/ 146
18. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXXIII. Examen de quelques Caracteres. » pp. 350-377

un homme de sa condition habiller ainsi son valet ! […] Vous savez, Madame, que c’est un homme de condition. . . . […] Si le Petit Seigneur n’érige pas son prétendu Ecuyer en homme de condition, & s’il ne feint pas de faire donner des emplois, expédier des brevets & des lettres de cachet, l’Auteur ne connoîtra pas le monde. […] Le tuteur consent, à condition qu’il sera présent, mais un peu éloigné.

19. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

Ici je dois remarquer que l’accueil fait aux hommes de lettres par la marquise de Rambouillet ajouta sensiblement à la noblesse de leur condition. […] M. le Prince disait de lui : « Si Voiture était de notre condition, on ne le pourrait souffrir. » Je remarque que nous n’avons rien dit encore que de vague et de banal concernant la personne sur qui pèse aujourd’hui le ridicule de la préciosité de mœurs et de langage ; parlons un moment de ses premières années et des premières apparences de son caractère.

20. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Y être admis, était pour les conditions médiocres un titre qui les relevait. […] « L’hôtel de Rambouillet », dit-il dans une note sur Dangeau (10 mai 1690), « était dans Paris une espèce d’académie de beaux esprits, de galanterie (galanterie est là pour élégance), de vertu et de science, car toutes ces choses s’accordaient alors merveilleusement et le rendez-vous de tout ce qui était le plus distingué en condition et en mérite, un tribunal avec qui fallait compter et dont sa décision avait un grand poids dans le monde, sur la conduite et sur la réputation des personnes de la cour et du grand monde, au tant pour le moins que sur les ouvrages qui s’y portaient à l’examen37. » 35.

21. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. Des Pieces intriguées par un Valet. » pp. 125-134

Il oublie son ancienne maîtresse, achete l’esclave pour le prix de quarante mines : comme il n’a point cette somme, il implore le secours d’un charitable usurier, qui prête les quarante mines, à condition qu’on lui paiera un gros intérêt, & qu’il sera nanti de l’esclave jusqu’au parfait paiement. […] La petite bourgeoise intéresse sa servante ; la femme de condition, la plus chérie de ses femmes ; le Duc, son valet-de-chambre ; le Prince, celui qui porte le titre de son ami : alors ces intriguants en chef font agir les baigneurs, les marchandes de modes, les maîtres à chanter, à danser, &c.

22. (1865) Les femmes dans Molière pp. 3-20

Ce qui prouve bien que, dans cette heureuse opposition des deux sœurs, la pensée de Molière a été uniquement de montrer toute la supériorité morale et intellectuelle de celle qui a su se conserver simple, vraie et modeste dans ce milieu tout d’affectation et de pédantisme, et non pas de glorifier l’ignorance et de la présenter comme la condition normale et désirable des filles ; c’est qu’au contraire, dans le rôle si charmant d’Agnès de son École des femmes, il s’est appliqué à faire ressortir les dangers que peut faire courir à l’innocence la plus pure un manque absolu de lumières. […] Molière connaissait trop bien le monde pour n’avoir pas observé quel rôle important jouent dans les familles ces braves filles que nous appelons aujourd’hui bonnes, à cause sans doute qu’elles ne le sont plus, et qui, placées par leur condition dans une situation très subordonnée, n’en exercent pas moins une très grande influence sur ceux-là mêmes qui s’appellent leurs maîtres, et que, le plus souvent, elles conduisent à leur gré ; cela était vrai surtout du temps de Molière. Le poète philosophe connaissait trop bien le cœur humain pour ne pas savoir que le bon sens, l’esprit même, sont de toutes les conditions ; et que souvent c’est dans celles où, sous prétexte d’éducation, le pédantisme et l’affectation n’ont pu gâter le naturel, que se trouve la plus saine appréciation des choses et la manière la plus nette et la plus piquante de les exprimer.

23. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Un travers de ce genre, qui ne peut exister que dans des conditions élevées, n’est d’aucune importance pour ces pères de famille que la médiocrité de fortune autorise à blâmer toute occupation qui distrait leur femme du soin de leur ménage : ajoutons qu’attaquer simplement les femmes savantes, c’eut été s’exposer à de dangereuses inimitiés. […] Les Femmes savantes, ai-je dit, sont Les Précieuses ridicules reproduites avec un ridicule de plus, celui de la science supposée par le poète dans une condition qui ne laisse point de loisir pour les études scientifiques, ce qui était absolument contraire à la réalité.

