. — Il est vrai, lui dit-il, que Madame de Lon... passe pour être ma femme ; mais elle ne l’est point, & il manque tant de formalités à notre prétendu mariage, que je le regarde comme nul. […] Cet enfant si cher, seul fruit de notre mariage, sera donc regardé comme un enfant illégitime ? […] Songez, Monsieur, que, devant Dieu, Madame la Marquise est votre épouse, & que devant les hommes, après vous être deshonoré, ils vous condamneront à la regarder comme telle.
Leurs discours sont à la fois ceux des gens les plus occupés de ce qui les regarde, et des moralistes les plus désintéressés. […] La foule accourt ; et, révoltée de ce qu’elle regarde comme un sacrilège, elle se déchaîne contre l’agresseur. […] car il faut être vraiment aveugle pour regarder comme une maladresse une des plus fécondes ressources de l’intérêt comique. […] Cette disposition à regarder en silence s’accrut avec l’âge et les chagrins de la vie. […] Les Navailles furent bannis du Palais pour s’être mêlés de ce qui ne les regardait pas.
Quelques personnes regardent Le Sicilien comme le premier essai d’opéra-comique : les scènes de cet ouvrage sont très bien coupées pour le chant et pour la danse ; les plaisirs et les peines de l’amour s’y trouvent présentés sous le point de vue le plus favorable à la musique. […] Depuis lors les habitants du Louvre le regardèrent d’un peu moins haut, et briguèrent même son amitié. […] « Là, dit d’Assoucy lui-même, je me couchai sur un peu de paille, que je regardai comme mon tombeau. […] D’ailleurs on verra par la suite qu’elle a du rapport à quelques particularités qui regardent Molière. […] Plusieurs années après la mort de Molière, tourmenté par la goutte, il se retira à la campagne ; il y vécut en fort honnête homme, se faisant estimer de tout le monde, et entre autres de son curé, qui le regardait comme un de ses meilleurs paroissiens.
Le héros de roman regarde comme un malheur qu’il y ait une société, une famille, un gouvernement, des lois, parce que ce sont autant de barrières brutales et prosaïques, opposées à l’idéal et aux droits infinis du cœur. […] « Winckelmann, dit-il, compare la beauté à l’eau qui, puisée à sa source, est regardée comme d’autant plus salutaire qu’elle a moins de goût. […] Toute offense faite à l’honneur est regardée comme quelque chose d’infini en soi, et demande une réparation du même genre. […] Le premier cas seul doit être regardé comme le vrai comique. […] Sans cette naïve sécurité en ce qui regarde le but et le succès de son entreprise, il ne serait pas un personnage véritablement romantique.
Il disoit que la nature sembloit lui avoir révélé tous ses secrets, du moins pour ce qui regarde les mœurs & les caracteres des hommes. […] Cela vous fera plus d’honneur dans le public, qui regardera vos Acteurs comme vos gagistes ; vos Acteurs d’ailleurs qui ne sont pas des plus souples avec vous, sentiront mieux votre supériorité. […] Cette traduction doit être regardée comme un ouvrage très-médiocre.
On assiste à ces spectacles avec indifférence, comme on regarde, à l’occasion, la reliure d’une Imitation de Jésus-Christ : c’est « le plus beau livre qui soit sorti de la main des hommes, » on veut bien le croire, mais on l’a connu naguère, dans les intervalles du catéchisme, à titre de petit ouvrage de piété. — Ainsi donc ces fruits du génie, ayant perdu le duvet et la fleur, nous sont vainement offerts : si quelques autres, de même qualité environ, restent dans le fruitier, qui s’en aperçoit ? […] On découvrira aussi que ce sont des hommes d’une certaine date : on s’amusera, par ce goût du bibelot qui est si vif aujourd’hui, des marques qu’ils en portent ; et, si quelques-unes de ces marques ont des analogues en d’autres siècles, voire de nos jours, on regardera en souriant ces analogies. […] Mais, tout de bon, reportons-nous à cette époque, et regardons les choses d’un peu plus près.
« La facilité de toutes ces dames, dit-il, avait rendu leurs charmes si méprisables, qu’on ne savait plus ce que c’était que les regarder. » De là ces amours à l’italienne décrits par le même auteur, ces amours dont Dangeau a aussi parié dans ses mémoires, et qui ont été longuement décrits dans ceux de la princesse Palatine, d’après les monuments de l’époque : ce sont ces mêmes amours contre lesquels l’éloquence de Bourdaloue a tonné le jour de Noël 1687, dans un sermon prêché devant le roi, qui le lendemain exila plusieurs jeunes gens de la cour : ait cité dans l’Abrégé chronologique du président Hénault. […] Elle passa neuf années avec lui, dans une liaison qu’elle ne regardait pas comme un mariage ; depuis la mort de Scarron, elle écrivit à son frère : « Je n’ai jamais été mariée : dans mon union avec Scarron le cœur entrait pour peu de chose, et le corps, en vérité, pour rien77. »Et Scarron, avant de l’épouser, disait à ses amis : Je lui apprendrai bien des sottises, mais je ne lui en ferai point. […] On peut, je crois, regarder la première entrevue du roi et de madame Scarron comme l’époque de la naissance d’un vif désir de se plaire réciproquement, désir qui n’a cessé de faire des progrès jusqu’à la certitude du succès, tout en traversant les nombreuses intrigues de galanterie, même d’amours, dont le roi fut occupé dix années.
Je songe à chaque trait que ma plume hasarde, Que d’un œil dangereux leur troupe me regarde : Je sais sur leurs avis corriger mes erreurs, Et je mets à profit leurs malignes fureurs. […] L’Âge vieil plus mûr, inspire un air plus sage, Se pousse auprès des Grands, s’intrigue, se ménage, Contre les coups du sort, songe à se maintenir, Et loin dans le présent regarde l’avenir.
