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22. (1824) Notices des œuvres de Molière (VIII) : Le Bourgeois gentilhomme ; Psyché ; Les Fourberies de Scapin pp. 186-466

Ici, se présentent un maître de danse et un compositeur de musique : celui-ci, qu’un art plus noble devrait rendre plus sensible à l’amour de la gloire, confesse, avec une assez basse ingénuité, qu’il est mû principalement par l’amour de l’or ; et celui-là, plus jaloux de l’honneur, précisément parce qu’il a moins droit d’y prétendre, prouve que la vanité d’un artiste est toujours proportionnée à la futilité de l’art qu’il exerce. […] Plus loin, un simple artisan, un tailleur, parle avec le plus risible enthousiasme d’un métier que la fatuité met en crédit ; et ses ouvriers, qui n’ont pas encore le droit d’avoir de la vanité, rançonnent, en attendant, celle d’autrui, et se font payer par un fou des qualifications qu’un homme sensé punirait comme d’insultantes moqueries. […] Tels étaient, en effet, les esclaves de l’antiquité, êtres dégradés, avilis par leur condition, et plus encore peut-être par les passions de ceux dont ils étaient la propriété ; espèces d’animaux domestiques, à la fois insolents et craintifs, que pouvaient battre et tuer impunément de jeunes fils de famille, sur qui ils avaient eux-mêmes, comme gouverneurs, droit de surveillance et de répréhension ; obligés, par conséquent, de complaire à leurs penchants les plus vicieux, ou de subir leurs plus cruels traitements ; enfin, exposés sans cesse aux étrivières, aux fers, à la croix même, et ne pouvant presque jamais y échapper qu’en les méritant. Il n’en est pas, il n’en peut pas être ainsi dans nos sociétés modernes, où les maîtres n’ont pas droit de vie et de mort sur leurs serviteurs, et où ceux-ci peuvent rompre à chaque instant le contrat qui les assujettit à la volonté d’autrui. […] » Je n’entrerai point dans la discussion du passage entier ; je n’examinerai point si Boileau, dans ces mêmes vers où il paie un juste tribut de louange à Molière, n’exprime pas, avec trop de sévérité, avec trop peu de précision surtout, un blâme qu’il avait le droit de prononcer.

23. (1862) Corneille, Racine et Molière (Revue chrétienne) pp. 249-266

Rambert, si le poète a accepté le ciel en partage, il s’y est réservé le droit d’y introduire de nombreux amis. […] On s’étonne que la révolution française ait commencé par une déclaration des droits de l’homme ; mais ne voit-on pas que c’est là un des tics du génie français et qu’il n’a fait en ce cas que ce qu’il avait fait cent fois? Toutes les révolutions littéraires de la France ont eu pour point de départ une déclaration des droits et des devoirs du poète. […] Les rôles d’Henriette et de Clitandre, si charmants qu’ils soient, ne suffisent pas pour donner à cette œuvre toute l’élévation morale que l’on serait en droit d’attendre. […] Rambert9, la race latine, admirablement douée pour la politique et le droit, est médiocrement religieuse.

24. (1884) La Science du cœur humain, ou la Psychologie des sentiments et des passions, d’après les oeuvres de Molière pp. 5-136

Tels sont par conséquent les principes psychologiques les plus importants, d’où tant d’autres dérivent, que l’on est en droit de tirer de ses œuvres. […] Mais quand j’entends les critiques me parler de ces comédies comme utiles et instructives, j’ai bien le droit de demander : utiles à quoi ? […] Les sentiments qui l’inspirent parlent en ce moment plus haut dans son esprit que la voix de sa passion, ce qui n’avait pas lieu lorsqu’il désirait perdre son procès pour avoir le droit de haïr davantage le genre humain. […] Il y a des droits trop forts et trop inviolables, on ne les traverse point sans faire de l’éclat. » La Bruyère, pour prétendre mieux faire que Molière, n’a créé qu’un hypocrite mesquin qui ne vise qu’à boire et à manger aux dépens d’autrui, qu’à être parasite. […] Devenu amoureux, il ajoute foi aux absurdités que Dorine invente pour flatter son amour suranné, et il finit par croire que la vieillesse a plus de droits pour inspirer de l’amour que la jeunesse.

25. (1852) Molière — La Fontaine (Histoire de la littérature française, livre V, chap. I) pp. 333-352

Lorsque cette guerre d’intrigues, de chansons, de pamphlets, de perfidies réciproques a cessé, tous les acteurs après avoir changé de rôle plusieurs fois, n’ayant rien à s’envier ni à se reprocher en fait de versatilité et de ridicule, prennent bravement leur parti : les princes deviennent la décoration du trône et ses fidèles appuis ; le parlement, abandonnant toute ambition politique, se résigne à enregistrer docilement les édits de toute nature ; le clergé se retranche dans son domaine spirituel et fait retentir dans les temples la parole de Dieu, mêlant à ses leçons religieuses ses hommages au monarque, pendant que la nation sous l’aile de la royauté se fortifie par l’industrie et par la science, et prend peu à peu le sentiment de ses devoirs et de ses droits pour remplir les uns et faire valoir les autres quand son heure sera venue. […] Molière eut donc droit de contrôle sur les mœurs de la société, et même ses hardiesses étaient encouragées. […] Il ne montre pas un sens moins droit ni moins délicat lorsque, parlant en son propre nom2, il combat les scrupuleux qui proscrivent absolument la comédie. […] Et tous deux avaient raison ; tous deux suivent librement les modèles qu’ils rencontrent ; là où d’autres les ont précédés, ils créent ce qu’ils imitent ; ils emportent par droit de conquête ce qu’ils dérobent ; car ils impriment à tout ce qu’ils mettent en œuvre le cachet de leur originalité.

26. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Elle porte la blouse à faire peur, et la couronne à faire envie ; un pied sur le trône, un pied sur la barricade, elle règne par le droit de sa naissance, elle règne par le droit de sa conquête ! […] Il n’y a même que les plus grands moralistes qui aient le droit de tracer le portrait actuel de cette puissance et de cette force, au-delà de toutes les limites connues. […] Ô les cruels, qui s’écrient tout à coup, au milieu de l’applaudissement universel, et quand chacun lui bat des mains, qu’il faut mettre à la retraite cette femme ; qu’elle n’a pas le droit de rester plus longtemps la reine du théâtre, et enfin : qu’elle fasse place à d’autres ! […] Vous régnez du droit despotique de votre jeunesse et vous voilà, de prime abord, au niveau de toutes les adorations humaines, au-dessus de tous les blâmes ! […] Picard était dans le vrai, mademoiselle Mars était dans son droit.

27. (1800) De la comédie dans le siècle de Louis XIV (Lycée, t. II, chap. VI) pp. 204-293

Il en était jaloux comme s’il eût pu être son rival, et le critiquait comme s’il avait eu le droit d’être son juge. […] L’auteur donne au Misanthrope un personnage ridicule : oui ; mais ce ridicule porte-t-il sur ce qu’il est droit, sincère, homme de bien? […] Or, si tout excès est blâmable et dangereux, la comédie n’a-t-elle pas droit d’en montrer le vice et le danger? […] commencez-vous à croire qu’un homme droit, sincère, estimable, peut être fort ridicule? […] la raison, mon bon droit, l’équité.

28. (1858) Molière et l’idéal moderne (Revue française) pp. 230-

Quand l’homme comprendra-t-il que le bonheur n’est pas son droit seulement, mais son devoir ? […] Tartuffe, qui plus que personne aurait droit au confident et au monologue, puisqu’il ne s’ouvre à personne, Tartuffe ne s’adresse pas une fois la parole à lui-même. […] Parce que nous n’avons pas fait notre devoir, parce que l’art a été trahi, parce que les hommes qui se sont faits ses apôtres N’ont, pour servir sa cause et venger ses injures, Ni le cœur assez droit, ni les mains assez pures.

29. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XLIII. Du But Moral. Philosophie de Regnard comparée à celle de Moliere. » pp. 504-548

Il faut qu’un Poëte comique soit juste en tout, & qu’il satisfasse les cœurs droits de son assemblée, en traitant ses personnages avec la derniere équité. […] Démocrite est amant, & il est maltraité : n’a-t-on pas droit de s’attendre à des scenes qui, en nous faisant voir les combats que l’amour & la raison se livrent dans l’ame d’un Philosophe, nous peindront une passion par ses beaux & ses mauvais côtés ? […] La Médecine est déshonorée par les enfants de l’ignorance : sans dire précisément comme Sganarelle que le cœur est du côté droit & le foie du côté gauche, ils connoissent aussi peu la structure du corps humain que le Fagotier. […] Il n’y a pas un de tous ces gens-là qui, pour la moindre chose, ne soit capable de donner un soufflet au meilleur droit du monde. […] J’ai entendu dire au célebre Préville, au milieu du foyer, & devant cent personnes : « Je voudrois, pour tout au monde, qu’on n’eût pas enlevé au public le droit de siffler ».

30. (1881) Molière et le Misanthrope pp. 1-83

— Puis, si nous nous arrogeons le droit de reprendre autrui, la conséquence rigoureuse sera que nous confessions publiquement nous-mêmes nos travers et nos vices. […] Ce sont vingt mille francs qu’il m’en pourra coûter, Mais pour vingt mille francs j’aurai droit de pester Contre l’iniquité de la nature humaine Et de nourrir pour elle une immortelle haine ! […] Mais est-il aussi pleinement dans son droit contre Célimène ? […] Puis, il tranche du maître, comme si Célimène lui eut donné des droits, il lui fait des scènes devant le monde, il s’attaque à ses hôtes : Sortez quand vous voudrez, messieurs mais j’avertis Que je ne sors qu’après que vous serez sortis ! […] Aussi ne trouverai-je aucun sujet de plainte Si pour moi votre cœur avait parlé sans feinte, Et rejetant mes vœux dès le premier abord, Mon cœur n’aurait eu droit de s’en prendre qu’au sort.

