Le Docteur, instruit de l’artifice de Scapin, lui en fait des reproches : celui-ci lui persuade que tout ce qu’il a fait n’étoit que pour lui rendre service. […] Il lui reproche sa prétendue perfidie quand ils sont seuls. […] Dorante écoute : il est furieux : il accable Finette de reproches.
Seulement, la morale n’y est plus ; et on ne le lui reproche pas, puisqu’il atteint son but, qui est de divertir irrésistiblement. […] Enfin, le moraliste a encore un reproche à faire. […] Le même reproche s’adresse au Valère du Mariage forcé, au Clitandre de l’Amour médecin, à l’Adraste de l’Amour peintre, au Valère du Médecin malgré lui, à l’Eraste de M. de Pourceaugnac, à l’Octave et au Léandre des Fourberies de Scapin : tous ces jeunes hommes mêlent des ruses honteuses, dégradantes, à la noblesse d’un amour qui touche au sublime par le dévouement et la délicatesse.
Il en est ainsi des deux charmantes scenes du quatrieme acte, lorsque Dorante, prenant Lisette pour Lucile, l’accable de reproches, & tombe à ses pieds pour lui demander pardon, au moment où Lucile elle-même arrive & n’est pas médiocrement surprise de voir son amant à genoux devant sa femme-de-chambre. […] Le pere & le fils se reconnoissent pour l’emprunteur & le prêteur ; ils s’accablent de reproches. […] Harpagon reproche à Elise son amour pour un voleur qu’il va faire pendre.
Enfin, m’étant donné la tâche de parler des femmes, il faut bien que je touche à leurs qualités comme à leurs défauts, et que je m’expose ainsi au reproche de fade galanterie ou de malignité ; j’aimerais mieux encore encourir le premier. […] Elle lui reproche son ajustement, son amour du monde, l’éducation qu’elle donne à ses enfants, ses propos les plus innocents. […] C’est la pensée de Priam et des vieillards qui la voyant s’avancer vers la tour où ils discourent, pareils à des cigales harmonieuses, n’ont pour elle aucun mot de reproche, admirent sa beauté et rejettent sur le destin la faute de leurs malheurs. […] C’est ce que pense don Juan, qui poursuivant son idéal et ne le rencontrant nulle part, va de l’une à l’autre, et non content d’abandonner les sujets de ses expériences, leur reproche encore de n’être pas celle qu’il cherche. […] Cependant elle n’a pas un murmure contre son père ; elle prévient même les reproches qu’il pourrait s’adresser.
Te serais-tu attendu à trouver de nos jours un censeur rigoureux qui reproche amèrement à ton Misanthrope de faire rire? […] Quelle leçon elle donne au tuteur qui l’a si mal élevée, lorsqu’il lui reproche les soins qu’il a pris de son enfance ! […] Si ce qu’on dit vous blesse, Il faut que ce reproche à madame s’adresse. […] Le reproche est fondé : nous avons vu quelle excuse pouvait avoir l’auteur, obligé de travailler pour le peuple. […] Rousseau fait un reproche très-sérieux à Molière de ce que le fils d’Harpagon se moque de lui quand son père lui dit : Je te donne ma malédiction.
Sa femme, avertie secrètement, le surprend sur le lit de la courtisanne, l’accable de reproches, & l’oblige à prendre la fuite. […] Moliere lui-même n’est pas exempt d’un pareil reproche.
Comme Philinte, à chaque pause que fait le lecteur, se récrie d’admiration, Alceste autant de fois lui reproche ses fades éloges en termes qui ne permettent pas de douter de son mépris pour cette ridicule production, ni, par conséquent, de s’étonner de la critique détaillée qu’il en fait bientôt après. […] Après avoir déchiré la Sophonisbe de Corneille, il s’était subitement avisé d’en prendre la défense contre l’abbé d’Aubignac ; et, présumant bien qu’on ne manquerait pas de l’opposer à lui-même, il avait essayé de prévenir ainsi le reproche de contradiction ou de versatilité : « Je n’avais été voir Sophonisbe que pour y trouver des défauts ; mais, l’ayant été voir depuis en disposition de l’admirer, et n’y ayant découvert que des beautés, j’ai cru que je n’aurais pas de gloire à paraître opiniâtre et à soutenir mes erreurs. » Il y a plus de naïveté que d’adresse ou de dignité dans cette justification. […] Pour que le reproche fait à Molière par Rousseau fût fondé, il faudrait que l’homme exempt de vices fût indispensablement un censeur outré et amer des vices d’autrui. […] Boileau lui en faisait un reproche.