La liaison du roi avec madame de Maintenon inquiétait plus madame de Montespan que celle de madame de Fontanges, qu’elle regardait comme une fantaisie, et dont elle ignorait toujours l’importante conséquence. […] Les Bossuet, les Fléchier, les Fénelon la regardaient comme l’élite de leurs troupeaux : elle regardait ces prélats comme les consécrateurs de la morale qu’elle pratiquait, comme les missionnaires chargés de lui donner la sanction religieuse. […] J’écris pour les historiens, et je me crois plus obligé à une exactitude scrupuleuse que si j’étais historien moi-même ; or il est de fait que je n’ai trouvé aucun document historique sur le personnel de madame de Maintenon à l’âge de quarante-cinq ans ; mais comme j’aime autant qu’un autre à me la figurer agréable, j’emprunterai ici la peinture que madame de Genlis en a faite : j’aimerais à la croire vraie, quoique je sois eu droit de la regarder comme un ouvrage d’imagination.
D’ailleurs, tout ce fatras de petites circonstances qui regardent les commencements de Baron, m’ennuie à la mort. […] L’Auteur fait faire ici un personnage à Molière d’homme désintéressé et juste ; mais il me semble qu’il pouvait dissuader le jeune étourdi de prendre sa profession, sans lui en faire voir le ridicule et l’indignité : C’est, dit-il, la dernière ressource de ceux qui ne sauraient mieux faire, ou des libertins qui veulent se soustraire au travail : c’est enfoncer le poignard dans le cœur de vos parents, de monter sur le Théâtre : je me suis toujours reproché d’avoir donné ce déplaisir à ma famille : c’est la plus triste situation que d’être l’esclave des fantaisies des Grands Seigneurs ; le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise. […] Car à regarder les Comédiens du côté des mœurs, ils en ont de bonnes comme les autres : et s’il y en a quelques-uns qui n’édifient pas, il y en a d’autres qui cultivent la vertu.
Pour moi, je la regarde comme une satyre délicate sur tous les faiseurs de projets en général, & comme une vive peinture de toute la critique moderne. […] Je danse à merveille : je chante à faire sécher Hermogene. | C’en est trop, je l’arrête. — Avez-vous encore une mere, quelques parents, qui s’intéressent à ce qui vous regarde ? […] Chez Regnier, des créanciers & des gens de Justice enlevent l’importun & le conduisent en prison ; le Poëte en est si content qu’il jure d’avoir désormais la plus grande vénération pour les Sergents, & de les regarder comme des hommes d’honneur & de probité.
Le 18 juin, madame de Montmorency écrivait au comte de Bussy : « Le roi, allant ou revenant de la messe, regarda madame de Ludres et lui dit quelque chose en passant. […] On dit que la petite reprendra son train ordinaire chez Madame. » Une autre lettre du 15 juin nous apprend que Jo a été à la messe du roi à la suite de Madame : « Le roi l’a regardée sous cape ; mais on (le roi) est insensible à son état et à sa tristesse. »Le lendemain, madame de Sévigné dit que « la dureté ne s’est point démentie ».
Il disait que la nature semblait lui avoir révélé tous ses secrets, du moins pour ce qui regarde les mœurs et les caractères des hommes.
Arlequin regarde Célio avec la plus grande admiration, & lui donne les vingt sols qu’il demande ; puis faisant réflexion qu’un tel homme seroit un trésor pour lui, qui est persécuté par un très grand nombre d’ennemis, & sur-tout par Scapin qui veut lui enlever Tiennette, prend Célio à son service, & lui annonce qu’il a une servante très jolie, dont on veut le priver. […] (Valere & Mariane se tiennent quelque temps par la main sans se regarder.) […] Mais ne faites donc point les choses avec peine, Et regardez un peu les gens sans nulle haine. […] Les gros mots que les amants venoient de se dire n’empêcherent pas qu’au travers de sa fenêtre Blanche ne regardât Don Diegue, & que Don Diegue ne se tournât deux ou trois fois pour voir si on le regardoit.
L’Avare de Plaute demande à voir la troisieme main de Strobile ; celui de Moliere regarde dans les deux mains de la Fleche & veut ensuite voir les autres. […] Ils me regardent tous, & se mettent à rire ; vous verrez qu’ils ont part sans doute au vol que l’on m’a fait. […] De mon côté, je vous déclare sincérement, & sans flatterie, que je vous ai toujours regardé comme un bon & fidele citoyen, & qu’encore aujourd’hui je fais le même jugement de vous. […] Il s’enferme seul ; il prend son cher trésor, le met sur la table, s’assied à côté de lui, l’admire, le regarde avec complaisance, l’embrasse à plusieurs reprises, lui donne les noms les plus tendres, & lui prodigue les épithetes les plus flatteuses. […] Pantalon s’approche alors de son trésor pour le disperser avec mépris, s’en débarrasser : mais il le voit ; sa passion renaît ; il le regarde avec tendresse, se précipite sur lui, le met dans son sein, & tout en gémissant de l’instant fatal qui doit les séparer, il dit qu’il aura du moins le bonheur de le posséder sans partage tant qu’il vivra.
Mais cela ne regarde que quelques-unes des précieuses, car il y en a qui ne se mettent pas tant à tous les jours. » Mademoiselle de Montpensier les représente dans la société des gens du monde, comme « fort sottes et fort niaises quand elles y sont seules de leur genre, comme fort insolentes quand elles y sont plusieurs. […] Certes, il ne viendra dans l’esprit de personne que cela regarde la maison de Rambouillet Molière, dans la préface de la pièce, exprime positivement une intention opposée aux applications de nos biographes modernes : « Les vicieuses imitations de ce qu’il y a de plus parfait, ont été de tout temps, dit-il, la matière de la comédie ; les plus excellentes choses sont sujettes à être copiées par de mauvais singes. […] Mais ces précautions ne pouvaient regarder que les précieuses subalternes, qui avaient pu se croire atteintes par l’auteur, et c’est ce que Molière a eu l’attention de faire en séparant les intérêts des véritables précieuses, des précieuses ridicules, c’est-à-dire les honnêtes femmes beaux-esprits, des hypocrites pleines d’affectation. C’est de leur propre autorité que nos biographes appliquent à madame de Rambouillet une précaution qui regardait des précieuses d’une autre classe. […] Quoique le secret d’ennuyer soit celui de tout dire , et que j’aie déjà dit beaucoup plus qu’il n’était nécessaire pour détourner de l’hôtel Rambouillet l’application des Précieuses ridicules, je ne puis m’empêcher de revenir sur l’opinion des écrivains qui donnent pour une adroite précaution contre les plaintes des personnes de cette société la préface où Molière déclare que sa pièce regarde uniquement les mauvais singes , les ridicules copies des illustres précieuses.
