/ 211
123. (1824) Notices des œuvres de Molière (VIII) : Le Bourgeois gentilhomme ; Psyché ; Les Fourberies de Scapin pp. 186-466

La plupart, et Fulgence le premier, y ont vu une image de l’union de l’âme et du corps, ou plutôt de l’empire des passions sur l’âme ; d’autres y ont aperçu la peinture de l’homme profane régénéré par son admission aux mystères ; des théosophes, sans s’inquiéter si une fiction du paganisme pouvait se prêter raisonnablement à une interprétation toute chrétienne, y ont reconnu le péché originel effacé par la rédemption ; enfin, un savant danois de nos jours y a découvert un mythe moral, faisant partie de ces mystères (sacra) auxquels les femmes seules étaient initiées, et destiné à être représenté devant elles, sous la forme d’un drame symbolique (symbolica et dramatica representatio), afin de leur rappeler les dangers qui assiègent la beauté, les devoirs que la femme mariée doit accomplir au milieu des difficultés et des épreuves de tout genre, et les récompenses qui sont réservées à celle dont la chasteté et la foi conjugale ne se seront point démenties. […] Tels étaient, en effet, les esclaves de l’antiquité, êtres dégradés, avilis par leur condition, et plus encore peut-être par les passions de ceux dont ils étaient la propriété ; espèces d’animaux domestiques, à la fois insolents et craintifs, que pouvaient battre et tuer impunément de jeunes fils de famille, sur qui ils avaient eux-mêmes, comme gouverneurs, droit de surveillance et de répréhension ; obligés, par conséquent, de complaire à leurs penchants les plus vicieux, ou de subir leurs plus cruels traitements ; enfin, exposés sans cesse aux étrivières, aux fers, à la croix même, et ne pouvant presque jamais y échapper qu’en les méritant. […] Ses dupes manquent d’esprit, sans doute ; mais elles ont une passion qui leur en tient lieu : tirer de l’argent de deux avares est peut-être plus difficile que de tromper dix aigrefins.

124. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. De l’Etat, de la Fortune, de l’Age, du Rang, du Nom des Personnages. » pp. 39-75

Ne parlons ici que du vice, puisque la passion du jeu en est un. […] Ta forte passion est d’être brave & leste ; Tu le seras toujours, va, je te le proteste. […] Jusqu’où la passion peut-elle faire aller !

125. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE V. » pp. 71-105

Pantalon répond au Prince, que son chagrin est causé par la crainte où il est que sa jalousie ne le rende malheureux : il l’exhorte à bannir de son cœur cette funeste passion ; le Roi le lui promet. […] qu’il ne t’a pas même osé regarder ; que son amour est une flamme toute pure, une passion délicate & toute platonique ; que c’est par pure civilité que tu l’as reçu dans ta chambre, qu’il est ton parent, que tu as été abusée ? […] Je ne veux point paroître plus long-temps coupable, pas même à vos yeux, quoique je connoisse la passion qui vous aveugle.

126. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. » pp. 218-250

Le Duc Octave arrive avec son valet, qui lui demande où il va si matin : son maître lui déclare sa passion pour Isabelle, & lui dit qu’il se rend à un rendez-vous qu’elle lui a donné. […] Don Juan se voyant pris fait un discours très pathétique à Don Alphonse, pour lui prouver que sa passion excessive pour Dona Anna doit le rendre excusable. […] Les deux petites paysannes séduites par notre scélérat ne lui paroissent-elles pas plus intéressantes qu’Elisa, cette fourbe se faisant un jeu de tromper les hommes, & que Dona Anna devenant sensible à la feinte passion d’un homme qu’elle voit pour la seconde fois, qui à la premiere a voulu la violer le poignard sur la gorge, & qui vient de tuer son pere ?

127. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

Son amour pour Mlle Menou l’avait fait entrevoir ; sa passion plus profonde pour Armande le prouva tout à fait. […] Sa passion avait tant de violence et le rendait si faible, qu’il avait été heureux que les nécessités de leur métier apportassent ces obstacles à leur séparation. […] Sa passion pour la du Parc ne fut qu’un caprice ; celle qu’il eut pour la de Brie fut plus qu’un amour, ce fut une amitié. […] De l’autre passion, au contraire, si profonde et si désespérée, jamais il n’avait pu rire. […] C’est un raisonneur emporté, chez qui l’égoïsme calcule, au profit de la passion.

128. (1892) Vie de J.-B. P. Molière : Histoire de son théâtre et de sa troupe pp. 2-405

La violence des passions augmentant, on affubla Molière de la carmagnole. […] Cette affection pour Molière, cette passion pour le spectacle finit par susciter une grave querelle à Boissat. […] Jusqu’où la passion peut-elle faire aller ! […] La foule s’y porta avec ardeur ; mais la critique se déchaîna avec passion. […] Les salons, d’où le bel esprit avait été chassé, s’organisaient maintenant dans ce sens, sous cette passion nouvelle de la piété militante.

129. (1705) La vie de M. de Molière pp. 1-314

Molière avait un grand-père, qui l’aimait éperdument ; et comme ce bon homme avait de la passion pour la Comédie, il y menait souvent le petit Pocquelin, à l’Hôtel de Bourgogne. […] Il est vrai que les parents de Molière essayèrent par toutes sortes de voies de le détourner de sa résolution ; Mais ce fut inutilement ; Sa passion pour la Comédie l’emportait sur toutes leurs raisons. […] Tout leur jeu ne consistait que dans une prononciation ampoulée et emphatique, avec laquelle ils récitaient également tous leurs rôles ; on n’y reconnaissait ni mouvements, ni passion : et cependant les Beauchateau, les Mondori, étaient applaudis, parce qu’ils faisaient pompeusement ronfler un vers. […] Cependant il avait cru que son bonheur serait plus vif et plus sensible, s’il le partageait avec une femme ; il voulut remplir la passion que les charmes naissants de la fille de la Béjart avaient nourrie dans son cœur, à mesure qu’elle avait crû. […] Il était surprenant qu’un enfant de dix ou onze ans, sans avoir été conduit dans les principes de la déclamation, fît valoir une passion avec autant d’esprit qu’il le faisait.

/ 211