Auger, dans les notes de son édition, fait une observation fort juste; il dit : Sbrigani avertit Pourceaugnac que les avocats ne peuvent s’exprimer sans chanter, mais rien ne vient avertir qu’ils connaissent d’avance la question dont il s’agit : « Molière se gène si peu avec son personnage, ou, si l’on veut, avec son public, qu’il ne prend pas môme la peine de lier la scène qui finit à la scène qui va commencer, en faisant expliquer aux avocats, soit par Sbrigani, soit par Pourceaugnac, le cas sur lequel celui-ci veut les consulter. […] D’après ces extraits, on peut conclure que Georges Dandin dialoguait avec les Bergers (car il est peu probable qu’il jouât certaines scènes en pantomime) ; la fin de chacun des actes de la comédie, telle qu’elle nous a été conservée, actes qui se terminent tous par un monologue du même personnage, semblerait indiquer qu’il y a eu remaniement uniforme et peu heureux.
Une des femmes de la pièce de Térence, qui devrait faire le personnage le plus intéressant, ne paraît sur le théâtre que pour accoucher. […] C’est ce naturel grossier qui fait le plaisant de la comédie ; et voilà pourquoi ce n’est jamais que dans la vie commune qu’on prend les personnages comiques. […] Il mit dans cet ouvrage deux personnages qu’il n’avait point encore fait paraître sur son théâtre, un astrologue, et un fou de cour.
Moliere faisoit le personnage du Docteur dans celle qui fut representée ce jour-là & la maniere dont il s’en acquita le mit dans une si grande estime que sa Majesté* donna ses ordres pour faire venir sa Troupe à Paris. […] Quand on fait réflexion au caractere d’esprit de Moliere, à la gravité de sa conduite, & de sa conversation, il est risible que ce Philosophe fût exposé à de pareilles avantures, & prît sur lui les Personnages les plus comiques. […] Dans son second Placet au Roi, il marquoit à Sa Majesté qu’il en avoit changé le titre de Tartuffe en celui d’Imposteur, & deguisé le principal personnage sous l’ajustement d’un homme du Monde en lui donnant un petit chapeau, de grands cheveux, un grand collet, une épée & des dentelles sur tout l’habit. […] Rohaut, pour le donner à du Croisy, qui devoit representer ce personnage dans la Piece. […] « Moliere avoit fait seul ce ballet & même les vers pour les personnages & Bensserade de chagrin, avoit fait la plaisanterie que je viens de citer.
Monsieur de Molière faisait le Docteur, et la manière dont il s’acquitta de ce personnage le mit dans une si grande estime, que sa Majesté donna ses Ordres pour établir sa Troupe à Paris.