[30188, p. 59189] Racine regarda toujours Molière comme un homme unique.
Pour ce qui regarde le Misanthrope, on peut dire qu’il soutient son caractère jusqu’au bout. […] C’est par des exemples pareils, plus sensibles que de simples discours, qu’il s’appliquait à former les mœurs de celui qu’il regardait comme son fils. […] Si l’on regarde la musique, il n’y a rien qui n’exprime parfaitement toutes les passions, et qui ne ravisse l’esprit des auditeurs. […] Ils me regardent tous, et se mettent à rire. […] Aujourd’hui bien des gens regardent comme une leçon de morale cette même pièce qu’on trouvait autrefois si scandaleuse.
Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage, mais Molière avait son original, il voulut le mettre sur le théâtre.
Il est présumable qu’il aura fait les vers qui la concernent peu après la critique que son irritable génie regardait comme une injure ; mais qu’il aura été détourné de les publier par la crainte de se mettre subitement en contradiction avec l’épître où il paraissait vouloir s’élever à un genre plus grave que celui de la satire ; qu’il aura mise dans son portefeuille, en attendant que le démon de la satire le reprît. […] Il est vrai que dans ces deux lettres madame de Sévigné marque une préférence décidée pour Corneille sur Racine ; mais celait à une époque où celui-ci n’avait pas encore fait ni son Iphigénie, que Voltaire regardait comme son chef-d’œuvre, ni Phèdre, ni Athalie ; Voltaire a lu ces deux lettres et n’a probablement pas lu toutes celles où madame de Sévigné parle du déclin de Corneille et des progrès de Racine. […] Ce mot de reconnaissance ne peut regarder que madame de Sévigné, et les éloges qu’elle se plaisait à donner aux fables du poète, à mesure qu’elles paraissaient, surtout dans les cercles du duc de La Rochefoucauld, qui en était charme comme elle.
Lysidas sait maintenant pourquoi je regarde comme chimérique sa méthode, qui consiste à déterminer l’idée de la comédie pour montrer que Molière n’est point comique, à déterminer celle de la poésie pour faire voir qu’il n’est pas poète. […] Non contente de mépriser ces poêles, elle exigeait, dans l’intolérance de sa passion, que ce mépris fût universel, et semblait le regarder vraiment comme aussi nécessaire qu’une des lois qui régissent le monde. […] Alors, plein de confiance en toi et n’ayant plus besoin de guide, regarde en ton âme, tu y découvriras la beauté. […] Ne cherchez pas de raisonnements pour vous empêcher d’avoir du plaisir, et quand vous lisez une comédie, regardez seulement si les choses vous touchent. […] Au banquet offert à tous par les grands poètes, les philosophes pour qui la critique est une science apportaient jadis Aristote, et regardaient dans la Poétique si ce qu’on leur servait était bon.
Cette piece, qui sera toujours regardée des connoisseurs comme un chef-d’œuvre, n’eut que cinq représentations. […] Prestement, Ecoute un mot secrètement : Regarde un peu ce garnement ; Vois comme sérieusement Il se promene gravement.
Son opinion sur la campagne ne regarde point les maisons de campagne, plus qu’urbaines, de notre temps. Elle regarde la vie campagnarde, la chasse, la pèche, et même, il faut l’avouer, l’agriculture, dont il est fort pardonnable à une femme du grand monde de n’être pas charmée.
Au milieu des fêtes mémorables de l’année 1666, c’était toujours madame de La Vallière que la cour regardait comme l’heureuse maîtresse du maître. […] Mademoiselle rapporte que la reine ne voulut point croire l’imputation faite à madame de Montespan, l’attribua à madame d’Armagnac, et néanmoins crut à la calomnie qui regardait madame de Montausier, celle de seconder les vues du roi, et lui en témoigna son mécontentement.
La Princesse jette les vains ornements de son sexe, & demande à s’armer pour aller combattre auprès de Don Rodrigue, qu’elle regarde comme son époux. […] On le regarde comme un bouffon ; on méprise cette aventure. […] qu’il ne t’a pas même osé regarder ; que son amour est une flamme toute pure, une passion délicate & toute platonique ; que c’est par pure civilité que tu l’as reçu dans ta chambre, qu’il est ton parent, que tu as été abusée ? […] Puisque je m’engage à te faire avouer toi-même ton injustice, tu dois promettre non seulement de n’aspirer plus à ma main, mais de renoncer pour toujours à mon cœur, d’oublier que tu m’aies connue, de ne plus me regarder, & de ne pas prétendre que je jette les yeux sur toi...
Le cinquième acte du Festin de Pierre peut être à juste titre regardé comme un prologue du Tartuffe. […] On s’étonne que Molière ait attendu l’absence du roi pour faire jouer le Tartuffe ; ce qu’on regarde comme une imprudence n’est-il pas au contraire le résultat d’un calcul très sage ? […] Ce retranchement a sans doute paru nécessaire à l’auteur ; il n’aura pas manqué de s’apercevoir qu’il nuisait à la belle scène du premier acte entre Orgon et Cléante, où le même moyen se trouve employé : Regardez Ariston, regardez Périandre, Oronte, Alcidamas, Polydore, Clitandre, etc. […] Je vous regarde comme un saint. […] Depuis qu’on espère se pousser par la piété dans les emplois, nous avons une multitude de chrétiens improvisés qui s’agenouillent dévotement quand on les regarde ; les gens qui veulent faire leur chemin ne manquent pas un office, et les athées qui ont de l’ambition ne passent pas un jour sans répéter leur Credo.
