Ainsi Armande dit à Henriette : Songez à prendre goût des plus nobles plaisirs, Et, traitant de mépris les sens et la matière, A l’esprit, comme nous, donnez-vous tout entière… Mariez-vous, ma sœur, à la philosophie. […] Sans doute il faut savoir gré à Molière de faire parler Alceste avec tant de chaleur et d’éloquence contre la brigue et l’imposture, et de mettre dans sa bouche de si nobles sentiments si noblement exprimés : Je veux qu’on soit sincère et qu’en homme de cœur On ne lâche aucun mot qui ne parte du cœur… Ce me sont de mortelles blessures De voir qu’avec le vice on garde des mesures. […] Qui vaut le mieux de cette noble et vertueuse indignation de ces haines vigoureuses d’Alceste contre les méchants, ou de cette indifférence morale de Philinte que Molière nous représente comme le plus haut degré de la sagesse ?
Je ris, quand je le vois, par ses boutades, servir de risée à tout un salon de gens raffinés qui ne le valent pas130 ; je ris, quand je le vois offrir sa main, sa noble main, à une femme qui se joue de lui visiblement131, et refuser celle qu’une digne fille lui offre presque, vaincue par tant de vertu132 ; je ris, quand je lui vois prendre sa belle résolution De fuir en un désert l’approche des humains133. […] Enfin, surtout, il a tort, et ses travers, jusqu’ici excusables, nobles, héroïques même143, deviennent une faute véritable quand, pour tous les ridicules, tous les vices qu’il voit autour de lui, il conçoit contre l’humanité cette haine violente qu’il ne cesse d’exprimer depuis la première scène jusqu’à la dernière : Tous les hommes me sont à tel point odieux Que je serois fâché d’être sage à leurs yeux. […] Enfin vous. avez. su, en nous peignant ces infirmités du sage, et en nous faisant rire de ses travers, nous inspirer ; pour lui pour sa vertu,, un sentiment de respect que ne peut diminuer tout le rire excité par ses boutades ; et, à la fin de votre pièce, notre opinion sur lui reste celle qui était la vôtre, et que vous avez mise dans la bouche de la sincère Eliante : Dans. ses façons d’agir il est fort singulier ; Mais j’en fais, je l’avoue, un cas particulier ; Et la sincérité dont son âme se pique À quelque chose en soi.de noble et d’héroïque. […] L’honnête homme doit être maître de lui cette noble modération est une vertu capitale dont rien ne le peut dispenser.
Tous ces beaux et nobles jeunes gens ne seront-ils donc jamais pères un jour ? […] Croyez-vous qu’il suffise d’en porter le nom et les armes, et que ce nous soit une gloire d’être sortis d’un sang noble, lorsque nous vivons en infâmes ? […] Molière y alla sans marchander ; il mit sur la scène un gueux plus noble de cœur qu’un gentilhomme716 ; il bafoua les bourgeois qui croient que c’est une belle chose de devenir gentilhomme ; les Arnolphe qui se donnent le nom de Monsieur de la Souche ; les Gros-Pierre qui s’appellent pompeusement Monsieur de l’Isle 717 ; les George Dandin qui, par un allongement, reçoivent le titre de Monsieur de la Dandinière 718 ; on n’oubliera jamais l’illustre maison de Sotenville, dans laquelle « Bertrand de Sotenville fut si considéré en son temps que d’avoir permission de vendre tout son bien pour le voyage d’outre-mer719, » ni celle de la Prudoterie « où le ventre anoblit720 ; » on rira éternellement des manies de dignité et de vanité qui constituent toute la noblesse des Pourceaugnac et des Escarbagnas ; enfin le type du marquis, produit par Molière et prodigué dans toutes ses pièces, est resté et restera comme l’un des meilleurs personnages du théâtre comique. […] Le noble n’a pas plus le droit d’être oisif que le bourgeois, vaniteux, ou le prolétaire, paresseux.
