de la Menardiere, qui nous a donné des préceptes très judicieux dans sa Poétique, prétend que les aparté n’ont jamais été supportables que chez les Anciens, parceque leurs théâtres avoient trente toises de face, & que le comédien qui étoit sur un côté pouvoit fort bien parler sans être entendu de son camarade qui étoit à l’autre extrémité. […] Si je n’avois pas d’armes assez fortes pour combattre les ennemis des aparté, je pourrois alléguer que le spectateur va à la comédie dans le dessein de se prêter aux aparté, ainsi qu’aux différentes illusions qu’il est obligé de se faire pour sa propre satisfaction ; comme de prendre une toile pour une ville, pour un jardin, pour un palais magnifique ; une actrice vieille & laide pour Vénus, ou l’une des Graces ; un tel comédien pour un héros en tendresse, en délicatesse, en bravoure ; & Mademoiselle une telle pour une Agnès, tandis que, malgré son énorme panier, nous voyons clairement le contraire.
Si l’on considère Molière comme acteur, si l’on veut savoir quels furent ses talents pour la déclamation, l’auteur répond assez du comédien ; on sent qu’il n’a pu lui manquer que les avantages extérieurs ; on dit qu’en effet ils lui manquèrent ; qu’une voix sourde, des infléxions dures, une volubilité désagréable le forcèrent d’abandonner la déclamation tragique, dont sa seule présence, en rappellant si vivement la comédie, devait trop affaiblir l’impression.
Mais il lui fallait, pour l’obtenir, renoncer à sa profession de comédien. […] Il est certain qu’Anne d’Autriche et les personnes austères de son entourage firent entendre des protestations contre la licence accordée aux railleries d’un comédien. […] Qu’un comédien excommunié par l’Église, et dénoncé du haut des chaires comme un corrupteur de la morale publique, n’ait pas été un chrétien très fervent, nul ne s’en étonnera. […] N’a-t-il pas dépêché Don Juan, parce que les comédiens de l’hôtel de Bourgogne, et ceux de Mademoiselle, avaient déjà le leur, et que la statue qui marche ne cessait de faire merveille ? […] Comédiennes de la troupe de Molière.
Mais mon goût, ou celui du siecle, ne fait rien à la chose : c’est le caractere des interlocuteurs, & leur situation, qui doivent alonger ou raccourcir les couplets ; &, d’après cette regle, dictée par la raison, je critique ce que la plupart des comédiens, grands amateurs de tirades, parcequ’elles sont toujours applaudies par le grand nombre, ont ajouté après la mort de Moliere à la cinquieme scene du troisieme acte de l’Avare, & qu’on débite hardiment sur le premier Théâtre de l’Europe, qu’on trouve même dans les mauvaises éditions. […] Le sieur Duchemin, comédien, qui savoit faire un bon usage des leçons qu’il avoit reçues dans sa jeunesse des compagnons de Moliere, nous a dit que Raisin avoit toujours joué le rôle d’Harpagon tel que nous l’avons imprimé, & que lui-même il seroit fort embarrassé s’il étoit obligé d’écouter tout ce qu’on fait dire à Maître Jacques contre toute vraisemblance.
Plus tard, les comédiens ont réduit la pièce en un acte, et c’est en cet état qu’on l’a jouée jusqu’à ce jour. […] Chef zélé d’une troupe de comédiens, il avait consenti, pour l’intérêt de son théâtre, à traiter le monstrueux sujet du Festin de Pierre. […] En 1699, Guérin, fils du comédien de ce nom qui avait épousé la veuve de Molière, entreprit d’achever Mélicerte.
Elle eut un grand succès, puisque les comédiens firent payer double dès la seconde représentation, & qu’elle se soutint pendant quatre mois de suite.
Molière obtint pour sa troupe le brevet de comédiens du roi, au lieu du titre de troupe de Monsieur.