Il suffit, pour s’en convaincre, de regarder le tableau des « farceurs, » où sa stature, en tenant compte de la perspective, est sensiblement inférieure à celle des autres personnages. […] Une tradition bien connue rapporte qu’à Pézenas il s’en allait, les jours de marché, s’installer dans la boutique d’un barbier, et que, assis dans un grand fauteuil, il écoutait, il regardait, tandis que bourgeois et manants, gentilshommes campagnards et beaux de petite ville bavardaient autour de lui. […] De même que sa personne physique est généralement regardée comme un type de beauté, un lieu-commun déjà vieux le comble de toutes les vertus morales. […] Pour Molière, en particulier, il me plaît fort, après y avoir regardé, de ne trouver dans sa vie aucune des « terribles défaillances » entrevues par M. […] — On ne joue pas les tragiques avec ton nez. — Mon nez ne regarde personne. — C’est là ton erreur, il regarde tout le monde. » Pour Molière, c’était toute sa personne qui chagrinait le public dans la tragédie.
Plapisson, qui passait pour un grand philosophe, était sur le théâtre pendant la représentation ; et à tous les éclats de rire que faisait le parterre, il haussait les épaules et regardait le parterre en pitié, et disait quelquefois tout haut : Ris donc, parterre !
Hélène elle-même subit la violence de Pâris plutôt qu’elle ne s’y prêta ; elle se regardait comme l’instrument dont les dieux s’étaient servis pour perdre l’Asie. […] Avec quelle malignité elle dévisage ses amis même, par exemple, cet oncle Damis qui … Les deux bras croisés, du haut de son esprit23, Regarde avec pitié tout ce que chacun dit. […] Puis Alceste se sent emporté par cette espèce de fatalité que l’on a toujours regardée comme un des caractères de l’amour. […] Nous devons l’estimer, parce que nous valons pour la plupart moins que lui ; mais nous aurions grand tort de le regarder comme l’idéal de l’homme vertueux. […] Que Philaminte regarde donc sa fille comme une sotte ; qu’Armande voie en elle une Cendrillon ; nous la tiendrons, nous, pour une femme d’un esprit charmant et naturel, en qui une pointe de malice relève une délicieuse naïveté.
Vous, bœuf, vous ne me regarderez pas plus que si je n’existais pas. […] Il faut en revenir ici aux principes que j’ai rappelés, à l’occasion de L’Avare, sur la fin et les moyens de la comédie, en ce qui regarde la leçon morale. […] Il suffirait de ces rapports frappants pour faire plus que soupçonner l’identité des personnages, malgré la différence des costumes ; mais, en ce qui regarde Pourceaugnac, cette identité est un fait dont un passage de l’Asinaire, de Plaute, m’a fourni la démonstration complète. […] Mais il n’y avait pas là d’intrigue, de nœud, de dénouement, conséquemment pas de pièce ; il en fallait trouver une, et c’est Molière que ce soin regardait : la chose était en bonnes mains. […] Un homme d’esprit, qui n’avait pas d’autre titre, se moquait un jour, devant un grand seigneur, de l’effroi qu’inspirent les comètes, considérées comme présages de quelque grand et funeste événement : Vous en parlez à votre aise, lui dit le grand seigneur ; on voit bien que cela ne vous regarde pas, vous autres.
Mais ce qui regarde cette derniere, trouvera assez sa place dans l’article de l’intérêt même ; je ne vais donc parler que des trois premieres. […] Je répliquerai à cela que l’art de la comédie n’est pas pour rien regardé comme le premier : d’ailleurs, les bons Auteurs savent très bien s’élever malgré les regles les plus austeres.
Vous l’avez accompagné en silence sur le bord de la mer : l’heure du départ est arrivée, le ciel est noir, la mer rugit au loin, le frêle esquif se balance d’une façon formidable, votre ami reste calme, il vous tient la main dans les siennes, il vous la serre, il vous regarde avec assurance, il vous sourit une dernière fois ; vous, cependant, vous avez la mort dans le cœur. […] « Voilà ce que disent nos maîtres, les critiques qui ont vu, qui se souviennent et qui regardent, à la fois, dans le présent et dans le passé.
Arlequin regarde attentivement la fenêtre de Flaminia. […] Moi, je le laisserai ou je mourrai. » De même, lorsque le capitaine revient à Silvia, ils n’ont d’autres paroles à échanger entre eux que celles que prêtent à leurs personnages les auteurs des Ingannati : Regardez, messer Spavente, reconnaissez votre page, celui qui s’est fait votre serviteur si fidèle, si dévoué ; celle qui vous a aimé d’un amour si brave et si constant.
Il faut s’éclaircir de leurs vrais sentiments à mon égard en leur proposant quelque chose de présent et de solide… Je veux que madame de Richelieu voie la froideur et l’indifférence de madame de Montespan sur tout ce qui regarde mes affaires essentielles. » Une lettre, datée de Versailles, le 6 août, au même abbé Gobelin, ne laisse aucun doute sur la brouillerie des deux dames, et sur sa cause, et sur la mauvaise humeur qu’en avait prise le roi, fatigué de leurs altercations. […] « J’en parlai hier au matin à madame de Montespan, et je lui dis que je priais le roi et elle de ne point regarder la mauvaise humeur où je leur paraissais être, comme une bouderie passagère contre eux ; que c’était quelque chose de plus sérieux ; que je voyais à n’en pouvoir douter que j’étais très mal avec elle et qu’elle m’avait brouillée avec le roi. » Brouillée avec le roi !