31. (1730) Poquelin (Dictionnaire historique, 4e éd.) [graphies originales] pp. 787-790

On le destinoit au Barreau ; mais au sortir des Ecoles de Droit il choisit la profession de Comedien, par l’invincible penchant qu’il se sentoit pour la Comédie b, toute son étude & son application ne furent que pour le theatre. […] On ne peut contester légitimement aux bons Auteurs le droit de forger de nouveaux mots, puisque sans cela les Langues seroient toujours pauvres, stériles, languissantes. […] On doit donc généralement parlant demeurer d’accord, que Moliere avoit le droit d’enrichir de nouveaux termes les matieres du Théatre où il avoit acquis une si grande réputation : mais ce que l’on peut prétendre c’est qu’il abusoit de son droit ; car il faut se souvenir que ces sortes de matieres ne font point sentir à ceux qui les traitent la pauvreté d’une Langue, autant que la sentent les Ecrivains des matieres dogmatiques.

32. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XII. M. COLLÉ. » pp. 354-380

Desronais l’exhorte, si cela n’est pas, à faire valoir ses droits : elle déclare qu’elle n’en a point : elle apprend à son amant qu’elle est née avant le mariage de sa mere & de son pere, qui ne subit le joug de l’hymen que pour lui faire un sort. […] je craindrois d’épouser ce jeune Seigneur, cela ne feroit que lui donner le droit de me traiter encore plus mal, & qu’augmenter ma misere. […] Le bon Henri est enchanté de se voir traité comme un homme ordinaire : il aide à préparer tout ce qu’il faut pour le couvert ; il trouve Cateau gentille, lui dit des douceurs : il délibere à part, si pour abréger les formalités il lui dira ce qu’il est ; mais il rejette cette idée & respecte les droits de l’hospitalité. […] En la quittant, Gulphar alla tout droit Conter ce cas, le corner par la ville, Le publier, le prêcher sur les toits.

33. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

n’a-t-il pas le droit de lui dire : Si vous n’aviez pas appelé le danger, votre honneur n’eût jamais été menacé ? […] Il faut laisser aux pédants le soin de savoir si le divertissement était de bon aloi, ou si l’on n’avait pas le droit de se divertir. […] Quand ils sont chargés de représenter un personnage conçu à loisir, dessiné avec un soin scrupuleux, leur tâche devient plus difficile, et leurs droits sont rigoureusement limités. […] Ils s’abusent trop souvent sur l’étendue de leurs droits, et je ne crois pas inopportun d’appeler l’attention sur leur méprise.

34. (1877) Molière et Bourdaloue pp. 2-269

, n’alla plus droit son chemin et ne se sentit dans toute sa course moins ébranlé. […] Elle était libre parce que c’est son caractère et son droit, et parce qu’on la savait fidèle. […] J’en ai le droit et je choisis un autre juge. […] Elle n’a pas plus de goût que de droits à la dignité d’épouse. […] Elle a le droit d’être médiocre et de médiocrement aimer.

35. (1901) Molière moraliste pp. 3-32

Au nom de la nature, il proclame que la femme a droit au bonheur. […] Seule avec son mari, elle est cynique et se croit le droit de l’être. […] Est-ce à dire que la femme ait le droit de satisfaire à ses caprices, de vivre bien ou mal comme il lui plaît ? […] Argan, le malade imaginaire, préoccupé surtout de se choisir un gendre médecin, veut-il contraindre sa fille à épouser Thomas Diafoirus ou à s’enterrer dans un cloître, c’est Toinette qui lui fera la leçon ; car, dit-elle : « Quand un maître ne songe pas à ce qu’il fait, une servante bien sensée est en droit de le redresser » ; et cette familiarité, cette bonhomie avec laquelle Toinette rappelle Argan à lui-même, fait infiniment plus d’impression sur les auditeurs que les plus savants raisonnements du monde : Argan. […] Le père doit être maître chez lui, bannir du logis tout directeur qui voudrait prendre sa place, consulter sa femme en toutes choses sans la laisser empiéter sur ses droits.

36. (1847) Le Don Juan de Molière au Théâtre-Français (Revue des deux mondes) pp. 557-567

Quant à Guy Patin, dont on était en droit d’attendre sur ce sujet quelques boutades, en sa double qualité de médecin5 et de libre penseur, il n’en dit pas le moindre mot, et n’enregistre même pas les épigrammes de Sganarelle contre le vin émétique, et pourtant, six mois plus tard, il saluait de sa verve railleuse l’apparition de l’Amour médecin, qu’il nomme, par une singulière distraction, l’Amour malade. […] Le brave frère de Pierre Corneille, dont les vers, pendant tant d’années, avaient protégé et fait oublier la prose de Molière, cette prose exquise, quoi qu’aient dit à l’encontre Fénelon et La Bruyère9, est devenu, à son tour, victime d’un de ces revirements de l’opinion publique qui poussent le droit jusqu’à l’injustice. […] Je dis création, sans prétendre en aucune manière nier les droits de l’Espagne à l’invention de la légende, non plus que ceux de Tirso de Molina à l’honneur de l’avoir le premier réalisée dans un drame.

37. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

Quelle que fût la cause de l’indifférence du roi pour la reine, Anne n’eut pas moins le droit de s’en trouver offensée. […] Segrais, venu plus tard, en parle en ces termes : « Elle était, dit-il, bienfaisante et accueillante, et elle avait l’esprit droit et juste : c’est elle qui a corrigé les méchantes coutumes qu’il y avait avant elle.

