Riccoboni, Auteur & Acteur Italien, ne connoissoit donc pas tout le théâtre de sa nation ? […] En tout cas, si notre Auteur cede en cela aux Italiens, nous allons le voir prendre sa revanche dans une scene qui est visiblement imitée de deux scenes italiennes.
Il est clair que les deux ressorts se ressemblent, & que les deux Auteurs se sont proposé le même but en les composant : mais il est plus clair encore qu’il y a autant de défauts dans le dernier dénouement, qu’il y a de beautés dans le premier. […] Est-il possible qu’un homme d’esprit ait pu se déterminer à répéter, à retourner dans quatre pieces différentes, un dénouement pris chez un autre Auteur ? & quel Auteur encore !
Oui, l’auteur du Tartuffe a fait Amphitryon 586 ; celui qui a soulevé contre le suborneur hypocrite une indignation telle, que le public n’eût pas été content si le roi même n’était venu frapper ce monstre par sa justice exceptionnelle et terrible587 ; celui qui, craignant qu’on ne lui attribuât une seule des paroles prononcées par son odieux personnage, mettait en note : « C’est un scélérat qui parle588 ; » ce même homme, pendant trois actes qui sont trois chefs-d’œuvre de comédie, de poésie et d’esprit, a fait rire du noble Amphitryon et de la touchante Alcmène, trompés dans leurs honnêtes amours par le don Juan de l’Olympe. C’est justement parce que ces trois actes sont des chefs-d’œuvre, parce que les farces de Mercure et les terreurs de Sosie forcent absolument à rire589 ; parce que la conduite, la langue même et la versification de la pièce sont des modèles inimitables ; parce que rien enfin n’interrompt le plaisir délicieux du spectateur, et que le génie comique de l’auteur enlève d’un bout à l’autre le rire et les applaudissements, c’est pour cela que cette pièce est très-immorale590. […] III, Si la comédie d’aujourd’hui est aussi honnête que le prétend l’auteur de la Dissertation : « Les airs de Lulli, tant répétés dans le monde, ne servent qu’à insinuer les passions les plus décevantes, en les rendant les plus agréables et les plus vives qu’on peut par le charme d’une musique… : c’est là précisément le danger, que pendant qu’on est enchanté par la douceur de la mélodie, ou étourdi par le merveilleux du spectacle, ces sentiments s’insinuent sans qu’on y pense, et plaisent sans être aperçus ; » chap.
À son retour à Paris, sa passion pour la comédie qui l’avait déterminé à faire ses études, se réveilla, et il résolut de la satisfaire en devenant en même temps comédien et auteur.