J’avoue qu’il y a des lieux qu’il vaut mieux fréquenter que le théâtre ; et si l’on veut blâmer toutes les choses qui ne regardent pas directement Dieu et notre salut, il est certain que la comédie en doit être, et je ne trouve pas mauvais qu’elle soit condamnée avec le reste ; mais supposé, comme il est vrai, que les exercices de la piété souffrent des intervalles, et que les hommes aient besoin de divertissement, je soutiens que l’on ne leur en peut trouver un qui soit plus innocent que la comédie. » Avant de se prononcer ainsi, Molière a eu soin d’établir qu’il y a comédie et comédie, et de faire observer que « ce serait une injustice épouvantable que de vouloir condamner Olympe, qui est femme de bien, parce qu’il y a une Olympe qui a été une débauchée ». […] Si l’on y regarde de près, ou verra que l’invention dans le langage n’a jamais été portée plus loin ; le mot abstrait ne parait pas, la métaphore y supplée de manière à parler aux sens. À proprement parler, on ne lit pas les fables de La Fontaine, on les regarde ; on ne les sait point par cœur, on continue de les voir.
Le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise. […] On a assez généralement regardé L’Amour médecin comme le premier acte d’hostilité de Molière contre la Faculté. […] Enfin, la principale figure de cette grande composition, Alceste, fut généralement regardée comme le portrait du duc de Montausier. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage. […] Cette production charmante a été regardée par tous les littérateurs comme l’essai heureux d’un genre frais et animé.
Le reste de l’article qui le regarde dans le dictionaire historique est exact, si ce n’est que vers la fin on dit qu’il reçut plusieurs pensions du roi Louis XIV.
je soutiens contre Molière, qu’un avare qui n’est point fou, ne va jamais jusqu’à vouloir regarder a dans la troisième main de l’homme qu’il soupçonne de l’avoir volé. […] En effet, regardez comme il est pâle ! […] Cette belle Dorimène, impatiente d’échapper à la pauvreté et aux brutalités de la maison paternelle, ne s’inquiète même pas de regarder le mari qu’on lui donne ; pourvu qu’elle soit dame et maîtresse en la maison de ce manant, Dorimène est contente. […] Mais la coquette le regarda pleurer, puis elle se mit à rire et à rappeler son amant. […] L’innocente fille était occupée à se regarder dans un miroir, et elle s’y représentait elle-même, à elle-même ; parlant et souriant à sa personne, dans les mêmes postures tendres et naïves qu’elle avait tout à l’heure avec son amant.
Je suis convaincu qu’il regardait avec plaisir faire les foins. […] Le soleil couché, il se promène à petits pas, sans regarder l’or et la pourpre du ciel éblouissant, cherchant « une lumière douce pour soulager ses faibles yeux ». […] Le naturaliste qui veut parler dignement des crocodiles, ne va pas se mêler au groupe de bonnes d’enfants et de soldats badauds qui regardent au Jardin des Plantes un grand lézard à moitié mort enveloppé dans une couverture de flanelle, et s’écrient : Ô l’affreuse bête ! […] À la ville comme à la cour, partout où étaient ses yeux et ses oreilles, il regardait, écoutait en silence. […] Il avait les yeux collés sur trois ou quatre personnes de qualité qui marchandaient des dentelles ; il paraissait attentif à leurs discours, et il semblait, par le mouvement de ses yeux, qu’il regardait jusques au fond de leurs âmes pour y voir ce qu’elles ne disaient pas.
« Il peut regarder avec loisir ce portrait que j’ai fait de lui- même 27. » Quand ou n’aurait que ce seul mot de sa préface, il y aurait là de quoi nous prouver que les procédés du moraliste diffèrent essentiellement de ceux de Molière. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon ouvrage. […] « Molière, a dit Lagrange, camarade et ami du grand homme et le premier éditeur de ses œuvres complètes, Molière faisait d’admirables applications dans ses comédies, où l’on peut dire qu’il a joué tout le monde puisqu’il s’y est joué le premier en plusieurs endroits, sur les affaires de sa famille et qui regardaient ce qui se passait dans son domestique; c’est ce que ses amis particuliers ont remarqué bien des fois. » (Voir Sainte- Beuve, Nouveaux portraits.)
Vous pouvez regarder, rue Richelieu, sa statue ; elle est impassible, elle est très belle, et respire le génie. […] DOM JUAN Sganarelle, regarde un peu ses mains. […] Mais Tartuffe a beaucoup nui en un sens à sa réputation littéraire ; à force d’admirer Tartuffe, on n’a plus regardé tout ce que Molière a semé de conceptions merveilleuses au-delà ou à côté. […] Mais ils firent tant de bruit dans leurs gazettes, car dès ce temps ils avaient déjà des gazettes, que Molière se mit à les regarder. […] Parmi les représentants les plus outrés de ce rigorisme, nous retrouvons un très grand adversaire de Molière, un adversaire qui pense très juste sur bien des points, mais qui, en tout ce qui regarde les femmes, est souvent d’un ridicule achevé.
Cependant ce ne fut pas sans se faire une fort grande violence, que Moliere resolut de vivre avec elle dans cette indifference ; & si la raison lui faisoit regarder sa femme comme une personne, que sa conduite rendoit indigne des caresses d’un honnête homme, sa tendresse lui faisoit envisager la peine qu’il auroit de la voir sans se servir des privileges que donne le mariage. […] Remarquez bien que par barbarisme je n’entens pas des expressions, ou des paroles tirées des autres langues, & inconnues à la Françoise ; j’entens un arrangement qui choque les regles, & que nos bons Grammairiens regardent comme barbare.
Il est si difficile de s’approprier les idées d’autrui, de les revêtir de couleurs propres à son sujet & à son pays, que je ne comprends pas pourquoi quelques Auteurs modernes, loin d’avouer qu’ils ont imité tel Romancier ou tel Auteur comique, s’en défendent au contraire comme d’un crime énorme, & regardent comme autant d’ennemis les personnes qui découvrent les sources où ils ont puisé.
Le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise.
