant chacun des grimaces pour se payer de la même monnaie.
Il résulte de ce qui précède que la comédie de Molière, ou n’était pas une hostilité contre la société d’élite, ou était regardée par lui-même comme une hostilité impuissante dont il ne voulait pas cire accusé.
Ce qui regarde, dans l’impromptu de Versailles, les comédiens de l’hôtel de Bourgogne, peut avoir été dicté par l’esprit de vengeance ; mais, du moins, le bon goût l’a-t-il réglé, & l’utilité publique en pouvoit être l’objet, puisque dans l’imitation chargée du jeu de ces acteurs, on découvroit le ton faux & outré de leur déclamation chantante. […] qui sera toujours regardé chez les nations polies, comme l’ouvrage le plus parfait de la comédie françoise. […] Le poëte françois a non seulement exposé sur la scéne les vices & les ridicules communs à tous les âges & à tous les pays, il les a peints encore avec des traits tellement propres à sa nation, que ses comédies peuvent être regardées comme l’histoire des mœurs, des modes, & du goût de son siécle ; avantage qui distinguera toujours Moliere de tous les auteurs comiques.
À proprement parler, il n’existe pas de comédie latine : aussi le peu que j’en dirai regardera plutôt la comédie grecque, dont elle n’est qu’un écho, et dont elle remplace pour nous les monuments perdus. […] En tout cas, leur silence ou celui de la chronique contemporaine n’est qu’un de ces arguments négatifs qui ne peuvent avoir force de preuve, et ne sont tout au plus regardés que comme des présomptions. […] Il en fut fait plusieurs autres, dont une, intituléeles Intrigues de Molière et celles de sa femme, est purgée d’une assez grande partie des infamies que contient la première, surtout en ce qui regarde Baron. […] « Boileau ne se lassait point d’admirer Molière… Il disait que la nature semblait lui avoir révélé tous ses secrets, du moins pour ce qui regarde les mœurs et les caractères des hommes. » (Bolœna de Monchesnay.) […] Les uns prétendent qu’il se refusa à cet arrangement ; les autres disent que sa mort précipitée en empêcha l’exécution ; d’autres, enfin, le regardent comme invraisemblable, attendu qu’il n’y a pas de différence essentielle entre le comédien qui reçoit des coups de bâton et celui qui les donne.