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55. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Molière avait bien compris que le moment ne pouvait pas être mieux choisi pour demander cette grande permission à la majesté royale, d’attaquer directement et de front, les faux dévots et leur sacristie. […] Cet homme, qui prenait au sérieux toutes choses, demanda de quoi il s’agissait ; et quand on le lui eut dit, il jeta sur toute cette cohue dévote l’ironie, le sarcasme, le ridicule, la honte enfin et l’épouvante. […] Aussitôt, en l’absence de ces jeunes fous qui se battaient là-bas de si bon cœur, le vieux parti royaliste et dévot se réveille, il s’oppose à ce qu’on joue ce drame que déjà il sait par cœur. […] Si les dévots de ce temps-là, si l’évêque d’Autun (l’abbé de la Roquette) avaient pu tout prévoir, la coquetterie de cette femme les eût sauvés. […] À aucun prix elle n’eût consenti à se façonner aux exigences dévotes de sa belle-mère, madame Pernelle, aux excès religieux de son mari, M. 

56. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXIX. Des Caracteres propres aux personnes d’un certain rang seulement. » pp. 312-327

Il est donc plus dévot que moi.

57. (1843) Le monument de Molière précédé de l’Histoire du monument élevé à Molière par M. Aimé Martin pp. 5-33

Longtemps ce grand dessein a mûri dans sa tête ; Rien n’échappe au penseur, tout émeut le poète ; Pour les combattre un jour son âme a médité Les fatales erreurs de la société : Il voit le faux Dévot, enseignant l’imposture, Au nom de Dieu prêcher une morale impure ; Le Philosophe, an lieu d’éclairer le savoir, En faire un puits obscur où l’on ne peut rien voir ; Courtisan ridicule et chargé de bassesse, Il voit le Gentilhomme avilir la noblesse. […] Son âme remontait à peine vers les cieux, Que tous ses ennemis, que tous les envieux Se lèvent à la fois ; une implacable haine, La haine des dévots, contre lui se déchaîne : « Il a pu nous railler et nous braver vivant, « Il n’est plus, disent-ils, jetons sa cendre au vent ; « Que l’impie au saint lieu n’ait pas de sépulture ! 

58. (1765) Molière dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (compilation) pp. 2668-16723

Ce qui manque à la plûpart des peintres de caractere, & ce que Moliere, ce grand modele en tout genre, possédoit éminemment ; c’est ce coup d’oeil philosophique, qui saisit non-seulement les extrèmes, mais le milieu des choses : entre l’hypocrite scélérat, & le dévot crédule, on voit l’homme de bien qui démasque la scélératesse de l’un, & qui plaint la crédulité de l’autre. […] Chez nos dévots ayeux le théatre abhorré Fut long-tems dans la France un plaisir ignoré. […] parce qu’un fripon vous dupe avec audace, Sous le pompeux éclat d’une austere grimace, Vous voulez que partout on soit fait comme lui, Et qu’aucun vrai dévot ne se trouve aujourd’hui ?

59. (1852) Légendes françaises : Molière pp. 6-180

PRÉFACE Le faux dévot serait plein d’espérances ! […] L’École des Femmes fit scandale ; les dévots se plaignirent : le sermon sur l’enfer et les chaudières bouillantes les révoltait. […] Les dévots alarmés remuaient, prêchaient: il fallait brûler Molière, faute de quoi la famine, la peste, le déluge... […] Jamais il ne s’était vu un tel spectacle : le comédien prenant contre les dévots la défense de la vraie piété, flétrissant l’hypocrisie avec les pères de la Foi, avec les apôtres, et déclarant aux ténébreux docteurs qu’il ignore leur art de confondre ensemble le bien et le mal. […] La dévotion est si raisonnable dans la bouche de Cléante, qu’elle me ferait renoncer à toute ma philosophie, et les faux dévots sont si bien peints que la honte de leur peinture les fera renoncer à l’hypocrisie.

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