Ayant l’occasion comme vous de quitter, un instant, la vie dissipée, il se mit à examiner les 40 ou 50 choses qu’il regardait comme des vérités. […] Ce mot très bien dit par Mlle de Vienne peint seul la manière dont Orgon est regardé dans sa famille. […] Mais ne faites donc point les choses avec peine ; Et regardez un peu les gens sans nulle haine. […] Mme de Staël peut désirer que le public la regarde comme un génie créateur. […] Mme de Staël peut désirer d’être regardée comme un grand caractère.
Quoique mariée à un homme âgé qui ne l’apprécie pas, elle ne songe plus à être regardée, et cette modestie est le couronnement de tous les autres mérites qui font d’elle une femme accomplie357. […] Il ne peut, pas plus que Boileau, supporter « ces femmes qui se retranchent toujours fièrement sur leur pruderie, regardent un chacun de haut en bas, et veulent que toutes les plus belles qualités que possèdent les autres ne soient rien en comparaison d’un misérable honneur dont personne ne se soucie382. »II déteste également « ces personnes qui prêtent doucement des charités à tout le monde, ces femmes qui donnent toujours le petit coup de langue en passant, et seraient bien fâchées d’avoir souffert qu’on eût dit du bien du prochain383. »Il veut que, jusque dans sa défense, la vertu attaquée reste douce ; il fait exprimer ce précepte par Elmire, insultée par la lubrique déclaration de Tartuffe : J’aime qu’avec douceur nous nous montrions sages, Et ne suis pas du tout de ces prudes sauvages, Dont l’honneur est armé de griffes et de dents, Et veut au moindre mot dévisager les gens384.
Je leve au Ciel les yeux, je vous regarde, je soupire ; C’est vous en dire assez. […] Dieux, Rois, qui sous vos pieds regardez tout le monde, Pouvez-vous comparer votre bonheur au mien ? […] Dans la premiere scene de l’Ecole des Femmes, Arnolphe & Chrisalde se regardent mutuellement en pitié, parceque l’un pense mettre son front à l’abri de toute insulte en épousant une femme sotte ; & que l’autre croit au contraire l’honneur d’un mari plus en danger entre les mains d’une idiote que d’une spirituelle.
Toujours au plus grand nombre on doit s’accommoder, Et jamais on ne doit se faire regarder. […] Lorsque les Anciens vouloient inspirer à leurs enfants l’horreur que tout honnête homme doit avoir pour l’ivresse, ils ne leur offroient pas pour exemple un buveur d’eau ; ils leur faisoient voir au contraire un esclave ivre ; & l’état affreux de ce misérable produisoit ordinairement l’effet qu’on s’étoit promis : de même, parmi nous, une personne sensée veut-elle exhorter son fils à être ferme sur ses pieds, à prendre une contenance noble & assurée, elle ne lui donnera pas pour modele un chef-d’œuvre de l’art & de Pigale, en lui disant : voilà comme tous les hommes devroient être : elle le menera aux Tuileries, elle lui montrera du doigt quelques-uns de ces faquins qui prennent un air penché, qui affectent l’anéantissement pour faire les hommes à bonnes fortunes, & elle lui fera remarquer l’air de pitié avec lequel tout le monde les regarde. […] Voilà ce qu’on admire dans les ouvrages de Moliere ; voilà ce qui le fera toujours regarder par les gens sensés comme le dieu de la comédie. […] Tout homme frémira de se laisser vaincre par le démon de l’avarice, quand il verra le malheureux Harpagon livré aux inquiétudes continuelles de perdre son trésor, redoutant jusqu’à ses enfants qu’il regarde comme autant d’ennemis, & se laissant aveugler par sa malheureuse passion, jusqu’au point de renoncer à toutes les loix de la probité, & de se déshonorer en faisant l’infame métier d’usurier.
Ainsi malgré l’exemple de Plaute, où nous lisons : cedo tertiam, je soutiens contre Molière, qu’un avare, qui n’est point fou, ne va jamais jusqu’à vouloir regarder dans la troisième main de l’homme qu’il soupçonne de l’avoir volé.
Contre le défaut qui regarde les femmes il fit aussi deux Comédies ; l’une intitulée : Les Précieuses ridicules ; et l’autre : Les Femmes savantes.
L’exemple de François Ier, celui des quatre successeurs de ce prince, celui de Henri IV, lui avaient persuadé que la France voyait sans scandale des maîtresses attitrées à ses rois, et regardait l’usage qui les avait introduites comme un dédommagement destiné à racheter ce qui manque à la liberté de leur choix quand ils se marient ; mais il n’oubliera pas ce qu’il doit à sa couronne dans le choix des personnes qui seront chargées d’élever son héritier.
On trouve même dans cette comédie une quantité de tirades qui auraient pu valoir à Molière l’éloge banal de nos jours : il y a de beaux vers dans cette pièce, éloge que l’on devrait regarder comme une critique sanglante ; dit-on des bons auteurs, qu’ils ont de beaux vers dans leurs drames ? […] À vous, mesdames, qui regardez toutes les belles qualités des autres femmes comme rien, en comparaison d’un misérable honneur dont personne ne se soucie… ; qui vous croyez fort vertueuses pourvu que vous appeliez amis ce que les autres nomment galants. […] Dès ce moment, Molière regarda Baron comme son enfant, il l’avait sans cesse avec lui, et ne manquait pas une occasion de donner à son élève quelque leçon utile, témoin cette anecdote. […] Je prie sincèrement mes juges de me condamner, si j’ai tort ; et je le désire presque, lorsque je songe que l’élite des comédiens, ceux qu’on regarde comme les apôtres du goût, peuvent, dans leurs missions fréquentes, égarer les acteurs, les spectateurs de nos provinces ; et puis, comment compter sur la tradition ? […] Les divertissements qui suivent le dénouement ne nous regardent pas, et nous ne tenons pas plus à eux qu’ils ne tiennent à la pièce.
