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19. (1884) Molière et les Allemands pp. 3-12

« Il n’y a pas dans la langue provençale, ancienne ou moderne, un seul mot qui commence par ce préfix2 caractéristique S si fréquent en italien (sconcertare, sforzato, sgalante, sgomento, etc.) […] Au surplus, si nous discutions ici l’histoire de ces deux comédies, (l’une portant et comportant l’autre,) je démontrerais que, contrairement à l’opinion généralement admise, ces pièces sont par le sujet, l’esprit satirique, l’observation des mœurs locales, bien plus d’essence languedocienne qu’italienne. […] Fritsche, de Stettin (province de Poméranie), ne saurait tolérer qu’un Français du Midi soutienne que Sganarelle est un nom originaire du Languedoc. — Il est de provenance italienne, ce nom, aussi vrai que « le prefix S » n’a jamais existé en provençal ! […] Ai-je besoin d’expliquer à quelqu’un qu’ici les préfixes es et S s’agglutinent, selon le terme technique, au radical calfa, calfura, « chauffer », pour en majorer le sens, comme l’en, l’s en italien ? […] Hermann Fritsche, à l’article Mascarille de son excellent Lexique des noms propres qui se rencontrent dans Molière, fait remarquer que Mascarilla est le diminutif de l’espagnol mascara “masque” ; la forme italienne serait mascharina ou mascheretta. »Maintenant l’italien ne va plus.

20. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IX. Beltrame » pp. 145-157

Beltrame Que les Fedeli soient revenus ou ne soient pas revenus à Paris après 1625, pendant les dix-huit années que régnèrent encore Louis XIII et Richelieu, la France ne fut pas privée de troupe italienne. […] Mais dans ses autres compositions il fut moins fidèle aux traditions de la comédie de l’art ; il céda, à son tour, à la tendance qui emportait le théâtre italien vers les complications extravagantes et les spectacles fantastiques. […] Il éprouva aussi ce vif besoin de réhabiliter sa profession que ressentaient particulièrement en France les comédiens italiens. […] Le génie français dépassait de beaucoup le génie italien ; et celui-ci, réduit à un rôle inférieur, ne fournissait plus, pour ainsi dire, qu’aux menus plaisirs de la cour et de la nation. […] Voyez ci-contre Scapin, d’après la planche 8 de l’Histoire du Théâtre italien : « Nous avons, dit Riccoboni, une estampe de cet habit dessinée et gravée à Paris par Le Bel, qui était un fameux dessinateur italien de ce temps. » Le costume traditionnel du premier zanni, c’est la veste et le pantalon blancs galonnés sur les coutures avec des lamelles d’étoffe ordinairement vertes, la toque blanche bordée d’un galon vert, le manteau à brandebourgs de même.

21. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. Pieces intriguées par une ressemblance. » pp. 176-191

On aura vu jouer à Carlin deux rôles dans une piece Italienne, intitulée gli due Gemelli, les deux Jumeaux, on sera parti de là pour dire : « D’où vient que Préville ne joue point les deux Ménechmes aux François ? […] Nous allons opposer les deux Jumeaux Italiens aux deux Jumeaux François ; prouver que l’Auteur Italien, en composant sa piece, a pris soin de tramer l’intrigue, de la dénouer, & d’arranger les incidents de façon que les deux freres ne fussent jamais ensemble sur la scene, & qu’un seul pût remplir les deux rôles ; ensuite il nous sera facile de faire remarquer que ce qui est une beauté sur le théâtre Italien, seroit un défaut sur le nôtre. […] Mais quand les Italiens ne mettent pas la ressemblance sur le compte de leurs personnages masqués, leurs pieces ont le même défaut, la même invraisemblance que les Françoises, & leurs spectateurs ont autant besoin de bonne volonté que les nôtres pour se prêter à la fiction. Je vais donner en peu de mots l’extrait d’une piece Italienne qui est dans ce dernier cas, & qui paroît avoir fourni à M. […] Le soir même de sa premiere représentation, on devoit donner aux Italiens un canevas intitulé, le Mystificateur mystifié.

22. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VIII. Les Fedeli » pp. 129-144

Ce fut sans doute à la suite de ces derniers événements, après la retraite de la reine mère à Blois, que les Italiens s’en retournèrent en Italie. […] La mise en scène, comme on voit, devait offrir de grandes difficultés ; elle exigeait des masques bien étranges, même à côté des masques fantastiques de la comédie italienne. […] Est-ce en souvenir du séjour que les Fedeli avaient fait à Paris en 1624-1625, ou à l’occasion d’un nouveau voyage de cette troupe, qu’un des organisateurs des divertissements de la Cour eut l’idée de faire danser « un ballet du roi représentant les comédiens italiens » pour lequel Bordier fît des vers 23 ? […] Quant aux autres types, il serait difficile de désigner les noms véritables des acteurs qu’on voulut copier dans cette fête royale ; quelques-uns des noms que l’on cite, Colas, maître Philippes, n’ont point une physionomie italienne, et sans doute ces personnages n’avaient appartenu qu’accidentellement à la comédie de l’art. […] Les inventions étranges et monstrueuses, les machines, les pompes du spectacle, le chant, la musique l’emportèrent sur les combinaisons plus ou moins ingénieuses du génie comique italien.

23. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE PREMIER. » pp. 5-19

Elle est imitée presque en entier d’une piece Italienne en prose, composée par Nicolo Barbieri, imprimée en 1629, neuf ans après la naissance de Moliere. […] Mais, en revanche, Moliere s’est montré bien supérieur à l’Auteur Italien dans une infinité de choses. […] Quant au caractere de l’Etourdi, il n’est pas merveilleusement peint dans Moliere ; mais il l’est bien mieux que dans l’Italien. […] Louons Moliere de n’avoir pas mis sur la scene le caractere Italien ; mais gardons-nous de lui en attribuer toute la gloire. […]   Si quelquefois l’intrigant Italien est plus adroit que Mascarille, en revanche celui-ci est continuellement supérieur à Philipin.

24. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. » pp. 20-52

Plusieurs comédies, tant françoises qu’italiennes, ont fourni à Moliere le fond & les scenes de cet ouvrage. […] Quant à la façon dont ces mêmes scenes sont traitées, on croira sans peine que Moliere l’emporte sur l’Auteur Italien. […] Les amants y sont dans la même situation que ceux de la piece italienne. […] L’amante Italienne a soin de nous dire ce qu’elle y fera ; l’amante Françoise ne se donne pas cette peine. […] Cette scene est dans Arlequin muet par crainte, canevas italien.

25. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Si cette forme de l’art s’est uniquement produite en Italie, c’est que les Italiens ont porté plus loin que tout autre peuple le talent du mime et de l’acteur. […] Si nos villageois avaient le génie de la comédie, ils en feraient des masques comme les Italiens. […] Les personnages extrêmement variés que la suite des temps introduisit sur le théâtre italien peuvent presque tous se rattacher à ces quatre types principaux. […] Pour le masque, il n’a rien d’extraordinaire : on portait la barbe dans ce temps-là, et d est un vieux, marchand dans son naturel. » Le Docteur est reproduit d’après la gravure nº 5 de l’Histoire du Théâtre italien de Riccoboni. […] Le Capitan, que nous reproduisons d’après la gravure nº 10 de l’Histoire du Théâtre italien, est le capitan espagnol qui fleurit dans la première partie du seizième siècle.

26. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VI. La commedia sostenuta » pp. 103-118

C’est là l’histoire des pièces que Ruzzante publia à la fin de sa vie d’improvisateur et d’acteur, l’histoire de L’Angelica du capitaine Cocodrillo et d’un très grand nombre des productions que nous a léguées l’époque la plus féconde du théâtre italien. […] Plusieurs fois réimprimée, en 1589, en 1632, cette pièce fut traduite en français sous ce titre : « Boniface et le Pédant, comédie en prose imitée de l’italien de Bruno Nolano. […] Le Mascarille des deux premières pièces du comique français avait donc, à l’origine des deux œuvres, porté les masques divers des deux zanni italiens, ce qui explique comment il se ressemble si peu à lui-même. […] Le contraste de Don Quichotte et de Sancho Panza, de la réalité grossière et de l’idéal chimérique, existait sur le théâtre italien bien avant Cervantès. […] Il faut remarquer qu’elle est dans la comédie italienne ce qu’elle était déjà dans nos fabliaux, c’est-à-dire fausse dévote et béguine.

27. (1746) Notices des pièces de Molière (1658-1660) [Histoire du théâtre français, tome VIII] pp. -397

La salle du Petit-Bourbon lui fut accordée, pour y représenter la comédie alternativement avec les comédiens italiens. […] La troupe royale lui prêta son théâtre, comme elle avait fait, avant eux, aux Italiens (en 1653), qui occupèrent depuis le Petit-Bourbon avec Molière, et le suivirent après au Palais-Royal. […] Enfin il fut donné à des comédiens italiens, dont la troupe débuta à Paris le 9 août 16533. […] Molière prit les mardis, les vendredis, et les dimanches ; les Italiens jouaient les autres jours. […] Cette pièce a été représentée par la nouvelle troupe italienne, le 10 novembre 1716.

28. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE X. M. DIDEROT. » pp. 317-332

« Mais comparons un peu plus rigoureusement l’Ami vrai du Poëte italien avec le Fils naturel. […] Riccoboni fit jouer, le 8 Février 1717, un canevas italien qui ressemble encore beaucoup au Fils naturel. […] Diderot le connoît ; je vais en donner l’extrait, & je le copierai tel que je l’ai trouvé dans l’Histoire du Théâtre Italien, pour qu’on ne puisse pas m’accuser de le flatter, & de lui donner des traits de ressemblance qu’il n’avoit pas dans son origine. Extrait de la Force de l’Amitié, canevas italien, en trois actes. […] La piece est intitulée en italien, Il vero Amico.

29. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IV. Du Choix du Titre. » pp. 94-102

Tel est celui du Dépit Amoureux & du Festin de Pierre de Moliere, du Festin de Pierre des Italiens, du Combidado di Piedra des Espagnols. […] Il est aisé de voir que Dorimon a mieux réussi que Moliere, les Italiens & les Espagnols, mais dans le titre seulement. […] Je crois très à propos de faire remarquer ici que les Italiens, & Moliere après eux, ont mal traduit le titre espagnol. […] Alors je répondrai qu’il suffisoit d’intituler la piece, le Prince Jaloux, à l’exemple des Espagnols & des Italiens, parceque c’est le rang & non le grand nom des personnages qui doit donner le ton à la jalousie. […] La Casa con dos puertas (la Maison à deux portes) des Espagnols ; le Tambour Nocturne de Destouches ; gli Perdigi (les perdrix), par Colalto, Pantalon de la Comédie Italienne ; l’Asinaire de Plaute ; tous ces titres peuvent servir d’exemple : mais les uns sont bons à suivre, les autres sont mauvais.

30. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

La pièce italienne avait été traduite ou plutôt imitée du drame espagnol, de frà Gabriel Tellez, par Onofrio Giliberti de Solofra. […] Trois ou quatre imitations françaises s’étaient produites dans l’intervalle et n’avaient pas été certainement sans modifier le canevas italien. Si l’on en voulait tirer des conclusions tendant à revendiquer, soit pour les Français, soit pour les Italiens, la priorité de certains détails, ces conclusions seraient contestables. […] Il nous suffit de montrer où elle en arriva sur le théâtre italien, par une conséquence toute naturelle du jeu comique propre à ce théâtre. […] Il n’échappera à personne que l’arlequinade italienne, telle ou à peu près telle que nous venons de la retracer, était pourtant une transition presque nécessaire entre l’œuvre du Frère de la Merci et l’œuvre philosophique et satirique de Molière.

31. (1775) Anecdotes dramatiques [extraits sur Molière]

Ce sujet fut apporté en France par les Comédies Italiens, qui l’avaient eux-même imité des Espagnols. […] Les Italiens la représentèrent aussi à leur manière. […] Lully* composa les airs et les paroles de la Plainte Italienne. […] Secchi, Niccolò : Dramaturge italien du XVIe siècle. […] Vigarani (Reggio nell’Emilia 1588 – Modène 1663) : architecte et ingénieur italien.

32. (1819) Notices des œuvres de Molière (II) : Les Précieuses ridicules ; Sganarelle ; Dom Garcie de Navarre ; L’École des maris ; Les Fâcheux pp. 72-464

On l’accusa d’avoir copié Les Précieuses de l’abbé de Pure, jouées quelque temps auparavant par les comédiens italiens, quoiqu’il y eût presque autant de différence entre les deux ouvrages, que de distance entre les deux auteurs. […] Suivant Riccoboni, Molière a pris le sujet du Cocu imaginaire dans un canevas italien, joué à l’impromptu et intitulé Il Ritratto ou Arlichino cornuto per opinione. […] C’est l’imitation d’un auteur italien, Giacinto Andrea Cicognini, qui a servi d’original à Molière. […] Je veux donner, en terminant, une idée des bienséances de la scène italienne à cette époque. […] Molière avait emprunté à la scène italienne les sujets de L’Étourdi, du Dépit amoureux, et de Dom Garcie de Navarre, et il les avait embellis.

33. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IV. Brueys & Palaprat, imitateurs, comparés avec Térence, Blanchet, un Auteur Italien, & la nature. » pp. 100-132

Brueys & Palaprat, imitateurs, comparés avec Térence, Blanchet10, un Auteur Italien, & la nature. […] Dans la piece italienne Célio exerce tout de même Arlequin à faire le muet ; & ce dernier est toujours tenté de parler lorsqu’il est question de manger ou de boire. […] Cette scene est dans plusieurs farces italiennes, avec la différence qu’Arlequin s’y contente de mêler de mauvais latin à plusieurs jargons italiens, & qu’il ne parle ni espagnol ni languedocien. […] L’exposition & le dénouement sont tout-à-fait à la latine : une fille perdue & retrouvée en fait tous les frais, l’intrigue est tout-à-fait à l’italienne. […] Est-il naturel que le Baron, bête comme un dindon, sache l’espagnol, le latin, l’italien, le languedocien, & que le sachant il s’applique à traduire toutes les phrases de Frontin ?

34. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE III. Des Pieces à spectacle. » pp. 30-36

Les Auteurs Italiens, singes nés des Auteurs Espagnols, n’ont pas osé, à la vérité, mettre en jeu les Anges & les Saints, sous les yeux du Chef de la Religion ; mais ils ont bien pris leur revanche avec les diables, les démons, les sorciers. […] Nos Comédiens Italiens l’éprouvent encore tous les jours. […] Extrait du Prince de Salerne, Canevas Italien avec spectacle & divertissement, par Véroneze 1. […] Le lecteur doit savoir que tous les canevas composés à Paris par les Comédiens Italiens, depuis leur établissement en France, sont remplis avec des scenes tirées de leurs anciens Auteurs.

35. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIV. M. BARTHE. » pp. 413-419

La seconde de ces pieces est faite d’après une scene du Soldat fanfaron de Plaute ; la troisieme est imitée d’une partie de l’intrigue des Vingt-six Infortunes d’Arlequin, piece italienne, & d’une scene des Bacchides de Plaute. J’ai fait jouer par la troupe Italienne le Cabriolet volant, ou Arlequin Mahomet, Drame philoso-comi-tragique extravagant en quatre actes ; & la suite du Cabriolet volant, ou Arlequin cru fou, Sultane & Mahomet, piece en trois actes, dans le même genre que la précédente. […] Quant à mes pieces données au théâtre italien par la troupe lyrique, un Conte m’a fourni l’idée du nouveau Marié, ou les Importuns, opéra comique d’un acte. […] Arlequin de la Comédie italienne, unique par le naturel de ses graces & de son jeu.

36.

Dans la représentation du Tartuffe de l’Odéon, la cheminée joue le même rôle que le large divan du milieu, dans la représentation de la Zaïra italienne. […] Entre le 7 et le 11 juillet 1659, « la troupe italienne », dit La Grange, « s’en retourna en Italie. […] Les premières pièces italiennes ne furent jamais imprimées ; les comédiens italiens n’apprenaient rien par cœur, et « il leur suffisait, pour jouer une comédie, d’en avoir vu le sujet un moment avant que d’entrer sur le théâtre » 40. […] Archives nationales, KK. 213. — La Comédie italienne avait été appelée à Compiègne en 1656. […] Th. italien de Gherardi.

37. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. M. DE CHAMFORT. » pp. 420-441

L’Italien. […] L’Italien. […] L’Italien. […] L’Italien. […] L’Italien.

38. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XX. » pp. 411-419

Monsieur de Pourceaugnac, comédie-ballet en trois actes en prose, comparée, pour le fond & les détails, avec un canevas italien intitulé Le Disgrazie d’Arlichino, les Disgraces d’Arlequin ; une Farce de Chevalier ; & une ou deux pages de Ne pas croire ce qu’on voit, histoire espagnole. […] Je n’ai pu me procurer la comédie italienne, parcequ’elle est fort rare, on en verra la raison dans l’article du Bourgeois Gentilhomme ; mais j’ai parlé à plusieurs acteurs qui la connoissent parfaitement, qui l’ont même représentée. Ils m’ont assuré que le héros Italien étoit, comme le héros François, persécuté par un fourbe qui mettoit à ses trousses de faux créanciers, des coquines qui prétendoient être ses femmes, & un déluge d’enfants qui l’appellent papa. […] Enfin, les lavements seuls dont on régale Pourceaugnac, & ce qui les amene, ne sont point dans l’italien : Moliere les a pris dans une farce42 en un acte, & en vers de 8 syllabes, par Chevalier comédien du Marais, & représentée sur son théâtre en 1661, huit ans avant Pourceaugnac.

39. (1765) [Anecdotes et remarques sur Molière] (Récréations littéraires) [graphies originales] pp. 1-26

Le Sieur Angelo, (Docteur de l’ancienne Troupe Italienne) m’a dit, (c’est ce M. de Tralage qui parle) que Moliere qui étoit de ses amis, l’ayant un jour rencontré dans le jardin du Palais Royal, après avoir parlé des nouvelles de Théatre & d’autres, le même sieur Angelo, dit à Moliere, qu’il avoit vu représenter en Italie, (à Naples) une Piece intitulée le Misanthrope : & que l’on devroit traiter ce sujet ; il le lui rapporta tout en entier, & même quelques endroits particuliers qui lui avoient parus remarquables, & entr’autres ce caractere d’un homme de Cour fainéant, qui s’amuse à cracher dans un puits pour faire des ronds. […] On ne prétend rien diminuer du mérite & de la gloire de Moliere, en disant que le fond de la fable de sa Comédie de l’Avare est pris en partie de l’Aulularia de Plaute, & en partie de la Sporta del Gelli, qui a suivi le Poëte latin ; que le premier Acte est imité d’une Comédie Italienne à l’inpromptu, intitulée l’Amante Tradito, & jouée à Paris sous le nom de Lelio & d’Arlequin, valets dans la même maison : que la premiere Scene du second Acte est tirée du Dottor Bachettone, Canevas Italien ; que la Scene 5me. du même Acte est toute copiée de le case Svaliggiate, ou Gli interompimenti di Pantalone, Canevas pareillement joué à l’inpromptu, que la Scene seconde du troisieme Acte est toute entiere dans la Cameriera Nobile, Comédie Italienne aussi jouée à l’inpromptu : que toute la Scene 7me. […] Les Italiens, qui ont enchéri sur ce modele, ont fourni à Moliere les lazzis, les plaisanteries, & même une partie du détail : si on ajoute ce qui est dans Plaute & dans Gelli, on ne trouvera pas dans toute la Comédie de l’Avare, quatre Scenes qui soient inventées par Moliere. […] Toutes les Pieces du Théatre de Moliere ont été traduites en Italien sous le titre suivant : Le Opere di G.

40. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. » pp. 290-293

Le Sicilien ou l’Amour Peintre, Comédie-Ballet d’un acte, en prose, comparée en partie avec le Cabinet, canevas italien. […] Le voile de la piece italienne & celui de la françoise sont tous les deux les principaux ressorts des scenes qu’ils amenent, & nous paroissent également forcés, parceque nos yeux ne sont pas accoutumés aux grands voiles : ce qui prouve qu’un Auteur, en imitant, ne doit rien transporter sur son théâtre qui blesse les usages de sa nation. […] Les Auteurs doivent s’ingénier jusqu’à ce que les caleches de nos Dames puissent fournir au comique autant de richesses que les mantes Italiennes ou Espagnoles.

41. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IX. » pp. 180-200

La Princesse d’Elide, Comédie-Ballet, en cinq actes & en vers, comparée pour le fond & les détails avec el Desden con el desden, Dédain pour dédain, comédie espagnole ; Ritrosia per ritrosia, Rebut pour rebut, comédie italienne ; les Amours à la chasse, comédie de Coypel ; l’Heureux stratagême, comédie de Marivaux ; avec quelques vers de Virgile, du Pastor fido, & de la Phedre de Racine. […] Les Italiens & leurs partisans prétendent que Moliere a pris l’idée de sa Princesse d’Elide dans une comédie italienne, intitulée Ritrosia per Ritrosia, qui est imitée del Desden con desden ; mais une légere esquisse de l’ouvrage italien prouvera que notre Poëte a puisé dans la source même. […] de Marivaux, appellé par quelques personnes le Moliere du théâtre italien, a donné aussi une imitation de la Princesse d’Elide. […] Il se peut très bien que Moliere, en composant la scene, se soit rappellé les vers italiens ; mais l’imitation n’est certainement pas assez marquée pour qu’on puisse prononcer là dessus. […] J’ai mis toutes ces pieces sous l’année 1718, parceque le 10 Juillet de cette année on joua à la Comédie Italienne une piece dudit sieur Coypel, intitulée les Amours à la chasse, & que c’est la premiere qu’on connoisse de lui.