38. (1686) MDXX. M. de Molière (Jugements des savants) « M. DXX. M. DE MOLIÈRE » pp. 110-125

Nous avons vu la plus célèbre des pièces de Molière ; mais ceux qui souhaiteront voir la plus scandaleuse, ou du moins la plus hardie, pourront jeter les yeux sur le Tartuffe, où il a prétendu comprendre dans la juridiction de son théâtre le droit qu’ont les ministres de l’Église de reprendre les hypocrites, et de déclamer contre la fausse dévotion. […] Les comédiens et les bouffons publics sont des personnes décriées de tout temps, et que l’Église même par voie de droit considère comme retranchées de son corps, parce qu’elle ne les croit jamais dans l’innocence.

39. (1884) Molière et les Allemands pp. 3-12

Je souhaite seulement que cette petite mésaventure profite à qui de droit. […] Mais n’ai-je pas le droit de dire qu’un étranger, un Allemand surtout, irrite en moi des fibres exceptionnellement sensibles, quand il veut m’apprendre, à propos de Molière, cette langue que nos ancêtres parlaient peut-être à Molière lui-même, et que le devoir m’oblige à savoir ?

40. (1816) Molière et les deux Thalies, dialogue en vers pp. 3-13

quoi, lorsqu’elle en fait autant ; Qu’elle usurpe mes droits… Molière. […] (À la vielle Thalie :) Pour vous, qui sur Molière aurez toujours des droits, Quand vous désirerez qu’avec vous je renoue, Vous oublierez Dorat, Marivaux et Lanoue.

41. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE V. L’Éducation des Femmes. » pp. 83-102

Et tout cela, avec quel charme, quelle mesure, quel talent féminin et inimitable pour ménager les gens, quelle constance dans le droit chemin du bon sens et du cœur ! […] Et comme si cette déclaration des droits de la femme n’avait pas assez de poids dans la bouche d’une suivante, Molière fait répéter le même plaidoyer par un homme sérieux, qui porte dans son discours l’élévation de son âme et l’autorité de son âge : Elle a quelque raison en ce qu’elle veut dire. […] C’est un spectacle moral, de montrer celte imprescriptible liberté de l’âme qui reste bonne, pure, intelligente, capable et désireuse du vrai et du bien, malgré les efforts les plus patients et les plus habiles ; qui, jusque dans la naïveté d’une extrême ignorance, garde une fleur de grâce native, marque ineffaçable de son origine et de ses droits ; en sorte qu’après la lecture de la lettre d’Agnès, il n’est personne qui ne dise avec Horace : Malgré les soins maudits d’un injuste pouvoir, Un plus beau naturel peut-il se faire voir ?

42. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Ce dont il s’agit seulement c’est de savoir si son mérite, quelque saillant qu’il soit, donne le droit aux critiques français de l’ériger en génie sans égal, et si cinq ou six pièces de Molière auxquelles leur genre de construction a valu le titre de régulières, les autorise à rabaisser, comme ils le font, tout ce que les autres nations ont produit de piquant et d’original en fait de comédies de caractère. […] L’intrigue amoureuse se dénoue avec facilité, le jeune homme qui a usurpé trop tôt les droits du mariage, se trouve être le neveu du vieux célibataire, et celui-ci de son propre gré se retire et lui cède la place. […] La haute comédie doit chercher à peindre des caractères, étranges sans doute, mais qui peuvent pourtant se rencontrer dans le cours ordinaire de la vie ; les exceptions, les bizarreries hors de la nature, appartiennent de droit à l’extravagance volontaire de la farce. […] D’après tout ce qui précède je me crois en droit d’affirmer, contre l’opinion dominante, que c’est dans le comique burlesque que Molière a le mieux réussi, et que son talent de même que son inclination était pour la farce : aussi a-t-il écrit des farces jusqu’à la fin de sa vie. […] L’opéra-comique, dont les prétentions sont plus modestes, répond bien mieux à ce que l’art a droit d’en attendre.

43. (1910) Rousseau contre Molière

La raison, mon bon droit, l’équité. […] L’on n’a de droits que sur celui qui s’est engagé à vous de son plein gré et le captif de guerre a toujours droit à l’évasion. […] Or, a-t-il le droit de le montrer renversé ainsi ? […] II pense que l’homme est bon et va tout droit au bien. […] En les traitant également, ne montrerait-elle pas qu’ils ont les mêmes droits sur elle ?

44. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VII.*. M. PIRON. » pp. 277-287

En jugeant les Auteurs morts nous n’avons fait, ou du moins nous sommes censés n’avoir fait, que recueillir les divers sentiments des hommes lettrés & des personnes de goût de toutes les nations : mais de quel droit nous aviserions-nous de prononcer sur les vivants, tandis que la renommée encore incertaine répete confusément ce que les partisans ou les ennemis de leur genre disent tour à tour sur leur compte. […] Quand nous avons cité quelques Auteurs vivants, dans les premiers volumes de cet ouvrage, nous avons toujours laissé au Lecteur le droit de prononcer, ou nous n’avons parlé que de choses peu conséquentes.

45. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Elle a l’esprit aimable et merveilleusement droit. […] Quand un auteur n’a pas déclaré lui-même son ouvrage allégorique, on n’est pas autorisé à le supposer tel, par quelques rapprochements arbitraires ; et même quand if donne son ouvrage pour allégorique, il a seul le droit d’en donner la clef.

