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22. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

« Vous avez grand tort de vous plaindre, répond Lelio, car le fruit que vous verrez prochainement naître de moi vous montrera que je n’ai pas perdu le temps, ainsi que vous le dites. » ACTE QUATRIÈME. […] Ricciardo en a pensé mourir de rire et s’est montré joyeux de l’aventure. […] Voyons ce que Molière fit représenter après le départ des Italiens : il importe d’insister sur ces débuts qui nous montrent le génie de Molière prenant en quelque sorte son essor. […]   Ce qui est certain, c’est que Molière diversifia ensuite le costume autant que le caractère du rôle : il devait faire paraître encore Sganarelle dans cinq comédies, à savoir : L’École des maris, Le Mariage forcé, Le Festin de Pierre, L’Amour médecin et Le Médecin malgré lui ; nous le montrer successivement tuteur d’Isabelle, futur époux de Dorimène, valet de Dom Juan, père de Lucinde, fagotier. […] Mais il convenait de reconnaître la part considérable que l’art antérieur de l’Italie occupe dans les commencements de sa carrière, pour montrer combien cet art avait contribué à son éducation dramatique.

23. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Arlequin montre deux fois ses mains pour montrer quelle a vingt ans. […] « Un dernier tableau montrait Don Juan en proie au feu vengeur, exprimant en vers ses tourments et son repentir. […] Il nous suffit de montrer où elle en arriva sur le théâtre italien, par une conséquence toute naturelle du jeu comique propre à ce théâtre.

24. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

Madame Scarron faisait toujours plus remarquer sa douceur, son aménité, son respect, à mesure que madame de Montespan se montrait plus impérieuse : elle gagnait en proportion de ce que celle-ci perdait. Malgré la légitimation des petits princes, on ne les montrait point encore. […] C’est aussi dans ces temps où les princes ne se montraient qu’à moitié, que le roi s’amusant à la campagne (à Clagny sans doute) à renverser à demi les fauteuils des dames, passa droit derrière celui de madame Scarron, en disant : Pour celle-là je n’oserais.

25. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

On m’a montré de la tendresse (madame de Montespan triomphante y était disposée) ; mais à vous dire la vérité, on ne m’a pas persuadée, et je ne saurais renoncer au projet (de retraite) que j’ai fait avec vous : j’y envisage une douceur extrême ; et quelque bons traitements qu’on me fasse ici, j’y aurai de grands chagrins. […] Le P. de La Chaise est un honnête homme ; mais l’air de la cour gâte la vertu la plus pure, et adoucit la plus sévère. » M. de Beausset, dans son Histoire de Bossuet, voit avec peine que madame de Maintenon se soit montrée en cette occasion peu équitable envers Bossuet. […] Toute la suite de sa vie a montré qu’en cette occasion sa peine la plus sensible fut la perte des espérances qu’elle avait déjà conçues de ramener le roi à une conduite plus conforme aux sentiments de religion et de piété dont elle était pénétrée. » M. de Beausset se fonde sur les Mémoires de Saint-Simon, et il en cite l’extrait suivant : « Bossuet était un homme dont les vertus, la droiture et l’honneur étaient aussi inséparables que la science et la vaste érudition.

26. (1843) Le monument de Molière précédé de l’Histoire du monument élevé à Molière par M. Aimé Martin pp. 5-33

Certes il y a quelque chose dé beau dans ce mouvement universel et populaire, car ce ne sont pas seulement les riches cités qui se montrent reconnaissantes envers leurs concitoyens : de simples bourgs, de chétifs hameaux prennent l’initiative et réclament leurs parts de l’honneur national. […] Parmi ces derniers, mademoiselle Mars s’est surtout montrée généreuse : c’était son droit. […] Comment se serait-elle montrée ingrate, cette dont le naturel, la grâce, l’intelligence exquise, étaient devenus comme la seconde couronne du poète. Les interprètes du génie sont presque aussi rares que le génie même, et ici l’interprète se montra toujours digne de l’œuvre. […] Cet amour a tué l’amour de la patrie ; Par son impur poison la jeunesse est flétrie ; L’or, des plus beaux instincts fait dévier le cours : Plus d’élans généreux, plus de nobles amours…… Le poète lui-même, aurais-tu pu le croire ; Aime l’or, ô Molière, encore plus que la gloire : Cet appât du vulgaire a gagné les esprits, Tous encensent l’idole et s’en montrent épris.

27. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

L’Antigone, avec son dénouement ensanglanté, Les Euménides, avec leur pacification finale, nous montrent la tragédie dans toute sa pureté. […] Ils se montrèrent irrésolus, chancelants, ballottés. […] Ainsi, le dénouement du drame comique me montre le triomphe réel de la personne humaine dans sa destruction apparente, et le dénouement du drame tragique m’avait montré le triomphe réel aussi du Divin dans sa destruction également apparente. […] Horace seul s’est montré vraiment poète dans quelques-unes de ses satires, où il a eu le bon goût de peindre sans colère, sans amertume, la société dissolue de son temps, se perdant elle-même par l’excès de sa folie211. […] Mais, dans ce deuxième cas comme dans le premier, soit que leur liberté déréglée ne s’attaque à aucune vérité de l’ordre moral, soit qu’elle ose faire la guerre aux choses divines, ils doivent, pour se montrer comiques, rire de leur propre extravagance.

28. (1900) Molière pp. -283

Si je ne vous montrais que ce second Alexandre, je vous fausserais complètement l’idée d’Alexandre ; si je ne vous montrais que le premier, je ne vous la fausserais pas, mais je vous la donnerais incomplète. […] Je vais vous montrer l’une en face de l’autre, dans la même situation, Angélique, du Malade imaginaire, et Rosine, du Barbier de Séville : vous allez voir la différence. […] Si je m’étonne d’une chose, c’est que Molière, après nous avoir montré George Dandin faisant des excuses à Clitandre, après nous avoir montré Sganarelle s’armant d’une cuirasse contre la pluie, et l’autre Sganarelle, celui de Dom Juan, associé à des infamies qu’il déteste ; après nous avoir montré Sosie renonçant à être Sosie, parce que le seigneur Mercure le bâtonne, je m’étonne, dis-je, que Molière ne nous ait pas montré le Pauvre reniant Dieu, parce que telle est la volonté, l’inéluctable volonté du seigneur Dom Juan. […] Molière a montré un génie avancé et qui voit loin ; il a fait Tartuffe, il a fait cette comédie que vous allez voir se développer tout à l’heure. […] Je vous l’ai peint comme un poète effréné ; je vous ai montré cette imagination sans limites dans le burlesque, je vous ai montré cette impétuosité de vision et de verve qui le jette dans des conceptions de comédie aussi fantastiques que le sont par moments certaines scènes de Monsieur de Pourceaugnac, du Bourgeois gentilhomme et du Malade imaginaire.

29. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Je vais montrer avec quelle logique ils sont partis, l’un de l’idée du sérieux, un autre de l’idée du sublime, pour déterminer, en vertu du principe de contradiction, l’idée du comique. […] Les personnages de la tragédie sont nobles ; ils nous montrent le principe moral vainqueur du principe animal : donc les personnages de la comédie doivent nous montrer le principe animal victorieux du principe moral ; ils doivent êtres ivres, poltrons, vains, débauchés, paresseux, gourmands ou égoïstes. […] La comédie doit donc nous montrer, au contraire, le triomphe de la personne humaine, conservant sa sécurité infinie au milieu même des échecs, qu’elle subit dans la poursuite d’un but contradictoire, et riant de ses propres infortunes. […] Uranie leur dira-t-elle : Vous êtes des aveugles qui me priez de vous montrer le soleil ; allez-vous faire ouvrir les yeux, et vous n’aurez pas besoin que je vous le montre ? […] Mais il n’a pas montré son esprit, en concluant de là que Molière n’est guère comique.

30. (1819) Notices des œuvres de Molière (II) : Les Précieuses ridicules ; Sganarelle ; Dom Garcie de Navarre ; L’École des maris ; Les Fâcheux pp. 72-464

En effet, si le faux bel esprit ne fut pas anéanti du coup que lui avait porté Molière, du moins il cessa de dominer, de triompher, d’insulter publiquement à la raison et au bon goût, enfin, de former un parti puissant devant lequel celui du véritable esprit osait à peine se montrer. […] Si, au contraire, écartant tout ce que ses visions peuvent avoir de douloureux et de funeste dans leurs conséquences, vous vous bornez à montrer ce qu’il y a de faiblesse et de folie dans son principe, le personnage, fût-il du rang le plus élevé, produira cette impression de ridicule qui est le but particulier de la comédie. […] Dans L’École des maris, il se montra imitateur plus judicieux et plus habile encore, en puisant dans divers auteurs les éléments variés qu’il devait combiner de manière à former l’ensemble d’une bonne comédie de caractère, de mœurs et d’intrigue. […] Les divers originaux mis en jeu dans l’ouvrage, au lieu de passer l’un après l’autre sur la scène, pour n’y plus reparaître, dialoguent entre eux, se montrent à plusieurs reprises et participent tous au dénouement. […] Elles fondent leur incrédulité sur ce qu’il existait une amitié sincère entre ces deux hommes célèbres, et que Chapelle s’est montré l’admirateur de Molière jusqu’à lui donner, dans une lettre qu’il lui écrivait, le nom de grand homme, titre que reçoivent rarement de leur vivant ceux qui en sont jugés le plus dignes après leur mort.

31. (1898) Molière jugé par Stendhal pp. -134

C’est dans le désir de se le concilier, qu’on pourrait trouver le moyen de nous montrer une ou deux fois Tartuffe désapointé. […] Pourquoi ne pas le montrer recevant un des matadors de son parti et lui donnant à déjeuner ? […] Pourquoi nous montrer Orgon tout séduit ? […] Une scène de séduction nous aurait montré comment Tartuffe s’y est pris pour arriver au point où nous le voyons. […] Molière ayant choisi de nous la montrer tout à fait vaincue a évité beaucoup de positions comiques.

32. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

Montrez-moi votre commission. — Voici un arrêt, dit le conseiller. […] L’autre était déjà sujet aux redites et montrait les recherches et les efforts des imaginations qui s’épuisent.

33. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

s’il ne tient qu’à vous montrer du gras, Je m’en vais vous montrer..... […] Il fallut convenir que Molière avait raison ; et quand il montra le miroir, il fit rougir ceux qui s’y regardaient. […] Or, si tout excès est blâmable et dangereux, la comédie n’a-t-elle pas droit d’en montrer le vice et le danger? […] Mais Molière, qui vient de montrer ce qu’il a de bon, fait voir sur-le-champ, et presque dans la même scène, ce qu’il a d’outré et de répréhensible. […] Ne vaut-il pas mieux nous montrer les défauts que nous avons, et dont nous pouvons corriger au moins une partie, qu’une perfection qui est trop loin de nous?

34. (1877) Molière et Bourdaloue pp. 2-269

Enfin le bon gouverneur l’emporte et le prince lui promet de se montrer. […] Louis XIV se montra roi et chrétien. […] Un peu plus tard une parole officielle du clergé montra qu’il prévoyait les périls de l’avenir. […] De cette iniquité même qui ne manquera pas de crier à l’hypocrisie, il tire la raison qui oblige indispensablement le chrétien de montrer sa foi : « — A vous de détruire ces soupçons, de réfuter ces jugements, de montrer par votre vie que, quoi qu’en pense le monde, Dieu ne manque pas encore de vrais serviteurs. […] Si l’on parle, qu’il soit politique ou non de montrer le fond de son cœur, il faut toujours parler franc.

35. (1819) Introduction aux œuvres de Molière pp. -

Sous Charles II, prince imbu usages, des opinions et des goûts de la France, les deux genres furent séparés, et la comédie de mœurs se montra sur la scène anglaise. […] Fallait-il, pour l’édification publique, qu’il montrât le ridicule faible et confiant de sa nature, triomphant du vice armé de toutes ses ruses ? […] Elles sont surtout variées, et chacune d’elles est conduite de manière à montrer sous toutes ses faces le vice ou le ridicule qui est le sujet comique de la pièce. […] Elle allègue des canevas qu’elle ne peut pas montrer, et quelques comédies qu’elle devrait peut-être souhaiter qu’on ne connût pas. […] J’ai montré Molière dans son ménage, à la cour et avec ses amis.

36. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLI. Des Episodes. Maniere de les lier aux Caracteres principaux, & de placer les Caracteres accessoires. Embonpoint d’une Piece. » pp. 475-492

vous montrez, Monsieur, un tel art dans Paris ? […] De quoi sert, je vous prie, une foule inutile De chanteurs, de danseurs, qui montrent par la ville ? […] Et, Monsieur Toutabas, vous avez l’insolence De venir dans ces lieux montrer votre science ?

37. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE III. L’Honnête Homme. » pp. 42-64

Avec cela vous l’avez fait amoureux, et amoureux d’une façon qu’il condamne lui-même147, pour nous montrer que le sage inébranlable rêvé par l’orgueil stoïcien148 ou par l’égoïsme épicurien149 n’existe point ; pour nous rappeler à l’humilité que doit entretenir en nous le sentiment de notre incurable faiblesse, et. pour avertir les plus fermes de leur fragilité-, comme, le. chant du coq- avertit Pierre150. […] Il a clairement montré, par les plus risibles exemples182, la folie de ceux Qui prennent pour génie un amour de rimer183. […] XXVI, v. 75. — « Mais le coup de maître est d’avoir fait-Alceste amoureux, d’avoir courbé cette âme indomptée sous le joug de la passion, et montré par là surtout que le plus sage ne peut être complètement sage,   Et que dans tons les cœurs il est toujours de l’homme. […] Le principal mérite du Philinte de Molière par Fabre d’Eglactine est de montrer à l’œuvre les caractères du Misanthrope.

38. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Montrons d’abord tout ce qui lui ressemble sans être elle. […] Qui prouve trop, risque de lie rien prouver, et il n’était pas nécessaire défaire intervenir Swift et Pascal pour montrer que l’ironie est dépourvue de gaieté comique. […] Si l’idéal de la tragédie consiste dans l’asservissement de l’être sensuel à l’être moral, l’idéal de la comédie doit nécessairement nous montrer l’inverse ; l’asservissement de l’être moral à l’être matériel63. […] Je serai pour Molière un juge sans faiblesse ; je saurai voir et montrer ses défauts ; mais je ne veux fermer ni mes yeux ni ma bouche sur ses qualités. […] Il doit, en sortant de la sphère de la moralité, montrer avec franchise bien qu’avec modestie, que ce n’est point à notre conscience qu’il s’adresse, mais à notre imagination et à notre esprit.

39. (1819) Notices des œuvres de Molière (III) : L’École des femmes ; La Critique de l’École des femmes ; L’Impromptu de Versailles ; Le Mariage forcé pp. 164-421

Les auteurs humiliés excitèrent contre lui le courroux de quelques hommes de la cour, en leur persuadant qu’il les avait joués dans le rôle du marquis turlupin ; et Boursault ne se montra point étranger à cette odieuse manœuvre, lorsque, dans Le Portrait du peintre, il annonça une clef imprimée de La Critique de l’École des femmes. […] N’est-ce pas là montrer dans le lointain, mais bien distinctement, le chef-d’œuvre des femmes savantes, qu’on intitulerait presque aussi bien Les Auteurs ridicules ? […] Racine, frappé du talent qu’elle avait montré en jouant le rôle d’Axiane, dans sa tragédie d’Alexandre, forma le projet de la faire entrer à l’hôtel de Bourgogne, où il avait résolu de donner dorénavant ses ouvrages. […] C’est d’elle qu’il est question dans le sonnet sur Phèdre : Une grosse Aricie, an teint ronge, aux crins blonds, N’est là que pour montrer, etc. […] Lorsque ensuite Molière retrancha la musique et la danse, en laissant subsister toutefois les moyens dont il s’était servi pour les amener, le défaut se montra seul, sans ce qui pouvait le faire excuser ; et l’on parut avoir raison contre l’ouvrage, quoiqu’on fût injuste envers l’auteur, lorsqu’on dit que la conduite en était irrégulière, et que les personnages y venaient presque tous au hasard.

40. (1862) Corneille, Racine et Molière (Revue chrétienne) pp. 249-266

Son ambition serait d’atteindre un point de vue assez élevé pour qu’il pût se montrer juste envers tous. […] Dans cette première ardeur, il rompit sans ménagements avec Port-Royal, et, après La Thèbaïde et Alexandre, ses essais de jeunesse, il écrivit Andromaque et Les Plaideurs, c’est-à-dire les deux pièces où son génie se déploya avec le plus d’abandon et se montra le plus franchement dramatique sans paraître se replier sur lui-même. […] Rambert5, qui ne l’a vu se montrer que par un côté dans ses autres tragédies. […] Au seizième siècle, cette vérité se montra sous un nouveau jour. […] La Réforme s’y montra plus formaliste qu’ailleurs.

41. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Une des fêtes de l’esprit, c’est d’aller, de venir, d’être écouté, d’être suivi, d’être obéi, applaudi, d’être débattu, c’est d’apprendre et de savoir, et de montrer ce qu’on sait. […] La statue devait agir et marcher ; elle devait se montrer entourée de tous les accessoires terribles de la puissance infernale. […] Ce même homme qui a écrit Le Misanthrope, qui vous a montré les plus beaux esprits et les plus grands seigneurs de Versailles, tenus en respect par une coquette nommée Célimène, maintenant il va vous montrer un libertin, dans la double acception du mot, abusant sans pitié et sans respect de toutes les femmes qu’il rencontre, quelle que soit leur condition. […] À la fin il se montrait à nous dans toute sa sévère et sombre physionomie. […] Molière est plus juste pour Don Juan ; il le connaît trop bien pour nous le montrer occupé jusqu’à la fin de ces billevesées.

42. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

À la ville on s’attend au passage, dans une promenade publique, pour se regarder au visage les uns les autres ; les femmes se rassemblent pour montrer une belle étoffe et pour recueillir le prix de leur toilette. […] « On voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés du soleil ; attachés à la terre qu’ils fouillent, ils ont comme une voix articulée, et, quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine. — En effet, ils sont des hommes !  […] aujourd’hui nous n’avons plus d’esprits forts ; on écrirait aujourd’hui : il n’y a pas de Dieu, que l’on serait montré au doigt… pour une moindre hardiesse, vous eussiez été brûlé vif, il y a deux cents ans. […] Ce fut le 18 avril 1844 que mademoiselle Mars se montra, pour la dernière fois, à ce public, dont elle était encore (après tant d’années) la fête la plus sérieuse et la plus charmante. […] À quelques pas plus loin, un poulain familier Frotte son poil bourru le long d’un vieux pailler, Et des chèvres, debout contre une claire-voie, Montrent leurs front cornus et leur barbe de soie.

43. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE IV. Jugement sur les Hommes de Molière. » pp. 65-82

Dans l’Avare, il y a une invraisemblance qui est une faute ; c’est que Valère, présenté à la fin sous les plus nobles couleurs264, et montré dès le début comme plein des plus nobles sentiments265, puisse allier cette hauteur d’âme avec le misérable rôle auquel il s’est soumis par choix : entrer par un mensonge dans une maison, et, contre son propre cœur, y maltraiter volontairement, malgré toute raison, de pauvres domestiques qui n’en peuvent mais266, c’est incompatible avec tant de constance, d’esprit et de cœur. […] Et s’il faut lui reprocher de nous avoir souvent forcés à applaudir ce que nous devons condamner, d’avoir maintes fois employé la puissance de son génie à flétrir la fleur de notre sens moral par l’entraînement du rire, il faut, sans lui pardonner cette erreur, lui rendre la justice que personne n’a plus fermement parlé le langage du bon sens, qui doit nous conduire dans la pratique de la vie ; personne n’a mieux compris ni montré quel ensemble de vertus supérieures doit se rencontrer en un homme pour qu’il soit honnête homme. […] S’il s’est montré trop rigoureux pour le sac de Scapin et les autres farces de Molière, s’il a été cruellement silencieux pour son ami La Fontaine, ces fautes de son esprit, mais non de son cœur, sont excusées par la lutte sans pareille qu’il a eue à soutenir pour rejeter en dehors de la civilisation littéraire de la France les turlupinades et les gaillardises.

44. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

La pompe, l’appareil dans lequel le jeune roi se montrait, cette grandeur empreinte sur toute sa personne, manifestaient en lui cette passion de gloire, ce besoin de respect et d’admiration qu’il est si agréable aux Français de satisfaire dans leur prince. […] Se montrer pieuse et attachée à ses devoirs de religion n’était point un calcul d’ambition, la une hypocrisie. […] Le 11e entretien de madame de Maintenon nous apprend que pour cacher l’existence des premiers enfants qui lui furent confiés, on les plaça avec leur nourrice, chacun séparément, dans une petite maison hors de Paris ; elle n’allait les y voir qu’à la dérobée ; elle profitait de tous les moments dont elle pouvait disposer pour se montrer dans sa société, afin que la curiosité ne cherchât pas l’emploi du temps qu’elle aurait dérobé à ses amis.

45. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XI. De la Religion. Principe et Sanction de la Morale de Molière. » pp. 217-240

Quelque mine qu’ils fassent, ce n’est point du tout l’intérêt de Dieu qui les peut émouvoir ; ils l’ont assez montré dans les comédies qu’ils ont souffert qu’on ait jouées tant de fois en public sans en dire le moindre mot. […] Il a montré comment l’homme, en ne se laissant jamais emporter aux élans des passions, doit rester dans le juste milieu qui lui permet de voir clairement le bien, et de le pratiquer sans exagération : juste milieu qu’il faut bien se garder de confondre avec celui des nouveaux académiciens d’autrefois et des sceptiques [modernes, car c’est un état moyen de passion, et non pas un état moyen de croyance dans le vrai et d’amour pour le bien797. […] Enfin, après une réfutation minutieuse des vingt-six arguments par lesquels l’épicurisme essaie de prouver que l’âme est mortelle, réfutation qui n’occupe pas moins de vingt-sept colonnes in-folio, Gassendi ajoute que son but n’est pas d’apporter à la foi, qui n’en a pas besoin, le secours des lumières de la raison, mais de montrer à ceux qui ferment les yeux pour ne point voir cette lumière, et qui attribuent une haute sagesse aux adversaires de l’immortalité, qu’ils se jettent non-seulement en dehors de la foi, mais aussi en dehors de la saine raison. […] Si l’on n’appuie pas ces conclusions sur des textes, c’est qu’elles ressortent nettement de toute cette étude, si bien qu’il faudrait, pour en montrer la justesse, répéter une bonne partie des chapitres précédents.

46. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Ses rivaux se montrèrent à visage découvert, et cherchèrent à l’arrêter dans sa marche triomphante. […] Pour consoler la fille d’un pêcheur, trompée par son maître, il lui montrait la fameuse liste de toutes celles qui s’étaient trouvées dans le même cas. […] L’idée qui se fait jour dans toutes ces pièces est celle-ci : Montrer que les plus honnêtes gens du monde ne sont pas exempts de faiblesses et de défauts, et que chacun doit s’appliquer à se perfectionner en se corrigeant. […] La Harpe s’est montré, en cette matière, d’une extraordinaire naïveté. […] Tout en se moquant des travers de la bourgeoisie, il montrait une grande prédilection pour cette classe à laquelle il appartenait, il contribuait puissamment à son émancipation.

47. (1870) La philosophie dans le théâtre de Molière (Revue chrétienne) pp. 326-347

La philosophie dans le théâtre de Molière1 La première partie de notre étude nous a d’abord montré que Molière n’avait attaqué la religion ni directement ni indirectement. […] — il me suffira, j’espère, pour forcer enfin toute admiration, de montrer un effet pratique de cette grande méthode et de faire voir le même maître de philosophie disant quelques gros mots, et se colletant agréablement avec un maître de danse, avant d’enseigner à M. […] A personne ou à tout le monde, serait-il facile de répondre ; et l’on pourrait invoquer ici l’unité de la philosophie nouvelle en face de sa rivale, faire voir Bacon, Gassendi, Descartes, au milieu de leurs doutes et de leurs affirmations contradictoires, d’accord pour résister aux anciens, et montrer enfin tout le mouvement philosophique du grand siècle venant aboutir à cette pensée, ou plutôt à cet effort commun : affranchir la science et l’esprit de toute autorité extérieure. […] J’aime qu’avec douceur nous nous montrions sages, Je veux une vertu qui ne soit point diablesse (53). […] Voyez enfin don Juan et son valet trop crédule, — l’avare et son fils le dissipateur, — les femmes savantes et le rustre Chrysale,… et partout vous apparaissent deux caractères opposés, semblables à deux statues plus ou moins effrayantes et destinées à vous montrer deux précipices entre lesquels l’homme doit se frayer sa route pour marcher en sûreté.

48. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. M. DE BEAUMARCHAIS. » pp. 442-462

Don Lope s’excuse, mais conseille à Jacinthe de ne pas désabuser Don Sanche, leur union devant naître de son erreur : elle ne veut pas d’un bonheur qui terniroit la gloire de l’un & de l’autre, & qui la rendroit indigne de son amant : elle lui ordonne de se montrer innocent en découvrant quel est le coupable. […] Don Pedre, faisons mieux, allons la voir ensemble, Et flattant sa douleur, tâchons de lui montrer... […] Mon frere, montrons de la modération dans une occasion légitime ; & ne vengeons point notre honneur avec cet emportement que vous témoignez.

49. (1847) Le Don Juan de Molière au Théâtre-Français (Revue des deux mondes) pp. 557-567

L’ombre du grand homme, qu’un poète jeune et de bonne espérance a évoquée ingénieusement ce soir-là, aurait pu se montrer fière et reconnaissante de ce nouvel hommage, préférable peut-être même au premier ; car, si les statues publiques sont la digne et seule récompense à offrir à la mémoire des grands généraux et des grands citoyens, nous n’imaginons pour les poètes et pour les artistes aucun hommage plus désirable et plus flatteur que le culte intelligent de leurs ouvrages. […] Quelques personnes ont regretté qu’il ne se soit pas montré de préférence dans le rôle demi-tragique de don Louis, ce Chromes iratus, si proche parent du père du Menteur. […] Dans le Convié de pierre, que les comédiens italiens jouaient à Paris, vers 1657, la dernière scène de la pièce montrait aux spectateurs don Giovanni au fond de l’enfer qui exprimait en vers (quoique tout le reste de la pièce fût en prose) ses souffrances et son repentir.

50. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

On ne peut nier d’abord que quiconque veut exciter l’horreur d’un vice, ne doive montrer tout ensemble ce qu’il a de plus nuisible, de plus funeste pour la société et pour le vicieux lui-même. […] Voilà ce qui s’appelle traiter un caractère en grand maître, le montrer sous toutes ses faces, le placer à tous les jours, le faire passer par toutes les épreuves. […] Le ridicule et le danger des alliances inégales auraient peut-être été présentés d’une manière plus frappante, plus utile et même plus vraie, si, agrandissant ses personnages, et les plaçant sur un théâtre plus élevé, il eût montré quelque homme considérable de la bourgeoisie de Paris, indignement méprisé, bafoué, trompé, déshonoré par quelque fille d’une grande et illustre maison. […] Il est évident que, sous la casaque du subtil Napolitain, Molière a caché un de ces Sosies, de ces Daves de la comédie antique, que la jeunesse inexpérimentée de son talent nous avait déjà fait voir deux fois sous le manteau de Mascarille et de Gros-René, et qu’un dernier caprice de son génie doit nous montrer encore sous celui de Scapin. […] Quelque gêné que Molière pût être par les ordres d’un monarque et par les convenances d’un sujet, il ne pouvait rien produire d’où la comédie fût entièrement exclue, où elle ne se montrât pas du moins par intervalles.

51. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Louis, brillant de jeunesse, commençait à déployer cette royale magnificence au sein de laquelle il aimait à se montrer ; tous les arts et tous les plaisirs accouraient à sa voix, et Versailles éblouissait la France de la magie de ses fêtes et de l’éclat de ses merveilles. […] Quelqu’un pouvait-il ignorer qu’il s’était montré constamment le protecteur de Molière ; que non seulement il n’avait pas défendu Don Juan, mais qu’il avait fait jouer à sa cour les trois premiers actes du Tartuffe, qu’il avait assisté depuis à la représentation de la pièce tout entière, et qu’il n’y avait rien trouvé de blâmable ? […] En lisant de pareils écrits, on voit que Molière y fut aussi livré ; mais un dernier trait montrera à quelle impudeur, à quel emportement peuvent s’abandonner les hommes qui font métier de dévotion. […] Pour jouer les personnes, il faut les montrer telles qu’elles sont ; si l’on ne met sur le théâtre que ce que fait un honnête homme qui a des sentiments religieux, on ne représentera que de bonnes actions, et alors la religion ne sera pas compromise. […] Molière, dans son ouvrage, nous offre une épouse fidèle à ses devoirs, et le prince de l’Église se complaît à nous montrer le libertinage effronté d’une femme mariée.

52. (1886) Molière, l’homme et le comédien (Revue des deux mondes) pp. 796-834

Presque aussi dénué de critique, quoique érudit de profession, Paul Lacroix se montrait cependant un peu moins large : dans son Iconographie moliéresque, il n’admettait, comme originaux, que vingt-cinq portraits peints et neuf gravés. […] Il est impossible de nous le représenter dans toutes les phases de son existence ; cependant, les portraits authentiques, dont je viens d’indiquer les principaux nous le montrent avec des manières d’être assez variées. […] J’ai déjà montré, dans une précédente étude, avec quelle générosité il secourut son père besogneux, de quel désintéressement il fit preuve à son égard. […] Pour le bon sens, de même qu’il inspire sa façon de saisir et de montrer le ridicule, il se manifeste partout dans sa vie. […] Comme ils visent au but de leur art, qui est le rire, ils ne nous montrent qu’une part de leurs découvertes, mais l’autre se devine, et il en reste quelque chose dans l’impression qu’ils nous laissent ; ils nous inspirent quelque chose de la pitié qu’ils ont ressentie.

53. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Introduction » pp. 3-17

Nous savons, il est vrai, qu’on ne prouve pas qu’il fait jour, qu’on ne prouve pas non plus les axiomes, qu’ainsi l’impossibilité de prouver ne prouve elle-même rien contre certaines vérités, et de peur que vous ne vous avisiez de dire que vos théories sont évidentes comme la lumière du jour ou comme les axiomes, nous allons vous montrer comment vous les formez toutes. […] vous montrez aux faiseurs de théories qu’au fond de tous leurs dogmes il y a un sentiment, pas autre chose, un sentiment étroit, exclusif, passionné, et puis vous donnez à la critique ce sentiment pour base !

54. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [12, p. 43-44] »

Le déchaînement était si grand, que Molière n’osait se montrer.

55. (1819) Notices des œuvres de Molière (IV) : La Princesse d’Élide ; Le Festin de Pierre pp. 7-322

Ce nombre peut étonner, si, même en mettant à part le peu d’intérêt de la pièce, on considère qu’à Paris elle se montra dépouillée de tous ces brillants accessoires qui, à Versailles, en avaient fait du moins un plaisir pour les yeux et pour les oreilles. […] Mais, à cette époque, les pieux scrupules de Louis XIV allaient croissant avec ses années, et les dépositaires de son autorité se montraient de plus en plus sévères sur tout ce qui pouvait toucher la religion. […] Molière doit-il être blâmé, peut-il être excusé d’avoir mis sur le théâtre, même pour le dévouer à l’exécration des spectateurs, et le montrer expirant sous les coups de la vengeance céleste, un homme qui tourne en dérision les mystères de la religion révélée, et repousse même les premiers fondements de la religion naturelle ?

56. (1885) Revue dramatique. Le répertoire à la Comédie-Française et à l’Odéon (Revue des deux mondes) pp. 933-944

Ces trois noms, depuis notre enfance, sont logés dans notre cervelle, comme ceux de trois demi-dieux particuliers à notre pays ; sur un rayon de notre bibliothèque, si chétive qu’elle soit, si encombrée de romans nouveaux, nous gardons leurs ouvrages ; nous les montrons à nos enfans, à peu près comme telle mère leur montre l’évangile, et tel père la Déclaration des droits de l’homme. […] on aurait tort de se plaindre qu’Horace et le Menteur reviennent trop souvent sur l’affiche : c’était la première fois de l’année qu’ils s’y montraient. […] Oui vraiment, l’année dernière et cette année, voici Le Menteur et Les Plaideurs ; voici, répartis sur l’une et l’autre, à peu près les mêmes ouvrages de Molière que nous avons vus là-bas ; seulement, au lieu du Bourgeois gentilhomme, d’Amphitryon et des Précieuses, nous apercevons Monsieur de Pourceaugnac, L’École des maris et Sganarelle : ne pouvait-on nous montrer le tout ?

57. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Dans la même année, il montra dans Titus la vertu triomphant d’une passion désordonnée ; c’était encourager le roi à la vertu par son propre exemple et rappeler à l’adorateur de madame de Montespan, le sacrifice qu’il avait pu faire de Marie de Mancini. […] Il importait la vérité historique de montrer, non que Molière, La Fontaine, Boileau et Racine affectionnaient mesdames de Sévigné, de La Fayette, de Maintenon et leur société, mais qu’ils en étaient venus au point de la respecter et de la craindre. […] Une grosse Aricie aux crins plus noirs que blonds N’est là que pour montrer deux énormes tétons.

58. (1881) Molière et le Misanthrope pp. 1-83

Et il s’est beaucoup plus soucié de nous faire rire en jouant ce qu’il a vu chez les autres que de nous montrer ce qui pouvait arriver chez lui. […] Il faut montrer Alceste arrivant, la tête perdue, criant comme un brûlé, se jetant à la tête d’Eliante, jurant que c’en est fait, que tout est rompu, — « Madame, vengez-moi, recevez mon cœur, il n’y a que vous, vous allez voir comme je vais vous aimer, attendez un peu, la voici, le temps de la confondre et je suis à vous pour la vie !  […] ALCESTE De grâce… Le voilà qui prie : … montrez-moi, je serai satisfait, je vous croirai, je vous le promets, je vous crois déjà avant que vous ayez parlé ; montrez-moi Qu’on peut pour une femme expliquer ce billet. […] Je ne sais si Molière a prétendu faire d’Alceste un janséniste ; mais je sais qu’il le combat, comme il combat Tartuffe son extrême ; et il ne combat Tartuffe avec tant de raison et de force, que parce qu’il a montré dans Alceste que, quand même on possède réellement toutes ces vertus dont Tartuffe n’a que la fausse apparence, on n’a pas pour cela le droit de se mettre au-dessus de l’humanité, de la maltraiter ni de la mépriser. […] Ce n’est pas rapetisser un homme incomparable que de le montrer tel qu’il fut dans son véritable milieu.

59. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Ne dissimulez point votre bosse ; montrez-la hardiment, comme faisait le maître, et laissez rire le parterre. […] Mais l’important, c’est de montrer sa propre nature à travers le personnage, c’est de rester soi. […] Mais avec Regnard c’est trahir l’auteur que de vouloir montrer dans Le Joueur un vrai joueur. […] Ne me montrez donc, vous son interprète, que cette superficie. […] Les comédiens cédèrent enfin, et l’événement fit voir qu’ils avaient eu raison de se montrer bons princes.

60. (1836) Une étude sur Molière. Alceste et Célimène (La Revue de Bordeaux et Gironde unies) pp. 65-76

La jeune fille ne se montra pas ingrate, et Molière eut la faiblesse de prendre la reconnaissance pour de l’amour. — Notre poète joue ici sous quelques rapports le rôle d’Arnolphe, de L’École des Femmes, mais moins heureux, il ne rencontre pas un Horace qui veuille, avant la noce, lui enlever la future. […] Est-il vrai que le misantrope ne soutienne pas, dans toute la pièce, le caractère qu’il a montré dès la première scène ?

61. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Si j’en excepte le petit morceau en question, le Chevalier a beaucoup loué son Uranie, et n’a rien montré de son savoir-faire. […] Il sait clairement ce qu’il veut, et ne craint pas de montrer clairement qu’il le sait. […] Il multiplie les incidents, parce que les situations étranges et variées sont très propres à mettre en lumière et à montrer sous toutes sortes de jours la nature spéciale de ses originaux. […] Dans Don Juan comme dans Tartuffe, mieux encore que dans Tartuffe, Molière a découvert et montré, non ce que le présent étalait à tous les yeux, mais ce qu’il recelait, pour ainsi dire, dans ses entrailles, le germe que développerait l’avenir. […] Molière a montré moins d’indépendance dans la grande comédie qu’un an avant sa mort il fit sur un petit ridicule.

62. (1871) Molière

C’est trop encombrer les premières années de notre poète, que d’en faire un des témoins de ce drame sanglant ; c’est faire un peu trop d’honneur au prince de Conti, que de le montrer, sitôt, protégeant Molière, son condisciple. […] Plusieurs aspirants à l’héritage du Mazarin se montraient dans le lointain, à savoir : M.  […] Il se contint, et daigna rire aux Fâcheux de Molière, une improvisation charmante, dans laquelle se montraient naïfs, sincères et tout joyeux ces. […] Il nous montrait Chrysalde à côté d’Arnolphe, et le voilà rentré, armé de toutes pièces, dans les démonstrations de L’École des maris.

63. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Le célèbre antagoniste de Descartes admit à ce cours le jeune Bernier, Poquelin et Hesnaut : ils se montrèrent dignes d’un tel maître. […] Molière n’y fut pas heureux ; très suivi d’abord, il eut à subir la concurrence redoutable d’un Vénitien, nommé Segalle, qui montrait des marionnettes. […] Il se montra en outre très bon comptable, et succéda dans ce service à La Thorillière. […] Honteux du rôle qu’il avait joué, celui-ci essaya de redevenir juste envers l’auteur, s’il s’était montré ingrat envers l’homme. […] La cour rit et fut désarmée ; la ville, comme nous l’avons déjà dit, ne montra pas des dispositions moins favorables.

64. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XII. Réflexions Générales. » pp. 241-265

Cœur convaincu, il sut avoir de la dignité dans sa conduite ; il montra pour ses ennemis de la douceur et de l’oubli, ce qui vaut mieux que du mépris. […] Immoler sous le rire tous leurs ridicules, toutes leurs passions honteuses, et leur montrer en riant ce que sont la vraie distinction et la vraie noblesse, c’est travailler sans aucun doute à les rendre meilleurs. […] Leur parler à tous le même langage du bon sens et leur montrer la honte des grands et des puissants qui oublient les devoirs formels attachés à leur grandeur, c’est leur apprendre qu’ils sont égaux devant la loi morale, et qu’aux yeux de Celui qui l’a dictée il n’y a de distinctions que celles acquises par l’accomplissement du devoir.

65. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

À peu de jours de là, le mari de ladite dame venant voir, lui aussi, la comédienne, celle-ci, qui ne le connaissait pas, lui montra, par hasard, le portrait de sa femme. […] Vous l’avez bien montré.

66. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [80, p. 121-126] »

Myrtil, si digne d’envie, Me chérit plus que le jour ; Et moi je perdrais la vie Pour lui montrer mon amour.

67. (1825) Notices des œuvres de Molière (IX) : La Comtesse d’Escarbagnas ; Les Femmes savantes ; Le Malade imaginaire pp. 53-492

Philaminte, Armande et Bélise montrent, sous des formes un peu moins vulgaires, tous les mêmes ridicules que Cathos et Madelon, savoir, leur prétention au beau langage, leur désir de briller et d’être connues, leur bonne opinion d’elles-mêmes, leur dédain pour les autres, leur engouement, enfin, pour un bel esprit fort ridicule, qui se trouve être au dénouement un faquin fort méprisable. […] On a prétendu qu’il n’avait tant tardé à montrer ses Femmes savantes sur le théâtre, que pour laisser au ridicule qu’il peignait le temps de s’affaiblir, et à quelques-uns de ses modèles le temps de disparaître de la scène du monde. […] Elle entretenait surtout un grand nombre de correspondances ; et ses lettres, qu’on montrait en divers lieux, ressemblaient trop aux pages d’un livre écrit sans naturel, sans grâce et sans facilité. […] Dans Le Malade imaginaire, au contraire, c’est la belle-mère elle-même qui veut faire déshériter les enfants d’un premier lit, pour s’enrichir de leurs dépouilles ; et ce personnage était le plus habilement choisi pour une pièce, où il s’agissait de montrer à quel point de lâche asservissement et de faiblesse coupable peut arriver un homme qu’un soin pusillanime de sa santé met à la merci de ceux qui l’entourent de leurs soins intéressés. […] Molière ne l’a montré que de profil ; encore a-t-il eu soin de ne le placer qu’auprès d’un être dégradé par une manie qui le rend imbécile et insensible.

68. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

Il est inutile d’examiner ici en détail les beautés de ce chef-d’œuvre de l’esprit, et de montrer avec quel art un homme, qui pousse la vertu jusqu’au ridicule, est si rempli de faiblesse pour une coquette ; de remarquer la conversation, le contraste charmant d’une prude, avec cette coquette outrée. […] Ils sont interrompus par la prude, et par les marquis qui apportent chacun une lettre qu’elle a écrite contre eux : ce que l’auteur a préparé dès le troisième acte, en leur faisant promettre qu’ils se montreraient ce qu’ils recevraient de leurs maîtresses. […] Il ne faut point d’autres preuves, pour montrer qu’elle le soutient, que le refus qu’elle fait d’épouser le Misanthrope et d’aller vivre dans son désert. […] Mme Dacier, qui étale toutes les beautés de la pièce latine, n’aurait pas réussi à faire pencher la balance en faveur de Plaute ; le parallèle des deux comédies n’aurait servi qu’à montrer la supériorité de l’auteur moderne sur l’ancien. […] Molière, en choisissant le plus parfait de ces originaux pour l’objet de son imitation, a bien montré quel était son discernement.

69. (1730) Poquelin (Dictionnaire historique, 4e éd.) [graphies originales] pp. 787-790

Montrez aux Dames d’esprit certaines pensées d’Horace, d’Ovide, de Juvenal, &c. ; montrez-les leur en vieux Gaulois ; faites-en la Traduction la plus plate qu’il vous plaira, pourvu qu’elle soit fidelle, vous verrez que ces Dames conviendront que ces pensées sont belles, délicates, fines. […] Elle fut établie dans l’Hôtel du Roi à la rue Mazarine38, & commença à se montrer en public le Dimanche 9 de Juillet 1673 : le Théatre du Palais Roial & celui du Marais furent interdits aux Comédiens.

70. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XII. M. COLLÉ. » pp. 354-380

Fort bien : si c’est là Londres, qu’on me laisse ma chaumiere : ma maison n’est point une grande maison ; mais telle qu’elle est, elle m’appartient, & je puis en montrer le contrat. […] Pour notre honneur, si me faut-il pourtant Montrer qu’on peut, nonobstant leur adresse, En attraper au moins une entre cent, Et lui jouer quelque tour de souplesse. […] La Dame regarde le Comte comme un monstre, surtout lorsqu’il la menace de publier son aventure & de montrer sa lettre, si elle ne consent au mariage du Chevalier avec Sophie.

71. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

J’ai voulu seulement montrer, dans le plus grand événement de sa vie, le triomphe d’une des plus illustres personnes de la société polie, et de cette société elle-même dont elle fut l’ornement et la gloire. […] entre l’art d’amuser et celui d’intéresser ; entre le frivole avantage de montrer de l’esprit, et le talent d’en donner ! […] Plus de cent vaisseaux de ligne se montrèrent dans ces ports.

72. (1697) Poquelin (Dictionnaire historique, 1re éd.) [graphies originales] pp. 870-873

Montrez aux Dames d’esprit certaines pensées d’Horace, d’Ovide, de Juvenal, &c. montrez les leur en vieux Gaulois ; faites en la traduction la plus plate qu’il vous plaira, pourveu qu’elle soit fidelle, vous verrez que ces Dames conviendront que ces pensées sont belles, délicates, fines.

73. (1922) La popularité de Molière (La Grande Revue)

Certes, le père Grandet est plus riche en sentiments, plus fouillé, plus vrai que ne l’est Harpagon et Fénelon a théoriquement raison quand il reproche à Molière d’avoir conservé, tout en l’atténuant, le trait de Plaute faisant demander par son avare à un valet de lui montrer sa troisième main. […] Pendant deux actes, Tartuffe, invisible et présent, a rempli, animé la pièce de sa personne, sans se montrer au public.

74. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Cinthio, entrant dans les vues de son ami, parla du capitaine à sa sœur qui montra des sentiments favorables. […] Ces exemples, non choisis parmi les pires, suffisent à montrer qu’une grande licence régnait sur le théâtre des Gelosi, et pourtant il est certain que cette troupe était en progrès sensible sous ce rapport et qu’elle frappait, au contraire, les contemporains par une décence inaccoutumée.

75. (1818) Épître à Molière pp. 6-18

Quand des imitateurs dédaignant le sentier Tu voulus nous montrer Molière tout entier ; Quand, dans le Misanthrope, on vit ton éloquence En corrigeant Alceste, essayer sa défense, Et, sans désespérer de sa conversion, Blâmer de la vertu l’exagération ; Quand ta brillante verve exposa sur la scène La prude Arsinoé, la folle Célimène ; Pour la première fois quand tu mis au grand jour La sottise et l’orgueil des beaux esprits de cour, Que tu fus grand ! […] Je ne te suivrai pas dans ta pénible tâche, Lorsque tu la remplis sans pitié, sans relâche ; Implacable ennemi de tous les charlatans, Je te laisse écraser sous le poids du bon sens Du bel esprit du jour la risible manie ; Chez Dandin nous montrer la vanité punie ; T’égayer aux dépens du bon monsieur Jourdain ; Rire de Vadius, et fouetter Trissotin.

76. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXI. De l’Amour. » pp. 367-384

Puisqu’un pareil discours émeut votre colere, Je dois de votre cœur me montrer satisfait, Et l’applaudir ici du beau choix qu’il a fait. […] Son dialogue est par-tout semé de faux brillants, de traits ingénieux à la vérité, mais déplacés, & qui montrent toujours l’Auteur à la place du personnage.

77. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVII. Du Caractere des Professions. » pp. 284-302

L’Auteur voudra sans doute nous montrer les Procureurs se chargeant sans distinction de la cause des honnêtes gens & des frippons ; mais le fera-t-il avec plus de succès qu’Arlequin Grapignant ? […] L’Auteur voudra, sans contredit, nous montrer son héros s’entendant avec les deux parties adverses, & rendant un procès éternel moyennant une pension ; mais il se trouvera encore prévenu dans la même piece.

78. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXVI. De l’opposition des Caracteres. » pp. 398-416

Moi-même, qui sur vous voulois être absolue, J’ai suivi son exemple, & mon cœur désormais Veut se montrer par-là sensible à vos bienfaits. […] Veut se montrer par-là sensible à vos bienfaits.

79. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE III. Dufresny imitateur comparé à Moliere, à Champmeslé, son Mariage fait & rompu comparé à l’histoire véritable du faux Martin-Guerre, & à la nature. » pp. 81-99

Le Procureur sort : la Comtesse demande la bourse qu’on lui a montrée pour l’engager au silence. […]   Dans la piece de Champmeslé le rôle du Marquis n’est rien moins qu’honnête ; Mad. la Comtesse figureroit mieux dans une maison de force que sur la scene ; Catho & Manon sont en train de lui ressembler dans peu ; le Chevalier est aussi mal-adroit qu’effronté ; le pere est un imbécille ; les autres personnages sans caractere ne se montrent que pour disparoître, ou sont inutiles ; l’intrigue est traînante & mal combinée.

80. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IX. M. PALISSOT. » pp. 297-316

Ils lui montrent une lanterne qu’ils prétendent être celle de Diogene. […] Mais il m’attaque à part comme un noble adversaire, Sur qui tout son effort lui semble nécessaire ; Et ses coups contre moi redoublés en tous lieux, Montrent qu’il ne se croit jamais victorieux.

