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19. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

Molière s’est servi souvent du mot de caution bourgeoise, pour caution solvable, et l’on comprend que c’était voir dans la bourgeoisie la probité du temps. […] N’avez-vous pas vu les ridicules du Bourgeois gentilhomme et de Georges Dandin largement compensés par le bon sens de madame Jourdain et par les remords du Mari confondu ? […] Toutes les femmes de Dancourt sont taillées sur le patron de ces bourgeoises ou de ces marquises. […] Turcaret et le Chevalier à la mode sont les deux ouvrages qui, avec l’Ecole des Bourgeois, approchent le plus de Molière. […] Toujours des procureurs, des bourgeoises ridicules, des nigauds, des paysans, des meuniers, des meunières ; cet homme-là est né pour le moulin, il ne peut le quitter.

20. (1809) Cours de littérature dramatique, douzième leçon pp. 75-126

Né et élevé dans une classe inférieure, Molière eut l’avantage de connaître la vie bourgeoise par sa propre expérience, et il sut très habilement imiter le langage et les habitudes des gens du peuple. […] Le Soldat glorieux de Plaute est-il, par exemple, un tableau grotesque moins bien caractérisé que Le Bourgeois gentilhomme ? […] Mais alors cesse le comique franc et jovial de la classe bourgeoise ; on lui en substitue un autre, auquel la société seule a donné naissance, et qui porte toujours le caractère de vide que doit nécessairement avoir une existence dépourvue de but et d’utilité. […] Avouons-le donc, il existait longtemps avant Diderot des peintures sérieuses des mœurs, des drames touchants et des tragédies bourgeoises, et il existait même de meilleures pièces dans tous ces genres, que celles qu’il a composées. […] Toutefois, la tragédie bourgeoise dirigée vers l’instruction morale, et précisément telle que la voulait Diderot, était déjà connue en Angleterre.

21. (1705) La vie de M. de Molière pp. 1-314

Quelques Bourgeois de Paris formèrent une troupe, dont Molière était ; Ils jouèrent plusieurs fois pour se divertir. Mais ces Bourgeois ayant suffisamment rempli leur plaisir, et s’imaginant être de bons Acteurs, s’avisèrent de tirer du profit de leurs représentations. […] (Car le Bourgeois s’imagine être beaucoup plus au-dessus du Comédien, que le Courtisan ne croit être élevé au-dessus de lui.) […] En effet y a-t-il rien de plus beau que le premier Acte du Bourgeois Gentilhomme ? […] Molière connaissait les trois sortes de personnes qu’il avait à divertir, le Courtisan, le Savant, et le Bourgeois.

22. (1885) Revue dramatique. Le répertoire à la Comédie-Française et à l’Odéon (Revue des deux mondes) pp. 933-944

Oui vraiment, l’année dernière et cette année, voici Le Menteur et Les Plaideurs ; voici, répartis sur l’une et l’autre, à peu près les mêmes ouvrages de Molière que nous avons vus là-bas ; seulement, au lieu du Bourgeois gentilhomme, d’Amphitryon et des Précieuses, nous apercevons Monsieur de Pourceaugnac, L’École des maris et Sganarelle : ne pouvait-on nous montrer le tout ? […] Mais, au-dessous de ces noms ; il faut dégringoler jusqu’à Brueys, dont L’Avocat Pathelin prévaut ici sur La Vraie Farce de Me Pathelin ; jusqu’à Dallainval (L’École des bourgeois) ; jusqu’à Andrieux (Les Étourdis) ; jusqu’à J. […] Le Bourgeois gentilhomme, au Théâtre-Français, est remis à flot : dix fois il attire la foule. […] Petits bourgeois, commis, étudians, ils accourent à l’Odéon comme dans un lieu de divertissement et aussi dans une école littéraire qui serait aux écoles d’enfans ce qu’est le catéchisme de persévérance au petit catéchisme. […] Athalie, Le Bourgeois gentilhomme, Le Légataire, pour ne citer à nouveau que ces trois-là, nous répondent heureusement de l’humeur de tout ce public.