Pourquoi ne reproche-t-il pas à Jourdain, comme Molière, comme le public, son ambition et de vouloir sortir de sa sphère ? […] Rousseau reproche à Molière d’être du parti des malhonnêtes gens. […] Ce reproche général se subdivise de la manière suivante : Molière « ne fait pas aimer la vertu ». […] Le président écouta très patiemment le comédien ; puis il lui dit, avec le flegme d’un Philinte : « Je ne vous reproche point d’attaquer la religion ; je vous reproche de la défendre. […] Mais il leur reproche précisément de ne guérir point et même d’aider la nature à nous faire mourir.
Scapin conduit Flaminia chez Lélio, où, après quelques reproches obligeants de part & d’autre, Lélio lui découvre l’amour qu’il a toujours eu pour elle : Flaminia lui dit à-peu-près la même chose, & l’hymen acheve de les réunir. […] Flaminia est outrée de dépit ; elle accable Lélio de reproches. […] Il lui fait de tendres reproches sur son insensibilité passée, & lui apprend que c’est lui qui a fait naître dans son cœur le changement qu’elle a ressenti depuis peu : il ordonne en même temps à sa suite de célébrer sa victoire, & il se forme une lutte entre les Amours & les Chasseurs, qui est imitée par les instruments entre les violons & les cors : les Amours enchaînent les Chasseurs avec des guirlandes, & tous ensemble forment un ballet au son des cors réunis avec les violons.
Le reproche seroit à sa place si Moliere, en mettant un pareil exemple sur le théâtre, n’eût pas en même temps peint avec les couleurs les plus fortes toutes les fripponneries qu’on essuie en faisant ce manege. […] Ce que je viens de dire pour prouver que la comédie ne corrompt point les valets, peut encore la justifier sur le reproche qu’on lui fait de styler les belles à tromper le tuteur le plus clairvoyant, ou le mari le plus soupçonneux. […] Que fait-il pour éviter un pareil reproche ? […] Mais si on ne reproche rien à la conduite & au style, on se soulevera un peu contre le sujet même de la piece. […] Nous allons donc dans le volume suivant placer Moliere au milieu des théâtres de tous les âges & de toutes les nations, l’entourer de ses prédécesseurs & de ses contemporains : là, nous le verrons, les yeux fixés sur un chaos, où rien n’est à sa place par sa nature, où rien n’est lié par ses rapports, rejetter des défauts, ramasser des beautés presque imperceptibles, & s’immortaliser enfin, en se rendant original, soit dans les scenes qu’il n’a faites, dit-on, que copier, soit dans les pieces qu’on lui reproche d’avoir traduites, & sur-tout dans celles qu’il a composées d’après plusieurs ouvrages différents.
Une jeune étrangere très vertueuse & qui manque des choses les plus nécessaires y loge : Freeport ne l’admire point ; mais il l’estime, veut la voir, passe brusquement dans son appartement, se fait apporter la gazette & du chocolat, lui parle sans ménagement de sa misere, lui reproche sa fierté, & lui dit. . . . . . . . . . . . . . . . . . . […] Elle les surprend dans le temps qu’ils se peignent tous les chagrins d’un amour traversé ; elle jette feu & flamme contre eux ; elle est furieuse, elle les accable de reproches ; ils se croient perdus.
Je me fis à moi-même des reproches sur une délicatesse qui me semblait ridicule et j’attribuai à son humeur ce qui était un effet de son peu de tendresse pour moi. […] Ceci nous mène au second reproche adressé à Molière : il est accusé de faire rire aux dépens du misantrope : « Ce caractère si vertueux, dit Rousseau, est présenté comme ridicule.