81. (1886) Revue dramatique : Les Fâcheux, Psyché (Revue des deux mondes) pp. 457-466

. — C’est que de toutes ces pièces, même des meilleures, même de celles qui se passeraient le moins malaisément de secours étrangers, Molière eût dit volontiers ce qu’il disait de l’Amour médecin, dans son Avis au lecteur : « Il serait à souhaiter que ces sortes d’ouvrages pussent toujours se montrer à vous avec les ornements qui les accompagnent chez le roi. » Cependant, à ses moments perdus, ce fournisseur de Sa Majesté composait pour lui-même et pour le vulgaire quelques autres pièces, comme l’École des femmes, Don Juan, le Misanthrope, Tartufe (dont les trois premiers actes, il est vrai, furent d’abord essayés à Versailles quelques jours après le divertissement de l’île enchantée), enfin les Femmes savantes. […] Faire tinter à nos oreilles le curieux récit des aventures de Clindor, menant la vie de bohème aux alentours du Pont-Neuf ; faire éclater les beaux vers burlesques et presque tragiques du rôle de Matamore ; lancer sur la scène la brave et pimpante Lyse, — patronne de Lisette, — qui, trois quarts de siècle à l’avance, mène un complot digne des Folies amoureuses ; montrer ce cavalier et sa belle, qui, deux siècles avant Marion Delorme, savent si bien s’évader de prison ; et ces comédiens enfin, qui, tant d’années avant MM.

82. (1858) Molière et l’idéal moderne (Revue française) pp. 230-

L’auteur ne fait que montrer ; peut-être l’indifférence apparente du poète, qui constate au lieu de juger, et montre tout sans rien maudire, ajoute-t-elle à la poignante horreur de la réalité. […] Se faire le héros d’un poème ou d’un roman, se peindre grand, majestueux, incompris, c’est l’habitude de la médiocrité ; mais se montrer petit, ridicule, bafoué par une misérable, voilà la force.

83. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

« Tu as acheté ma maîtresse sous couleur qu’elle fût ma sœur, dit-il à son valet, et j’ai acheté ma sœur croyant acheter une maîtresse. » Polipo revient donc à Flavia, qui lui a montré de la tendresse et du dévouement, et qui se trouve être la fille d’un voisin et ami de Polidoro. […] Il y trouva le valet de chambre, qui se montra encore plus inflexible que les deux autres, et ne se relâcha que difficilement à la promesse du troisième tiers ; de sorte qu’il ne resta plus rien au pauvre Mezzetin qui, dès qu’il aperçut le duc, courut à lui et lui dit : « — Ah !

84. (1820) Notices des œuvres de Molière (V) : L’Amour médecin ; Le Misanthrope ; Le Médecin malgré lui ; Mélicerte ; La Pastorale comique pp. 75-436

Il travaillait pour le théâtre, et non pour le cabinet ; sa mission était de divertir plutôt que d’éclairer, d’être plaisant plutôt que d’être juste : la muse comique, dispensée de l’impartialité, est autorisée à ne montrer jamais que le côté ridicule des opinions ou des caractères. […] Ce n’était pas assez toutefois d’un tableau complet de la société vue sous deux aspects différents, montrée dans ce qu’elle a d’odieux et dans ce qu’elle a de risible : il fallait que cette peinture fût un drame, c’est-à-dire une action capable d’exciter quelque intérêt. […] Enfin, chez nous-mêmes, un auteur du dernier siècle, de Lisle, a transporté le misanthrope d’Athènes sur la scène italienne, scène subalterne et peu régulière qui permit à l’auteur de montrer l’âne de Timon métamorphosé en arlequin, et donnant à son maître des leçons de sagesse et de bonté dont il profite.

85. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVII. » pp. 323-356

Je le répete, & mes Lecteurs seront certainement de mon avis, Boileau & Madame Dacier ont été entraînés dans leurs jugements par le respect aveugle que l’on avoit jadis pour l’antiquité, & par l’idée où l’on étoit que nos génies ne pouvoient se mesurer avec les anciens, sans se montrer inférieurs : idée presque aussi ridicule, mais bien moins impertinente que notre mépris actuel pour les ouvrages du siecle passé, & la haute estime que nous avons de nos monstrueuses productions. […] Le sommeil t’a surpris, t’a montré ton image, Et ne t’a fait qu’en songe accomplir ton voyage. […] Moi, vous dis-je, ce moi plus robuste que moi ; Ce moi qui s’est de force emparé de la porte ;  Ce moi qui m’a fait filer doux ;  Ce moi qui le seul moi veut être ;  Ce moi de moi-même jaloux ;  Ce moi vaillant, dont le courroux  Au moi poltron s’est fait connoître ;  Enfin ce moi qui suis chez nous ;  Ce moi qui s’est montré mon maître ;  Ce moi qui m’a roué de coups.

86. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXV. » pp. 500-533

) Montrez-moi ce papier. […] Mais il faut te montrer. […] Mais il faut te montrer.

87. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLIII. Du But Moral. Philosophie de Regnard comparée à celle de Moliere. » pp. 504-548

Vous vous faites honneur d’être un franc libertin : Vous tenez votre gloire à tenir bien du vin ; Et lorsque, tout fumant d’une vineuse haleine, Sur vos pieds chancelants vous vous tenez à peine, Sur un théâtre alors vous venez vous montrer : Là, parmi vos pareils on vous voit folâtrer : Vous allez vous baiser comme des demoiselles ; Et, pour vous faire voir, jusques sur les chandelles Poussant l’un, heurtant l’autre, & comptant vos exploits, Plus haut que les acteurs vous élevez la voix ; Et tout Paris, témoin de vos traits de folie, Rit plus cent fois de vous que de la comédie. […] Lorsque les Anciens vouloient inspirer à leurs enfants l’horreur que tout honnête homme doit avoir pour l’ivresse, ils ne leur offroient pas pour exemple un buveur d’eau ; ils leur faisoient voir au contraire un esclave ivre ; & l’état affreux de ce misérable produisoit ordinairement l’effet qu’on s’étoit promis : de même, parmi nous, une personne sensée veut-elle exhorter son fils à être ferme sur ses pieds, à prendre une contenance noble & assurée, elle ne lui donnera pas pour modele un chef-d’œuvre de l’art & de Pigale, en lui disant : voilà comme tous les hommes devroient être : elle le menera aux Tuileries, elle lui montrera du doigt quelques-uns de ces faquins qui prennent un air penché, qui affectent l’anéantissement pour faire les hommes à bonnes fortunes, & elle lui fera remarquer l’air de pitié avec lequel tout le monde les regarde. […] Si leurs drames sont tristes, en revanche ils me paroissent eux-mêmes bien plaisants, de vouloir se montrer plus sages que la nature, cette mere bienfaisante qui donne un goût agréable aux aliments les plus nécessaires. […] Il faut le montrer de tous ses côtés.

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