24. (1900) Molière pp. -283

Même justesse dans le choix des expressions destinées à exprimer une condition ou un caractère. […] Voilà la condition particulière des femmes dans le théâtre de Molière, condition puissante et incomplète. […] Cette impartialité de Molière est tout aussi grande dans la peinture des conditions. […] Dans toutes les conditions, dans tous les états de la vie, nous pouvons tous, perpétuellement et continuellement, en faire notre profit. […] ——— Misère de la condition humaine !

25. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Cette dernière condition est justement celle de certaines définitions a priori. […] Si la connaissance vaste et la science profonde du théâtre comique nous suggère une idée telle du comique parfait, qu’elle puisse nous servir de criterium unique et absolu pour juger et pour classer toutes les œuvres, cette idée, quelles que soient les conditions empiriques de sa formation, renferme une part d’a priori, j’entends le principe même de nos jugements et de notre classification. […] Mais, par quel excès de petitesse veulent-ils exclure Molière du chœur des poètes, parce qu’il a été poète à sa manière et sans remplir les conditions de leur programme ? […] Par quelle raison démonstrative et convaincante décident-ils enfin que la poésie a telles et telles conditions positives, négatives, et de quelle autorité lui disent-ils : Jusqu’ici, mais pas plus loin ? […] Ses maîtres lui avaient rempli la tête d’idées fausses, puériles, sur les conditions de la tragédie parfaite, et elle ajoutait foi à ces doctorales niaiseries non seulement avec candeur et soumission, mais avec l’ardeur fanatique d’un jeune esprit encore très ignorant, qui, ne voyant qu’une chose, plaint un peu et méprise beaucoup ceux qui ne la voient point.

26. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE V. Des Vers & de la Prose dans les Comédies. » pp. 103-117

Sotte condition que celle d’un esclave, de ne vivre jamais pour soi, & d’être toujours tout entier aux passions d’un maître, de n’être réglé que par ses humeurs, & de se voir réduit à faire ses propres affaires de tous les soucis qu’il peut prendre ! […] Sotte condition que celle d’un esclave,  De ne vivre jamais pour soi,  Et d’être toujours tout entier   Aux passions d’un maître,  D’être réglé par ses humeurs,  Et de se voir réduit à faire   Ses propres affaires  De tous les soucis qu’il peut prendre.

27. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [50, p. 83-85] »

L’archevêque révoqua donc sa défense, à condition que l’enterrement serait fait sans pompe et sans bruit.

28. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Verrons-nous l’impudence d’un côté, la résignation de l’autre, se tendre une main aussi familière que serait celle d’une franche amitié dans une parfaite parité de condition, de vertu et d’honneur ? […] Je suis trop vieille pour changer de condition ; et selon le bien que j’aurai, je songerai à m’établir en pleine tranquillité.

29. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. Regnard imitateur de Moliere. » pp. 51-80

Harpagon cede sa maîtresse, & couronne les amours de ses deux enfants, à condition qu’on lui rendra sa chere cassette qu’on lui a volée. […] Géronte cede Isabelle, dont il a été amoureux, à son neveu Eraste, à condition qu’on lui rendra le porte-feuille qu’on lui a volé. […] Géronte consent au mariage de Clitandre son fils avec Lucile, à condition qu’on lui rendra un sac de cuir plein d’argent qu’on lui a pris.

30. (1819) Deux pièces inédites de J.-B. P. Molière [La Jalousie du Barbouillé, Le Médecin volant] pp. 1-4

Le style est bas, sans doute ; mais il convient au genre des pièces et à la condition des personnages.