Et si je me fais bien entendre au propre ou au figuré ; de manière que je conserve les caractères, et que j’évite le languissant, le bas, et le superflu, je m’embarrasse peu que l’on me reproche la singularité : Car je déclare à mon Censeur que je ne suis nullement scrupuleux, et que s’il se présente un terme expressif, qui m’en épargne plusieurs, je l’emploie avec assurance, quand il a passé dans les conversations des personnes qui parlent bien. […] Mon Auteur me reproche sans attention de la contradiction dans cet endroit. […] On est aisément piqué, quand on est traité d’ignorant ; je n’ai pu tenir contre l’envie que j’avais de faire retomber ce reproche sur mon Censeur. […] Il aurait voulu que je n’eusse rien dit du mauvais ménage qui était entre Molière et sa femme, que je n’eusse parlé de Mr de Chapelle, que lorsqu’il était à jeun ; C’est-à-dire que mon Censeur aurait voulu l’impossible ; ç’aurait été sans raison tomber dans le défaut qu’il me reproche un moment après.
Le roi l’avait jugé sans reproche, il était donc intéressé lui-même à ce qu’il parut ; après trois ans d’épreuve il en permit la représentation. […] On n’imaginerait jamais comment le dévot parodiste amène les reproches de plagiat qu’il fait à Molière. […] La Bruyère a fait au Tartuffe un reproche qui n’est guère plus fondé, mais qui est beaucoup plus spécieux. […] Ainsi les reproches de Bourdaloue tombent à faux ; comment un homme d’une raison si élevée les a-t-il faits si légèrement ? […] Il lui reproche les impuretés de ses comédies ; il dit que ce sont les plus grossières dont on ait jamais infecté les oreilles des chrétiens !
Mais il leur sied mal de faire un pareil reproche au plus grand de nos Auteurs, tandis que les leurs ne sont jamais intéressants qu’aux dépens des regles de la vraisemblance, en entassant avec confusion vingt événements, en confondant le temps & les lieux, & sur-tout en mêlant le grotesque au terrible. […] Une Picarde survient, & fait le même reproche à Pourceaugnac.
Doublette, femme de Raoullet, Vigneron fort vieux, se plaint de ce que sa vigne demeure en friche, faute d’être façonnée ; son mari se met en colere d’un pareil reproche, & dit : Qui la voudroit Servir à son gré, il faudroit Houer15 la vigne jour & nuit. […] La Hollande reproche à deux Bourguemestres qu’elle est réduite à cet état déplorable par leurs conseils.
Elle reproche à son mari de faire le galant avec toutes les dames et de la négliger16. […] Isabelle a vu Oratio parler à la comédienne ; elle lui reproche de ne pas tenir sa promesse.
Cependant, à part la matière, la statue de Molière peut encore encourir le reproche de lourdeur. […] Mais ce reproche s’adresse à l’architecte plutôt qu’au sculpteur.
L’éloquent Chrysostome, dans un discours sur l’hypocrisie même, a dit : « Le libertin ne manque jamais de se prévaloir de la fausse piété, pour se persuader à lui-même qu’il n’y en a point de vraie, ou du moins qu’il n’y en a point qui ne soit suspecte, et pour affaiblir par le reproche qu’elle semble lui faire continuellement de son libertinage. » L’ingénieux Augustin a dit : « L’hypocrisie est cette ivraie de l’Évangile, que l’on ne peut arracher sans déraciner aussi le bon grain. » Louis XIV, qui n’était pas un faux dévot, et qui n’avait pas lu les Pères de l’église, Louis XIV, au milieu d’une fête voluptueuse donnée à la première et à la plus chérie de ses maîtresses, fut frappé des mêmes conséquences, lorsque, parlant du Tartuffe, il craignit qu’une trop grande conformité entre ceux qu’une véritable dévotion met sur le chemin du ciel et ceux qu’une vaine ostentation des bonnes œuvres n’empêche pas d’en commettre de mauvaises, ne fît prendre la vertu et le vice l’un pour l’autre par les personnes incapables d’en faire un juste discernement 3. […] Je ne dissimule et n’affaiblis, comme on voit, aucun des reproches ni des soupçons qu’il peut mériter ; mais les torts qui les lui attirent tiennent uniquement à la forme de son opinion. […] Je ne me sens pas le droit d’approuver leurs motifs ; mais il était de mon devoir de les exposer, et je l’ai fait en bravant le danger d’attirer sur moi le même reproche d’hypocrisie qu’ils ont attiré sur eux. […] Aurait-on voulu par là garantir du reproche d’inconséquence le monarque qui finit par permettre la représentation de cette même pièce qu’il avait d’abord jugé impossible de donner au public ?