L’usage d’adopter un nom étranger a duré longtemps au théâtre ; il est presque entièrement tombé en désuétude, depuis qu’on est assez raisonnable pour sentir qu’il ne peut y avoir de honte à présenter, sous les costumes de divers personnages, d’utiles leçons, de sages conseils, un noble divertissement. […] Jamais, depuis le père du Menteur, Thalie n’avait parlé un langage aussi éloquent, aussi noble ; jamais on n’avait vu des passions contraster plus habilement, ni des intérêts se heurter d’une manière plus dramatique. […] Tenez donc, voici quatre pistoles que vous lui donnerez pour moi , répliqua le noble écrivain, et en voici vingt autres que vous lui donnerez pour vous. […] La Grange a toujours joué au gré du public ; et, quoique parvenu à un certain âge, il remplissait les rôles d’amoureux d’une manière aussi noble qu’aisée. […] Quoi qu’il en soit de cette histoire, mademoiselle de Brie était une fort bonne comédienne, grande, bien faite et extrêmement jolie ; elle conserva longtemps un air de jeunesse ; elle jouait dans le grand tragique, et le noble comique.
Tous ces entremetteurs infâmes, tous ces valets, âmes damnées du vice et de la débauche, travaillent cependant à des causes justes, nobles, touchantes ; ils sont tendres, compatissants, désintéressés ; ils ont un esprit qui touche au génie : cela est faux dans la réalité. […] Dans l’Avare, il y a une invraisemblance qui est une faute ; c’est que Valère, présenté à la fin sous les plus nobles couleurs264, et montré dès le début comme plein des plus nobles sentiments265, puisse allier cette hauteur d’âme avec le misérable rôle auquel il s’est soumis par choix : entrer par un mensonge dans une maison, et, contre son propre cœur, y maltraiter volontairement, malgré toute raison, de pauvres domestiques qui n’en peuvent mais266, c’est incompatible avec tant de constance, d’esprit et de cœur.
Au Cid persécuté, Cinna doit la naissance, Et peut-être ta plume aux Censeurs de Syrrhus Doit les plus nobles traits dont tu peignis Burrhus. […] Et qui voyant un jour la douleur vertueuse De Phèdre malgré soi perfide, incestueuse, D’un si noble travail justement étonné, Ne bénira d’abord le siècle fortuné Qui rendu plus fameux par tes illustres veilles Vit naître sous ta main ces pompeuses merveilles ?
Il prétend que le mot âne était très noble en grec331. […] Un âne traversant un champ ne le rendait pas sérieux comme Boileau ; il ne se préoccupait pas pour Homère de la nécessité que ce mot fût très noble en grec. […] Déjà l’on commence à préférer des plaisanteries de Polichinelle à l’éloquence la plus noble et la plus sage. […] Deuxième exemple. — « Dans l’Iphigénie de Racine, a dit Voltaire, tout est noble. […] Naguère le cardinal de Richelieu avait fait prier madame de Rambouillet, en amie, de lui donner avis de ceux qui parlaient de lui dans son salon, et la noble dame avait refusé, avec une fierté polie, de remplir ce rôle d’espion.
Comment, d’ailleurs, ne pas se sentir attiré vers ce théâtre où les hommes lui apparaissaient dans un si noble idéal par les pièces de M. […] Et n’était-ce pas son grand-père lui-même qui l’avait induit, encouragé à se plaire en ce noble métier, comme disait M. […] D’ailleurs, il commençait à être bruit de la troupe ambulante, Molière surtout attirait l’attention par son esprit, par son noble savoir-vivre et par sa probité. […] Établi dans sa nouvelle salle, il semble qu’il ait voulu s’élever à un ton plus noble ; au mois de février 1661. […] Il ne l’instruisait pas seulement dans son art ; il cherchait à développer en lui un caractère noble, généreux et vrai.
Notre homme, enrichi, veut prendre femme, et encore veut-il que sa femme soit noble. […] Le noble ainsi ruiné par l’oisiveté, faisait de son fils un escroc et vendait sa fille à un bourgeois enrichi. […] De là tout l’intérêt que vous portez à cette noble misère. […] Noble et tendre faiblesse ! […] Il n’a imité ni l’ingénieux, ni le fini, ni le noble d’aucun auteur ancien ou moderne ; il comprenait que chaque époque a sa finesse, son génie et sa noblesse qui lui sont propres.
