Sans doute, le sujet de, la pièce est heureux, les caractères sont d’un comique irrésistible, le dialogue est d’une vivacité naturelle, le style d’une pureté hardie : tout cela fait un plaisir extrême.
L’oreille est aussi plus flattée de l’harmonie des beaux vers tragiques et de la magie étonnante du style de Racine qu’elle ne peut l’être du langage propre à la comédie. […] Il lui reproche d’avoir été trop docile aux conseils de Boileau, de n’avoir pas su conserver le style de L’Étourdi, qu’il trouve supérieur au style du Misanthrope, et de n’avoir pas écrit un assez grand nombre de scènes comme celle du Pauvre dans Dom Juan. […] Si l’on trouve parfois dans le dialogue de Molière un peu de crudité et de verdeur, on n’en est pas surpris, en se reportant au temps où il vécut ; s’il y a lieu de s’étonner au contraire, c’est bien plutôt du progrès qu’il fit faire au style et aux mœurs de la comédie. […] Non ; il n’y faut voir, selon toute vraisemblance, qu’une simple redondance de style, sans autre intention. […] Je fais d’aussi beaux vers que ceux que je récite, Et souvent leur style m’excite A donner à ma muse un glorieux emploi.
Or il y réussit par cette incomparable naïveté qui n’est que la nature prise sur le fait, comme le laisse entendre ce mot de Joubert : « Molière est comique de sang-froid, à son insu : il provoque le rire, et ne rit pas. » Son style. Les fresques de Mignard et de Molière Aussi quelle spontanéité, quelle véhémence dans ce style qui est tout action, mouvement et chaleur ! […] Ce fut ainsi que Molière, dans cette pièce, « où l’on n’agit qu’en parlant46 », réussit à charmer, par le plaisir sérieux d’une émotion réfléchie, les esprits capables d’apprécier les beautés du dialogue, la vérité des portraits, la profondeur de la morale et l’excellence du style. […] Pour ce qui est du style, disons seulement qu’un attique comme Fénelon est mauvais juge d’une verve comique à laquelle répugnent les aptitudes natives d’un délicat. […] C’est un modèle de composition et de style.