Ménage peut y avoir été trompé : c’est la seule manière d’expliquer son assertion, que démentent des faits prouvés, et que sa bonne foi reconnue empêche de regarder comme une imposture. […] On peut, d’ailleurs, opposer à cette saillie d’un personnage imaginaire ce que dit Molière lui-même, dans la préface du Tartuffe : « La médecine est un art profitable, et chacun la révère comme une des plus excellentes choses que nous ayons. »Le seul rôle de Béralde prouve, mais prouve invinciblement que Molière, à l’époque du moins où il écrivit Le Malade imaginaire, n’avait aucune foi à la médecine, Béralde, l’homme raisonnable de la pièce, comme Cléante l’est dans Le Tartuffe ; Béralde, par la bouche de qui Molière attaque la manie d’Argan, comme il combat celle d’Orgon par l’organe de ce même Cléante, Béralde dit, comme l’athée don Juan, et en outrant même le mépris de ses expressions : « La médecine est une des plus grandes folies qui soient parmi les hommes ; et, à regarder les choses en philosophe, je ne vois point de plus plaisante momerie, je ne vois rien de plus ridicule qu’un homme qui veut se mêler d’en guérir un autre. »Ajoutons que la longue et vive argumentation de Béralde contre la médecine ne va point directement au sujet ; que l’important pour lui est de prouver à Argan, son frère, non pas qu’il aurait tort de se confier à la médecine, s’il était malade, mais qu’il fait mal de s’y livrer, puisqu’il se porte bien. […] Il est présumable que Molière n’arriva que par degrés à regarder la médecine comme une science fausse, dangereuse et ridicule. […] Renoncer à cet art, c’était sacrifier à la fois ses intérêts et ses goûts ; c’était surtout laisser sans appui un théâtre qui était son ouvrage, et des comédiens qu’il regardait comme ses enfants. […] Je ne rapporterai que ce qui regarde ce dernier chef.
Les comédiens étoient autrefois regardés comme infâmes (l. si fratres cod. ex quibus causis infamia irrogat. […] ) ; & par cette raison on les a regardés comme incapables de rendre témoignage. […] L’avarice, cette avidité insatiable qui fait qu’on se prive de tout pour ne manquer de rien ; l’envie, ce mêlange d’estime & de haine pour les avantages qu’on n’a pas ; l’hypocrisie, ce masque du vice déguisé en vertu ; la flatterie, ce commerce infame entre la bassesse & la vanité : tous ces vices & une infinité d’autres, existeront par-tout où il y aura des hommes, & par-tout ils seront regardés comme des vices. […] Boileau a eu raison, s’il n’a regardé comme indigne de Moliere que le sac où le vieillard est enveloppé : encore eût-il mieux fait d’en faire la critique à son ami vivant, que d’attendre qu’il fût mort pour lui en faire le reproche. […] Ils se regardent aussi comme ne faisant avec eux qu’une même personne ; & dans cette vue l’amour-propre joue admirablement bieu son jeu.
À la ville on s’attend au passage, dans une promenade publique, pour se regarder au visage les uns les autres ; les femmes se rassemblent pour montrer une belle étoffe et pour recueillir le prix de leur toilette. […] Ils ont dépensé leurs plus belles années, leur plus beau style et leur meilleur esprit, à soutenir, à parer, à décorer, à fortifier la chose de ce monsieur ; ils ont fécondé sa terre, ils ont taillé sa vigne, ils ont mené paître ses troupeaux, ils ont supporté, pendant que le maître dormait, ou batifolait avec ses esclaves, la chaleur de la journée et la fraîcheur du matin ; ils n’ont pas osé être malades sans la permission de ce monsieur ; ils ont regardé dans les yeux de Trajan, pour savoir si Trajan était content ; ils ont été attentifs à sa moindre parole, ils ont interrogé son sourcil de Jupiter Olympien, ils ont flatté même sa cuisinière, la complice de sa toute-puissance ; ils ont ri de son rire, et pleuré de son chagrin ; ils ont sué, ils ont halé, ils ont râlé… et les voilà à la porte de cette maison qu’ils ont bâtie, à la porte de ces jardins qu’ils ont plantés ; et du jour au lendemain, pendant que ce sol qu’ils ont fécondé de leur esprit, de leur talent, de leur labeur, rapporte au maître un intérêt qui serait un capital pour les ouvriers de la vigne, nul ne s’informe du destin de ces ouvriers habiles, actifs, intelligents, dévoués, braves jusqu’à l’audace, hardis jusqu’à l’abnégation ! […] Où remplacer la femme savante « que l’on regarde comme on fait d’une belle arme » ? […] me voilà, vous ne direz pas que je me suis trop parée, vous ne direz pas que j’ai fait trop d’efforts, et cependant regardez-moi, écoutez-moi ! […] On l’écoutait bouche béante, on la regardait, à la brûler, et tous ces regards, semblaient dire à leur tour : — C’est impossible, cette femme ne joue pas pour la dernière fois !
On prend la lettre, on l’ouvre sans regarder le dessus. […] Là, regardez-moi sans rire, si vous le pouvez, Mons Dumont.
En ce qui regarde le fait de la séparation, madame de Caylus se borne aux paroles suivantes : « Ces deux amants, pressés par leur conscience, se séparèrent de bonne foi, ou du moins ils le crurent. […] ) s’apercevant que le dessous des cartes (le trop d’amitié du roi pour cette glorieuse et la jalousie de madame de Montespan) se découvre, affectent fort de rire et de tourner cela en plaisanterie. » Il eut été, en effet, de fort mauvais goût que des amies de madame de Maintenon consentissent à regarder les préférences marquées par le roi à la gouvernante comme des avances sérieuses et pressantes : c’était chose fort convenable d’affecter d’en rire comme d’une plaisanterie sans conséquence.
