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107. (1885) La femme de Molière : Armande Béjart (Revue des deux mondes) pp. 873-908

C’est Mlle de Brie qui aurait rempli auprès de Molière ce rôle d’abnégation. […] Je m’attachois sans crainte à servir la princesse, Fier de mes cheveux blancs et fort de ma faiblesse ; Et, quand je ne pensois qu’à remplir mon devoir, Je devenois amant sans m’en apercevoir. […] C’était, il est vrai, un homme de génie ; avec un jugement plus large, elle aurait rempli près de lui le beau rôle que bien des femmes surent prendre en pareil cas, celui de l’abnégation et du dévoûment.

108. (1914) En lisant Molière : l’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

., et que l’effet eût été aussi grand, peut-être plus ; mais enfin Molière, encore une fois peut-être avec raison, a pensé que Tartuffe, paraissant seulement en trois scènes essentielles, serait d’un art plus concentré et plus fort ; soit, mais alors il fallait qu’il le tînt éloigné de la scène pendant deux actes sur cinq et il ne pouvait pas « préparer sa venue », c’est-à-dire faire parler de lui pendant deux actes tout entiers ; il y aurait eu monotonie ; il ne pouvait faire parler de lui que pendant un acte ; restait donc un acte à remplir de n’importe quoi ; Molière l’a rempli d’une courte scène à la lois essentielle et bien à sa place : Orgon proposant à sa fille Tartuffe pour époux, et puis, étant à court, il sa achevé de remplir par sa scène de dépit amoureux, qui, de quoi qu’en faveur de Molière notre amour pour lui nous entretienne, doit être reconnue comme faisant trou. […] Sens commun et sens social, c’est ce qui remplit toute son œuvre et c’est pour cela qu’il a été aimé de Louis XIV et détesté de Rousseau. […] Et il faut dire en second lieu qu’en peignant les sots dupes des coquins, sans du reste rendre les coquins sympathiques, il remplit le véritable office, même moral, de la comédie, La comédie ne peint pas les coquins pour les convertir ce à quoi du reste elle ne réussirait pas ; elle peint les défauts des honnêtes gens ou des demi-honnêtes gens qui sont des sots, pour les avertir que par ces défauts ils se prêtent à être victimes des coquins. […] Or Molière remplit admirablement cet office. […] Et comment vous pourrez remplir cette promesse.

109. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

il le fait, lui, si rempli de plaisirs Que de se marier il donne des désirs. […] S’il lui échappe des aveux qui le condamnent, c’est qu’il croit pouvoir s’en tirer ; et quoique cette confiance le trompe, il a du moins rempli un objet qui n’est pas indifférent pour la célébrité, celui d’étonner par la singularité des opinions nouvelles, et par le talent de les soutenir. […] Jourdain cette prétention si commune à la richesse roturière, de figurer avec la noblesse, il n’était pas nécessaire de le faire assez imbécile pour donner sa fille au fils du Grand-Turc et devenir mamamouchi : ce spectacle grotesque est évidemment amené pour remplir la durée de la représentation ordinaire de deux pièces, et divertir la multitude, que ces sortes de mascarades amusent toujours. […] Il était difficile de remplir cinq actes avec un ridicule aussi mince et aussi facile à épuiser que celui de la prétention au bel-esprit.

110. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXIX. Des Méprises, des Equivoques & de ce qu’on appelle quiproquo au Théâtre. » pp. 474-489

Ces ressorts, comme tous ceux d’un drame, produisent différents effets, selon le génie de l’Auteur qui les fait agir : souvent ils excitent le rire le plus bas, quelquefois ils font verser les larmes les plus ameres, & ils peuvent remplir les différents degrés qui séparent ces deux extrêmes.

111. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIII. Des Pieces intriguées par les Maîtres. » pp. 151-168

Messieurs, si vous voulez absolument remplir le théâtre, & figurer seuls sur un lieu destiné à tous les états, souffrez qu’on vous y fasse voir tels que vous êtes, tels même qu’il le faut pour faire aller la machine dont vous voulez seuls faire mouvoir les ressorts.

112. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXVIII. De l’exposition des Caracteres. » pp. 433-447

Son faste, Sa fierté, ses hauteurs font un parfait contraste Avec les qualités de son humble rival, Qui n’oseroit parler, de peur de parler mal, Qui, par timidité, rougit comme une fille, Et qui, quoique fort riche, & de noble famille, Toujours rampant, craintif, & toujours concerté, Prodigue les excès de sa civilité : Pour les moindres valets rempli de déférences, Et ne parlant jamais que par ses révérences.

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