23. (1825) Notice sur Molière — Histoire de la troupe de Molière (Œuvres complètes, tome I) pp. 1-

George Dandin, Pourceaugnac, Le Bourgeois gentilhomme et Les Fourberies de Scapin se succédèrent en peu de temps ; chacun de ces ouvrages a des beautés particulières. […] Jourdain, ses bizarres prétentions, ses études tardives pour devenir homme de qualité, le gros bon sens de sa femme et de Nicole, la dispute des trois professeurs, enfin la manière adroite dont le marquis traite sa maîtresse aux dépens du bourgeois, tout se réunirait pour élever Le Bourgeois gentilhomme au rang des chefs-d’œuvre, si les deux derniers actes n’étaient sacrifies aux charges trop grotesques de la cérémonie. […] Duparc fut un des acteurs de la troupe bourgeoise qui joua en 1645 sur l’illustre théâtre. […] Celui de Bélise, dans Les Femmes savantes, madame Jourdain, dans Le Bourgeois gentilhomme, et madame Jobin, dans La Devineresse, lui ont attiré l’applaudissement de tout Paris. […] Ce grand homme a peint sa femme sous le nom de Lucile dans la neuvième scène du troisième acte du Bourgeois gentilhomme, entre Covielle et Cléonte.

24. (1732) Moliere (Grand Dictionnaire historique, éd. 1732) [graphies originales] « article » pp. 45-46

Dans le Bourgeois gentilhomme, le Pourceaugnac, les Fourberies de Scapin, & les autres de cette nature, il a trop donné au goût du peuple, pour les situations & les pointes bouffonnes. […] Les autres n’ont joué dans la comedie que la vie bourgeoise & commune ; & Moliere a joué tout Paris & la cour.

25. (1686) MDXX. M. de Molière (Jugements des savants) « M. DXX. M. DE MOLIÈRE » pp. 110-125

Le Sieur de Pourceaugnac : Le Misanthrope : Le Bourgeois gentilhomme, qui est une comédie-ballet. […] Rapin1 n’ont que des valets pour les plaisants de leur théâtre ; et les plaisants du théâtre de Molière sont les marquis et les gens de qualité : les autres n’ont joué dans la comédie que la vie bourgeoise et commune ; et Molière a joué tout Paris et la Cour. […] C’est toi qui par tes Mômeries As réprimé l’orgueil du Bourgeois arrogant.

26. (1886) Revue dramatique : Les Fâcheux, Psyché (Revue des deux mondes) pp. 457-466

Dans l’intervalle, admirez la série : le Mariage forcé, la Princesse d’Élide, l’Amour médecin, Mélicerte, Pastorale comique, le Sicilien, George Dandin, M. de Pourceaugnac, les Amans magnifiques, le Bourgeois gentilhomme… Dansés devant le roi, et quelques-uns par le roi, à Vaux, à Fontainebleau, au Louvre, à Versailles, à Saint-Germain, à Chambord, aux Tuileries, avant d’être donnés au public sur la scène du Palais-Royal, (et tous n’y parviennent pas), ce ne sont que ballets, encore ballets, toujours ballets ! […] Monsieur de Pourceaugnac remplit le même office, après la chasse, à Chambord ; le Bourgeois gentilhomme, à Chambord aussi, n’est que pour servir de lien à des intermèdes bouffons et d’avant-propos à la turquerie qui le termine. […] C’étaient, par exemple, M. de Pourceaugnac et ses médecins ; George Dandin, sa femme et ses beaux-parents ; le Bourgeois gentilhomme, MmeJourdain et Dorante. […] Mais, prenez-y garde : M. de Pourceaugnac, George Dandin, le Bourgeois gentilhomme, si promptement que Molière ait dû les inventer et les écrire, sont pourtant des comédies, et leur composition est celle de comédies.

27. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE VI. Les Femmes. » pp. 103-120

Le Bourgeois gentilhomme. […] Le Tartuffe, l’Avare, le Bourgeois gentilhomme, les Femmes savantes, le Malade imaginaire. […] Le Bourgeois gentilhomme, act. […] Le Bourgeois gentilhomme, act.

28. (1868) Une représentation de M. de Pourceaugnac à Chambord. Examen de deux fragments inédits paraissant appartenir à l’œuvre de Molière (Revue contemporaine) pp. 700-722

vient du Bourgeois gentilhomme. […] La 5e entrée : Les Italiens et les Egyptiens, est tirée du Bourgeois gentilhomme pour les morceaux : Di rigori armata il seno... […] La 6e entrée : Le Muphti et la Cérémonie turque, est prise dans le Bourgeois gentilhomme. […] Pourceaugnac, bourgeois italien, vient demander justice sur ce que deux femmes veulent lui faire accroire qu’il les a épousées toutes deux, et chante : Giustitia ! […] Le Bourgeois gentilhomme Unirait mieux après la cérémonie, sas» y ajouter un cinquième acte languissant.

29. (1850) Histoire de la littérature française. Tome IV, livre III, chapitre IX pp. 76-132

Aux Mascarilles il substitua un premier crayon de ces valets qui font partie de la maison, qui ont voix aux conseils de l’honnête bourgeois, et font payer leur dévouement par plus d’une impertinence. […] Sganarelle ne voit guère au-delà du gros bon sens bourgeois ; il a ramassé dans son carrefour tous les aphorismes de cette sagesse de ménage, et il s’en sert contre les autres, sans songer à en profiter pour lui. […] Il y avait des termes nobles et des termes bourgeois. […] On ferait tort à la gloire de Molière en la réduisant à trois comédies d’intrigue, à deux comédies bourgeoises, à trois chefs-d’œuvre de haut comique. […] Est-ce bien là le langage d’un bon bourgeois de Poitiers en 1653 ?

30. (1759) Moliere (Grand Dictionnaire historique, éd. 1759) [graphies originales] « article » pp. 604-605

Dans le Bourgeois gentilhomme, le Pourceaugnac, les Fourberies de Scapin, & les autres de cette nature, il a trop donné au gout du peuple, pour les situations & les pointes bouffonnes. […] Les autres n’ont joué dans la comédie que la vie bourgeoise & commune ; & Moliere a joué tout Paris & la cour.

31. (1775) Anecdotes dramatiques [extraits sur Molière]

Ces derniers ne jouaient sur leur Théâtre, que la vie commune et bourgeoise ; Molière joua sur le nôtre la Ville et la Cour. […] Ces derniers ne jouaient sur leur Théâtre, que la vie commune et bourgeoise ; Molière joua sur le nôtre la Ville et la Cour. […] Nicole (Bourgeois gentilhomme) : servante. […] Lucile ( Le Bourgeois gentilhomme) : fille de M. […] Covielle ( Le Bourgeois gentilhomme) : valet de Cléonte.

32. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

-Prenons un exemple : Le Bourgeois gentilhomme de Molière. […] Ce qui fait du Bourgeois gentilhomme un poème, c’est son indépendance de tout but pratique, indépendance relative sans doute (car quelle pièce de la nouvelle comédie a jamais pu renoncer absolument à corriger les mœurs ?) […] En même temps Le Bourgeois gentilhomme est prosaïque ; prosaïque au même titre que les Caractères de la Bruyère, ou que Le Siècle de Louis XIV de Voltaire. […] Revenons au Bourgeois gentilhomme. […] J’ai cité Le Bourgeois gentilhomme, à cause de la part assez large de poésie que contient cette pièce, bien qu’elle soit écrite en prose.