42. (1802) Études sur Molière pp. -355

Mais soyons justes, le dénouement italien n’est-il pas meilleur ? […] La scène italienne est bouffonne, puisqu’Arlequin confie même à son cheval les secrets de son maître ; la française est du meilleur comique. […] Les Espagnols et les Italiens avoient déjà traité le sujet du Prince jaloux. La pièce italienne mérite de préférence que nous la mettions en comparaison avec la française. […] L’intrigue italienne est ridicule.

43. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Dans les farces mêmes que Molière a véritablement inventées, il ne laisse pas de s’approprier des formes comiques imaginées chez les étrangers, et en particulier celles de la bouffonnerie italienne. Il voulait introduire et ramener sur la scène une sorte de personnages sans masques, mais du même genre et portant les mêmes noms que les masques italiens ; jamais ces rôles n’ont pu se naturaliser en France. […] C’est pourquoi, depuis Molière et sans doute aussi avant lui, le rôle d’un vieil avare amoureux a été un des lieux communs de la comédie à masques et de l’opéra buffa des Italiens ; à dire le vrai, c’est là que ce rôle est à sa place. […] Regnard était une espèce d’aventurier, qui, après avoir beaucoup couru le monde, se fit poète dramatique ; il écrivait tour à tour les scènes françaises du théâtre italien, qui florissait encore sous la direction de Gherardi, et faisait pour son compte des comédies régulières en vers. […] Mazarin avait introduit en France le goût de l’opéra italien.

44. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XX. Des Unités. » pp. 352-366

Les Espagnols, les Italiens se sont moqués très souvent de cette regle ; on voit dans leur théâtre des pieces qui annoncent un déréglement d’esprit inconcevable. […] LA COMÉDIE ITALIENNE. […] Il a arrangé, pour le Théâtre Italien, vingt-six canevas. Indépendamment de ses ouvrages dramatiques, nous avons de lui une histoire raisonnée du Théâtre Italien, depuis la décadence de la Comédie Latine jusqu’à son siecle ; un poëme italien sur la déclamation ; des observations sur la comédie & sur le génie de Moliere, ouvrage dont il est souvent question dans celui-ci ; des réflexions historiques & critiques sur les différents Théâtres de l’Europe, avec des pensées sur la déclamation ; un ouvrage intitulé la Réformation, dans lequel il a souvent des vues qui seroient tout-à-fait opposées au goût de notre siecle.

45. (1847) Le Don Juan de Molière au Théâtre-Français (Revue des deux mondes) pp. 557-567

Il a connu, à n’en pas douter, la traduction du drame espagnol jouée sur la scène italienne de Paris11, où, grâce à la figure de don Pierre et à celle de son cheval, elle fit courir toute la ville12. […] Dans Tirso et dans le traducteur italien, le mort soupe deux fois avec son meurtrier, la première fois comme invité, d’où vient le second titre de la pièce espagnole el combidado de piedra 13 ; la seconde fois chez lui, c’est-à-dire dans l’église des Franciscains de Séville, sous les voûtes de sa chapelle sépulcrale. […] Dans le Convié de pierre, que les comédiens italiens jouaient à Paris, vers 1657, la dernière scène de la pièce montrait aux spectateurs don Giovanni au fond de l’enfer qui exprimait en vers (quoique tout le reste de la pièce fût en prose) ses souffrances et son repentir. […] Je crois, sans pouvoir l’affirmer, que le Don Juan italien qui fut joué à Paris vers 1657 était Il Convitato di pietra del Giacinto Andrea Cicognini. […] C’est ce que nous apprend de Villiers, un des acteurs de l’hôtel de Bourgogne, qui fit jouer en 1659 la première imitation de la pièce italienne.

46. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXV. » pp. 500-533

Le stratagême dont Cléante se sert est employé dans plusieurs pieces italiennes. […] Bien des gens prétendent que la réception burlesque du Malade imaginaire est aussi imitée des Italiens : je n’ai trouvé rien d’approchant dans aucune de leurs anciennes pieces. […] voir jouer une scene sur le Théâtre Italien, la lire dans un Auteur Espagnol, la voir en action dans la société, ou l’entendre narrer par quelqu’un qui pese sur les circonstances & les détails, n’est-ce pas de même à peu de chose près ? […] Il pouvoit alors choisir entre les pieces qui depuis ont fait la fortune du Théâtre Italien & du François : il donne la préférence à l’Ecolier de Salamanque, à la Fausse Apparence, au Prince corsaire, au Gardien de soi-même, &c. […] Pantalon de la comédie italienne.

47. (1739) Vie de Molière

Il avait fait un recueil de scènes italiennes, dont il faisait de petites comédies pour les provinces. […] La troupe de Molière jouait sur le théâtre les mardis, les jeudis et les samedis, et les Italiens, les autres jours. […] Le théâtre de Molière, qui avait donné naissance à la bonne comédie, fut abandonné la moitié de l’année 1661, et toute l’année 1662, pour certaines farces moitié italiennes, moitié françaises, qui furent alors accréditées par le retour d’un fameux pantomime italien, connu sous le nom de Scaramouche. […] Il y a dans celle-ci quelques scènes tirées du théâtre italien. […] La troupe des comédiens italiens le joua à Paris, et on l’appela Le Festin de Pierre.

48. (1730) Poquelin (Dictionnaire historique, 4e éd.) [graphies originales] pp. 787-790

Quelques-uns prétendent que la gloire de l’invention n’appartient pas à Moliere, & qu’il profita beaucoup des Comédies que les Italiens avoient jouées à Paris (F). […] Je ne sai si les Italiens trouvent à leur goût les Comédies de Moliere traduites en leur langue par un homme de leur Nation transplanté en Allemagnek. […] (F) Quelques-uns prétendent – – – – qu’il profita beaucoup des Comédies que les Italiens avoient jouées à Paris. […] Cependant ces excellens originaux Italiens ne nous produisent plus rien27 ». […] Elle occupa quelque tems la sale du petit Bourbon, en s’accommodant avec les Comédiens Italiens que l’on y avoit déjà établis.

49. (1819) Notices des œuvres de Molière (IV) : La Princesse d’Élide ; Le Festin de Pierre pp. 7-322

Deux troupes françaises, jalouses du succès de la troupe italienne, voulurent en avoir leur part. […] C’est certainement d’après une de ces éditions de Hollande, que Nicolas Castelli, auteur d’une traduction italienne des œuvres de Molière, publiée, pour la première fois, en 1697, a traduit Le Festin de Pierre. […] Les Italiens, dont la poétique dramatique, calquée sur celle des anciens, ne repousse point le joug des unités, n’ont pu y soumettre le sujet essentiellement irrégulier du Convié de pierre ; mais du moins ils en ont atténué le vice, et l’ont rendu plus tolérable, en rapprochant les distances de lieu et de temps, en diminuant le nombre des événements, et en les unissant par une sorte de lien. […] Les deux auteurs français, qui ont traité le sujet avant Molière, de Villiers et Dorimond, ont imité la pièce italienne, ou se sont imités l’un l’autre. […] Le don Juan italien, copié par de Villiers et Dorimond, n’est pas d’une perversité moins abjecte et moins brutale.

50. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. » pp. 218-250

La troupe italienne avoit donné il Convitato di pietra, le Convié de pierre, appellé par corruption le Festin de pierre, & cette piece informe avoit fait courir tout Paris. […] Ils n’avoient, pour corriger cette faute, qu’à imiter un canevas italien très ancien. […] Le Poëte italien n’a-t-il trouvé dans le Poëte françois que ce trait digne d’être imité ? […] Dans chaque Troupe Italienne il y a ordinairement un acteur qui se mêle de faire des changements aux canevas, & qui les gâte bien souvent au lieu de les raccommoder. […] Les Comédiens Italiens l’ont apporté en France, & il a fait tant de bruit chez eux, que toutes les Troupes en ont voulu régaler le public.

51. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XII. Réflexions Générales. » pp. 241-265

« La troupe de Molière jouait d’abord sur le théâtre du Petit-Bourbon les jours qu’on appelait extraordinaires, les lundi, mardi, jeudi et samedi, et les liens jouaient les autres jours… En janvier 1662, quand Molière et sa troupe étaient installés au Palais-Royal, les Italiens étant revenus à Paris, alternèrent de nouveau avec eux. » J. […] I, note 36. — À moins d’être un habitué, il était impossible de ne pas confondre les deux troupes ; et les pièces des Italiens étaient aussi plates et aussi grossières que celles de Boursault, voir le Théâtre italien, ou le Recueil de toutes les scènes françaises qui ont été jouées sur le Théâtre italien, Genève, 1695. De plus les Italiens, comme Boursault, pillaient les pièces de Molière, ce qui ajoutait encore à la confusion. Le Médecin volant, le Portrait du Peintre, la Satire des Satires, les Mots à la mode, de Boursault, les Scènes de la Fille savante, de la Cause des Femmes, etc., des Italiens, ne sont que de détestables et graveleux pastiches de Molière, qui d’ailleurs, ne pouvant pas jouer uniquement son répertoire, prêtait son talent d’acteur aux plus mauvaises pièces, en sorte qu’un contemporain non assidu au théâtre attribuait tout à Molière.

52. (1740) Lettres au Mercure sur Molière, sa vie, ses œuvres et les comédiens de son temps [1735-1740] pp. -89

Il avoit beaucoup profité de l’imitation de Plaute et de Terence, aussi bien que de celle des auteurs dramatiques espagnols et italiens, comme nous le disons en parlant de ses pièces. […] On a dit depuis la même chose de Scaramouche dans le temps qu’il représentoit sur le théâtre des Italiens, à l’Hôtel de Bourgogne69. […] Le sujet de cette piece est pris dans l’Inavvertito, comédie italienne en prose, composée par Nicolo Barbieri, dit Beltrame, imprimée en 1629. […] Les Italiens, qui avoient tiré ce sujet des Espagnols, le firent connoitre en France sur leur theatre, où il eût un extreme succès. […] Ou le Fils criminel, tragi-comédie en 5 actes tra­duite de l’italien en français; Paris, Ch. de Sercy, 1660, in-12.

53.

Le théâtre des bouffons italiens au Petit-Bourbon ! […] La troupe italienne était-elle donc autorisée à jouer de véritables pièces françaises, entièrement françaises ? […] Soit ; mais c’est en juillet 1659 que la troupe italienne fermait son théâtre, et voilà pourquoi je disais tout à l’heure le Théâtre des bouffons italiens au Petit-Bourbon. […] Elle était dans ces dispositions, lorsqu’une de ses amies vint la chercher pour la mener aux Italiens voir la comédie. […] De là vient l’allusion à un Arlequin français et à un eunuque italien.

54. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXIII. » pp. 436-488

Mais, avant de mettre Moliere à côté de Térence, comparons-lui Cyrano qui lui a fourni deux scenes, les Italiens qu’il a mis à contribution, & Tabarin qu’il a malheureusement imité dans la scene du sac. […] Les Italiens ont encore mis un sac sur la scene dans plusieurs farces. […] Les Italiens ont quantité de scenes dans lesquelles Arlequin, prenant tour-à-tour plusieurs voix, joue lui seul plusieurs personnages. […] Avant que d’abandonner le théâtre italien, parcourons tout ce qui peut avoir fourni des idées à Moliere pour composer la piece dont il est question. […] Cette scene-est encore dans plusieurs pieces italiennes ; on l’a placée dans Pantalon Pere de famille.

55. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

De même pour la comédie italienne qu’il avait eu occasion d’étudier sur le vif à Paris même. […] D’ailleurs il lui préférait les bouffons italiens, ou du moins il les payait davantage. […] Quant aux Italiens, ce sont ses créanciers naturels. Tels de ses personnages sont Italiens de pied en cap. […] Molière et la Comédie italienne.

56. (1800) Des comiques d’un ordre inférieur dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VII) pp. 294-331

Les scènes épisodiques du Gascon et du tailleur sont dignes du reste pour l’effet comique, et ces sortes de méprises, nées de la ressemblance, sont un fonds si inépuisable, que nous avons au théâtre italien trois pièces sur le même sujet, qui toutes trois sont vues avec plaisir. […] Les Folies amoureuses sont dans le genre de ces canevas italiens où il y a toujours un docteur dupé par des moyens grotesques, un mariage et des danses. Regnard avait essayé son talent pendant dix ans sur le théâtre italien ; il fit environ une douzaine de pièces, moitié italiennes, moitié françaises, tantôt seul, tantôt en société avec Dufrény. […] On peut remarquer que les Français, nation en général plus pensante que les Italiens et les Grecs, sont les seuls qui aient établi la bonne comédie sur une base de philosophie morale. […] On joue quelques pièces de Hauteroche : son Esprit follet est un mauvais drame italien, écrit en style de Scarron, et fait pour la multitude, qui aime les histoires d’esprits et d’apparitions.

57. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Nous pouvons nous former par là une idée de la science des décors et des machines où les Italiens étaient parvenus grâce à Baldassare Peruzzi et à ses élèves ; mais là n’est pas le véritable intérêt du recueil de Flaminio Scala. […] Les jeunes gens et les jeunes filles s’expliquent sur tout cela avec une simplicité tout italienne, et nous rappellent ces dames romaines dont parle Stendhal, qui, fermant leur porte à tous les visiteurs, font dire pour excuse que la signora est innamorata. […] On comprend ce que l’acteur français Des Lauriers, surnommé Bruscambille, disait, à quelque temps de là, dans un de ses prologues en parlant de la farce française : « Je puis dire avec vérité que la plus chaste comédie italienne est cent fois plus dépravée de paroles et d’actions qu’aucune des nôtres. » Bornons-nous à quelques indications sur ce point délicat. […] Niccolo Barbieri dit simplement à ce sujet : « Ces fictions ne peuvent corrompre l’âme des comédiennes, puisque c’est l’usage de l’art. » À une époque plus rapprochée de nous, le marquis d’Argens, remarquant aussi le contraste existant entre la liberté presque illimitée de la scène italienne et les mœurs souvent correctes des actrices de cette nation, l’expliquait par la considération même dont les comédiennes jouissent en Italie.

58. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE PREMIER. Regnard imitateur comparé avec la Bruyere, Plaute, & la nature. » pp. 5-50

Sa tournure tout-à-fait italienne fait soupçonner aux connoisseurs qu’elle est tirée du Théâtre Italien. […] Parfait, pour transporter cette piece sur la scene italienne, de changer les noms des acteurs, & les caracteres se trouveroient conformes. […] Le dénouement ressemble totalement à ceux des farces italiennes que l’on jouoit autrefois sur le théâtre de l’Hôtel de Bourgogne. […] La finta Pazza, la feinte Folle, jouée à Paris par l’ancienne Troupe Italienne, pourroit avoir fourni le sujet & les lazzis des Folies amoureuses, où nous voyons Agathe feindre d’être folle, pour échapper à son tuteur Albert, & paroître en vieille, en musicienne Italienne, en Officier. Il seroit injuste, puisque nous n’avons pu trouver le canevas italien, de lui donner toutes les bonnes plaisanteries & tous les défauts qui sont chez l’Auteur François.

59. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XII. » pp. 251-273

l’Amour Médecin, comédie-ballet en trois actes, en prose, comparée, pour le fond & les détails, avec il Medico volante, le Médecin volant, du Théâtre Italien ; le Médecin volant, de Boursault ; le Pédant joué, de Cyrano ; le Phormion, de Térence ; la finta Ammalata, la feinte Malade, de Goldoni. […] Comme c’est tout ce qui nous en reste, nous ne pouvons savoir si Moliere lui est redevable de quelque chose ; mais nous allons reconnoître dans l’Amour Médecin, de l’italien, du Boursault, du Cyrano, du Térence ; le tout élagué, étendu, ou corrigé avec discernement, & encadré avec goût. […] Dans le Médecin volant italien, Arlequin se déguise en Médecin pour servir les amours d’Octave & d’Eularia qui feint d’être malade. Dans le Médecin volant de Boursault, piece calquée sur l’italienne, un valet a recours au même déguisement pour favoriser la tendresse de son maître & s’introduire auprès de l’amante, qui a, comme Eularia, une maladie de commande. […] On ne comprend pas s’il a dessein de suivre la bouffonnerie de l’Auteur Italien, ou bien si son Crispin prétend connoître la maladie d’une fille en tâtant le pouls de son pere, à cause de la sympathie : en tout cas, son idée est exprimée d’une façon bien louche.

60. (1732) Moliere (Grand Dictionnaire historique, éd. 1732) [graphies originales] « article » pp. 45-46

Il donna avant & depuis ce tems-là, plusieurs pieces dans le veritable goût de la comedie, que nos auteurs avoient negligé, corrompus par l’exemple des Espagnols & des Italiens, qui donnent beaucoup plus aux intrigues surprenantes, & aux plaisanteries forcées, qu’à la peinture des mœurs & de la vie civile. […] Il avoit beaucoup profité de l’imitation de Plaute, de Terence, & des Italiens.

61. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. » pp. 294-322

Riccoboni intitule le premier des canevas qu’il cite, Il Dottore bachettone ; ce qui, selon quelques Italiens, signifie le Docteur bigot ; &, selon quelques autres, le Docteur pédant. […] Je demande présentement à l’Europe entiere, qui sait le Tartufe par cœur, ce que Moliere doit au Docteur Italien ; & l’Europe entiere me répondra certainement, rien. […] Dans la piece italienne, Arlequin ne s’est déterminé à prendre Célio à son service, que parcequ’il refuse l’aumône généreuse qu’il lui fait en lui donnant sa bourse, & qu’il se contente de vingt sols, pour appaiser la faim qui le dévore. […] Dans l’Italien, Arlequin donne aussi tout son bien à Célio, qui le met ensuite à la porte. […] Les Italiens ont une piece dont le héros est le véritable Tartufe d’Italie.

62. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXII. » pp. 426-435

Le Bourgeois Gentilhomme, comédie-ballet, en cinq actes, en prose, comparée avec un morceau du roman de Don Quichotte, & le dénouement des Disgraces d’Arlequin, le Disgrazie d’Arlecchino, comédie italienne. […] J’ai annoncé dans l’article de Pourceaugnac, que je dirois ici la raison pour laquelle la piece italienne intitulée, le Disgrazie d’Arlecchino, étoit fort rare, & ne se jouoit plus en Italie ; c’est parceque les Juifs ont obtenu un ordre qui en défend la représentation. […] Si quelque autre Auteur ne prend le théâtre, il va tomber : cet homme-là donne dans la farce italienne.

63. (1846) Quelques pages à ajouter aux œuvres de Molière (Revue des deux mondes) pp. 172-181

En 1697, un certain Nic. de Castelli, italien réfugié en Allemagne et secrétaire de l’électeur de Brandebourg, traduisit en italien et fit imprimer séparément à Leipsick toutes les comédies de Molière, qu’il réunit l’année suivante en quatre volumes in-12. […] Cet Italien était, comme on voit, un homme emunctae naris, et des mieux informés.

64. (1746) Notices des pièces de Molière (1661-1665) [Histoire du théâtre français, tome IX] pp. -369

Et enfin s’il est tiré ou imité de quelque autre, dont l’original est espagnol ou italien ; voilà tout ce que le lecteur peut exiger de nous. […] « [*]Ceux-là se trompent, qui croient que Molière a tiré l’idée de sa comédie des Fâcheux d’une satire d’Horace : Molière avait vu jouer à l’impromptu par les comédiens italiens, qui de son temps étaient à Paris, une ancienne comédie italienne intitulée : Le case svaliggiate, ou Gli interompimenti di Pantalone, et à laquelle les comédiens italiens d’aujourd’hui ont donné simplement le titre d’Arlequin dévaliseur de maisons, pour éviter celui des Fâcheux, dont Molière s’était emparé. Dans la comédie italienne, Pantalon est amoureux d’une jeune fille, dont il attaque vivement la vertu. […] Riccoboni dans le même ouvrage ci-dessus cité, page 148, dit : « Il y a, dans Le Mariage forcé, une scène et des lazzis tirés de plusieurs comédies italiennes, jouées à l’impromptu. » M. Riccoboni aurait dû marquer la scène imitée des Italiens.

65. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII. » pp. 125-143

Les Facheux, Comédie en trois actes & en vers, comparée, pour le fond & les détails, avec un acte d’une comédie italienne intitulée le Case svaliggiate, ou gli Interompimenti di Pantalone ; les Maisons dévalisées, ou les Embarras de Pantalon ; avec deux Satyres, l’une d’Horace, l’autre de Regnier ; & avec un discours du Spectateur Anglois. […] Précis de l’acte italien. […]   Ce bout d’intrigue italienne est absurde. […] Je ne ferai nulle comparaison de la critique fine qui regne dans cette scene, avec tout le sel qu’il peut y avoir dans l’acte entier de la piece italienne.

66. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. » pp. 357-396

  Riccoboni, qui rapporte cette imitation, loue Moliere d’avoir écarté du comique de la liste, l’outré & l’extravagant que l’Auteur Italien y avoit mis. […]   Voilà encore un fond italien qui a fourni plusieurs scenes à Moliere, mais toutes sont embellies par les changements qu’il y a faits. […] Les Italiens ont une comédie très ancienne, que Moliere n’a vraisemblablement pas connue, puisqu’il n’en a pas tiré une scene qui, selon moi, est de toute beauté, & qui auroit surement ajouté un nouveau mérite à sa piece. […] Quelqu’un de mes Lecteurs se donnera peut-être la peine de fouiller dans les originaux italiens ; je dois l’avertir de ne pas être surpris s’il y trouve quelquefois des personnages qui ne portent pas le nom que je leur donne. Tout le monde sait que les Comédiens Italiens changent sur leurs canevas le nom de leurs acteurs, au gré de ceux qui remplissent les rôles.