On souffrait à l’idée de revêtir ses pensées d’expressions nobles et vigoureuses, ou de voir quelqu’un pénétré des sentiments d’une personne. […] Il existait un grand nombre de lettres de Sévigné, modèles de style épistolaire ; on en avait de son cousin Bussy-Rabutin, homme de mauvais cœur, de mauvais esprit, mais d’assez bon goût ; En morale, on avait les nobles écrits de Balzac ; En métaphysique, la méthode de Descartes ; En didactique et en polémique, les Lettres provinciales ; En critique, plusieurs bons écrits de Port Royal, la critique du Cid ; En poésie, les belles odes de Malherbe, quelques ouvrages de Racan, de Segrais, de Benserade ; les chefs-d’œuvre de Corneille, Le Cid, Les Horaces, Cinna, Polyeucte, La Mort de Pompée, Le Menteur, Rodogune.
« Le plus beau quartier de la ville de Coquetterie est la grande place, qu’on peut dire vraiment royale 44… Elle est environnée d’une infinité de réduits, où se tiennent les plus notables assemblées de coquetterie, et qui sont autant de temples magnifiques consacrés aux nouvelles divinités du pays ; car, au milieu d’un grand nombre de portiques, vestibules, galeries, cellules et cabinets richement ornés, on trouve toujours un lieu respecté comme un sanctuaire, où sur un autel fait à la façon de ces lits sacrés des dieux du paganisme, on trouve une dame exposée aux yeux du public, quelquefois belle et toujours parée ; quelquefois noble et toujours vaine ; quelquefois sage et toujours suffisante ; et là, viennent à ses pieds les plus illustres de cette cour pour y brûler leur encens, offrir leurs vœux et solliciter la faveur envers l’amour coquet pour en obtenir l’entrée du palais de bonnes fortunes. » On lit dans un autre passage, que dans le royaume, « il n’est pas défendu aux belles de garder le lit, pourvu que ce soit pour tenir ruelle plus à son aise, diversifier son jeu, ou d’autres intérêts que l’expérience seule peut apprendre45 ». […] Point de roturière, dit Somaise, dans L’Empire des Précieuses, les sciences et la galanterie n’ayant rien que d’illustre et de noble. […] Les vers les plus nobles, les plus doux, les plus sublimes de la langue, se terminent par des monosyllabes formés de cette diphtongue. […] Au fond, mademoiselle de Scudéry avait de l’esprit, de l’imagination, une âme délicate et noble. […] Sa lettre à l’évêque de Vence sur la détention du prince est intéressante et noble.
c’était l’heure où le cœur lui battait d’un noble amour pour mademoiselle de La Vallière, où il s’assimilait heureusement l’intelligence des grands hommes de son temps. […] Dans cette noble fierté, ou reconnaît l’auteur du Misanthrope. […] Il en est de même des nobles qualités d’Alceste, elles se feront jour au travers de sa mauvaise humeur. […] Ce n’est plus la peinture générale des vices et des défauts de l’espèce humaine, c’est le tableau des abus et des torts de la société, et de la société française flagellée dans la personne du noble comte Almaviva. […] Il descendait d’une famille noble dont un des membres avait été honoré en Angleterre de l’ordre delà Jarretière.
« Il n’était (Molière) ni trop gras, ni trop maigre ; il avait la taille plus grande que petite, le port noble, la jambe belle ; il marchait gravement, avait l’air très-sérieux, le nez gros, la bouche grande, les lèvres épaisses, le teint brun, les sourcils noirs et forts, et les divers mouvements qu’il leur donnait lui rendaient la physionomie extrêmement comique.
Don Juan eût fait fureur aux soupers du régent, et les débauchés du Palais-Royal eussent admiré et copié, comme leur maître à tous, ce vicieux si élégant, si poli, si froid, si égoïste, si incrédule ; il a au suprême degré une noble qualité, la bravoure audacieuse, ‘ qui reste encore debout dans les âmes françaises les plus dévastées par le vice ; et il est bien près de sa fin, quand cette dernière trace de la vertu oubliée, le point d’honneur, disparaît après tout le reste. […] Le don Juan qui débute sur la scène par enlever done Elvire à un couvent44, et qui se lasse si vite du touchant amour qu’il lui inspire45, passe aussitôt, de cette affection où il pouvait y avoir quelque chose de noble et de vrai, à la grossière passion qui lui fait séduire deux pauvres paysannes a la fois46, au moment même où il a failli périr en voulant enlever une jeune mariée47. […] Sa puissance arrive à faire trembler les plus nobles, et arrête l’indignation dans leur bouche effrayée89.