33. (1725) Vie de l’auteur (Les Œuvres de Monsieur de Molière) [graphies originales] pp. 8-116

Quelques Bourgeois de Paris formerent une Troupe, dont Moliere étoit ; ils joüerent plusieurs fois pour se divertir. […] Ce Bourgeois crut devoir en être offensé ; il en marqua son ressentiment à un de ses amis. […] En effet, y a-t-il rien de plus beau que le premier Acte du Bourgeois Gentilhomme ? […] Chaque Bourgeois y croyoit trouver son voisin peint au naturel ; & il ne se lassoit point d’aller voir ce portrait. […] Moliere connoissoit les trois sortes de personnes qu’il avoit à divertir, le Courtisan, le Savant, & le Bourgeois.

34. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Quelle grande comédie Le Bourgeois gentilhomme ! Et quelle farce : Le Bourgeois gentilhomme ! […] Dans Le Bourgeois gentilhomme, Préville était inimitable. […] Une bourgeoise, en passant, dit à sa camarade : — Voilà une catin ! […] Le calme heureux et quel sans-gêne bourgeois !

35. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Il paraît aussi avoir été employé dans la comédie de de Pure, comme un moi équivoque également applicable à des bourgeoises ridicules et sans mérite et à des femmes distinguées par le rang et les qualités. […] Ce sont des bourgeoises du dernier ordre, qui veulent éprendre le ton des femmes de qualité. […] Ces bourgeoises sont de plus des pécores (peckes) sans éducation, sans esprit, de manières ignobles, qui prétendent à l’élégance du ton, des manières et du langage. Ceci nous éloigne toujours plus de l’application supposée, et ces pécores, ces bourgeoises, ces provinciales sont tellement privées d’usage, de tact, de discernement, qu’elles prennent de plats et de grossiers laquais pour des seigneurs du meilleur ton, de l’esprit le plus distingué. […] En un mot, y aurait-il eu du bon sens à prendre deux pécores, bourgeoises, provinciales, presque canailles, qui ont si peu d’usage du monde qu’elles traitent, en hommes de distinction, des laquais travestis, mais affublés de manières propres à leur condition, pour donner une leçon de discernement à les femmes contre lesquelles le grief de Molière aurait été d’avoir un esprit trop raffiné et une délicatesse trop pointilleuse ?

36. (1739) Vie de Molière

Son goût pour l’étude se développa ; il pressa son grand-père d’obtenir qu’on le mît au collège, et il arracha enfin le consentement de son père, qui le mit dans une pension, et l’envoya externe aux jésuites, avec la répugnance d’un bourgeois qui croyait la fortune de son fils perdue, s’il étudiait. […] Le Bourgeois gentilhomme est un des plus heureux sujets de comédie, que le ridicule des hommes ait jamais pu fournir. […] Cette faiblesse est précisément la même que celle d’un bourgeois qui veut être homme de qualité. Mais la folie du bourgeois est la seule qui soit comique, et qui puisse faire rire au théâtre : ce sont les extrêmes disproportions des manières et du langage d’un homme, avec les airs et les discours qu’il veut affecter, qui font un ridicule plaisant ; cette espèce de ridicule ne se trouve point dans des princes ou dans des hommes élevés à la cour, qui couvrent toutes leurs sottises du même air et du même langage ; mais ce ridicule se montre tout entier dans un bourgeois élevé grossièrement, et dont le naturel fait à tout moment un contraste avec l’art dont il veut se parer. […] Le Misanthrope est admirable, Le Bourgeois gentilhomme est plaisant.

37. (1900) Molière pp. -283

Il lui prête tous les défauts de bon ton, tous ceux qu’on serait bien fâché de ne pas avoir, les défauts charmants, comme l’impertinence ; quand il place le bourgeois et le noble en face l’un de l’autre, le bourgeois est toujours accablé ! […] Le bourgeois, chez Molière, n’a qu’une seule vertu, et elle n’est pas héroïque : la prudence ; il n’a aucune espèce de point d’honneur. […] Le bourgeois ? […] Quand il est accablé sous le plus fort, il se rattrape toujours, le bourgeois de Molière, comme c’est de règle, sur le plus faible. […] Avant la Révolution, dans les hautes classes, chez les bourgeois riches et opulents, chez les financiers et chez les magistrats, le droit d’aînesse régnait en souverain.

38. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. De l’Etat, de la Fortune, de l’Age, du Rang, du Nom des Personnages. » pp. 39-75

Graces à la vanité mal entendue des Auteurs qui ont succédé à Moliere, il est devenu indécent de mettre des bourgeois sur la scene. Tous les personnages doivent au moins être Comtes ou Marquis ; & cette impertinente coutume s’est accréditée à tel point, qu’un titre qui annonceroit un personnage bourgeois sur la Scene Françoise, n’ameneroit personne. […] La plus mince bourgeoise à qui un polisson feroit la même grossiéreté chez elle, le feroit jetter par la fenêtre, ou du moins le mettroit à la porte, & la lui interdiroit pour toujours. […] Ce qui me paroît plus plaisant, plus singulier, c’est que le parterre, qui est ordinairement peuplé de bourgeois, a gagné peu-à-peu la manie des Auteurs ; qu’il n’est affecté que des grands airs ; que son oreille est agréablement chatouillée par les titres ; qu’il a la simplicité de se mésestimer. […] Nous examinerons ailleurs si Destouches a bien pris son sujet lorsqu’il a donné à son Glorieux l’envie de s’allier à un bourgeois.

39. (1852) Molière — La Fontaine (Histoire de la littérature française, livre V, chap. I) pp. 333-352

Le Misanthrope, Le Tartuffe, Le Bourgeois gentilhomme et Les Femmes savantes ne sont que des chapitres, et les plus importants, de ce cours de morale dramatique à l’usage des gens du monde. […] Qu’on ne croie point, par exemple, que Le Bourgeois gentilhomme soit une protestation contre l’anoblissement de la roture, contre la marche ascendante du tiers état, ni contre l’aristocratie elle-même ; en traduisant sur la scène un bourgeois ridicule et un marquis dépravé, il signale un double abus : l’avilissement des titres dans ceux qui les portent ; le ridicule d’y prétendre quand on n’y est pas né. […] Dans cette double exécution, Molière prouve sa haute impartialité : de souche bourgeoise, il n’épargne pas les ridicules de la bourgeoisie, obligé de vivre avec les grands, il ne ménage pas davantage les vices de la cour.

40. (1769) Éloge de Molière pp. 1-35

On verrait quel artifice particulier a présidé à chacun de ses Ouvrages ; avec quelle hardiesse il élève dans les premières Scènes son Comique au plus haut degré, et présente au spectateur un vaste lointain, comme dans L’École des femmes ; comment il se contente quelquefois d’une intrigue simple, afin de ne laisser paraître que les caractères, comme dans Le Misanthrope ; avec quelle adresse il prend son Comique dans les rôles accessoires, ne pouvant le faire naître du rôle principal, c’est l’artifice du Tartuffe ; avec quel art un seul personnage, presque détaché de la Scène, mais animant tout le tableau, forme par un contraste piquant les groupes inimitables du Misanthrope et des Femmes savantes ; avec quelle différence il traite le Comique noble et le Comique bourgeois, et le parti qu’il tire de leur mélange dans Le Bourgeois Gentilhomme ; dans quel moment il offre ses personnages au spectateur, nous montrant Harpagon dans le plus beau moment de sa vie, le jour qu’il marie ses enfants, qu’il se marie lui-même, le jour qu’il donne à dîner. […] Aussi est-ce le Comique Bourgeois qui produit le plus de ces mots que leur vérité fait passer de bouche en bouche. […] Mais qu’un Bourgeois, voyant la fille de son voisin attaquée de mélancolie, conseille au père de lui acheter une garniture de diamants pour hâter sa guérison, le mot qu’il s’attire, vous êtes orfèvre, M. 