31. (1886) Molière et L’École des femmes pp. 1-47

Arnolphe, dans cet état d’esprit que vous lui voyez résolu cependant à se mettre en ménage ; plus préoccupé, je viens de vous dire qu’il est désintéressé, des garanties que lui donnera sa femme que de la dot qu’elle pourrait lui apporter, a jeté les yeux sur une fillette, presque une servante, qui se trouve placée près de lui dans des conditions particulières. […] Mais si l’éducation est comme jetée à tort et à travers, chez des parents imprudents, ou peu corrects, ou besogneux, alors c’est un danger plutôt qu’une garantie, et très probablement l’éducation qu’une jeune fille aura reçue dans ces conditions lui donnera un esprit d’indépendance plutôt qu’un esprit de discipline. […] George Dandin, vous le savez, est un homme de petite condition, un paysan, qui avait pris, lui aussi, la résolution de se marier.

32. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IV. Brueys & Palaprat, imitateurs, comparés avec Térence, Blanchet, un Auteur Italien, & la nature. » pp. 100-132

Quelque temps après, Pamphila est exposée en vente ; le même Capitaine la rachete, & veut la donner à Thaïs, à condition qu’il sera pendant quelques jours le seul possesseur de ses charmes. […]   Les Auteurs François se sont piqués de laisser à Térence cette fille de joie qui prie son favori de permettre qu’elle tire parti de ses charmes, pour se faire des amis & mériter leurs présents ; ce lâche amant, qui s’absente deux jours pour laisser un champ libre à son rival, & qui partage ensuite avec lui la possession de sa belle, à condition qu’il financera ; ce parasite qui fait l’accord entre les deux rivaux ; ce pere qui permet à son fils de vivre publiquement avec sa concubine. […] on diroit, à ton action, que ce seroit un archer du Prévôt qui l’auroit demandé, & non pas un homme de condition.

33. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

Qu’il égaie le parterre, je le veux bien, mais à la condition qu’il sera ridicule sans le savoir. Or les comédiens qui représentent Arnolphe ne paraissent pas comprendre l’importance de cette condition ; débutants et chefs d’emploi sont à cet égard du même avis ; ils veulent à tout prix égayer le parterre, et craindraient de passer pour inintelligents en donnant du relief à la partie mélancolique de ce rôle. […] Le moyen qui se présente naturellement, le seul auquel on puisse recourir, c’est de soumettre l’ancien répertoire aux mêmes conditions que les pièces nouvelles, c’est-à-dire d’en suivre, d’en surveiller les répétitions, sans rien abandonner aux caprices, aux prétentions des comédiens.

34. (1819) Introduction aux œuvres de Molière pp. -

Quelques-uns ont prétendu que Plaute l’avait été aussi ; mais le plus grand nombre veut que, né de condition libre, et livré au commerce, il ait d’abord acquis, puis perdu une assez grande fortune, et qu’il ait été réduit pour vivre à tourner la meule aux gages d’un meunier. […] Ils ont entre eux ces rapports communs que produit la conformité d’âge, de sexe ou de condition ; mais ils ont en même temps ces différences individuelles qui distinguent tous les êtres créés. […] Les législateurs du théâtre veulent que cette intervention soit indispensable, et que le nœud n’en soit pas indigne : qui oserait dire que ces deux conditions n’existent pas dans Tartuffe ? […] Par le style, il faut entendre ici, non pas le langage propre à chaque personnage, suivant son âge, son sexe, sa condition et son caractère donné, mais la diction même de l’auteur, appliquée à l’ensemble de ses productions. […] Il étudiait l’humeur, l’esprit, le langage, le geste des hommes de tonte condition, qui venaient, pour ainsi dire, passer en revue devant lui.

35. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. Pieces intriguées par une ressemblance. » pp. 176-191

Un instant après, Celio, qui est subitement devenu amoureux de Rosaura, lui fait la même promesse, à condition qu’il n’épousera pas Rosaura. […] Le véritable Mario revient à Milan avec la sœur de Lélio qui la lui accorde, à condition qu’il épousera Flaminia ; & leur querelle de Genes ne sert qu’à les rendre meilleurs amis.

36. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXX. Des Caracteres propres à tous les rangs. » pp. 328-330

Qu’on place Dorante chez un homme de sa condition, il ne pourra plus être escroc ; chez un homme de rien, il ne lui persuadera pas qu’il est aimé d’une belle Marquise.

37. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVIII. » pp. 357-396

Euclion accorde sa fille à un homme très âgé qui la lui demande en mariage, à condition qu’il la prendra sans dot. […] J’y consens, mais à condition que vous ne me demanderez rien que ce que je voudrai bien vous dire. […] A la condition que je vous ai dite ; c’est que vous la prendrez sans dot. […] Harpagon, plus ferme, plus décidé, conserve toujours son caractere, cede sa fille, renonce même à l’amour qu’il a pour Mariane, à condition qu’on lui rendra sa cassette ; &, quand tout le monde cherche à peindre sa joie, il exprime la sienne, en s’écriant : Allons revoir ma chere cassette.

38. (1884) La Science du cœur humain, ou la Psychologie des sentiments et des passions, d’après les oeuvres de Molière pp. 5-136

Or, pour avoir celle connaissance, certaines conditions sont absolument nécessaires. […] Mais, outre ces anomalies générales dont tous les scélérats sont atteints à des degrés différents, certaines dispositions intellectuelles et instinctives, ainsi que les conditions dans lesquelles ils naissent, créent parmi eux un grand nombre de variétés de scélérats. […] Molière a toujours su reproduire des effets semblables dans des conditions psychiques semblables. […] Sans ces deux conditions, les actes odieux sont impossibles. […] Celui-ci se trouve alors momentanément dans les mêmes conditions psychiques que si la nature l’avait privé de ces sentiments moraux.

39. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXVII. Du Caractere des Professions. » pp. 284-302

Turcaret se pique du fol orgueil d’avoir pour maîtresse une femme de condition qui le joue, le hait, le méprise, le pille, & le trompe pour un chevalier ; lorsqu’il envoie un billet au porteur, excellent, & de fort mauvais vers à sa maîtresse ; lorsqu’il veut faire jetter sa maison trente fois à bas pour la faire construire de façon qu’il n’y manque pas un Iota, & qu’il ne soit pas sifflé de ses confreres ; lorsqu’il prétend être connoisseur en musique parcequ’il est abonné à l’Opéra ; lorsqu’il admet à sa table un Poëte qui ne dit rien, mais qui mange & pense beaucoup ; lorsqu’il vend des emplois ; lorsqu’il en donne aux rivaux qui l’embarrassent ; lorsqu’à la priere de sa maîtresse il fait un commis de ce laquais naïf qui prie la dame de se servir toujours du même rouge, afin de plaire à son protecteur, & ne pas le mettre dans le cas d’être révoqué ; lorsqu’il refuse de payer à sa femme une modique pension & qu’il se ruine pour une fripponne à laquelle il donne pour dix mille francs de porcelaines, un carrosse, une maison de campagne, &c. […] Diderot dit, dans ses réflexions sur la Poésie dramatique, page 11 : « Que quelqu’un se propose de mettre sur la scene la condition de Juge ; qu’il intrigue son sujet d’une maniere aussi intéressante qu’il le comporte & que je le conçois ; que l’homme y soit forcé par les fonctions de son état, ou de manquer à la dignité & à la sainteté de son ministere, & de se déshonorer aux yeux des autres & des siens, ou de s’immoler lui-même dans ses passions, ses goûts, sa fortune, sa naissance, sa femme, ses enfants ; & l’on prononcera après, si l’on veut, que le Drame honnête & sérieux est sans chaleur, sans couleur & sans force ».

40. (1858) Molière et l’idéal moderne (Revue française) pp. 230-

Aussi ne daigne-t-elle pas se défendre ; le danger est nul, elle ne tient pas à Alceste ; et d’ailleurs elle sait que l’accusateur, obligé de pardonner, pardonnera sans condition et finira par demander pardon lui-même : elle a raison. […] Quelle est, en ce monde, la condition de l’acte ?

41. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Cette condition ne pouvait convenir à la petite-fille d’Agrippa d’Aubigné, le compagnon de Henri IV, qui osait dire de ce prince, sans le fâcher, qu’il était un ladre verd, parce qu’il n’était pas prodigue pour ses amis. […] Et ce n’est pas tout : comme la condition absolument imposée par madame Scarron aurait été désagréable à madame de Montespan, si elle-même n’avait eu intérêt à ce que le roi préludât, par l’ordre demandé, à la reconnaissance de ses enfants, il est présumable qu’elle avait autorisé, peut-être même excité madame Scarron à l’exiger.

42. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XVI. » pp. 294-322

Elmire, étonnée, lui pardonne son audace à condition qu’il refusera la main de Mariane, & qu’il engagera son époux à l’accorder à Valere comme il l’a déja promis. […] Silvio ne se rebute point, & sollicite le consentement de Pantalon, qui l’accorde, à condition que Silvio l’aidera à tuer un certain écolier dont il est jaloux. […] Elle dit un moment après à Brighella de se déguiser en Diable, & de venir la joindre au même lieu & à la même heure : elle finit par donner un semblable rendez-vous à Pantalon, à condition qu’il s’habillera comme un Mort.

43. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. » pp. 290-293

Il suffit d’examiner les mœurs de cette comédie, pour voir que le sujet en est étranger, que Moliere l’a transporté sur son théâtre, sans se donner la peine de l’habiller à la françoise, & de changer la condition de ses esclaves, qui rendent son intrigue plus vraisemblable.

44. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Ce sentiment intime et transparent que les figures comiques doivent avoir de la profonde insignifiance de leurs desseins et de leurs actes est une condition essentielle de l’art qui n’est pas imposée par la morale seulement, mais qui résulte de la nature propre du comique. […] Par cette épuration profonde, leur théâtre serait seul digne d’être comparé à celui des Grecs, si la rhétorique qui s’y fait trop applaudir ne rappelait pas plutôt les déclamations de Sénèque que les chefs-d’œuvre classiques221, surtout si les conditions nouvelles d’un art romantique en dépit de lui-même n’avaient pas imposé à leur poésie dramatique des allures et des mœurs contraires à l’antique plasticité. […] Comment être poète dans ces conditions ? […] Mais, pour le comique, nous devons exiger une condition plus profonde. […] … Le comique, par conséquent, se rencontre plutôt dans les conditions inférieures de la société, parmi les hommes simples, qui sont me fois pour toutes ce qu’ils sont, et qui, incapables d’ailleurs de toute passion profonde, ne mettent cependant pas le moindre doute dans ce qu’ils sont ou ce qu’ils font.

45. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE VIII. Le Mariage. » pp. 145-165

Le mariage est doux, mais à une condition indispensable : c’est qu’il soit le nœud bien assorti 518 qui lie deux personnes portées par la nature à s’aimer, et décidées par la raison à accepter patiemment les charges nécessaires qu’il impose. […] sans doute, ceux qu’une passion déraisonnable fait passer outre à ces indispensables conditions, sont souvent bien innocents et bien excusables : Molière en fut lui-même un exemple531 ; et il y a un stoïcisme amer dans la façon joviale dont il essaye de prouver qu’on doit porter en galant homme de certaines disgrâces 532.

46. (1909) Deux ennemis de la Compagnie du Saint-Sacrement : Molière et Port-Royal (Revue des deux mondes) pp. 892-923