ne soit pas une des meilleures du côté de l’intrigue, quoiqu’elle ne soit pas une des plus nobles, elle doit tenir un rang considérable parmi les chef-d’œuvres de Moliere. […] On n’étoit pas dans l’habitude de porter au spectacle de la comédie, ce degré d’attention nécessaire pour saisir les détails & les rapports délicats que l’on a depuis admirés dans cette piéce ; le comique noble qui y régne ne fut point senti ; enfin, malgré la pureté & l’élégance du stile, elle fut reçûë froidement. […] Les intermédes se ressentent du ton peu noble de toute la piéce. […] Il n’étoit ni trop gras, ni trop maigre ; il avoit la taille plus grande que petite, le port noble, la jambe belle ; il marchoit gravement, avoit l’air très-sérieux, le néz gros, la bouche grande, les lévres épaisses, le teint brun, les sourcils noirs & forts, & les divers mouvemens qu’il leur donnoit lui rendoient la phisionomie extrêmement comique. […] L’art caché sous des graces simples & naïves, n’y employe que des expressions claires & élégantes, des pensées justes & peu recherchées, une plaisanterie noble & ingénieuse pour peindre & pour développer les replis les plus secrets du cœur humain.
.–1688) : d’une très noble et illustre famille, dans laquelle il s’est distingué d’une manière particulière par sa bravoure et par son esprit.
Il faisait de son bien un usage noble et sage ; il recevait chez lui des hommes de la meilleure compagnie, les Chapelles*, les Jonsac, les Desbarreaux, et qui joignirent la volupté à la philosophie. […] Ton peu noble, mais du comique.
Dans tout cœur d’homme, grand et noble, il y a du mécontentement du présent, un penchant irrésistible vers l’avenir, un besoin constant d’innovations. […] Supérieur au reste de la société, il aperçoit un but grand et noble qu’elle ne voit pas ; mais il ne peut se diriger vers ce but d’un pas ferme et constant, arrêté, tiraillé qu’il est sans cesse par la foule qui l’entoure et qu’il doit traverser.
Remontons plus haut, & faisons la guerre au noble personnage de Madame Grognac dans le Distrait de Regnard, qui ne me paroît pas dignement soutenir sa qualité. Il est clair que Regnard a voulu faire de Madame Grognac une femme noble & riche. […] Rodillard de Choupille, Noble au bec de corbin, grand gruyer de Berri, Et qui fut votre pere, étant bien mon mari, M’enleva malgré moi ; sans cela, de ma vie, De me donner un maître il ne m’eût pris envie. […] Des malheurs imprévus ont causé ma ruine, Sans me faire oublier une noble origine : Mais vous, vous avez fait, devenu financier, D’un pauvre gentilhomme, un riche roturier.
La pièce est écrite de manière à faire voir que Campistron, qui n’a jamais pu s’élever jusqu’au style tragique, pouvait plus aisément s’approcher de la facilité élégante qui convient à la comédie noble. […] Mais, à cet amour près, son caractère est aussi noble que son esprit est censé, et la pièce offre tour à tour des scènes touchantes et des scènes comiques, toutes également morales et instructives. […] Là, par cent mots piquants, enfants nés dans le vin, Nous donnerons l’essor à cette noble audace Qui fait sortir la joie et qu’avouerait Horace. […] Regnard rapporte les dernières paroles de Boileau, adressées à ses vers : « O vous, mes tristes vers, noble objet de l’envie, Vous dont j’attends l’honneur d’une seconde vie!
À côté de la perfide Célimène et du malheureux Alceste, égaré par une noble folie, il place le raisonnable Philinte et la douce Éliante. […] Quels nobles sentiments l’auteur a prêtés à son métromane, et dans quel magnifique langage il les lui fait exprimer ! […] À soixante ans passés, il a conservé les airs sautillants, le ton évaporé, les idées, les préjugés, les mœurs des nobles d’avant 1789. […] Comme le noble pair est titulaire de huit emplois largement rétribués, la nouvelle de son trépas met aussitôt mille ambitieux en mouvement. […] Dans toute sa carrière, Molière reste fidèle à cette loi difficile, alors même qu’il attaque la noble passion de la vertu, dont la fausse appréciation peut entraîner à des erreurs funestes, ou qu’il flétrit les vices les plus odieux, tels que l’hypocrisie et l’ingratitude.
