laissez-le parler ; vous l’accusez à tort, Et vous ferez bien mieux de croire à son rapport.
Il auroit tort de vous plus offenser.
J’en fus étonnée, dit la Marquise ; mais plus je sentois qu’il avoit raison, plus je tâchois de lui persuader qu’il avoit tort.
Quand la critique conjecturale va jusque-là, elle n’offre plus aucun danger, et l’on aurait tort de s’en plaindre : c’est un passe-temps comme un autre, et qu’on peut ranger parmi les jeux innocens ; mais parmi les lieux communs historiques auxquels la question des influences littéraires a donné lieu, il en est un dont les conséquences n’échappent à personne : c’est l’influence personnelle qu’aurait eue Louis XIV sur la littérature de son temps.
Mmede Sévigné écrit le 29 mars 1680 : « Nous entendîmes, après dîner, le sermon de Bourdaloue, qui frappe toujours comme un sourd, disant des vérités à bride abattue, parlant à tort et à travers contre l’adultère : sauve qui peut, il va toujours son chemin. » Le sermon dont parle Mmede Sévigné est probablement le sermon sur l’impureté. […] « Le Bourdaloue frappe comme un sourd, parlant à tort et-à travers contre l’adultère. […] Il n’y a point de meilleure scène dans la pièce : « Votre Majesté juge bien elle-même combien il m’est fâcheux de me voir exposé tous les jours aux insultes de ces messieurs ; quel tort me font dans le monde de telles calomnies s’il faut qu’elles soient tolérées, et quel intérêt j’ai enfin à me purger de cette imposture et à faire voir au publie que ma comédie n’est rien moins que ce qu’on veut qu’elle soit. Je ne dirai point, Sire, ce que j’aurais à demander pour ma réputation, et pour justifier à tout le monde l’innocence de mon ouvrage : les rois éclairés comme vous n’ont pas besoin qu’on leur marque ce qu’on souhaite ; ils voient comme Dieu ce qu’il nous faut et savent mieux que nous ce qu’ils nous doivent accorder. » Louis XIV donna tort au curé qui avait osé suspecter les intentions du bon M. de Molière : Ah ! […] L’orgueil masculin pousse des cris de fureur lorsqu’après l’avoir amené jusqu’à la génuflexion, la ruse féminine lui dit avec un sourire : « Bien obligée ; demeurons-en là. » L’homme a tort de crier et il ne devait pas tant se prêter à l’illusion.
Cette comédie est excellente, s’écria-t-il ; et ceux qui s’en moquent méritent qu’on se moque d’eux.Racine eut le mérite assez rare de pardonner à Molière le mal qu’il lui avait fait, et de se montrer équitable à son égard ; mais Molière fut doublement généreux, en oubliant les torts d’un ami ingrat, et en soutenant, contre le jugement public, un auteur qui pouvait lui faire craindre un rival. […] C’est en partie pour eux qu’il avait refusé le poste que le prince de Conti lui offrait auprès de lui ; c’est pour eux qu’il continua jusqu’à la fin l’exercice d’une profession que sa santé et d’autres considérations lui conseillaient d’abandonner89 ; c’est pour eux enfin, c’est pour ne point leur faire tort de quelque argent, qu’il voulut paraître sur le théâtre le jour où il en descendit pour n’y plus remonter : on peut donc dire qu’il vécut et mourut victime de l’intérêt tout paternel qu’il leur portait. […] Voltaire, dans son Commentaire sur Corneille, ouvrage dont il est plus facile d’éviter les défauts que d’égaler le mérite et l’agrément, apeut-être eu tort de prononcer trop absolument qu’une telle expression, une telle tournure n’était pas française, au lieu de dire qu’elle l’était du temps de Corneille, et qu’elle avait cessé de l’être depuis. […] Non seulement elle mérite plus de confiance, venant d’un homme qui avait trouvé, dans sa famille même et dans la fréquentation de Boileau, la tradition de tout ce qui concernait les grands poètes du siècle de Louis XIV ; mais encore Molière, s’associant, pour ainsi dire, au tort de ses convives, et se mettant du nombre de ceux qui, suivant lui, pourraient bien ne pas vivre aussi longtemps que La Fontaine dans la postérité, parle d’une manière plus convenable, plus modeste, moins caustique, en tout plus digne de foi.