Moncade arrive, prend son portrait pour celui d’un rival, &, furieux, accable Mariane de reproches : elle est trop irritée pour le désabuser. […] Pamphile fait les reproches les plus vifs à Dave, qui avoue ses torts, & promet de tout réparer. […] Pamphile est furieux contre Dave : Carin fait à Pamphile les reproches les plus vifs ; ils se réunissent ensuite pour accabler Dave, qui leur promet de tout réparer. […] Voilà le reproche qu’on pourroit faire à la plupart des personnages du Philosophe marié.
Or, ce reproche ne manquait pas d’une certaine gravité; car de plus en plus, à notre époque, l’auteur de la Méthode passe pour avoir eu non-seulement en métaphysique, mais en physique aussi, le regard autrement pénétrant que son adversaire, et l’heure ne semble pas éloignée où tout le monde s’accordera pour saluer en lui un des fondateurs des sciences modernes (45). […] Oui, si ce reproche est fondé, c’est une tache, ou si l’on veut, c’est une ombre bien légère ; mais enfin, c’est une ombre qui ternit pour moi l’éclat de cet incomparable génie. […] L’humanité a pu le rendre triste, amèrement triste, et il a pu le lui dire dans un reproche immortel… Mais même alors il ne saurait désespérer d’elle et la maudire. […] Il devait nous apprendre que « Gassendi n’a jamais été matérialiste ni épicurien que pour ceux qui ne l’ont pas la sérieusement » (p. 17). — Heureusement, ce reproche de légèreté atteignait tant de critiques que le plaisir de nous trouver en si nombreuse et si bonne compagnie aurait pu suffire à lui seul pour nous consoler de notre mésaventure.
Il n’a pas le temps de reconnaître sous le costume du cavalier done Ignés, l’amie de done Elvire, et il éclate en reproches insultants. […] Si ce qu’on dit vous blesse, il faut que le reproche à madame s’adresse. […] Que lui reproche-t-on ? […] Les reproches que l’on adresse à Molière renferment le plus grand de tous les éloges : il est trop vrai. […] Maintenant, tu ne me reproches plus de me déshonorer par ma conduite: moi, je ne veux plus m’exposer à entendre des discours qui me déshonorent.
Chose singulière, les deux autres comédies de Destouches qui seules, avec Le Philosophe marié, ont fondé sa réputation, Le Glorieux et Le Dissipateur, méritent le même reproche. […] On lui a fait un juste reproche d’avoir, dans George-Dandin, montré une femme mariée manquant à ses devoirs. […] Dans L’École des Vieillards, Danville fait aussi reproche à sa femme de la société qu’elle reçoit des grands dîners qu’elle donne, des beaux esprits qu’elle y invite. […] Ce reproche pourrait s’adresser à M. […] Ses reproches purent éclater d’abord, mais il finit par souffrir sans se plaindre ; jamais d’ailleurs il ne se fût rendu coupable d’une violence pareille à celle d’Alceste.
Desronais, seul, se reproche son aventure avec la Comtesse, & jure qu’il n’a pas cessé d’adorer Mariane. […] Henri releve tout le monde avec bonté : il jette un regard menaçant sur Concini, lui montre Agathe, lui reproche son crime. […] Le Comte le persiffle sur sa discrétion, lui reproche d’être amoureux comme un roman 45, & veut le marier pour l’en punir.
