., mais il excellait encore dans les rôles de haut comique, tels que ceux d’Arnolphe, d’Orgon et d’Harpagon ; c’est alors que par la vérité des sentiments, par l’intelligence des expressions, et par toutes les finesses de l’art, il séduisait les spectateurs au point qu’ils ne distinguaient plus le personnage représenté dans le comédien qui le représentait ; aussi se chargeait-il toujours des rôles les plus longs et les plus difficiles ; il s’était encore réservé l’emploi d’orateur de sa troupea. […] À propos d’ébat théâtral : Toujours dans le Palais-Royal, Aussi le Tartuffe se joue : Où son auteur1, je vous l’avoue, Sous le nom de Monsieur Orgon, Amasse pécune et renom. […] Ces deux autres, ou Dieu me damne, Damis 6, et sa sœur Marianne 7, Qui font les deux enfants d’Orgon, Y font merveilles tout de bon. […] La raillerie fine de Dorine, dans la scène avec son maître, nous découvre Orgon tout entier, et nous prépare à reconnaître Tartuffe dans le portrait de l’hypocrite, que Cléante oppose à celui du vrai dévot. […] L’entêtement d’Orgon, qui s’accroît à mesure qu’on cherche à le détruire, donne lieu à cette scène si singulière et si admirable du IVe acte, que la nécessité de démasquer un vice aussi abominable que l’hypocrisie rendait indispensable.
Elmire veut savoir de Tartufe si Orgon a effectivement projetté de lui donner Marianne.
La scene dans laquelle Orgon, caché sous une table, écoute la déclaration de Tartufe, est un chef-d’œuvre ; elle en deviendra un d’impertinence si vous la placez dans une tragédie.
À ce dernier genre de comique, le plus fin et le plus spirituel de tous, appartient sans doute la manière dont Oronte amène son sonnet, celle dont Orgon écoute les nouvelles qu’on lui donne de la santé de sa femme et de celle de Tartuffe, et la dispute qui s’élève entre Vadius et Trissotin ; mais ce qui s’en éloigne entièrement, ce sont les discussions sans lin d’Alceste et de Philinte sur la conduite à tenir au milieu de la fausseté et de la corruption du monde. […] On convient généralement que le dénouement en est mauvais, parce qu’il est amené par un ressort étranger à la pièce ; il est encore blâmable sous un autre rapport, c’est que la situation de cet Orgon, sur le point d’être expulsé de chez lui et jeté en prison, fait naître l’idée d’un danger réel et bien différent de l’embarras ridicule où le poète comique aurait eu le droit de le plonger, pour le punir de son aveugle confiance.
Il règne, avec ses ministres Laurent et Loyal 87, sur le peuple naïf des Orgon et des Pernelle ; il faut qu’on cède à son infernal génie, que les filles viennent lui immoler leurs grâces pudiques, et les femmes leur chasteté conjugale.