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4. (1820) Notices des œuvres de Molière (V) : L’Amour médecin ; Le Misanthrope ; Le Médecin malgré lui ; Mélicerte ; La Pastorale comique pp. 75-436

Pour que le reproche fait à Molière par Rousseau fût fondé, il faudrait que l’homme exempt de vices fût indispensablement un censeur outré et amer des vices d’autrui. […] Ne soyons cependant pas injustes envers Alceste, pour mieux convaincre Rousseau de l’avoir été envers Molière. […] En rapprochant les traits dont se compose le caractère comique d’Alceste, je cesse d’être étonné que Rousseau ait fait le procès à Molière. Rousseau, au moins singulier dans le choix de ses maîtresses, et toujours prêt à se brouiller avec ses meilleurs amis ; affectant de contrarier sans cesse l’opinion commune, et quelquefois sa propre opinion ; faisant à tout propos la satire de la société, et menaçant de rompre avec elle en fuyant dans un désert ; s’imaginant que tous les hommes étaient ligués pour lui nuire, et aspirant à des persécutions réelles pour nourrir et justifier sa misanthropie, Rousseau, je suis bien tenté de le croire, se sentit joué personnellement dans le rôle d’Alceste ; et, quand il attaqua Molière, il ne fit, à son insu peut-être, que se défendre et se venger lui-même. […] La fausse et odieuse interprétation donnée par Rousseau au dessein qu’avait eu Molière en composant Le Misanthrope, fit rechercher depuis, quel avait été véritablement ce dessein Rien n’est plus facile à apercevoir.

5. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

Mais je dirai ici à Rousseau : Eh bien ! […] Quel était le but de Rousseau? […] De tous les exemples que j’ai cités, Rousseau conclut: Il fallait faire rire le parterre. […] Cette excuse est si naturelle, que Rousseau l’a prévue; mais il la trouve insuffisante, et revient à son refrain : Voilà comme on avalit la vertu. […] Rousseau fait un reproche très-sérieux à Molière de ce que le fils d’Harpagon se moque de lui quand son père lui dit : Je te donne ma malédiction.

6. (1836) Une étude sur Molière. Alceste et Célimène (La Revue de Bordeaux et Gironde unies) pp. 65-76

Mais Rousseau élève la voix ; il accuse l’auteur d’avoir fait de Philinte son héros, tandis qu’il ridiculise Alceste : combattre ainsi Molière, c’était presque le comprendre. Il appartient aux hommes de notre époque de considérer le misantrope sous un nouvel aspect; je vais, tout en combattant le jugement de Rousseau, exprimer mon opinion personnelle sur le but moral de ce drame. […] Ceci nous mène au second reproche adressé à Molière : il est accusé de faire rire aux dépens du misantrope : « Ce caractère si vertueux, dit Rousseau, est présenté comme ridicule. […] Rousseau pense que dans la scène du Sonnet, le comique naît de l’embarras du misantrope et de ses : je ne dis pas cela, répétés ; je suis tenté de croire tout le contraire : ce n’est point le biais que prend Alceste, c’est sa franchise même qui est ridicule ; dire la vérité quand il est de bon ton de mentir, c’est manquer à toutes les convenances.

7. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

Rousseau ne prend-il pas trop à la lettre ce mot imposant de malédiction, et n’abuse-t-il pas du sens terrible qui y est attaché ? […] Rousseau prétend que, dans cette pièce, le public applaudit à la femme infidèle, et rit du mari trompé. Rousseau, par un artifice familier à tous les sophistes, pose d’abord en fait ce qui est en question. […] Il y a une grande différence entre ces deux choses, et Rousseau se plaît à les confondre. […] La censure de Rousseau n’était pas nouvelle.

8. (1824) Notices des œuvres de Molière (VIII) : Le Bourgeois gentilhomme ; Psyché ; Les Fourberies de Scapin pp. 186-466

S’il s’agissait d’un sophiste vulgaire, la fausseté palpable de ces arguments dispenserait d’y répondre, surtout une troisième fois ; mais on doit à un homme tel que Rousseau, on doit principalement à ceux qu’il pourrait abuser par le prestige de son talent et de sa renommée, de plaider contre lui la cause de la vérité, toutes les fois qu’il lui plaît de prendre en main celle de l’erreur. Quel est le plus blâmable, demande Rousseau, de la dupe ou du fripon ? Je laisse de côté cette question, que Rousseau n’a pas proposée sérieusement ; mais dont la réponse, qui ne peut être douteuse, doit servir de fondement à sa fausse argumentation. […] Rousseau abuse ici d’un terme équivoque, et il feint de le mal comprendre, afin de l’appliquer plus mal encore. […] Rousseau ne pouvait ignorer toutes ces choses ; mais, par une des plus étranges saillies de son humeur sophistique, il a trouvé plaisant d’appliquer cette expression convenue d’honnête homme, à un homme qui n’est rien moins qu’honnête, en en dépouillant celui à qui elle convient dans toutes ses acceptions.

9. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [69, p. 105] »

[69, p. 105] Rousseau*, de Genève, a dit : les mœurs ont changé depuis Molière ; mais le nouveau peintre n’a point encore paru.

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