Mais, si j’essayais de les satisfaire en traitant quelque point moins connu de l’histoire des lettres, j’oublierais, Mesdames, que vous faites la meilleure partie de cet auditoire, et que vous ne venez pas chercher ici un travail, mais un noble divertissement. […] Le noble auteur ne dit pas qu’elle se soit corrigée pour cela. […] Enfin, lorsqu’elle a reconnu la bassesse du savant et la noble conduite de Clitandre, elle reconnaît franchement son erreur et revient à lui sans arrière-pensée. […] Elle est noble ; car cette pièce n’est pas une comédie bourgeoise ; les marquis qu’on y voit figurer sont des familiers de Versailles qui, venus à la ville, se réunissent chez une femme de leur condition. […] Elle estime ce qu’il y a de noble et d’héroïque dans ce caractère, et ne cache point le penchant qui la porte vers Alceste.
Il y a entre la crapule de la canaille & les nobles travers des grands, des ridicules roturiers dignes de l’œil du philosophe, & qui méritent d’occuper le premier rang dans une piece. […] Le héros de la piece Danoise est un très petit Monsieur : opposons-le à quelqu’un des nobles personnages qui embellissent notre scene, à l’Ambitieux de Destouches, par exemple.
C’était en effet un coup de maître pour Molière, de représenter Montausier, ce censeur énergique, sous les couleurs les plus nobles, et d’opposer son caractère même aux prétentions de bel esprit sans esprit, et le poète sans talent ; de le montrer intraitable pour un mauvais ouvrage, quelque honnête, quelque estimable que fut l’auteur, en respectant en lui l’homme de bien et de mérite ; précisément comme Racine et Boileau prétendaient en user avec Chapelain, Cottin et leurs semblables.
Mais comme il est plus aisé d’imiter le grossier & le bas, que le délicat & le noble, les premiers poëtes Latins, enhardis par la liberté & la jalousie républicaine, suivirent les traces d’Aristophane. […] Comedie ), se divise en comique noble, comique bourgeois, & bas comique. […] Le comique noble peint les mœurs des grands, & celles-ci different des mœurs du peuple & de la bourgeoisie moins par le fond, que par la forme. […] Les progrès de la politesse & du luxe l’ont rapproché du comique noble, mais ne les ont point confondus. […] Le comique bas au contraire est susceptible de délicatesse & d’honnêteté ; il donne même une nouvelle force au comique bourgeois & au comique noble, lorsqu’il contraste avec eux.
« Selon Aristote, les mœurs dans la tragédie, qui est une imitation des meilleurs, doivent être plus nobles & plus élevées que l’original ; & dans la comédie, qui est une imitation des plus méchants, les portraits doivent être plus chargés que les modeles, en sorte (dit ce grand maître) qu’elles nous donnent un exemple de la difformité qui fait rire.
N’avons-nous pas d’un autre côté bien des Nobles réels, qui, pour raccommoder leurs affaires, n’aspirent pas à une Marquise, & se bornent à tromper une simple roturiere ? Mais prêtons-nous aux idées nobles & relevées de l’Auteur. […] Moliere a bravé les partis des Beaux-Esprits, des Prudes, des Femmes Savantes, des Tartufes, tous réunis contre lui : il les a attaqués & combattus avec une noble audace, dont on ne sauroit assez le louer ; mais il se fût perdu s’il eût été au-delà du ridicule des Marquis.
À ces causes s’en joignait une autre encore plus pressante, c’était l’émulation établie entre les sexes par leur mélange dans les sociétés particulières, depuis que Louis XII et Anne de Bretagne avaient relevé les femmes de cette infériorité qui subsiste encore en Angleterre et en Allemagne ; émulation de mérite et de vertu pour les nobles héritières des traditions d’Anne de Bretagne ; émulation de galanterie pour les élèves de l’école de François trop bien soutenue par ses successeurs. […] La conversation devint bientôt le principal attrait de cette société, et fut placée entre les plus vives et les plus nobles jouissances de la vie : c’était la préparation et le complément de toutes celles qui étaient réservées à l’intimité.