Mais combien de reproches ne s’est-il point attirés, en se proposant ce but si utile, le seul convenable à un Poète comique, qui n’a pas, comme de froids Moralistes, le droit d’ennuyer les hommes, et qui ne prend sa mission que dans l’art de plaire ? […] On reproche avec raison à l’un des imitateurs de Molière d’avoir mis sur le théâtre un neveu malhonnête homme, qui, secondé par un valet fripon, trompe un oncle crédule, le vole, fabrique un faux testament, et s’empare de sa succession au préjudice des autres héritiers. […] Malgré ses défauts, malgré les reproches qu’on fait à quelques-uns de ses dénouements, à quelques négligences de style, et à quelques expressions licencieuses, il fut avec Racine celui qui marcha le plus rapidement vers la perfection de son Art.
Cependant Darviane aime Rosalie ; il s’emporte contre son rival : Mélanide alarmée lui fait les reproches les plus vifs ; il se doute de la vérité ; & pour faire cesser son incertitude, il va joindre le Marquis : ils ont ensemble la scene suivante. […] Qui, plus que Moliere, est exempt d’un pareil reproche ?
Pour ce qui concerne Molière, ce reproche n’est qu’à moitié fondé et certains traits individuels, non pas seulement moraux, mais physiques, distinguent plusieurs de ses personnages. […] Certes, le père Grandet est plus riche en sentiments, plus fouillé, plus vrai que ne l’est Harpagon et Fénelon a théoriquement raison quand il reproche à Molière d’avoir conservé, tout en l’atténuant, le trait de Plaute faisant demander par son avare à un valet de lui montrer sa troisième main.
Maître Simon, courtier d’usure, promet à l’Avare que l’emprunteur en passera par tout ce qu’on voudra : Harpagon se détermine à prêter au plus gros intérêt ; mais il n’est pas médiocrement surpris lorsqu’il découvre que son fils est l’emprunteur : d’un autre côté, Valere partage bien sa surprise ; tous les deux s’accablent de reproches. […] Harpagon, croyant à la déposition de Maître Jacques, accable Valere de reproches, & lui dit de venir confesser l’action la plus noire, l’attentat le plus horrible qui jamais ait été commis. […] Magnifico accable de reproches Célio son commis : celui-ci, qui a une intrigue secrete avec la fille de la maison, se croit découvert, avoue une faute que la tendresse la plus vive lui a fait commettre, & dit qu’il n’a pu résister à l’éclat de deux beaux yeux. […] Si je suis pauvre, du moins je suis sans reproche.
Cela justifierait Orgon du reproche qu’on lui a fait, lui, si empressé de son Tartuffe, et rentrant de voyage au premier acte, de ne pas l’avoir encore embrassé au troisième. […] Le reproche n’est pas sans quelque fondement. […] ce n’est plus guère cela qu’on reproche à la tragédie ; c’est plutôt par esprit de pénitence qu’y vont les contemporains de l’opérette. […] Il s’accuse, au contraire : non pas (notez-le bien) du crime qu’on lui reproche, mais de tous les crimes sans exception. […] Du reste, quant à ce bien qu’on lui reproche d’usurper, il est probable qu’en effet Tartuffe ne l’accepte pas pour lui-même.
Dans Gli Sdegni Amorosi, canevas italien, Diane et Flaminio s’accusent mutuellement d’infidélité et s’accablent de reproches, comme Éraste et Lucile ; leur scène a des beautés ; celle des amants français est sublime. […] Ici plus d’un Valère, sensible au reproche, se croira peut-être bien justifié en disant, d’un ton d’homme à bonne fortune : Mais… mais… vous ne voulez donc pas que je sois amant ? […] et les mères, accoutumées à conduire leurs filles au spectacle, reconnaissent-elles l’Isabelle de Molière, cette jeune personne honnête, intéressante, que la crainte d’être à jamais malheureuse force à une démarche qu’elle se reproche ? […] Arnolphe, enfin, entraîné hors de lui-même par les coups sensibles que lui porte Agnès, aigri par l’ingénuité avec laquelle ses reproches sont repoussés, brûle un moment de se satisfaire par quelques coups de poing. […] Jusqu’ici, je n’avais pas cru qu’on pût pousser trop loin la naïveté ; mais, s’il est quelques hommes de génie auxquels on puisse faire ce reproche, on ne le fera jamais au bel esprit.
