Mais pour moi, du premier coup d’œil, je connois le vrai mérite.
J’ai démontré que l’action nous conduit d’incident en incident, & par gradation, à un dénouement bien supérieur à celui du Mercure, & qu’il est dans toutes les regles, puisqu’il a le mérite de la précision, qu’il surprend, & qu’il satisfait tout le monde : j’ai donc confondu, aux yeux de mes Lecteurs judicieux, les personnes qui n’avoient pas apperçu le moindre nœud dans cette piece, ou qui ne vouloient pas en convenir : j’ai triomphé en même temps de celles qui ne concevoient pas la possibilité de resserrer une action parfaite dans un petit nombre de vers, & qui critiquoient Moliere de l’avoir fait.
Barthe : cette piece en est digne à tous égards, puisque l’Auteur est, de nos jeunes Comiques, celui qui fait voir un talent plus décidé ; puisque son ouvrage est resté au théâtre, qu’il a eu le plus grand succès & qu’il le mérite ; puisqu’on y voit des scenes que les maîtres de l’art ne désavoueroient pas ; puisqu’enfin l’Auteur vise à la gloire de faire regner dans ses pieces le ton de la bonne compagnie.
Cette réflexion une fois faite, bien des gens penseront qu’il est très aisé de la mettre en pratique ; mais la chose doit avoir ses difficultés, puisque des Auteurs d’un vrai mérite, & qui ont uni des caracteres accessoires à des caracteres principaux, n’ont jamais eu l’adresse de leur assortir ceux qui leur étoient propres.