Enfin Moliere a préparé par le seul état de son héros, toutes les richesses comiques amenées par le bon sens de Madame Jourdain, l’ingénuité de Nicole, le bon esprit de Lucile, la noble franchise de Cléonte, la subtilité de Covielle, ils se trouvent très bien en opposition avec le caractere principal, & font ressortir le ridicule de M.
Molière, toutefois, ne négligea pas de peindre les nobles de la cour, de la ville et de la province ; mais il les plaça ordinairement dans des intrigues bourgeoises, comme personnages secondaires ou accessoires. […] Ces personnes ne sont pas toutes parées d’un titre ; mais toutes font évidemment partie de la classe noble ; et Alceste, quoiqu’il n’en dise rien, est aussi bon gentilhomme qu’Oronte qui s’en pique et Acaste qui s’en vante. […] Le Misanthrope abonde en beautés nobles, élégantes, fines et délicates, qui lui sont particulières. […] Cette profession noble et généreuse pouvait plaire à son cœur ; et ce talent de parler en public, qu’il sentait en lui, et dont il aima, depuis, à faire preuve en toute occasion, semblait lui promettre des succès dans la carrière du barreau. […] Il avait la taille plus grande que petite, le port noble, la jambe belle.
Il était aussi très clair pour madame Scarron que l’issue de cette éducation clandestine d’enfants réprouvés par les lois, qui, peut-être, ne seraient pas avoués par leur père, pourrait être de la dégrader, au moins de la déconsidérer, aux veux de cette noble société par qui elle était honorée et chérie. […] Les premières impressions que le roi avait faites sur madame Scarron, à son entrée dans Paris, étaient peut-être de celles que la beauté et la jeunesse font sur les sens d’une femme jeune et sympathique ; mais l’auréole de gloire qui environnait cette belle tête de Louis XIV, la douce et noble fierté de son attitude soumirent aussitôt les sympathies physiques aux sympathies morales.
Molière ne tarda pas à prendre une noble revanche. […] L’ouvrage serait achevé peut-être, si l’auteur, n’empruntant pas les noms des personnages du Misanthrope, avait emprunté les formes nobles et régulières de leur langage. […] Dans la distribution des madrigaux que Benserade adressait aux nobles acteurs de son ballet, Molière eut pour sa part ce méchant quatrain : Le célèbre Molière est dans un grand éclat ; Son mérite est connu de Paris jusqu’à Rome.
Quelle prévention que cette qui fait voir un bureau de fade bel esprit dans cette maison, ou le poète le plus mâle de notre littérature et le plus élevé, à qui il n’est arrivé qu’une seule fois de mettre une passion amoureuse sur la scène, allait chercher des conseils et des encouragements, échauffer et exalter son énergique talent, et où il trouvait l’inexprimable bonheur délie goûté, senti, admiré dans son élévation et dans sa profondeur, par des femmes qui s’étaient passionnées dans la noble conversation de Balzac pour la grandeur romaine !
En plus d’une occasion, elle fut nnon seulement efficace, mais noble et presque touchante. […] Des hommes de talent et de goût, animés parfois d’un noble enthousiasme, s’y sont laissé prendre en grand nombre. […] Noble et touchante modestie d’un grand homme, qui, au lieu de vouloir commander à la nature, n’a d’autre souci que de s’y conformer. […] Celte idée noble et touchante avait de vieilles racines oubliées dans le sol celtique de la Gaule, qui se mirent un beau jour à pousser des bourgeons verdoyants. […] On dit que le vice, représenté par la noble épouse de Georges Dandin, quitte la partie impuni et triomphant, tandis que la sottise du mari est seule vertement châtiée.
J’eus tout lieu de me louer de ma noble audace, lorsque j’appris « que l’Académie avoit lu mon ouvrage en entier ; qu’elle y avoit trouvé du savoir, une connoissance profonde du théâtre ; que je n’aurois pas le prix, parcequ’elle avoit résolu de couronner un Discours & non une Poétique, mais qu’on en parleroit avec éloge ». […] Le cœur ne se laisse point tromper ; cette noble, cette superbe partie de l’homme n’entend que son propre langage.
