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71. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

Mais rien n’est funeste à la comédie comme ces époques où il existe mille tyrans subalternes, qui forment une espèce d’assurance mutuelle en faveur du ridicule. […] Cette comédie, c’était le Tartuffe ; l’apparition de ce chef-d’œuvre, à côté des froides allégories de Benserade et des insipides ballets du duc de Saint-Aignan, devait former un étrange contraste : le roi parut sérieux, et le visage des courtisans se rembrunit ; les scènes les plus passionnées, les tableaux les plus capables d’enflammer les sens n’avaient scandalisé personne : un ouvrage où la vraie piété est mise en honneur, et la scélératesse, dépouillée du manteau sacré dont elle s’affuble, parut le comble de l’audace. […] Après avoir répandu dans les âmes ces poisons funestes qui étouffent la pudeur et la honte, après avoir pris soin de former des coquettes et de donner aux filles des instructions dangereuses ; après des écoles fameuses d’impureté, il en a tenu d’autres pour le libertinage ; et voyant qu’il choquait toute la religion et que tous les gens de bien lui seraient contraires, il a composé son Tartuffe, et a voulu rendre les dévots des ridicules ou des hypocrites. […] Mais, il faut le dire à la gloire du grand siècle littéraire, tous les hommes supérieurs surent se connaître et s’apprécier : Corneille, Racine, Molière, Boileau, La Fontaine, se sont mutuellement jugés comme la postérité les juge, et les noires atteintes de l’envie n’ont jamais troublé cette noble et poétique union formée par l’estime et cimentée par l’amitié.

72. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Il n’y en pas un qui n’ait son opinion toute faite sur le mérite littéraire de Molière, de Racine, de Boileau, opinion formée en partie par leurs propres lectures, en partie par leurs discussions lorsqu’ils étaient au collège, et leurs réflexions lorsqu’ils en sont sortis, opinion que les Allemands n’ébranleront pas, que le Chevalier n’affermira pas, que je ne me soucie pas de discuter ni de connaître. […] L’artiste reste toujours plus ou moins enfant, plus ou moins soumis à l’influence du milieu où s’est formé son génie : le critique doit être homme, et s’affranchir par un acte viril d’indépendance, de tous les préjugés où son jugement s’est formé d’abord, mais comme nos corps se développent dans des langes et dans des maillots. […] Si les grands courants qui forment l’esprit d’un peuple ou d’un siècle, ne suffisent pas à nous expliquer l’existence et la nature d’une œuvre, à l’histoire nous ajouterons la biographie, et nous finirons bien par éprouver dans tous les cas réels et possibles l’éternelle vérité de cet axiome nouveau, parce qu’il est méconnu : que tout phénomène a sa cause. […] Le ridicule qu’il mit en avant, le prétexte de la comédie des Femmes savantes, ce fut, il est vrai, la pédanterie de ces ménagères bourgeoises, comme on en voit à toutes les époques, qui, au lieu d’avoir l’œil sur leurs gens, de former aux bonnes mœurs l’esprit de leurs enfants, et de régler la dépense avec économie, vont chercher ce qui se passe dans la lune, pendant qu’ici-bas, à la cuisine, le pot-au-feu brûle.

73. (1775) Anecdotes dramatiques [extraits sur Molière]

La Béjart, Comédienne de Campagne, se l’associa ; et bientôt liés par les mêmes sentiments, leurs intérêts furent communs : ils formèrent de concert une Troupe, et partirent pour Lyon. […] Tome II, p. 41 Cette Pastorale96 faisait partie du Ballet des Muses, donné à Saint Germain devant Louis XIV, par Benserade*, et dont elle formait la troisième entrée. […] La Grange-Chancel 143 avait souvent entendu dire à Racine, que le sujet d’Orphée était le plus susceptible de tout ce qui peut former un grand Spectacle ; en conséquence il traita ce sujet pour le mariage de Louis XV. […] La Béjart, Comédienne de Campagne, se l’associa ; et bientôt liés par les mêmes sentiments, leurs intérêts furent communs : ils formèrent de concert une Troupe, et partirent pour Lyon. […] Leurs trois talents ne formaient qu’un esprit, Dont le bel Air réjouissait la France Ils sont partis ; et j’ai peu d’espérance De les revoir, malgré tous nos efforts.

74. (1816) Molière et les deux Thalies, dialogue en vers pp. 3-13

N’en accusez que vous, si vos admirateurs Ont le goût dépravé ; vos goûts forment les leurs : Ils sont habitués aux manières charmantes De votre cher Dorat, à ses phrases brillantes.

75. (1911) L’Étourdi de Molière et Le Parasite de Tristan L’Hermite (De Jodelle à Molière) pp. 292-302

L’Étourdi de Molière et Le Parasite de Tristan l’Hermite Lorsque Molière a composé l’Étourdi, il ne s’est piqué ni de tracer des caractères, ni de peindre les mœurs, ni même de former une intrigue parfaitement claire et bien suivie.

76. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Quelque mauvais que soit le goût de gens liés par une conversation habituelle, il faut qu’ils se forment un langage raisonnable, toute conversation est une épreuve par laquelle chacun essaie son langage à l’intelligence, au goût, aux affections des auditeurs ; là, ce n’est pas la critique qui éclairé, c’est l’impression que fait la parole sur ceux à qui elle s’adresse.

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