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4. (1858) Molière et l’idéal moderne (Revue française) pp. 230-

Il y a dans l’homme un besoin profond d’être satisfait aujourd’hui. […] La racine du mépris que nous inspire la coquette est plus profonde que nous ne le croyons. […] À la fin de Tartuffe, la toute-puissance apparaît, non pas en vertu d’un besoin profond et d’une nécessité supérieure, mais pour tirer l’auteur d’embarras, et elle apparaît sous la figure de Louis XIV. […] Notre siècle a de l’idéal, il a deviné que l’homme a quelque chose en lui de plus profond que les passions : c’est la passion. […] Sa médecine est une médecine de symptômes, c’est celle de Dorine qui réconcilie les deux amants, sans soupçonner le motif de leur querelle, aussi profond en réalité qu’il est vain en apparence.

5. (1843) Le monument de Molière précédé de l’Histoire du monument élevé à Molière par M. Aimé Martin pp. 5-33

Et comment le peuple l’aurait-il oublié, lui, l’enfant du peuple, le plus gracieux, le plus charmant des amuseurs, le plus profond, le plus joyeux des philosophes ? […] Sans cette étude préliminaire, on ne saura jamais comment le fils du tapissier destiné par sa naissance à meubler les appartements du roi, put devenir un profond philosophe et un grand poète comique. Je dis un profond philosophe, car la philosophie ne se concentre pas seulement dans l’étude des notions abstraites de la pensée, elle comprend encore la connaissance morale que l’homme a de lui-même et celle de ses relations avec ses semblables. […] Là, de l’antiquité Il apprend à goûter la sévère beauté ; Il parle, dans ce monde où l’étude l’exile, La langue de Platon et celle de Virgile ; Il interroge et suit, comme ses précurseurs, Les poètes hardis et les profonds penseurs. […] Frappé de ce tableau, pour lui si véridique, Louis quatorze absout le profond Satyrique ; Bientôt même à Molière il fournit des portraits.

6. (1862) Molière et ses contemporains dans Le Misanthrope (Revue trimestrielle) pp. 292-316

» Mais les types que crée le poëte dramatique, ne sont ni des abstractions, ni des symboles inanimés d’une vertu ou d’un vice ; ce sont des êtres doués de vie, portant le cachet d’une originalité propre et distincte, et auxquels il donne une âme prise dans la profonde connaissance du cœur de l’homme. […] Ce penchant, auquel nul écrivain n’échappe, devient un besoin impérieux, irrésistible, quand le cœur a été secoué par ces cruelles émotions qui laissent une trace profonde dans la vie. […] En épousant Armande, dont il nous fait un portrait si gracieux et si piquant dans Lucile du Bourgeois gentilhomme, Armande élevée sous ses yeux et par ses soins, il croyait assurer le bonheur de sa vie, oubliant, lui le profond connaisseur du cœur humain, que la reconnaissance ne tient pas lieu d’amour37. […] Et cette Célimène, qui se rit de l’amour qu’elle inspire et ne répond à une passion profonde que par l’indifférence et la sécheresse du cœur, n’est-ce pas Armande Béjart, cette femme si frivole et si coquette, qui n’a jamais compris quel noble cœur elle avait blessé à mort ? […] « Lorsque vous verrez Le Misanthrope, songez à Molière, à son infortune profonde ; persuadez-vous bien que sous le nom d’Alceste c’est lui-même que vous avez devant les yeux, et vous sentirez quelle douleur amère se cache au fond de ce diamant plaisir 47. » On voudrait se transporter dans ce temps où Molière lui-même, interprétant ses chefs-d’œuvre, racontait à cette grande société française l’histoire intime de son cœur et de ses souffrances.

7. (1812) Essai sur la comédie, suivi d’analyses du Misanthrope et du Tartuffe pp. 4-32

Ces deux pièces, sous le rapport de l’examen, sont aussi parfaites, aussi admirables l’une que l’autre ; mais je préfère le Misanthrope, parce que l’idée fondamentale de ce chef-d’œuvre me paraît plus profonde, plus philosophique que celle du Tartuffe. […] Quel sujet sera assez fécond pour lui fournir ces aperçus profonds, ces saillies qui décèlent de nouvelles découvertes dans le cœur humain ? […] Ainsi, les auteurs de ces différents ouvrages ont enrichi le théâtre de nouvelles découvertes, se sont fait remarquer par des observations profondes, un naturel, une gaieté souvent admirables, et par des traits pleins de force et de vérité. […] Le premier pas fait, il faut qu’il pénètre plus avant, qu’il arrache en entier le voile sous lequel se cache le vice ou le ridicule qu’il attaque ; qu’il agrandisse sa marche, qu’il peigne en traits vifs et profonds, qu’il ne laisse pas échapper la nuance la plus légère. […] Il faut toujours qu’il réserve pour la fin, ces expressions énergiques, ces profondes saillies qui souvent décèlent ce que le cœur humain a de plus mystérieux, que le dernier mot d’une comédie soit le plus pénétrant.

8. (1870) La philosophie dans le théâtre de Molière (Revue chrétienne) pp. 326-347

Le langage vulgaire eût été sans doute indigne, sinon incapable, d’exprimer des pensées aussi profondes. […] Ou si vous avez peur de vous déranger, prenez Molière, il est aussi profond, plus profond même que l’école de médecine, et non moins au courant qu’elle des questions à la mode : Voulez-vous savoir, en effet, « si la substance et l’accident sont termes synonymes ou équivoques à l’égard de l’être ?  […] Nous avons vu, en effet, Descartes affirmer deux choses : la profonde distinction du corps et de l’âme, et la connaissance de l’âme beaucoup plus claire que celle du corps. […] Voilà tous les sensualistes bien flattés, à coup sûr, de posséder un tel défenseur, et tout prêts à applaudir, sans doute, quand, à propos de sa domestique, il s’écrie avec une si profonde tristesse : Qu’importe qu’elle manque aux lois de Vaugelas, Pourvu qu’à la cuisine elle ne manque pas ? […] L’influence du maître sur l’élève fut profonde.

9. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

Adolphe Regnier fils, qui s’était appliqué à la suite de son père à la science profonde des textes, a disparu dans toute la force de la jeunesse ; l’autre, M.  […] C’est surtout Bourdaloue qui, dans un admirable sermon sur l’hypocrisie, a développé avec un art profond et une émouvante dialectique cette grave objection contre le chef d’œuvre de Molière. […] C’était cependant une pensée hardie et profonde de mettre sur la scène le libertinage de la pensée au libertinage des mœurs. […] Molière semble avoir pressenti cette parole profonde de Robespierre : « L’athéisme est aristocratique. » C’est en effet le gentilhomme qui est athée ; c’est le pauvre diable qui est croyant. […] Molière, en observateur profond, a été frappé de ce fait que la vraie vertu, la vertu rigoureuse et étroite, mise en conflit avec le monde, devient ridicule ou du moins prête à rire.

10. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIV » pp. 394-401

Le roi savait la douleur profonde que madame de Maintenon ressentait de la perte de cet ami : il fait placer le portrait du maréchal d’Albret dans la galerie de Maintenon. […] Le 15 du même mois, elle adressait à sa fille ces réflexions d’une profonde sagesse et d’une parfaite honnêteté : « Si Quanto avait bridé sa coiffe à Pâques de l’année qu’elle revint à Paris, elle ne serait pas dans l’agitation où elle est.

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