Une noble hardiesse, sans être heureuse, mérite des éloges, quand l’amour seul des beaux arts l’a produite, & non la sotte présomption. […] Je sais encore que si la noble & honnête fermeté qui pousse un homme franc à dire son avis, arme contre lui quelques Auteurs & leurs partisans, une basse & lâche flatterie compromet son jugement & le fait siffler des connoisseurs.
Que l’on ne pouvait pas faire un sacrifice plus noble de ses intérêts, et que M. […] Au surplus, je ne puis qu’approuver cette idée, qui est très décente et très noble de la part de la Comédie. […] Ce fier visage de songeur nous apparaît donc à travers l’histoire comme un des plus nobles et des plus sympathiques. […] Croyez-vous qu’il suffise d’en porter le nom et les armes, et que ce nous soit une gloire d’être sorti d’un sang noble quand nous vivons en infâmes ? […] On l’avait vu, lorsqu’il joua pour la première fois devant le roi, prendre la parole pour faire excuser par la noble assemblée les façons un peu campagnardes, rurales, dirait-on aujourd’hui, des débutants.
Molière et Boileau avaient besoin de la protection immédiate du roi ; ils en avaient besoin pour le plus noble et le plus cher de leurs intérêts : l’intérêt de leur talent.
L’enseignement de l’esthétique est confié, dans l’université de Zurich, à un homme de science et d’une portée d’esprit peu commune, mais qui, Germain par sang et digne héritier de Schlegel, fait profession d’un profond mépris pour les lettres romanes et n’a d’admiration que pour les littératures germaniques, dont Shakespeare est, à ses yeux, le plus noble représentant. […] Que vous disent ces nobles et hautes figures ? […] L’homme accompli, tel que le voudrait Molière, évite avec soin l’exagération, le ridicule dont parle Cléante quand il dit: Les hommes, la plupart, sont étrangement faite ; Dans la juste nature on ne les voit jamais : La raison a pour eux des bornes trop petites ; En chaque caractère ils passent les limites, Et la plus noble chose, ils la gâtent souvent Pour la. vouloir outrer et pousser, trop avant.
Au spectacle de cette période de terreur, c’est, je pense, une consolation de voir s’élever une autre grandeur que la grandeur de la cour, une autre autorité d’exemple et d’opinion, un autre modèle de société, une autre source de mœurs, d’idées, de principes ; c’est surtout un besoin pour les âmes douces et nobles, au milieu des tourments politiques qui les épuisent, d’entrevoir dans une société nouvelle un asile fermé à l’esprit de faction, et où se retrouvent les principales aménités de la vie civilisée.
L’accomplissement de ce noble projet devait rapprocher sa condition de celle de la duchesse de Montausier, et c’est ce qui arriva dès que le duc du Maine eut annoncé ses heureuses qualités.
Vous le voyez, Madame, & la preuve en est claire : Sans doute il n’est pas noble. […] Sans doute il n’est pas noble.
La postérité comptera parmi nous dix Peintres fameux, autant de Sculpteurs, autant d’Architectes illustres, & dira : « Tant d’Artistes distingués n’ont pu faire des progrès, qu’au sein d’un pays où les talents naissants trouvent des ressources gratuites chez des Maîtres entretenus par la générosité du Monarque ; tant d’Artistes distingués n’ont pu se perfectionner, que dans un pays où l’Eleve, parvenu au point de laisser entrevoir la moindre étincelle de génie, est envoyé à grands frais dans l’ancienne patrie des beaux arts, peut s’y enrichir des plus belles connoissances, & revenir, précédé de sa réputation, dans la capitale pour être accueilli dans le palais des Rois. » Qui pourroit ne pas voir toute l’utilité du plus respectable des établissements, de cette Ecole d’honneur, de bravoure, dans laquelle est admis quiconque puise dans un sang noble l’ardeur de défendre sa patrie ? […] Soyez surpris, avec raison, de voir la qualité & l’intérêt s’établir des privileges dans le sanctuaire des arts : dites-vous à vous-même qu’au théâtre les vrais nobles, les vrais riches, sont ceux qui ont hérité de Moliere, de Corneille, & qui les approchent de plus près : gémissez en secret ; mais gardez-vous d’insister si vous desirez qu’on vous joue par grace dans les petits jours, ou pendant les chaleurs de l’été57, encore serez-vous très heureux.