41. (1845) Œuvres de Molière, avec les notes de tous les commentateurs pp. -129

Quelques bourgeois de Paris formèrent une troupe dont Molière était ; ils jouèrent plusieurs fois pour se divertir. […] Ce bourgeois crut devoir s’en offenser ; il en marqua son ressentiment à un de ses amis, « Comment ! […] En effet, y a-t-il rien de plus beau que le premier acte du Bourgeois gentilhomme ? […] Molière connaissait les trois sortes de personnes qu’il avait à divertir, le courtisan, le savant, et le bourgeois. […] On croit qu’il servit de modèle au philosophe du Bourgeois gentilhomme ; il mourut en 1675.

42. (1706) Lettre critique sur le livre intitulé La vie de M. de Molière pp. 3-44

Voilà un sentiment qui me paraît outré ; car je ne vois pas même que Molière ait jamais mieux représenté le Bourgeois Gentilhomme et Pourceaugnac, que Poisson les représente ; qu’il ait mieux soutenu le caractère du Misanthrope, que Beaubourg et Dancour le font valoir ; plus délicatement grimacé que la Toreillière, et ainsi des autres. […] Il fait beau voir cet homme grave envoyer chercher le chapeau de Rohaut son ami, pour représenter le Philosophe dans le Bourgeois Gentilhomme ; cela est plat, et d’un mauvais caractère. […] Je ne suis pas mécontent de l’histoire du succès du Bourgeois Gentilhomme et des Femmes savantes à la Cour.

43. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XI. M. SAURIN. » pp. 333-353

La Piece des Mœurs du Temps mise à côté de l’Ecole des Bourgeois, & Béverley à côté du Joueur Anglois. […] Une partie du fond de cette piece, de sa morale & de son intrigue, ressemble beaucoup au fond, à la morale & à l’intrigue de l’Ecole des Bourgeois, comédie en trois actes & en prose, de d’Allainval. Précis de l’Ecole des Bourgeois.

44. (1772) De l’art de la comédie. Livre second. De ses différents genres (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE IX. Du Genre larmoyant. » pp. 103-122

Le Malade imaginaire, le Bourgeois Gentilhomme, ne sont certainement pas les meilleures productions de leur Auteur ; cependant, lorsque les comédiens ont repris ces deux pieces, après les avoir oubliées quelque temps, ne leur ont-elles pas rapporté beaucoup d’argent ? […] Il condamne avec raison tout ce qui aurait l’air d’une tragédie bourgeoise. […] « Peut-être les comédies héroïques sont-elles préférables à ce qu’on appelle Tragédie Bourgeoise ou Comédie larmoyante.

45. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE V. L’Éducation des Femmes. » pp. 83-102

Les moindres bourgeoises voulurent prendre le genre à la mode, et parvinrent, à force de préciosité, à détruire en elles cet avantage accordé à leur sexe sur l’autre, de plaire, par la simplicité même, jusque dans la plus grande médiocrité d’esprit. […] L’intrigue des Précieuses 285 est nulle : toute la comédie n’est qu’une scène où deux valets du grand monde, sous les habits de leurs maîtres, viennent flatter la préciosité de deux petites bourgeoises infectées de la maladie régnante. […] Le Bourgeois gentilhomme, act.

46. (1825) Notices des œuvres de Molière (IX) : La Comtesse d’Escarbagnas ; Les Femmes savantes ; Le Malade imaginaire pp. 53-492