67. (1759) Moliere (Grand Dictionnaire historique, éd. 1759) [graphies originales] « article » pp. 604-605

Il donna avant & depuis ce temps-là, plusieurs piéces dans le véritable goût de la comédie, que nos auteurs avoient négligé, corrompus par l’exemple des Espagnols & des Italiens, qui donnent beaucoup plus aux intrigues surprenantes, & aux plaisanteries forcées, qu’à la peinture des mœurs & de la vie civile. […] Il avoit beaucoup profité de l’imitation de Plaute, de Térence, & des Italiens.

68. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

La finesse du dialogue, et la peinture vive de l’amour dans un amant italien, et dans un amant français, sont le principal mérite de cette pièce, qui était ornée de musique* et de danses. […] Riccoboni fait un examen de cette comédie, où il rapporte différents endroits de pièces italiennes, dont Molière s’est servi pour composer la sienne. […] La première scène du second acte est tirée du Dottor Bachettone, canevas italien, et que par conséquent ce qui précède, et ce qui suit le motif de la scène, en dépend aussi. […] Il a aussi écarté du comique de la liste l’outré que l’auteur italien y avait ajoutée. […] Les Italiens y ont ajouté ; et Molière en a fait usage dans la scène de la Cassette, mais en ajoutant de la finesse aux plaisanteries italiennes.

69. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVII. M. DORAT. » pp. 463-467

Les deux Reines, Drame héroïque en cinq actes & en prose, mis à côté de l’Histoire de Sainte Genevieve de Brabant, & d’une piece italienne, &c. […] La même situation est dans une farce italienne intitulée l’Oracle accompli.

70. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VI. Des Prologues. » pp. 118-138

De toutes les nations qui ont fait des prologues d’après les Grecs & les Latins, les Italiens, & les François sur-tout, sont ceux qui ont le plus hérité de leur manie. […] Les Italiens sont ceux qui, en cela, ont le mieux imité Plaute. Je prends la premiere piece italienne qui se trouve sous ma main. […] J’ai long-temps balancé pour décider si je rapporterois ou non les textes latins, italiens, espagnols, anglois, &c.

71. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

Quoi qu’il pût vouloir, il fallait qu’il fût Italien, à cette époque où il était de mode et de bon ton d’aimer les œuvres italiennes et espagnoles ; où la fantaisie était aux œuvres castillanes. […] II prenait une pièce à l’Italie, il lui laissa la marque italienne. […] Ils lui viennent de la farce italienne. […] Il était avec Mascarille, en pleine comédie italienne. […] Ils viennent d’Italie, ne l’oubliez pas : jouez-les donc à l’italienne.

72. (1739) Vie de Moliere (Réflexions sur les ouvrages de litérature) [graphies originales] « Chapitre » pp. 252-262

Cependant il cache sous cette fausse vertu tout ce que l’insolence a de plus effronté ; & c’est sur le Théatre une Satire, qui, quoique sous des images grotesques, ne laisse pas de blesser tous ceux qu’il a voulu accuser : il fait de plus le Critique, il s’érige en Juge, & condamne à la berne les Singes, sans voir qu’il prononce un Arrêt contre lui, en le prononçant contr’eux ; puisqu’il est certain qu’il est Singe en tout ce qu’il fait, & que non-seulement il a copié les Précieuses de M. l’Abbé de Pure, jouées par les Italiens ; mais encore qu’il a imité par une singerie, dont il est seul capable, le Médecin volant, & plusieurs autres Pieces des mêmes Italiens qu’il n’imite pas seulement en ce qu’ils ont joué sur leur Théatre ; mais encore en faisant leurs postures, contrefaisant sans cesse sur le sien, & Trivelin & Scaramouche.

73. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII. La Chaussée, imitateur de Regnard, d’un Auteur Espagnol, d’un Auteur Italien, d’un Romancier François, &c. » pp. 262-276

La Chaussée, imitateur de Regnard, d’un Auteur Espagnol, d’un Auteur Italien, d’un Romancier François, &c. […] Au lieu que pour transplanter sur notre théâtre une piece latine, espagnole, italienne, angloise, &c. il faut non seulement changer les mœurs, les caracteres, les bienséances ; il faut encore décomposer toute la machine pour lui donner une forme convenable aux regles établies parmi nous ; il faut sur-tout l’assujettir à la vraisemblance, dont les autres nations se passent. […] L’Ecole des Meres est encore calquée sur un canevas italien intitulé, Il Padre di Famiglia, le Pere de Famille.

74. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Ce sujet est tiré d’une pièce italienne intitulée l’Inavertito, de Nicolo Barbieri, qui, comme Molière, était à la fois comédien et auteur. […] On dirait que les auteurs qui ont porté la main sur cette œuvre ont été pris d’un ardent amour national, et qu’ils ont voulu en ôter tout ce qui venait de l’italien. […] Le roi fut si satisfait des mérites de cette troupe, qu’il lui permit de s’établir sur le théâtre du Petit-Bourbon, et de jouer alternativement avec les Italiens. […] Plaute et Térence, le théâtre espagnol et le théâtre italien avaient défrayé son génie naissant. […] Il a mis à contribution un conteur italien du XVI siècle, Strapparole, ainsi que La Fontaine, son imitateur.

75. (1734) Mémoires sur la vie et les ouvrages de Molière (Œuvres de Molière, éd. Joly) [graphies originales] pp. -

La cour avoit tellement goûté le jeu de ces nouveaux acteurs, que le Roi leur permit de s’établir à Paris, sous le tître de troupe9 de Monsieur, & de jouer alternativement avec les comédiens italiens sur le théatre10 du petit Bourbon. […] Les italiens qui l’avoient emprunté des23 espagnols, le firent connoître en France sur leur théatre, où il eut un extrême succès. […] Ce sujet fit tant de bruit chez les italiens, dit Rosimond,24 que toutes les troupes en voulurent régaler le public. […] La finesse du dialogue, & la peinture vive de l’amour dans un amant italien & dans un amant françois, font le principal mérite de cette piéce, qui étoit ornée de musique & de danses. […] La sale du petit Bourbon ayant été démolie au mois d’octobre 1660, pour construire la façade du louvre qui est du côté de saint Germain l’Auxérrois, le Roi accorda à Moliere & aux comédiens italiens la sale que le cardinal de Richelieu avoit fait bâtir dans son palais.

76. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VI. Baron, imitateur, comparé à Moliere, à Cicognini, à Térence, &c. » pp. 219-261

Nous avons comparé, dans le volume précédent, Chapitre V, le Prince jaloux de Moliere au Principe geloso italien : voyons si Baron aura tiré grand parti de ses modeles. […] La façon dont Baron alonge cet acte, en envoyant chercher Marton par Mariane, & Mariane par Marton, est encore due à la rare imagination de Baron, à moins qu’il n’ait puisé cette idée dans une scene italienne très ancienne ; elle est rajeunie dans le Prince de Salerne. […] Je ne sais si Baron a connu la scene italienne ; mais elle est plaisante, & les siennes sont ennuyeuses. […] Nous avons vu27 le parti que Moliere a tiré de cette situation ; nous avons admiré dans l’italien la scene originale : nous sommes convenus que dans ce moment les deux Auteurs étoient sublimes. […] Si quelque Auteur moderne étoit tenté de faire une nouvelle guerre aux jaloux, & de réunir les traits de jalousie épars dans les différentes pieces qui ont pour objet cette passion, je dois l’avertir qu’il trouvera dans Pantalon jaloux, piece italienne, une scene plaisante.

77. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « PRÉFACE. Du Genre & du Plan de cet Ouvrage. » pp. 1-24

Louis Riccoboni, Auteur & Acteur de la Comédie Italienne, a fait à la vérité des observations excellentes sur la comédie ; mais on m’avouera que les préceptes d’un art aussi compliqué que celui de la comédie, peuvent tout au plus être indiqués dans un ouvrage de trois cents quarante-huit pages, encore le quart est-il consacré à la parodie ; ajoutons à cela que Riccoboni, étant Italien, a dû nécessairement, malgré la justesse de son goût, donner trop souvent la préférence au théâtre de ses compatriotes & à leur maniere. […] Ils savent sous combien de faces différentes ils doivent envisager leur art ; avec quelle variété infinie Ménandre, Aristophane, Plaute, Térence, Calderon, Lopez de Vega, les Comiques Anglois, les Italiens, les Danois & Moliere ont saisi les causes du rire.

78. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVIII. Les Caracteres des hommes n’ont pas plus changé que ceux des professions. » pp. 303-311

Vous voudriez déguiser des masses sous des nuances : il a pris des nuances chez le Poëte Latin, chez les Italiens, chez ses contemporains ; il les a fondues ; il en a fait des masses, & voilà pourquoi ses portraits sont frappants. […] Dans le Don Gilli des Italiens, le Pédant qui fait des réprimandes à son éleve parcequ’il a une maîtresse, est surpris bientôt avec elle, & son Disciple le rosse.

79. (1686) MDXX. M. de Molière (Jugements des savants) « M. DXX. M. DE MOLIÈRE » pp. 110-125

Dominique Othonelli jésuite italien, Frederic Cerutus, Franc. […] Il faut avouer qu’il parlait assez bien français ; qu’il traduisait passablement l’italien ; qu’il ne copiait point mal ses auteurs : mais on dit peut-être trop légèrement, qu’il n’avait point le don de l’invention, ni le génie de la belle poésie11, quoique ses amis même convinssent que dans toutes ses pièces le comédien avait plus de part que le poète, et que leur principale beauté consistait dans l’action.

80. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. Des Pieces intriguées par un Valet. » pp. 125-134

Les Italiens ont nombre de pieces dans ce goût. […] Merlin l’enchanteur a été fameux sur le théâtre de la Foire & sur celui des Italiens ; mais Merlin, intriguant & valet, n’a commencé à figurer que dans le Retour imprévu 30, les trois Freres rivaux 31, &c.

81. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIX & dernier. Des causes de la décadence du Théâtre, & des moyens de le faire refleurir. » pp. 480-499

Si nos Comédiens Italiens n’eussent pas eu une petite troupe françoise du temps de Dalainval, de Legrand, de Boissi, de Marivaux, ces Auteurs auroient souvent essuyé des jugements définitifs très injustes. […] Le théâtre italien, tel qu’il est monté présentement, ne peut faire que la réputation des Musiciens ; les Poëtes y sont totalement sacrifiés : aussi aura-t-il bientôt besoin d’une nouvelle révolution. […] Le célebre Préville a un frere qui lui ressemble presque parfaitement, & qui jouoit des rôles françois à la comédie italienne.

82. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIII. M. ROCHON DE CHABANNES. » pp. 381-412

Musique italienne, françoise, angloise, allemande, suisse, turque, chinoise ? […] Vous en êtes pour l’italienne, je le vois : c’est là le grand goût : aussi, qu’est-ce que cette musique françoise ? […] Criquet chante en musique italienne. […] Vous allez donc quelquefois aux Italiens ; vous avez vu l’Epouse jalouse.

83. (1747) Notices des pièces de Molière (1670-1673) [Histoire du théâtre français, tome XI] pp. -284

Une Italienne chantante, Mlle Hilaire. Un Italien chantant, le sieur Gaye. […] Entrée d’Italiens, tirée du Ballet des Nations, représenté à la suite du Bourgeois gentilhomme. […] ajoutait M. le duc *** le pauvre homme extravague : il est épuisé, si quelque autre auteur ne prend le théâtre, il va tomber : cet homme-là donne dans la farce italienne. […] Lully composa les airs (et les paroles de la plainte italienne).

84. (1765) Molière dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (compilation) pp. 2668-16723

Tel est le comique Italien, aussi chargé d’incidens, mais moins bien intrigué que le comique Espagnol. Ce qui caractérise encore plus le comique Italien, est ce mêlange de mœurs nationales, que la communication & la jalousie mutuelle des petits états d’Italie a fait imaginer à leurs poëtes. […] Les Italiens en firent une regle essentielle de leur théatre, & la comédie s’y vit par-là condamnée à la grossiere uniformité qu’elle avoit eue dans son origine. […] Les Italiens ont eux-mêmes reconnu la supériorité du comique François ; & tandis que leurs histrions se soûtiennent dans le centre des beaux arts, Florence les a proscrits dans son théatre, & a substitué à leurs farces les meilleures comédies de Moliere traduites en Italien. […] A ces confreres ont succédé les troupes de comédiens, qui sont ou sédentaires comme les comédiens François, les comédiens Italiens établis à Paris, & plusieurs autres troupes qui ont des théatres fixes dans plusieurs grandes villes du royaume, comme Strasbourg, Lille, &c.

85. (1682) Préface à l’édition des œuvres de Molière de 1682

La Salle du Petit Bourbon lui fut accordée pour y représenter la Comédie alternativement avec les Comédiens Italiens. […] Cette réunion des deux troupes qui a mis les Comédiens Italiens en possession du Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, a été d’autant plus agréable à sa Majesté qu’elle avait eu dessein de la faire, comme on l’a déjà expliqué, incontinent après la mort de Monsieur de Molière.

86. (1850) Histoire de la littérature française. Tome IV, livre III, chapitre IX pp. 76-132

La fin du xvie  siècle avait vu naître, de la double imitation des anciens et des Italiens modernes, un essai de comédie, où des traits de mœurs véritables et des indications de caractères se rencontrent parmi des scènes de nuit, des travestissements, des reconnaissances, dans un dialogue assaisonné d’obscénités. […] Après cette pièce et d’autres du même genre, une nouvelle imitation, celle du théâtre espagnol, fait tomber de mode l’imitation de la farce italienne, et produit la tragi-comédie, où se distinguent, après Hardy et sur ses traces, les Théophile, les Scudéry, Racan, Rotrou et Corneille, avant d’être le grand Corneille. Au moment où ce grand homme parut, trois genres d’ouvrages dramatiques défrayaient le théâtre : la tragédie, imitée des anciens ; la tragi-comédie, imitée des Espagnols ; la farce, imitée de l’italien. […] Ce ne sont que rencontres impossibles, confusions de noms, générosités tombées du ciel ; pardons où l’on attendait des vengeances ; cachettes dans les murailles, derrière les tapisseries ; aparté pour unique moyen des effets de scène ; un mélange grossier de traditions grecques et latines, espagnoles et italiennes ; et, pour la part de la France, de gros sel gaulois, la seule chose qui ait quelque saveur dans cet amalgame. […] Les Italiens, que Molière imitait, excellent à embrouiller l’intrigue, soit qu’ayant affaire à des spectateurs d’un esprit plus pénétrant et plus prompt, ils eussent besoin de plus de complications pour tenir sa curiosité en haleine, soit plutôt que la faiblesse d’invention s’y déguisât sous cette vaine richesse d’incidents.

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