Clairville reproche à son ami le mystere qu’il lui faisoit de son amour pour sa sœur : Avez-vous eu peur, lui dit-il, de me voir contrarier vos desirs ? […] Flaminia presse vivement Lélio de tenir la parole qu’il lui a donnée à Venise, & de la délivrer par ce moyen des poursuites de Mario, qu’elle ne peut souffrir : elle lui fait ensuite des reproches, & lui témoigne beaucoup de jalousie.
Elle avait besoin de cette garantie contre le reproche de s’être dévouée à la maîtresse du roi, et d’être entrée en quelque sorte au service de ses amours. […] Et sans la piété comment aurait-elle pu repousser la jalousie de la favorite et éviter des reproches d’ingratitude de sa part ?
Madame Pernelle, mere d’Orgon, & vieille bavarde, ne veut rien croire de tout ce qu’on reproche à Tartufe, lorsqu’il paroît avec l’Exempt & l’exhorte à remplir son devoir. […] Ils s’accablent mutuellement de reproches. […] Célio accable Tiennette de reproches sans lui donner le temps de s’excuser, rentre dans la maison, & la laisse à la porte.
Mais il n’est pas temps de vous faire des reproches ; venez, embrassez-moi. […] Allez, lui dit-elle, je serois au désespoir de vous attirer un reproche : votre honneur m’est aussi cher que le mien. […] Je lui jette un coup d’œil assez farouche : elle veut fuir mes reproches ; mais un orage épouvantable inonde tout-à-coup le jardin.
Corneille répondit à ce reproche en 1639, par Les Horaces et Cinna ; en 1640, par Polyeucte ; en 1641, par La Mort de Pompée ; en 1642, par Le Menteur ; en 1645, par Rodogune.
Cidalise lui reproche de n’avoir pas assez flatté Géronte, & surtout la Comtesse qui gouverne son bon-homme de frere, quoiqu’elle le méprise, & qui le fait consentir à tout ce qu’elle veut en feignant d’avoir des vapeurs dès qu’elle est contredite. […] Leuson reproche à Stukéli qu’il partage les vols faits à Béverley : ils sortent pour se battre.
Tu te trompes, si tu crois pouvoir, sans faire les moindres frais, conserver la tendresse des parents que t’a donnés la nature. » Il semble que ces vers du poète de la raison pourraient être une réfutation suffisante du reproche grave et solennel adressé à Molière par le plus éloquent des sophistes. […] Voici le texte même de la sentence fulminée contre l’auteur de L’Avare par l’auteur de La Nouvelle Héloïse : « C’est un grand vice d’être avare et de prêter à usure ; mais n’en est-ce pas un plus grand encore à un fils de voler son père, de lui manquer de respect, de lui faire mille insultants reproches, et, quand ce père irrité lui donne sa malédiction, de répondre d’un air goguenard, qu’il n’a que faire de ses dons ? […] Passons à des reproches moins graves. […] Je conviens de tout cela. »Cette faute qu’il reproche à Molière, Riccoboni cherche à l’atténuer par beaucoup de raisons qui m’ont paru d’une extrême faiblesse.
Nous ne déciderons pas entre eux, nous plaindrons seulement celui qui mérite le reproche. […] Les Beaux Esprits qui vivoient de son temps le lui reprocherent : nous verrons dans la suite si leurs reproches sont fondés. […] La femme sort furieuse, trouve précisément son beau-frere avec la robe sous le bras, le prend pour son mari, l’accable de reproches. […] Ils trouvent le frere qui se moque de leurs reproches, & les maltraite si bien en protestant de ne pas les connoître, qu’il passe pour fou dans leur esprit, & qu’ils projettent de le mettre entre les mains d’un Médecin2.
