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46. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Une anecdote prouve que Boursault avait au fond quelque noblesse dans l’âme. […] l’âme de don Juan s’est-elle attendrie ? […] Les amours de Clitandre et d’Henriette respirent une douce poésie de l’âme : ces natures si franches, si fidèles, si sûres d’elles-mêmes, relèvent l’espèce humaine à nos yeux. […] Ne sent-on pas là toute l’âme poétique du bon homme ? […] Ces deux traits de grandeur d’âme delà part de Louis XIV ont fait jusqu’ici l’admiration des biographes de Dancourt.

47. (1886) Molière, l’homme et le comédien (Revue des deux mondes) pp. 796-834

On devinerait, en les lisant, si l’on ne le savait d’ailleurs, que l’auteur de ces pièces était une âme libérale et haute. […] Les auteurs dramatiques de tous les temps, qu’ils le veuillent ou non, ne pratiquent pas leur art comme chose purement objective ; tous y mettent plus ou moins de leur âme. […] Six ans avant Psyché, un de ses amis, La Mothe Le Vayer, qui faisait profession de philosophie et de force d’âme, avait perdu un fils de trente-cinq ans, homme d’une grande distinction. […] Tout démontre, au contraire, qu’il aimait passionnément son art, qu’il y rapportait toutes pensées, qu’il s’y donnait corps et âme. […] Le résultat de ses efforts était une justesse d’ensemble, dont Segrais disait : « On a vu par son moyen ce qui ne s’étoit pas encore vu et ce qui ne se verra jamais : c’est une troupe accomplie de comédiens, formée de sa main, dont il étoit l’âme, et qui ne peut avoir de pareille, »Segrais se trompait en partie ; la tradition de Molière devait rester l’Âme d’une troupe qui, survivant à son chef et toujours renouvelée, n’a cessé de la suivre en la rajeunissant.

48. (1910) Rousseau contre Molière

Il n’y a donc qu’une âme grande et noble qui en soit susceptible. […] Rousseau attribue la haine qu’Alceste a pour les hommes à la vertu, la vertu à la noblesse d’âme, et de cette noblesse d’âme il estime que toutes les perfections doivent sortir. […] De toutes amitiés on détache mon âme. […] La grande âme de Corneille s’est déclarée par elle et s’est exprimée par elle tout entière. […] Donnez-leur un sens droit et une âme honnête ; puis, ne leur cachez rien de ce qu’une âme chaste peut regarder.

49. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Les combats de son âme, nul ne les vit, sur son visage impassible. […] Madame Sainval aînée, corps si frêle, âme si grande. […] de notre temps, nous appartenions corps et âme à l’art dramatique, c’était là toute notre vie. […] Quel grand critique en toutes les choses, où il pouvait placer un peu de son âme, un peu de son cœur ! […] À force de montrer leur âme à nu, les écrivains de ce temps-là ont fini par habiller leur corps presque aussi peu que leur âme.

50. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

il y avait dans ce nuage une lueur, dans ce silence un bruit, dans ce cadavre une âme ; le feu est resté dans ces cendres éteintes. […] Son âme pleure-t-elle encore Célimène, cette belle adorée ? […] Il faut alors qu’Alceste ait recours à Philinte ; il y a recours en effet, avec l’abandon des belles âmes. […] Cette véhémente colère produit sur l’âme autant d’effroi que l’arrivée de la statue du commandeur chez don Juan. […] Elle était l’âme et l’esprit de Molière, et pour longtemps, pour bien longtemps, elle a emporté avec elle cette âme et cet esprit-là !

51. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Le nouveau bienfait qu’elle recevait, la confiance et l’estime dont ce bienfait était le témoignage, ne durent pas affaiblir la reconnaissance qu’elle avait gardée du premier, et le roi n’eut pas besoin de donner à ses paroles un accent d’affection extraordinaire pour accroître ce tendre sentiment dans l’âme de madame Scarron. […] Un directeur était un parasite, « jaloux d’obtenir le secret des familles, aimant à trouver les portes ouvertes dans les maisons des grands, à manger souvent à de bonnes tables, à se promener en carrosse dans une grande ville, et à faire de délicieuses retraites à la campagne, à voir plusieurs personnes de nom et de distinction s’intéresser à sa vie, à sa santé, et à ménager pour les autres et pour lui-même tous les intérêts humains…, couvrant tous les intérêts du soucieux et irrépréhensible prétexte du soin des âmes ». […] C’était pourtant au fond une âme assez basse, et pleine de vénération pour les grandeurs humaines ; d’ailleurs tracassier et processif.

52. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

quelle âme grande et pure ! — Oui, c’est là le vrai mot que l’on doit dire sur lui : c’était une âme pure ! […] Il emprunta, pour répéter encore le mot, les costumes, mais il inventa et donna l’âme à ces personnages. […] Âme pure, s’écriait Goethe, et Goethe caractérisait d’un mot cette grande âme altérée d’amour et accablée de douleur. […] Pour de telles âmes, le mépris des hommes est d’ailleurs la plus grande des souffrances.

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