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64. (1865) Les femmes dans la comédie de Molière : deux conférences pp. 5-58

Quelle mine aurait fait une coquette dans ces réunions de guerriers où Agamemnon, le roi des rois, dépeçait de ses mains le bœuf du sacrifice, le mettait à la broche et en distribuait le dos entier aux convives qu’il voulait honorer ? […] Aux yeux des anciens, l’amour est un délire que les dieux inspirent aux mortels pour les égarer ou les punir : C’est Vénus tout entière à sa proie attachée. […] Accoutumez-la à l’application, au travail domestique, aux détails du ménage, afin qu’elle soit en état d’élever des enfants avec autorité et prudence dans la crainte de Dieu. » Ailleurs il développe sa pensée dans un passage que je rapporterai tout entier parce qu’il prête une force singulière aux observations que j’ai présentées plus haut : « Si une fille doit vivre à la campagne, de bonne heure tournez son esprit aux occupations qu’elle y doit avoir, et ne lui laissez point goûter les amusements de la ville… Si elle est d’une condition médiocre de la ville, ne lui faites point voir des gens de la cour : ce commerce ne servirait qu’à lui faire prendre un air ridicule et disproportionné… Formez son esprit pour les choses qu’elle doit faire toute sa vie ; apprenez-lui l’économie d’une maison bourgeoise, les soins qu’il faut avoir pour les revenus de la campagne, pour les rentes et pour les maisons qui sont les revenus de la ville… et enfin le détail des autres occupations d’affaires ou de commerce dans lequel vous prévoyez qu’elle devra entrer, quand elle sera mariée. » Ces occupations, c’est le vrai rôle et la dignité de la femme ; car, selon le même Fénelon « il faut un génie bien plus élevé et plus étendu pour s’instruire de tous les arts qui ont rapport à l’économie… que pour jouer, discourir sur des modes, et s’exercer à de petites gentillesses de conversation. » C’est aussi son vrai bonheur, et je ne vois pas sans regret que beaucoup de femmes soient devenues par leur faute, comme des étrangères dans leur famille, ignorantes des affaires du mari, qu’elles ne connaissent souvent que par leur ruine, une sorte d’objet de luxe qu’il entretient à grands frais, et qu’il montre, mais auquel il ne tient que par vanité. […] Enfin la famille reluira tout entière de ce bonheur que peut y répandre une femme aimante, ferme, spirituelle et sensée.

65. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Après quoi elles se mettent à l’œuvre, et cette feuille imprimée, que la ville entière ouvrait, au matin, frémissante de curiosité et d’impatience… arrive, à la tombée du jour, un homme armé d’un crochet, qui de cette feuille jetée aux immondices fait sa proie et l’emporte, dédaigneux de savoir ce que ce vil chiffon peut contenir. […] — Il s’est jeté sur des corporations entières. — Il a lutté avec les médecins jusqu’à la mort ; s’il était fatigué, il se rejetait avec délices dans l’antiquité, objet de ses études, et dans la vieille farce française qui devait lui rappeler souvent sa vie errante ! […] Voilà une belle scène et bien amenée, et bien imprévue, et bien entière, et vivement rendue. […] Dans cette grande comédie du Misanthrope, Molière est tout entier. […] De notre temps, le journal était de moitié moins grand que du vôtre, et du temps de Geoffroy tout le feuilleton d’aujourd’hui ne serait pas entré dans la feuille entière.

66. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Ce bas comique qu’on rencontre dans le Médecin volant est emprunté, du reste, ainsi que la pièce tout entière, à Boursault. […] C’est un homme qui n’a rien à perdre ; et les comédiens ne me l’ont déchaîné que pour m’engager à une sotte guerre, et me détourner par cet artifice des autres ouvrages que j’ai à faire; et cependant vous êtes assez simples pour donner dans ce panneau. » Ces quelques lignes valent mieux que la comédie tout entière du Portrait du Peintre. […] Il est aidé par un valet hardi, entreprenant, astucieux, Hali, qui se plaint déjà de la sotte condition d’être toujours tout entier aux passions d’un maître, de n’être réglé que par ses humeurs, et de se voir réduit à faire ses propres affaires de tous les succès qu’il peut prendre. […] Ces sarcasmes mis dans un des plateaux de la balance, l’emportent quelquefois sur le caprice et l’amour-propre, et empêchent un homme de compromettre, dans une union mal assortie, le bonheur d’une existence entière. […] Le premier a fait poser devant lui l’humanité entière, et le second les hommes de son siècle, en prenant un calque fidèle et léger des caprices du jour, des ridicules du moment.

67. (1865) Les femmes dans Molière pp. 3-20

Quoiqu’il en puisse être, ce qui me paraît ressortir de son œuvre tout entière, c’est que Molière a beaucoup aimé les femmes et qu’il a eu un juste et profond sentiment de leur vocation. […] La pièce tout entière est le plus fort et le plus ingénieux plaidoyer qui se puisse faire contre l’ignorance et contre la sotte prétention de vouloir, par la contrainte, triompher de doux instincts de la nature, qui réagissent d’autant plus violemment qu’on les comprime davantage, et dont une indulgente prudence peut seule modérer et diriger l’épanouissement.

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