La Fontaine fut reçu dans sa société, Ce fut le genre de conversation à laquelle elle se plaisait qui inspira au jeune poète ces contes auxquels on reproche une liberté plus que gaie.
Nérine fait des reproches à Léandre sur son indifférence, & dit à l’Olive qu’elle peut se venger de la sienne, si elle veut. […] Nérine & Julie viennent accabler de reproches Crispin & Damon ; elles apprennent d’eux que Léandre & l’Olive leur ont permis de les épouser. […] La Comtesse vient elle-même se plaindre à Valere de ce qu’il n’a pas été la joindre au château de Clitandre, elle lui reproche son insensibilité pour elle.
D’un autre côté, Dona Luisa a découvert que Don Juan rend des soins à Léonor, elle en est jalouse, elle entre chez cette derniere pour lui faire des reproches.
Un instant, on peut croire à un mouvement sincère de repentir et de tendresse, quand, à la fin du cinquième acte, elle dit à Alceste, qui seul ne l’accable pas de reproche : Je sais combien je dois vous paraître coupable, Que toute chose dit que j’ai pu vous trahir, Et qu’enfin vous avez sujet de me haïr. […] Et sur le reproche de Mariane qu’elle ne compatit pas à sa peine : Je ne compatis pas à qui dit des sornettes Et dans l’occasion mollit comme vous faites.
Térence, sensible à ce reproche, cherche à se justifier dans le prologue de son Phormion. […] Ce reproche n’est pas si bien fondé qu’on le croit.
Eschine, touché des malheurs de son frere, se charge pour lui d’enlever l’esclave, & la conduit dans sa maison, ce qui donne lieu à tout le monde de croire que c’est pour son compte, sur-tout à Déméa, qui rencontre Micio, l’accable de reproches, lui dit que son indulgence perd Eschine, & l’exhorte à se modeler sur lui, qui, en traitant Ctésiphon avec sévérité, en a fait un jeune homme sage & prudent. […] Le pere, étonné d’une pareille nouvelle, fait à ce fils des reproches sanglants, l’oblige d’aller trouver sa maîtresse, & de lui demander pardon de ses importunités : le fils, qui soupçonne la ruse, obéit.
Négligeons le second point du sermon de Bourdaloue, qui porte sur les dévotions lâches, et passons au troisième, où Bourdaloue se porte de la défensive à l’offensive, et renvoie le reproche d’hypocrisie des jésuites, auxquels il s’adressait d’abord, aux jansénistes d’où le coup était parti, avant Molière, par la main de Pascal. […] On ne voit donc pas, malgré La Bruyère, ce qu’il y a de contraire au caractère de Tartuffe dans les différents traits qu’il lui reproche. […] L’auteur des Observations sur le Festin de Pierre 7 commence en jouant la légèreté et la malice ; il feint de rendre justice à Molière et croit lui décocher les traits les plus sanglants sans se douter combien il accuse lui-même par là la pauvreté et la platitude de son esprit : « Il est vrai, dit-il, qu’il y a quelque chose de galant dans les ouvrages de Molière, et que, s’il réussit mal à la comédie, il a quelque talent pour la farce. »Ce n’est même là qu’une feinte concession, car il ajoute : « Quoi qu’il n’ait ni les rencontres de Gautier-Garguille, ni les impromptus de Turlupin, ni la bravoure du capitan, ni la naïveté de Jodelet, ni la panse de Gros-Guillaume, ni la science du docteur, il ne laisse pas de divertir quelquefois et de plaire en son genre. »Il lui reproche de n’avoir pas le talent de l’invention ; mais il reconnaît qu’il traduit assez bien l’italien et parle passablement français. […] » On lui reproche aussi de n’avoir pas suscité quelque acteur « pour défendre la cause de Dieu et défendre sérieusement ses intérêts. […] Reste enfin le dénouement que Molière peut invoquer en sa faveur ; car, en définitive, c’est le méchant qui est puni ; l’athée est foudroyé. « Mais ce foudre, répond l’accusateur, n’est qu’un foudre en peinture qui n’offense pas le maître et qui fait rire le valet. » Les mêmes reproches, les mêmes accusations se retrouvent dans la lettre du prince de Conti sur la comédie : « Y a-t-il, disait ce prince de l’ancien camarade dont il avait encouragé les premiers essais, y a-t-il une école d’athéisme plus ouverte que Le Festin de Pierre, où après avoir fait dire toutes les impiétés les plus horribles à un athée qui a beaucoup d’esprit, l’acteur confie la cause de Dieu à un valet à qui il fait dire pour la défendre toutes les impertinences du monde ?