Il était devenu « de notoriété publique»qu’il s’assemblait, dans cette ville, « une congrégation illicite de plusieurs personnes, privilégiées et non privilégiées, » qu’elle « décidait de la réputation des hommes et des femmes et envoyait dans les maisons des billets injurieux ou quelqu’un de ses membres pour troubler le repos des familles; » même qu’ « elle faisait enlever des femmes et des filles et les enfermait dans le couvent de Sainte-Magdelaine sans information, ni condamnation. » Par arrêt du 12 juillet 1658, le Parlement de Guyenne interdit à la supérieure du couvent de recevoir ces prisonnières, aux Jurats de prêter main-forte à ces arrestations arbitraires, « à toutes personnes, de quelle qualité et condition qu’elles fussent, de porter ni envoyer aucuns billets injurieux à la réputation... sous peine de punition corporelle; » enfin de « s’assembler sans permission du Roi ou de la Cour. » Ce fut à Blois, l’année suivante, que la Compagnie du Saint-Sacrement trembla. […] Alors la justice fut saisie, et le Parlement de Paris informé par le procureur général que, « sous le voile de la piété et de la dévotion, il s’est introduit plusieurs assemblées, congrégations et communautés dans plusieurs endroits de cette ville, notamment sur les paroisses Saint-Eustache, Saint-Sulpice, faubourg Saint-Jacques et Saint-Antoine, » et que, de plus, « en un lieu appelé le Refuge Saint-Paul, se sont trouvées plusieurs femmes et filles détenues sans aucun ordre de justice. » Le 13 décembre 1660, un arrêt de la Cour13 « fit inhibitions et défenses à toutes personnes, de quelque qualité et condition quelles fussent, de faire aucunes assemblées en cette ville et partout ailleurs, sans l’expresse permission du Roi et lettres patentes vérifiées, comme aussi de tenir aucunes prisons pour retenir aucuns sujets du Roi contre leur volonté, sous quelque prétexte que ce fût. »Et bien que cet arrêt ? rendu sous la présidence d’un des membres de la Compagnie, Lamoignon, fût rédigé et « adouci » par lui de telle sorte que la Compagnie n’y parut pas expressément, il y avait dans les considérans des mots fâcheux : les mots de « cabale, » d’« intrigues ruineuses au service du Roi, de l’État et du public... » Plus fâcheux encore était le commandement donné aux commissaires du Châtelet de se transporter « en tous les endroits où ils auront advis que pareilles assemblées se tiennent. »Dès lors, il fallait bien que les conditions d’existence de la Compagnie changeassent. […] Et pourtant, M. de Saint-Cyran croyait qu’il lui manquait encore encore quelque chose, et en mourant il lui a laissé par testament son cœur, à condition qu’il se retirerait du monde.

47. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Molière regardait même les gens de cette condition comme formant un corps, une classe dans la société. […] Loin de désorganiser le mariage, il le consolide par les conditions qu’il veut qu’on apporte dans ce pacte sacré. […] La condition d’existence de Molière n’était qu’au prix de son silence sur les affaires de l’état. […] Il s’agit d’un jeune guerrier de condition obscure, qui gagne le cœur d’une grande princesse, et l’on prétend que Molière fit allusion aux amours de Mademoiselle pour Lauzun. […] Dans la comédie de George Dandin, il se moqua, ainsi que nous l’avons vu des imbéciles qui, au lieu de prendre une femme de leur condition, épousaient des demoiselles de qualité dont leur soumission n’obtenait que du mépris.

48. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IX » pp. 77-82

Segrais raconte que le cardinal envoya Boisrobert à la marquise, pour lui demander son amitié, mais à une condition trop onéreuse pour elle, qui ne savait ce que c’était de prendre parti, et de rendre de mauvais offices à personne.

49. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVII » pp. 298-304

L’accomplissement de ce noble projet devait rapprocher sa condition de celle de la duchesse de Montausier, et c’est ce qui arriva dès que le duc du Maine eut annoncé ses heureuses qualités.

50. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XV. M. DE CHAMFORT. » pp. 420-441

Le visage consterné du Turc, ses soupirs, quelques larmes qu’il voyoit couler de ses yeux par intervalles, lui firent croire que son sort étoit plus triste que celui de ses pareils, ou qu’il étoit né dans une condition qui le lui rendoit plus sensible. […] On ne tarda point à les produire dans le lieu où se fait la vente des esclaves, avec la triste parure de leur nouvelle condition.

51. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE VIII. » pp. 144-179

Toutes les personnes de condition de la ville assisterent aux noces, & furent autant satisfaites de la beauté de Laure, qu’elles le furent peu de son esprit. […] Une bourgeoise, femme de médiocre condition, qui demeuroit vis-à-vis de la maison de Don Pedre, charitable de son naturel, & prenant grande part aux peines de son prochain, s’apperçut bientôt & de l’amour de l’étranger, & du peu de progrès qu’il faisoit auprès de sa belle voisine. Elle étoit femme d’intrigue, & sa principale profession étoit d’être conciliatrice des volontés, possédant éminemment toutes les conditions requises à celles qui s’en veulent acquitter, comme d’être perruquiere, revendeuse, distillatrice, d’avoir quantité de secrets pour l’embellissement du corps humain ; & sur-tout elle étoit un peu soupçonnée d’être sorciere.

52. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

Chez nous, on resta longtemps encore dans cette alternative, ou d’être imitateur en perdant son originalité propre, ou de ne conserver son originalité qu’en dehors de toutes les conditions d’un art élevé et d’une littérature proprement dite.

/ 146