46. (1850) Histoire de la littérature française. Tome IV, livre III, chapitre IX pp. 76-132

Le droit du poète sur ce langage ne va qu’à en ôter les fautes de français. […] Seulement, la plupart d’entre nous n’ont des défauts de Sganarelle que tout juste assez pour goûter la vérité de ce caractère, et ils ont assez de bonnes qualités pour avoir le droit d’applaudir à la façon dont Molière le punit. […] Sganarelle, Arnolphe, donnaient même à Molière le droit de faire finir leurs pupilles malhonnêtement, car l’égoïsme mérite l’ingratitude, et le désordre doit être le fruit d’une absurde contrainte. […] Elle a le ton de la femme du monde, avec une candeur qui témoigne qu’elle en a trouvé le secret dans un cœur honnête et dans un esprit droit. […] En outre, la convention y tenant plus de place que dans la comédie, le public se croit le droit d’y demander plus de changements.

47. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

comptez-vous, pour rien, Monsieur, le droit de me parler comme vous faites, répondait Lekain. — Lekain avait raison ! […] Même à Dorine je ne reconnais pas le droit de porter des socques. […] c’est ton droit de jeune homme, nouveau vêtu de la toge virile, donne ta jeunesse aux courtisanes ! […] À quoi je répondrai que noire auteur est de ceux qui ont tous les droits du monde, et à qui l’on permet bien des choses, parce qu’il use de son droit de la plus aimable et de la plus engageante façon. […] Lucinde n’a-t-elle pas bien le droit de dire à madame Araminte : Que venez-vous faire ici, je suis chez moi ?

48. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXII » pp. 222-236

J’étais plus en droit de le faire qu’un autre, parce qu’il est mon parent. […] Mademoiselle de Montpensier rapporte à la page déjà citée que peu après les propos dont elle réprimanda Montespan, « madame de Montausier étant dans un passage derrière la chambre de la reine, où l’on met ordinairement un flambeau en plein jour, elle vit une grande femme qui venait droit à elle, et qui, lorsqu’elle en fut proche, disparut à ses yeux, ce qui lui fit une si vive impression dans la tête et une si grande crainte qu’elle en tomba malade. » Le duc de Saint-Simon raconte ce fait singulier et mystérieux d’une manière plus significative.

49. (1836) Une étude sur Molière. Alceste et Célimène (La Revue de Bordeaux et Gironde unies) pp. 65-76

— Pour arriver à son but, il jette dans une société polie et corrompue, un homme au cœur droit et haut placé, aux allures brusques et franches; un homme qui fait contraste avec tout ce qui l’entoure : Alceste, le misantrope, en un mot. […] Ce n’est pas de la vertu chrétienne, modérée, passive ; c’est de la vertu d’application , de la vertu agissante, de la vertu française qui marche droit à l’obstacle, qui ne rêve pas, qui ne gémit pas, qui hait et qui attaque, c’est de la vertu révolutionnaire — Alceste est mal nommé le misantrope, il aime l’humanité, mais il abhorre les hommes vicieux ; il veut l’amélioration du genre humain ; mais il n’y songe pas pour les siècles futurs; il la veut immédiate.

50. (1717) Molière (Grand Dictionnaire historique, éd. 1717) [graphies originales] « article » p. 530

On l’avait élevé avec assez de soin, et il avait fait beaucoup de progrès dans les Belles Lettres et dans le Droit.

51. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. De l’Etat, de la Fortune, de l’Age, du Rang, du Nom des Personnages. » pp. 39-75

Sans cela, plus de combats dans l’esprit du Glorieux, entre sa vanité & la nécessité d’épouser un riche parti ; plus de morgue dans le financier qui, malgré sa roture, prétend, graces à sa fortune, avoir le droit de traiter de pair à compagnon un pauvre gentilhomme ; plus de scenes comiques & morales entre eux deux. […] Toutes nos pieces modernes semblent se disputer le droit de nous en fournir des exemples. […] Je consens, si l’on veut, que les soubrettes soient autorisées à dire des sottises à leur maîtresse : elles peuvent avoir été dans des confidences qui leur donnent ce droit, & qui ne permettent pas à la maîtresse de se plaindre, quelque grande dame qu’elle soit. […] Des vers adressés au sapajou d’une Duchesse donnent le droit d’assister à sa toilette.

52.

Je voudrais que l’Académie déniât publiquement à Fechter le droit de rendre Tartuffe inconséquent et peu soigneux de ses intérêts, qu’elle lui déniât le droit d’interpréter à son gré le vers d’Orgon : « Le pauvre homme ! […] La maison où naquit Molière, et que son père habita longtemps encore, était située rue Saint Honoré, au coin droit de la rue des Vieilles Etuves, aujourd’hui rue Sauval. […] « Jodelet est au second plan ; c’est un personnage effacé : cependant il se tient droit. […] Mais la langue française revendiqua bientôt ses droits, et, dès les premières années qui suivirent la mort du cardinal Mazarin, les représentations des italiens devinrent tout à fait bigarrées. […] Plus d’un théâtre allemand pourrait réclamer le titre de Maison de Molière, la plupart de nos acteurs et actrices ont des droits au titre honorifique de Comédiens et Comédiennes de Molière : avis à M. 

53. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE X. De la Diction. » pp. 178-203

Bon, ce coup-là sans doute a percé sa jaquette : Bon, le voilà perdu : bon, me voilà sauvé, Car de ce premier coup son œil droit est crevé. […] Aussi ne trouverois-je aucun sujet de plainte, Si pour moi votre bouche avoit parlé sans feinte ; Et, rejettant mes vœux dès le premier abord, Mon cœur n’auroit eu droit de s’en prendre qu’au sort. […] Ils semblent n’imaginer à la hâte une petite intrigue que pour avoir le droit de ramasser beaucoup de monde & de faire débiter sur les planches une diction qu’ils se piquent d’avoir à eux.

54. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE III. L’Honnête Homme. » pp. 42-64

A-t-on droit à ce titre quand on hait en gros le vice, quand on aime en gros la vertu, et quand on désire en général se défendre soi-même et protéger les siens contre la dégradation morale ? […] Ce sont vingt mille francs qu’il m’en pourra coûter : Mais, pour vingt mille francs, j’aurai droit de pester Contre l’iniquité de la nature humaine, Et de nourrir pour elle une. immortelle haine 145. […] Rousseau : « Vous ne sauriez me nier deux choses, l’une qu’Alceste est dans cette pièce un homme droit, sincère, estimable, un véritable homme de bien ; l’autre, que l’auteur lui donne un personnage ridicule.

55. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VI. Des Pieces à scenes détachées, dans lesquelles une Divinité préside. » pp. 61-74

Portez-moi ce corps fracassé Tout droit aux Incurables,  Lon la, Tout droit aux Incurables.

56. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVI. Des Caracteres nationaux. » pp. 268-283

Sur le terrein des sots j’arrondis l’héritage, Par droit de bienséance & droit de voisinage.

57. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

« Au contraire, Alceste, s’il n’est entré dans le salon de Célimène qu’en passant et par hasard, de quel droit, je vous prie, vient-il dire à chacun ces vérités inattendues ? De quel droit adresse-t-il, à ces futiles gentilshommes, des leçons que pas un ne lui demande ?

58. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VIII. » pp. 144-179

L’Ecole des Femmes, Comédie en vers & en cinq actes, comparée pour le fond & les détails avec l’Histoire de Nérin & de Jeanneton, Fable IV de la quatrieme Nuit du Seigneur Straparole ; le Maître en Droit, Conte de la Fontaine ; la Précaution inutile, Nouvelle de Scarron ; la Précaution inutile, ou l’Ecole des Cocus, Comédie de Dorimon. […] Le Maitre en Droit, Conte. […] Avint que le Légiste, Parmi ses écoliers, dont il avoit toujours    Longue liste, Eut un François moins propre à faire en Droit un cours    Qu’en Amours. […] Le Maître en Droit est peut-être plus plaisant qu’Arnolphe, en ce qu’il dicte lui-même à son rival le moyen dont il doit se servir pour séduire les Romaines, & qu’il l’avertit d’aller au but dès qu’il aura obtenu le premier rendez-vous.

59. (1892) Vie de J.-B. P. Molière : Histoire de son théâtre et de sa troupe pp. 2-405

Tel ou tel pays, telle ou telle époque n’ont pas le droit de se l’approprier. […] Après avoir étudié la philosophie, Jean-Baptiste Poquelin étudia le droit. […] Ses protestations sur son droit, sur son état, tout fut inutile.  […] Le chef de brigade avait droit à une de ces places. […] Le droit jugement de M.

60. (1879) Les comédiennes de Molière pp. 1-179

Si elles n’en ont pas on n’a garde de s’offenser des jolis scandales qu’elles mettent au monde ; on leur accorde le droit d’avoir un amant, deux amants, trois amants. […] Quelle jolie chanson il chanta à la Du Parc, qui sans doute lui avait payé son droit de seigneur, mais qui gardait toujours ses grands airs d’impeccable ! […] D’ailleurs, les femmes de Molière ne croyaient pas perdre leurs droits à la vertu pour avoir aimé Molière. […] D’abord, ne sachant que faire de bon, il avait étudié le droit ; mais, à peine avocat, devenu éperdument amoureux d’une comédienne à la mode, il s’était détourné de son chemin pour une bonne fortune. […] II y a loin de là, sans doute, à une avance de dix mille francs ; mais les rubans en broderie d’or et d’argent avaient pu le conduire tout droit à mille écus de points de Gènes.

61. (1735) Moliere (Supplément au Grand Dictionnaire historique) « MOLIERE, (Jean-Baptiste Poquelin) poëte comique, etc. » p. 82

On dit qu’il fut destiné par ses parents à l’étude du droit ; mais on le dit contre toutes preuves : il est sûr au contraire que Jean-Baptiste Poquelin, son père, et Anne Boutet, sa mere, lui donnerent une éducation conforme à leur état, et qu’ils n’eurent point d’autres vûes que celles de le voir de leur profession.

