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4. (1862) Corneille, Racine et Molière (Revue chrétienne) pp. 249-266

On est accoutumé, sur cette terre du refuge, à procéder en toute question avec liberté. […] Rambert voit dans Corneille le poète de la liberté. […] « Corneille, continue-t-il, n’est pas le seul poète dramatique qui ait célébré de préférence les gloires de la liberté. […] Mais il y a cette grande différence que Corneille ne songeait qu’à la liberté individuelle, tandis que Schiller, toujours philosophe, s’inspirait de ses théories sur l’éducation générale de l’humanité, et songeait soit à la liberté politique, soit à celle de la pensée. […] Si Alceste a voulu être conséquent avec lui-même, il a dû, pour trouver un lieu où il eût pleinement la liberté d’être homme d’honneur, sortir non-seulement de la société, mais de l’Eglise du dix-septième siècle. » Ainsi s’exprime M.

5. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VIII. M. DE SAINT-FOIX. » pp. 288-296

A présent Vénus le cherche, elle offre une rançon pour le délivrer ; mais, quoiqu’on lui ôte ses chaînes, il ne s’en ira point, & préférera la servitude à sa liberté. […] C’en est trop ; écoutez : si je me mets moi-même en liberté, je vous attraperai à mon tour, & vous aurez beau dire, comme tantôt, j’appellerai, j’appellerai, vous me paierez tout ceci. […] A peine fut-elle en liberté avec la blonde, que d’abord elle vint au fait : elles ne se cacherent rien ; la conclusion fut qu’il falloit faire une piece à ce perfide, à ce traître qui les jouoit.

6. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE X. Du Père, de la Famille, de l’Etat. » pp. 193-216

  On objectera en vain qu’au dix-septième siècle il avait des abus d’autorité paternelle consacrés par les lois et par les mœurs, et que Molière a entrepris une réforme utile en attaquant et en ridiculisant ces abus : ce n’est pas en détruisant qu’on réforme, et je ne pense pas que personne puisse aujourd’hui accepter cette mauvaise excuse, qui est celle de tous les méchants quand ils déclarent la guerre aux bons, de tous les tyrans quand ils étouffent la liberté. […] Nous insultons à la mémoire du Roi-Soleil ; nous voulons croire que toute idée de justice ou de liberté devait sécher aux feux de ses rayons absolus. Nous nous obstinons à ignorer que c’est sous son règne que fut inventé le moi de patriote ; que la tyrannie féodale fut définitivement vaincue ; que la liberté commerciale et industrielle prit son premier et victorieux essor ; que le peuple fut déchargé des impôts du servage ; que la justice cessa d’être une routine ou un abus ; que ceux qui s’engraissaient du suc de la France712 furent brisés, et que des fils de bourgeois et de marchands vinrent remplacer au ministère les ducs et les princes déchus ; nous oublions qu’il souffrit que l’éducation de son petit-fils fût nourrie des plus hardies et même chimériques utopies républicaines ; qu’il servit à sa table, de sa royale main, le valet de chambre qui proclama que la France est un peuple, qui immola les marquis au rire du peuple, cent cinquante ans avant que le peuple les traînât à la guillotine, et enfin qu’il voulut être le parrain du fils de ce fils du peuple. Molière, avec une grande liberté de génie attaqua la société d’alors dans ce qu’elle avait de plus mauvais et de plus redoutable, la noblesse oisive. […] Immoler au parterre 715 l’orgueil du nom et de la race pour y substituer l’orgueil du mérite, faire de l’acte royal qui conférait des duchés-pairies la cérémonie du mamamouchi, c’était un acte de courage dans un temps où, à nos yeux, l’esprit de justice et de liberté était représenté par le duc de Saint-Simon, si indigné de voir des bourgeois dans les charges.

7. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VI » pp. 50-55

Selon Voltaire, Anne d’Autriche avait apporté à la cour de France une galanterie noble et fière qu’elle tenait du génie espagnol, et y avait joint les grâces, la douceur et une liberté décente qui n’était qu’en France : l’anecdote des férets d’aiguillettes en diamants qu’elle avait reçus du ici, et qu’elle donna presque aussitôt au duc de Buckingham, les vers où Voiture lui parle à découvert de son amour pour ce charmant Anglais et le plaisir qu’elle prit à les lire, le soin qu’elle mit à les garder, ces détails attestés par madame de Motteville annoncent dans la reine toute l’inconsidération d’un goût très vif, et sortent des bornes de cette galanterie noble et fière et de cette liberté décente que Voltaire lui attribue.

8. (1886) Molière et L’École des femmes pp. 1-47

Les uns, et ils nous le disent, pour conserver plus de liberté dans leurs travaux, y ont renoncé ; et les autres, ils nous le disent aussi, sont absolument certains qu’elle leur appartiendra. […] Voici tout simplement le calcul qu’a fait Angélique : elle s’est dit que ses parents, bien que bons gentilshommes, étaient fort ridicules et fort pauvres ; qu’elle aurait beaucoup de peine à se marier ; qu’un bon parti se présentait pour elle ; qu’elle trouverait avec Dandin une situation, de l’aisance, la liberté ; qu’elle aurait un sot pour mari et qu’elle le traiterait comme tel. […] Sa formule pourrait assez bien se traduire ainsi : la liberté dans l’ignorance. […] Je disais tout à l’heure : la liberté dans l’ignorance ! Molière eût dit peut-être, si on lui eût demandé de résumer sa devise : la liberté, dans la famille !

9. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VI. » pp. 106-124

Il lui accorde une liberté honnête, ne la gêne point sur sa parure ; lui dit que si quatre mille écus de rente qu’il possede, beaucoup d’égards & de complaisance peuvent réparer chez lui les défauts de son âge, il sera enchanté de l’épouser ; mais que si elle croit être plus heureuse avec une autre personne, il y consent de bon cœur. […] Chez notre Poëte, Isabelle, poussée à bout par la contrainte où la tient son tuteur, se porte à mille extrémités ; & Léonor, qui jouit d’une honnête liberté, tient la conduite la plus irréprochable. […] Leur sexe aime à jouir d’un peu de liberté : On le retient fort mal par tant d’austérité ; Et les soins défiants, les verroux & les grilles Ne font pas la vertu des femmes ni des filles : C’est l’honneur qui les doit tenir dans le devoir, Non la sévérité que nous leur faisons voir. […] si vous l’épousez, elle pourra prétendre Les mêmes libertés que, fille, on lui voit prendre ?

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