Quelle que fût, au juste, la distribution du spectacle, on peut dire que Molière en fit seul tous les frais ; car le prologue et tous les intermèdes furent tirés de ses propres pièces, Les Amants magnifiques, Psyché, George Dandin, Le Bourgeois gentilhomme, et cette Pastorale comique qu’il avait composée pour le Ballet des Muses. […] Molière, n’osant attaquer de front une coterie que de grands noms, de grandes alliances rendaient redoutable, avait déguisé, sous les noms bourgeois de Cathos et de Madelon, les puissantes dames que réunissait l’hôtel de Rambouillet. […] Il fallait toutes les ressources du génie le plus fécond, pour rendre comique et même attachant, ce tableau d’un intérieur bourgeois, où la lutte n’est établie qu’entre le bon sens un peu grossier d’un chef de famille, et la folie pédantesque de sa femme, de sa sœur et de sa fille aînée ; où tout le danger qui menace les personnages est le projet d’un mariage ridicule, opposé à celui d’un hymen bien assorti. […] Il me semble, à moi, que Chrysale est de tous les temps, et que, dans le nôtre même, malgré les lumières dont il s’enorgueillit, il ne serait pas difficile de trouver un bon bourgeois, même de la classe la plus opulente, qui fît fort peu de cas du savoir et du beau langage, et qui mît bien au-dessus les commodités et les jouissances de la vie. […] « Chrysale, dit-il, est donné pour l’homme raisonnable de la pièce. » Nous avons vu Rousseau, voulant accuser Molière d’avoir favorisé les mauvaises mœurs dans Le Bourgeois gentilhomme, prétendre faussement que Dorante, malhonnête homme moralement parlant, est l’honnête homme de la pièce, c’est-à-dire l’homme qui a raison et à qui l’on s’intéresse.

47. (1885) Études sur la vie et les œuvres de Molière pp. -461

C’est aussi une bourgeoise élégante, que Mme Jean Poquelin, la tapissière, plus cossue que coquette, mais certainement soigneuse et soignée au dernier point. […] Un an et vingt jours après la mort de sa première femme, le 30 mai 1633, il se remariait à la fille d’honorable homme Eustache Fleurette, marchand et bourgeois de Paris. […] Quand on est le comédien d’une Altesse Royale, peut-on faire moins que de quitter un nom bourgeois, pour en prendre un bien sonore, précédé d’une belle particule ! […] Celui-là était riche, il était sot, et, de plus, son proche parent ; à ce dernier titre, Molière lui donna la préférence : il en fit le Bourgeois gentilhomme. […] Il fallut qu’il le fit descendre dans le milieu bourgeois, seul espace où ce genre de comédie pouvait lui être permis.

48. (1801) Moliérana « [Anecdotes] — [12, p. 43-44] »

1775, Anecdotes dramatiques, tome I, p. 155 Le Bourgeois gentilhomme fut joué la première fois à Chambord.

49. (1772) De l’art de la comédie. Livre troisième. De l’imitation (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XXII. » pp. 426-435

Le Bourgeois Gentilhomme, comédie-ballet, en cinq actes, en prose, comparée avec un morceau du roman de Don Quichotte, & le dénouement des Disgraces d’Arlequin, le Disgrazie d’Arlecchino, comédie italienne. […] On prétend que Moliere a peint son Bourgeois Gentilhomme d’après une personne qui avoit à-peu-près le même ridicule.

50. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Il ne doutait pas que ce ne fut un moyen de plaire au roi et à madame de Montespan : en conséquence, le 11 mars 1672, il remit sur la scène, sous le nom de Femmes savantes, les prudes bourgeoises et beaux esprits qu’il avait si joyeusement travestis en 1669, sous le nom de Précieuses ridicules. […] Ce sont des précieuses modifiées, prises dans la vie bourgeoise, à qui un mari peut dire fort raisonnablement : Qu’on n’aille pas chercher ce qu’on fait dans la lune, Et qu’on se mêle un peu de ce qu’on fait chez soi.

51. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE II. La Débauche, l’Avarice et l’Imposture ; le Suicide et le Duel. » pp. 21-41

C’est le tableau de l’avarice, non pas chez le pauvre qui enfouit furtivement quelques pièces d’or sous son foyer sans feu107, mais chez le riche bourgeois, dans sa grande maison, où il pourrait vivre avec aise et honneur, entouré d’une heureuse et aimante famille, dont il devient la honte et presque la perte108. […] Le Bourgeois gentilhomme, act. […] VIII ; le Bourgeois gentilhomme, act.

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