Il est décidément dangereux d’oser regarder la vérité en face et de toucher à certaines plaies et à certains masques. […] Dans Dom Juan, au contraire, les liens sont brisés ; Molière a donné comme un coup d’aile et regarde en face les grands problèmes. […] Une foule de gens en perruque le regardent et rient. […] Et cette bouche ironique et confiante à la fois, regardez-la ; regardez cette lèvre supérieure, arquée comme celle d’Alceste, cette lèvre inférieure déjà lasse et froncée comme celle d’Arnolphe. […] J’eus à peine achevé de parler du mérite de cet auteur, qu’une Personne de la Compagnie tira quelques pièces de vers qui regardaient cet illustre défunt.
Lothaire, encore plus surpris qu’il ne l’avoit été d’abord, le regarda quelque temps sans parler ; & après l’avoir bien considéré : Faut-il, Anselme, lui dit-il, que je prenne sérieusement ce que tu viens de dire, & crois-tu que, si je ne l’avois pris pour une raillerie, je ne t’aurois pas interrompu au premier mot ? […] Pendant qu’il s’empêchoit de lui parler, il ne laissoit pas de faire des réflexions sur sa beauté ; & croyant ne tourner les yeux vers elle que par bienséance, il commença peu à peu à la regarder avec admiration, & après cela avec tant de plaisir qu’il ne pouvoit plus s’en détacher. […] Je ne suis pas tout-à-fait de leur avis ; j’ai toujours regardé la Nouvelle espagnole comme un très bon fonds de comédie.
D’ailleurs on verra par la suite qu’elle a du rapport à quelques particularités qui regardent Molière. […] Il fallut bien que la Raisin en passât par là ; mais ces huit jours lui donnèrent beaucoup d’argent, avec lequel elle voulut faire un établissement près de l’Hôtel de Bourgogne ; mais dont le détail, et le succès ne regardent point mon sujet. […] Elle regardait cet endroit comme un trait indigne d’un si bon Ouvrage : Mais Molière avait son original, il voulait le mettre sur le Théâtre. […] C’était un Frère lai, les deux Philosophes n’avaient point vu son enseigne ; et honteux d’avoir perdu le fruit de leur dispute devant un homme qui n’y entendait rien, ils se regardèrent l’un l’autre sans se rien dire. […] Le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise.
Il est touché de ses charmes & de sa jeunesse ; il la prie de ne le pas regarder, parcequ’il n’auroit jamais le courage de la faire mourir : il finit par tuer un mouton dont il porte le cœur à son maître, en lui disant que c’est celui de la Princesse, & en faisant bée : ce qui rend la chose burlesquement touchante.
Le berceau de cette révolution fut l’hôtel de Rambouillet, cet hôtel regardé, depuis la fin du siècle passé, comme l’origine des affectations de mœurs et de langage, et qui fut dans le grand siècle, et pour tous les grands écrivains qui l’illustrèrent, pour Corneille, pour Boileau, pour La Fontaine, pour Racine, pour Molière même, oui pour Molière, plus que pour aucun autre, l’objet d’une vénération profonde et méritée.
Boileau regardait son suffrage comme le plus honorable qu’il pût obtenir ; Molière a emprunté son caractère plusieurs des beaux traits de son Misanthrope.
Le Moine envoya chercher son ami, & dans son emportement il en vint jusqu’aux injures. « Vous m’aviez solemnellement promis, lui dit-il, de ne plus persécuter cette honnête femme, & vous avez la malhonnêteté de lui envoyer faire des présents, qu’elle regarde avec exécration, & qu’elle m’a donnés pour vous rendre ». […] Réprimande très vive du Docteur à Léandre, qui avoue avoir eu la témérité de regarder plusieurs femmes, prie humblement son Précepteur de lui montrer la maison de celle qui s’en est offensée, & vole vers Isabelle qui est à sa fenêtre.
Surpris d’abord l’un & l’autre de cette entrevue, ils ne tarderent pas à se regarder d’un œil favorable. […] Tantôt elle se divertissoit à lui découvrir le sein & à le regarder, ou à se moquer de lui & à rire lorsqu’il vouloit le cacher.
voyons Poinsinet 53 se faire regarder, avec une petite piece décousue & pillée çà & là, comme l’espoir de la scene françoise. […] Admettons une seconde troupe ; la premiere ne regardera plus comme une chose de peu de conséquence qu’un ouvrage soit refusé ou reçu : les petites haines, les raisons particulieres ne l’emporteront plus sur l’intérêt général devenu très pressant : on écoutera attentivement, & l’on réfléchira avant de rejetter un poëme qui peut attirer la foule à un autre théâtre.
Le jugement de Rousseau à cet égard n’était pas entièrement impartial, car il avait dans son propre caractère et dans sa conduite à l’égard des hommes une ressemblance frappante avec Alceste ; d’ailleurs à d’autres égards il a méconnu l’esprit de la comédie, et a regardé comme essentiels au genre, des défauts qu’on ne peut reprocher qu’aux auteurs. […] C’est comme ces jeux où les enfants se cachent : ils ne peuvent pas rester tranquilles dans leur coin ; ils avancent toujours la tête pour regarder si on ne les découvrira pas ; enfin, il faut connaître Marivaux, pour comprendre ce que c’est que de la naïveté sans naturel et sans innocence. […] Pour ne citer qu’un exemple entre plusieurs, je ne puis m’empêcher de regarder comme un chef-d’œuvre de peinture théâtrale la scène de Raoul sire de Créqui, où les enfants du geôlier ivre, font échapper le prisonnier. […] La déclamation ampoulée répondait parfaitement à cet étalage. » Comme à cette époque, et même encore longtemps après, on jouait la tragédie en habit de cour, avec un grand jabot, une épée et un chapeau, on ne se permettait guère d’autres gestes que ceux qui sont reçus dans un salon ; tout au plus quelques légers mouvements des bras ; on regarda sans doute comme un coup de théâtre très hardi, que dans la dernière scène de Polyeucte, Sévère qui vient reprocher à Félix sa trahison, s’avançât le chapeau sur la tête, tandis que l’autre l’écoutait le chapeau sous le bras.