C’est la scène où le père de Dorante, indigné de ses fourberies, l’accable de reproches qui rappellent ceux du vieux Chrémès dans Térence, que Corneille surpassait sans peut-être l’avoir lu. […] Elle entre dans sa chambre, simule des reproches à sa sœur, dont Sganarelle s’applaudit tout bas comme d’un fruit de son plan d’éducation, et la prétendue Léonor sort pour aller au logis de Valère. […] Il lui fait peur des damoiseaux, des chaudières du diable ; il lui reproche son origine, la pauvreté d’où il l’a tirée : il pense la toucher, et il ne fait que rendre plus doux à Agnès, par la comparaison, le souvenir des tendresses d’Horace. […] Trop, selon quelques délicats qui en ont fait le reproche à Molière.
Goldoni que je fais un pareil reproche, c’est au goût de sa nation, que ce grand homme n’a pu entiérement corriger.
Antoine Baudeau, dans la Préface de la Comédie des véritables Prétieuses, reproche à Moliere d’avoir imité le Médecin volant, & plusieurs autres Pieces du Théatre Italien.
Taschereau. » Nous n’avions jamais songé à coup sûr à adresser à son imagination un pareil reproche. […] Reproches que lui fait J. […] Ses envieux ne lui ménagèrent pas les reproches pour avoir osé attaquer une classe et un art aussi redoutables. […] Il renouvela donc les reproches, et la menaça de la faire enfermer. […] Les reproches que Rousseau adresse généralement à Molière portent toujours sur des points beaucoup plus graves que le style.
Le Capitaine reproche à Maugrebleu qu’il est ivre : celui-ci lui répond : Maugrebleu. […] Dès qu’il la voit, il lui reproche ses escampativos nocturnes ; Angélique lui répond qu’il n’y a pas grand mal à prendre le frais de la nuit : alors George Dandin s’écrie : Eh !
Rousseau ; mais si le reproche est grave, la méprise ne l’est pas moins. […] Il nous reste à noter encore quelques reproches articulés par d’illustres écrivains, et la restriction apportée à l’éloge par cet arbitre du goût, qui cependant avait proclamé devant Louis XIV la supériorité de Molière sur tous les hommes de génie de son siècle.
Ceci n’est point un reproche : la pièce est tout ce qu’elle devait et pouvait être, une espèce de prologue dialogué ; mais Molière y a su mettre plus de génie comique qu’on n’en trouve dans beaucoup de grandes pièces fortement intriguées. […] Beaucoup de savants, comme Trissotin le reproche à Vadius, et comme on le reprochait à Ménage lui-même, avaient pillé les auteurs grecs et latins. […] Ce qu’il reproche à Molière, c’est d’avoir uniquement opposé Chrysale à Philaminte, comme le représentant, l’organe de l’opinion générale de l’époque sur le degré de savoir auquel il était permis aux femmes d’aspirer. […] Chrysale, qui aurait droit de donner des ordres à sa femme, n’ose pas même lui adresser des reproches, et il se sert d’un détour pour lui faire entendre quelques vérités qu’il ne peut plus retenir : Clitandre, qui voit le sort de son amour dépendre de cette femme impérieuse, ne saurait se faire violence au point d’admirer ses écrits, et il la blesse sensiblement en perçant devant elle, des traits les plus acérés, l’homme dont elle est enthousiasmée.
Ne sont-ce pas là des reproches tout personnels, des torts qui varient selon chaque individu ?
Ce soin ne l’a pas mis à l’abri du reproche.