Mais le bonhomme Chrysale n’est pas de son avis, et il réplique en vrai Gassendiste : Oui, mon corps, c’est moi-même, et j’en veux prendre soin; Guenille, si l’on veut, ma guenille m’est chère. […] Il est vrai que Philinte, de même que Clitandre ou Chrysale, représente le bon sens et la vraie sagesse, en plus d’une occasion, contre certains travers et certains emportements du Misanthrope.
Ce qui est vrai, c’est que leur psychologie s’adresse à la foule ; elle est, si j’ose dire, populaire, alors que celle d’un Racine est aristocratique. […] Certes, le père Grandet est plus riche en sentiments, plus fouillé, plus vrai que ne l’est Harpagon et Fénelon a théoriquement raison quand il reproche à Molière d’avoir conservé, tout en l’atténuant, le trait de Plaute faisant demander par son avare à un valet de lui montrer sa troisième main. […] Psychologiquement, Tartuffe ne cesse d’être faux et il commet des maladresses, des exagérations dont un véritable hypocrite se garderait prudemment : mais il est théâtralement vrai et Onuphre, plus nuancé, plus habile que lui, serait inintelligible au parterre.
Quelquefois, il est vrai, ton austère férule En passant près de lui frappa le ridicule, Dont la vie éphémère, en son obscurité, Eût échappé, sans elle, à la postérité : Mais plus souvent, aussi, ta généreuse audace Brave le vice altier, l’attaque et le terrasse, Et, marchant droit au but, sans le laisser en paix, Torture le méchant qui ne change jamais. […] De l’avare Euclion Plaute esquissant les traits2, D’Harpagon avant toi commença le procès : De ce maître, il est vrai, la peinture est fidèle, Mais que l’imitateur surpasse le modèle ! […] La censure, il est vrai, de son poids nous écrase6, Commente chaque mot, mesure chaque phrase ; Ce vers, nous dira-t-on, ne passera jamais : Il sent l’indépendance, il n’est donc pas français.