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59. (1868) Une représentation de M. de Pourceaugnac à Chambord. Examen de deux fragments inédits paraissant appartenir à l’œuvre de Molière (Revue contemporaine) pp. 700-722

Aucun valet n’est Italien dans les pièces qui ne se passent pas en Italie; souvent même dans celles dont la scène est à Naples ou en Sicile, le valet a un nom français, par exemple Scapin, ou turc : Hali. — Sbrigani fait seul exception : la raison ne viendrait-elle pas de ce qu’il était destiné à renouer connaissance avec un compatriote, et cela justifierait encore le Pursognacco, gentilhomme italien dans le canevas original. […] Pourquoi Molière, auquel on donne le rôle de Pourceaugnac (qu’il remplit dans la suite), n’aurait-il pas joué à Chambord celui de Sbrigani, comme il joua celui de Scapin?

60. (1725) Vie de l’auteur (Les Œuvres de Monsieur de Molière) [graphies originales] pp. 8-116

Les Fourberies de Scapin parurent pour la premiere fois le 24. de Mai 1671. […] Dans le Sac ridicule où Scapin s’Envelope, Je ne reconnois plus l’Auteur du Misanthrope. On a reproché au Satyrique à son tour d’avoir dit mal à propos que Scapin s’envelope dans un Sac, au lieu que c’est le vieillard Géronte que Scapin engage à entrer dans le Sac. […] Il louë le Misanthrope comme un chef-d’œuvre, mais méprise les Fourberies de Scapin, comme une Farce d’autant moins estimable que son Auteur avoit fait voir par de très-bons Ouvrages qu’il étoit capable de faire mieux. […] La Cour se plaisoit aux spectacles, aux beaux sentimens, de la Princesse d’Elide, des Amans Magnifiques, de Psyché ; & ne dedaignoit pas de rire à Scapin, au Mariage forcé, à la Comtesse d’Escarbagnas.

61. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVIII. Du Comique, du Plaisant, des Causes du rire. » pp. 463-473

Sans cette précaution, les coups de bâton qu’on donne à Géronte dans les Fourberies de Scapin, acte III, scene II, exciteroient notre indignation, & non les ris.

62. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Pourquoi, lorsqu’elle était enfant, n’aimait-elle pas Molière ou l’aimait-elle si mal que Le Misanthrope lui paraissait moins beau que Les Fourberies de Scapin, et que, dans cette farce préférée, Géronte roué de coups à travers un sac lui semblait plus comique que Géronte maudissant le Turc et sa galère ? […] Lorsqu’elle n’aimait rien tant, dans Molière, que les coups de bâton donnés si gaiement par Scapin, ce n’était pas qu’elle entrevît alors l’idée du comique comme dans un brouillard ; car, voyez : quand plus tard William Schlegel est venu débrouiller cette idée dans son esprit, et lui expliquer, avec la dernière évidence et la dernière clarté, comment, la gaieté étant l’essence du comique, les farces de Molière valent beaucoup mieux que Le Misanthrope, elle a trouvé Schlegel ridicule, Scapin toujours amusant, mais Alceste admirable.

63. (1765) Molière dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (compilation) pp. 2668-16723

Qu’il laisse mettre au rang des farces Georges Dandin, le Malade imaginaire, les Fourberies de Scapin, le Bourgeois gentilhomme, & qu’il tâche de les imiter. […] Boileau a eu tort, s’il n’a pas reconnu l’auteur du Misantrope dans l’éloquence de Scapin avec le pere de son maître ; dans l’avarice de ce vieillard ; dans la scene des deux peres ; dans l’amour des deux fils, tableaux dignes de Térence ; dans la confession de Scapin qui se croit convaincu ; dans son insolence dès qu’il sent que son maître a besoin de lui, &c.

64. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

Il est vrai que les canevas italiens et les romans espagnols t’ont guidé dans l’intrigue de tes premières pièces; que, dans ton excellente farce de Scapin, tu as pris à Cyrano le seul trait comique qui se trouve chez lui; que, dans le Tartufe, tu as mis a profit un passage de Scarron ; que l’idée principale du sujet de L’ Ecole des Femmes est tirée aussi d’une Nouvelle du même auteur; que, dans le Misanthrope, tu as traduit une douzaine de vers de Lucrèce; mais toutes tes grandes productions t’appartiennent, et surtout l’esprit général qui les distingue n’est qu’à toi. […] La Comtesse d’Escarbagnas, le Médecin malgré lui, les Fourberies de Scapin, le Malade imaginaire, M. de Pourceaugnac, sont dans ce genre de bas comique qui a donné lieu au reproche que le sévère Despréaux fait à Molière d’avoir allié Tabarin à Térence. […] Quand Scapin démontre au seigneur Argante qu’il vaut encore mieux donner deux cents pistoles que d’avoir le meilleur procès, et qu’il lui détaille tout ce qu’on peut avoir à souffrir et à payer dès que l’on est entre les griffes de la chicane, cette leçon si vivement tracée qu’elle frappe même un vieil avare, et le détermine à un sacrifice d’argent, cette leçon n’est-elle pas d’un bon comique? […] A l’égard des valets intrigants et fourbes, tels que le Mascarille de l’Étourdi, Scapin, Hali, Sylvestre, Sbrigani et tous les Crispins que Regnard mit à la mode, à compter du premier Crispin qui se trouve dans le Marquis ridicule de Scarron, ce n’était dans Molière qu’un reste d’imitation de l’ancienne comédie grecque et latine.

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