L’hôtel de Rambouillet, maintenant « diffamé », suivant la très-juste expression de Boileau, avait été, vingt ans auparavant, une école de beau langage, de bonnes manières et de bonnes mœurs. […] Ses amis le pressaient de quitter du moins le théâtre et de réserver ses forces pour le travail de cabinet ; mais il se faisait un « point d’honneur », c’était son expression, de paraître sur la scène, comme s’il eût éprouvé le besoin de mordre de ses propres dents les maris trompés, les marquis, les dévots et les médecins. […] En 1694, le monde supportait encore l’expression nue de la vérité. […] Après trois mois d’épreuve, le conseiller au présidial de Bourges se laissa vaincre ; il abandonna à Dieu tout ce qu’il espérait du génie déjà remarquable de son fils, en qui l’on voyait, suivant l’expression d’alors, une égale « ouverture, » une égale aptitude pour toutes les choses de l’esprit. […] On ne le peut lire, et encore moins sans doute pouvait-on l’entendre, sans reconnaître la beauté, la force et la justesse de cette expression.
malheureux que vous êtes, laissez agir, laissez parler votre âme ; elle se peindra sur tous vos traits, elle dirigera tous vos mouvements, elle modulera toutes vos expressions. […] Le jargon de leurs coteries passa dans toutes les productions, il tint lieu de justesse dans les expressions, et de vérité dans les idées, il éloigna du beau naturel ; enfin, c’en était fait du goût et du véritable esprit : le galimatias allait pour jamais prendre leur place, si Molière en foudroyant l’idole n’eût détruit son culte. […] ne devrait-il pas au moins payer d’un soupir tant d’expressions tendres, tant de traits délicats échappés successivement du cœur de son amante ? […] Grandval y joignait la grâce, l’amabilité, la décence, à l’expression de la tendresse la plus délicate, la plus vive. […] Malheur au comédien si, dans toutes ses expressions, dans tous ses mouvements, dans tous ses gestes, il ne laisse échapper le sentiment avec autant de facilité qu’il s’échappait du cœur et de la plume de notre philosophe amoureux !
Il faut remarquer que l’archevêque de Paris et Bourdaloue ont pris l’un et l’autre ces idées et même ces expressions dans la relation intitulée les Plaisirs de l’Ile enchantée, Paris, 1665 : « Le roi connut tant de conformité entre ceux qu’une véritable dévotion met dans le chemin du ciel et ceux qu’une vaine ostentation de bonnes œuvres n’empêche pas d’en commettre de mauvaises, que son extrême délicatesse pour les choses de la religion ne put souffrir celte ressemblance du vice avec la vertu qui pouvoient être pris l’un pour l’autre, et quoique l’on ne doutât pas des bonnes intentions de l’auteur, il défendit pourtant celte comédie en public, et se priva soi-même de ce plaisir pour n’en pas laisser abuser à d’autres moins capables d’en faire un juste discernement. » Voir J.
Vous ne trouverez pas un mot grossier, une locution basse, une expression licencieuse dans les écrits des Sévigné, des La Fayette, des La Suze, des Coulanges, des deux belles-sœurs Scudéry, qui ont précédé le règne de madame de Maintenon, ni dans ceux de femmes qui ont été fort dégagées des préceptes de son école : telle a été madame de Caylus, sa nièce et son élève ; telle a été la marquise de Lambert.