62. (1886) Molière et L’École des femmes pp. 1-47

Mais, dès qu’Arnolphe lui parle de l’épouser, elle se réveille, elle se révolte, elle rentre en quelque sorte dans son droit naturel, et ni les services qu’elle a reçus, ni les avantages qu’on lui promet, ni l’amour d’Arnolphe, ni ses prières, ni ses menaces, rien ne sera plus capable de l’émouvoir et de la ramener. […] Il avait une enfant entre les mains ; il l’a élevée dans une ignorance absurde, dans une innocence coupable ; il lui a refusé l’éducation qui est nécessaire à une femme, qu’elle était en droit de recevoir et qu’il avait le devoir de lui donner ; qu’il ne s’en prenne qu’à lui si Agnès s’est trouvée sans résistance, sans un appui intérieur, sans une force morale et intellectuelle pour se défendre de la première attaque, du premier jeune homme qui a passé sous ses yeux. […] Cette concession une fois faite, faite avec équité et bienveillance, et pour montrer qu’on en usait généreusement avec l’auteur, on n’en avait que plus le droit de le juger sévèrement.

63. (1769) Éloge de Molière pp. 1-35

Tant qu’il vécut, on vit dans sa personne un exemple frappant de la bizarrerie de nos usages : on vit un Citoyen vertueux, réformateur de sa Patrie, désavoué par sa Patrie, et privé des droits de Citoyen ; l’honneur véritable séparé de tous les honneurs de convention ; le génie dans l’avilissement, et l’infamie associée à la gloire : mélange inexplicable, à qui ne connaîtrait point nos contradictions, à qui ne saurait point que le Théâtre respecté chez les Grecs, avili chez les Romains, ressuscité dans les États du Souverain Pontifea, redevable de la première Tragédie à un Archevêqueb, de la première Comédie à un Cardinalc, protégé en France par deux Cardinauxd, y fut à la fois anathématisé dans les Chaires, autorisé par un Privilège du Roi, et proscrit dans les Tribunaux. […] Quand les Poètes Latins peignirent ces mœurs, ils renoncèrent au droit qui fit depuis la gloire de Molière, celui d’être les réformateurs de leurs concitoyens. […] Mais combien de reproches ne s’est-il point attirés, en se proposant ce but si utile, le seul convenable à un Poète comique, qui n’a pas, comme de froids Moralistes, le droit d’ennuyer les hommes, et qui ne prend sa mission que dans l’art de plaire ?

64. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE XI. De la Religion. Principe et Sanction de la Morale de Molière. » pp. 217-240

Je veux frapper des mains, hausser le bras, lever les yeux eu ciel, baisser la tête, remuer les pieds, aller à droit, à gauche, en avant, en arrière, tourner…748. » Le comique reprend encore le dessus ; mais Fénelon a-t-il mieux dit749 ? […] Pour trouver des expressions qui en fassent sentir la haute moralité, on ne peut que citer Molière lui-même, quand il fut obligé d’implorer la puissance royale pour obtenir le droit de dire tout haut qu’un hypocrite est un scélérat et qu’un tartuffe est un sacrilège : J’ai mis tout l’art et tous les soins qu’il m’a été possible pour bien distinguer le personnage de l’hypocrite d’avec celui du vrai dévot ; j’ai employé pour cela deux actes entiers à préparer la venue de mon scélérat ; il ne tient pas un seul moment l’auditeur en balance ; on le connaît d’abord aux marques que je lui donne ; et d’un bout à l’autre il ne dit pas un mot, il ne fait pas une action qui ne peigne aux spectateurs le caractère d’un méchant homme, et ne fasse éclater celui du véritable homme de bien que je lui oppose772. […] On pouvait donc légalement accuser Molière de sortir du profane, et le premier président de Lamoignon était fondé en droit à interdire la représentation du Tartuffe, comme il le fit le 6 août 1667.

65. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Qui aura le droit d’accuser ici celle qu’ils ont déclarée irréprochable ? […] C’était avoir acquis de grands droits à la reconnaissance d’une bonne Espagnole140 ». […] J’écris pour les historiens, et je me crois plus obligé à une exactitude scrupuleuse que si j’étais historien moi-même ; or il est de fait que je n’ai trouvé aucun document historique sur le personnel de madame de Maintenon à l’âge de quarante-cinq ans ; mais comme j’aime autant qu’un autre à me la figurer agréable, j’emprunterai ici la peinture que madame de Genlis en a faite : j’aimerais à la croire vraie, quoique je sois eu droit de la regarder comme un ouvrage d’imagination.

66. (1818) Épître à Molière pp. 6-18

Quelquefois, il est vrai, ton austère férule En passant près de lui frappa le ridicule, Dont la vie éphémère, en son obscurité, Eût échappé, sans elle, à la postérité : Mais plus souvent, aussi, ta généreuse audace Brave le vice altier, l’attaque et le terrasse, Et, marchant droit au but, sans le laisser en paix, Torture le méchant qui ne change jamais. […] Le droit d’impertinence est dans leur apanage ; Ils en usent, Dieu sait !

67. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Cette fois ce n’était pas la jalousie seulement qui faisait le tourment de la reine, c’était une fort légitime inquiétude sur son sort, sur le sort de son fils ; et comme Henri IV avait répudié Marguerite de Valois pour l’épouser, elle craignait d’être répudiée à son tour pour faire place à la princesse de Condé : ainsi, au supplice de l’amour négligé se joignaient le tourment de l’orgueil profondément blessé, le sentiment des droits les plus sacrés, outrageusement menacés, un esprit de vengeance sans retenue. […] Quelle que soit la corruption générale d’une grande nation, même d’une grande cour, il s’y trouve toujours quelques familles où se conserve l’honnêteté des mœurs, où la raison, le droit sens, la bienséance exercent leur légitime empire, où les bons principes sont héréditaires, comme certaines conformations : ici est d’ordinaire le privilège des familles nombreuses qui s’entretiennent, par les sympathies mutuelles de leurs membres, dans les traditions de vertus où elles sont nées.

68. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [56, p. 89-93] »

Il joua la cour, le peuple et la noblesse, les ridicules et les vices, sans que personne eût droit de s’en offenser.

69. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Louis Veuillot, parlant de Molière et de sa vie privée, n’a le droit d’ignorer ni les travaux de M.  […] Il raisonne toujours, et très droit, et très net, et va d’un bond aux dernières conséquences. […] Elle a l’esprit plus droit qu’Orgon ; cela est possible, cela est même certain. […] Tous trois sortent, et les deux jeunes gens, comme il serait de droit, vont prendre le pas devant. […] — C’est votre droit, mon ami, vous avez en effet toujours le droit de ne pas admettre une convention ; tout ce qui en résulte, c’est qu’il n’y a plus de pièce.

70. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [74, p. 108-114] »

On ne vous consulte pas sur cela, répondit Molière à Chapelle*. « Représentez-vous, ajouta-t-il, en s’adressant au jeune homme, la peine que nous avons ; incommodés ou non, il faut être prêts à marcher au premier ordre, et à donner du plaisir quand nous sommes souvent accablés de chagrin ; à souffrir les grossièretés de la plupart des gens avec qui nous avons à vivre, et à captiver les bonnes grâces d’un public qui est en droit de nous gourmander261 pour son argent.

71. (1824) Notice sur le Tartuffe pp. 91-146

De son côté Molière, observateur profond, avait jugé qu’il avait besoin de flatter son maître pour avoir le droit de ne pas flatter son siècle : sous une minorité orageuse, il n’eût pas été libre d’exprimer une seule vérité, parce que chaque faction régnait à son tour, et qu’elles étaient trop éphémères ou trop faibles pour supporter le ridicule. […] Molière, qui savait être courtisan pour avoir le droit de tout dire, avait d’ailleurs flatté l’amour-propre du prince de la manière la plus habile, en lui empruntant une des meilleures scènes de son ouvrage. […] Lamoignon était d’ailleurs le modèle des magistrats, le protecteur des lettres ; ami de Boileau, il avait droit aux respects de Molière, et si le premier président défendit le Tartuffe, il céda moins sans doute à sa conviction personnelle qu’à ces cris impérieux d’une cabale que les hommes publics sont trop souvent exposés à prendre pour l’expression de l’opinion générale. […] Il ne se joué pas à la ligne directe, et il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent à la fois une fille à établir et un fils à pourvoir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables ; on ne les traverse point sans faire d’éclat, et il t’appréhende, sans qu’une pareille entreprise ne vienne aux oreilles du prince à qui il dérobe sa marche, par la crainte qu’il a d’être découvert et de paraître ce qu’il est. » Sans doute les faux dévots ont plus beau jeu chez un célibataire que chez un père de famille ; on calomnie, on dépouille plus facilement des collatéraux que des enfants ; mais le vrai tour de force de Tartuffe est de faire déshériter le fils même de la maison ; et si l’auteur nous prouve que le fanatisme peut aveugler un père jusqu’à lui faire oublier son propre sang pour un misérable fardé d’une fausse dévotion, ne fait-il pas voir à plus forte raison l’empire que de pieux imposteurs peuvent exercer sur des hommes qui ne tiennent pas au lieu puissant de la famille ? […] On croirait que, satisfait de rompre le mariage de Valère avec elle, il se réserve seulement de l’épouser plus tard, afin de dominer un jour la maison comme gendre après y avoir joui d’abord de tous les droits du maître.

72. (1732) Moliere (Grand Dictionnaire historique, éd. 1732) [graphies originales] « article » pp. 45-46

Après avoir fait ses humanités au college de Clermont à Paris sous les Jesuites, il fut destiné à l’étude du droit, qu’il quitta bientôt, pour suivre le penchant qui l’entraînoit sur le theâtre.

73. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Pour les bien juger, voyez-les l’un et l’autre dans le dernier asile des vivants et des morts, jusqu’alors respecté par les poètes dramatiques ; voyez-les, ces chevaliers errants de la fantaisie, entrer dans le cimetière, un lieu sacré, que Molière et Shakespeare ont envahi par droit de conquête et par droit de naissance. […] les droits de l’histoire, dans ce royaume de France, livré à toutes les corruptions de l’esprit et des sens. […] L’art avant tout, pour les hommes athéniens, et quand enfin les devoirs et les droits de l’art étaient sauvés, venait la leçon qui n’était que plus profitable pour être assaisonnée de gaieté, de bienveillance, de grâce, d’enjouement. […] Alors de quel droit nous fâcher contre la tragédie anglaise, et même de quel droit nous en moquer ? […] nous avons renoncé à tant de droits qu’il nous est bien permis d’en usurper quelques-uns.

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